Les événements météorologiques de cette année 2022 se superposent à un fond de réchauffement de l’atmosphère. Ils font désormais partie de la dramaturgie de notre époque. Est-ce une « annus horribilis » et marque-t-elle une rupture dans le fil du climat?
Il n’a pas fait sec sur toute l’Europe, selon les relevés publiés par infoclimat.fr. À Moscou par exemple il est tombé 90,5 mm de pluie en juillet, soit plus que la moyenne (74.1 mm). Juin était moins arrosé avec 41.5 mm pour une moyenne de 65,9 mm. Mai a reçu 22,3 mm sur une moyenne de 79,8 mm.
À Vienne il a eu 36,9 mm de pluie sur une moyenne de 46 mm en juillet; en août: 63,3 mm sur 34 en moyenne. En juin, 118,6 mm sur 64; en mai, 48,5 mm sur 69. À Stockholm par contre une sécheresse quasi totale dure depuis plusieurs mois.
Tout ce que la réchosphère contient de journalistes, d’activistes et de politiques a pris l’habitude de monter en épingle des événement météorologiques et d’en faire des événements climatiques. S’il y a bien un lien entre météo et climat, les événements intense de la première ne sont pas tous des marqueurs du second.
J’ai montré à différentes reprises que les extrêmes ont eu lieu en tous temps, depuis plusieurs siècles. Même des événements chauds en période fraîche, et l’inverse. Actuellement et depuis une vingtaine d’année les événements chauds semblent plus fréquents que par le passé.
Pour autant l’Europe a connu déjà des années avec 3 ou 4 vagues de chaleur, des été longs et torrides, des sécheresses abominables. Il n’y rien de très nouveau en 2022. Par contre comme l’atmosphère est un peu plus chaude ces événements sont plus visibles et remarquables, surtout concernant les températures.
Les sécheresses, elles, ont toujours eu lieu,. La plus longue récemment documentée était celle de 1976. Elles ne sont pas la conséquence du réchauffement mais des grands mouvements de l’atmosphère, du blocage des anticyclones qui détournent les front pluvieux, et d’autres facteurs. Le lien existe cependant en ce sens: la chaleur exacerbe la sécheresse.
Les grands incendies de 2022 en France ont été dramatiques mais il y a déjà eu pire dans le passé. Et puis, comme déjà dit, un feu ne part pas tout seul sauf orage. Il faut du combustible (forêts non débroussaillées), et une négligence ou une main criminelle.
Par contre on ne voit pas plus de pluies malgré l’augmentation de l’humidité de l’atmosphère en raison du réchauffement. Il y a là quelque chose de paradoxal à explorer, sur quoi je reviendrai.
L’image 1 d’infoclimat.fr montre qu’au début août la vague de chaleur ne touchait que l’ouest de l’Europe et qu’ailleurs, en Russie par exemple, il faisait sensiblement plus frais. L’ouest européen est sur un couloir de remontée de l’air chaud saharien qui passe par Tanger et Oran.
Les blocages des anticyclones ne sont pas nouveau. Ils étaient moins repérés dans le passé mais pas inexistants. La situation des pressions favorise depuis des décennies un courant dominant du sud-sud-ouest.
Un des critères utilisés pour montrer le réchauffement est l’accroissement du nombre de jours de chaleur. Sont considérés comme tels des jours dont la T° maximale supérieure est de plus de 5° par rapport à la moyenne pendant au moins cinq jours consécutifs. L’image 2 montre cet accroissement pour le nord de la France à Cambrai.
« + 2,4 jours par décennie, en moyenne, à Cambrai (8,3 jours en moyenne), soit une hausse de 15,4 jours sur la période complète 1955-2018. »
On peut lire ce graphique en y voyant la preuve de l’apocalypse à venir. Moi je le regarde autrement: les étés des années 1950-1960 étaient frais et courts, bien plus qu’aujourd’hui. Un jour de pluie laissait place à trois jours froids. De ce point de vue le réchauffement, commencé comme un possible rebond en réponse au petit âge glaciaire, est une chose positive.
Et je doute que l’Europe connaisse un jour le climat de Marrakech: 4 à 5 mois de températures diurnes à plus de 30°, plusieurs semaines d’affilée à 42°-45° en plein été. Si des vagues de chaleur peuvent remonter vers l’Europe, l’ensoleillement ne permet pas le maintient d’une telle masse chaude pendant des mois.
Quant à la pluie la moyenne annuelle de 225 mm est très faible à Marrakech, comparativement par exemple à Genève (environ 800 mm par an). À Madrid la pluviométrie moyenne annuelle est de 455 mm et une température plus haute que 40° y est fréquente de juin à août.
Le plus problématique en 2022 est la sécheresse. Normalement l’humidité du sol et des forêts tempère l’atmosphère. Au contraire la sécheresse accentue les coups de chaud.
Je sais que les évolutions climatiques sont lentes, sur plusieurs décennies ou siècles. Il est donc difficile de se baser sur 20 ans, ou même sur 50 ans. On ne peut capter à l’échelle humaine une tendance claire et manifeste. Mais on peut quand-même lire quelques signes, à la fois dans les relevés et dans sa propre mémoire quand, comme moi, on atteint un âge où l’observation et l’expérience personnelle du climat deviennent significatives.
J’ai écrit ailleurs qu’il est possible que la tendance évolue. Actuellement les vents viennent majoritairement du sud-sud-ouest, avec leur cargaison de chaleur saharienne et tropicale. Mais depuis quelques années il semble à la fois que le courant d’ouest, plus frais et humide, soit plus marqué, et que la bise, porteuse du frais du nord, revienne plus souvent.
Ces évolutions sont lentes et non-linéaire. Cela avance, puis recule, puis avance encore. Toutefois il faudra au moins 10 ans de plus pour confirmer ou non cette tendance. Placé dans la ligne des tendances du sud, de l’ouest et du nord-est, Genève est bien placée pour observer cette évolution.
Je reviendrai aussi sur cette question: pourquoi ces grosses vagues de chaleur, pourquoi ces courants du sud dominants par rapport aux années 1950-1960? Il se passe quelque chose de plus global que lié à la seule Europe, et de moins global que le réchauffement généralisé.
Le courant froid du Pacifique La Niña continue (image 4). Il dure depuis trois ans, c’est très long. Pourtant il ne semble pas rafraîchir l’atmosphère comme on aurait pu l’attendre. Là aussi il faut creuser, chercher des pistes, sachant que son influence est plus faible en Europe qu’en hémisphère sud. La Niña actuelle ne compense pas la très forte poussée chaude d’El Niño de 2015-2018.
En 2010 La Niña a fait chuter la température de Lima à 8°. Mais ce n’était pas seulement dû à ce courant: une masse d’air froid venue du sud avait recouvert l’Amazonie elle-même, faisant chuter ses températures aux alentours de 10°.
Enfin on s’attendait à un affaiblissement accentué de l’activité solaire et donc des taches, ce qui pouvait contribuer à un rafraîchissement par l’entremise des rayons cosmiques qui produisent une augmentation de la couche nuageuse. Or actuellement le nombre de taches est en augmentation par rapport au cycle précédent (qui lui était en baisse).
Il semble que la nature suive des logiques et cycles que nous ignorons en bonne partie. La désignation du CO2 comme seule cause du réchauffement actuel ne suffit pas à expliquer toutes les variations météorologiques. La panique des activistes du climat non plus.
Alors, 2022 annus horribilis? En partie. Comme d’autres. Sommes-nous au bord de l’effondrement? Ça j’en doute sérieusement.
Commentaires
"Panique" est bien le maître mot aujourd'hui à propos du climat. On peut comprendre que les feux de forêt, ou la chaleur insupportable dans les villes, soient à la une des infos. mais faire peur à la population est devenu une habitude chez nos gouvernants. La Covid est passée par là. Il est en effet plus facile de faire monter la pression que de faire preuve de pédagogie. On obéit plus vite aux exigences gouvernementales quand le danger menace nos vies. Alors ils veulent aller vite, bombarder le citoyen d'images insupportables accompagnées de discours anxiogènes.
Non, la planète qui brûle, ce n'est pas pour demain. Il faut seulement écouter les scientifiques indépendants et les politiques qui savent faire la part entre l'urgent et le possible. Il faut surtout éviter de faire confiance à une prétendue écologie qui ne pense qu'à punir. La dictature, même pour une bonne cause, ne vaut rien.