Autour de l’affaire Quatennens.
Le prince Harry n’est pas seul à étaler publiquement son intimité – jusqu’à son dépucelage. En France le divorce d’Adrien Quatennens a explosé dans la sphère de la France Insoumise. Le député aux cheveux de feu est tombé. En cause: un geste violent, une gifle, envers son épouse Céline au cours d’un divorce conflictuel. Il a également confisqué son portable. Je croyais que seules les femmes jalouses faisaient cela pour chercher une preuve de la tromperie, eh bien non.
Le député, numéro 2 du parti fondé par Jean-Luc Mélenchon, a été malmené publiquement après la divulgation de la main-courante déposée contre lui, l’été dernier. Sa femme avait, dit-on, demandé à ce que l’on ne médiatise pas cette main-courante. Quelqu’un l’a quand-même fait.
Quatennens avait souvent pris la parole sur les violences dont certaines femmes sont victimes dans le couple. Son geste tombait d’autant plus mal. L’homme a été jeté dans la fosse commune des salauds. L’affaire est portée par un émotionnel puissant, un émotionnel qui exclut et annule la personne.
On sait que son divorce est conflictuel, et les hommes savent ce que cela veut dire. Je ne défends pas Quatennens. Une gifle est une gifle de trop, même si ce geste n’a pas la gravité d’un coup de poing, d’un coup avec arme, d’un tabassage en règle, de torture ou d’un meurtre. Un homme doit se re1tenir, d’abord à cause de la différence moyenne de force.
La justice doit évaluer chaque affaire selon les circonstances et prendre des décisions raisonnables. Or ici, sur différentes chaînes de télévision, j’ai entendu le cas Quatennens associé à la violence faite aux femmes en général, voire aux « féminicides ». Ce n’est plus son cas personnel dont on parle.
On passe du cas individuel à la généralisation. C’est de la violence faite aux femmes, pas de Quatennens, que l’on parle dès lors, comme si le député endossait la représentation globale et horrifiante de cette criminalité – alors même que cette violence n’a rien de massif ni de généralisé et que la violence dans le couple fait également de nombreuses victimes hommes dont on évite soigneusement de parler.
Par exemple en France, selon le Ministère de l’Intérieur et l’enquête Sécurité et cadre de vie, sur les 125 personnes tuées en 2020 par conjoint, 102 sont des femmes femmes et 23 des hommes. 23 hommes, 23 cadavres qui comptent pour du beurre.
Les autres chiffres varient selon que l’on compte les plaintes, les enquêtes à auto-déclaration, et les régions et périodes. Concernant les violences intrafamiliales en général, environ 0,79 % des femmes majeures et environ 0,32 % des hommes majeurs en sont victimes. Plus qu’en 2007 (image 2, clic pour agrandir) mais toujours proche de un pour-cent.
C’est pourquoi l’expression violence faite aux femmes est impropre puisqu’elle laisse à penser que les femmes sont massivement brutalisées, et qu’elles seules le sont. La formule Violence faite aux femmes produit plus d’effets psychologiques dans les médias que Violence faite à certaines femmes. Cette simplification/généralisation est pratique et personne ne la questionne. Tout va bien.
Tout geste peut devenir suspect. Et cela ne sert qu’à amplifier un phénomène qui, je le répète, et aussi malveillant soit-il, ne touche qu’une très petite part féminine et masculine de la population. Il ne s'agit pas de minimiser la violence mais de mieux en connaître les circonstances et la gravité:
« D’après l’enquête Cadre de vie et sécurité (CVS), en moyenne annuelle sur la période 2011 à 2018, on estime à 295 000 le nombre de victimes de violences conjugales (violences physiques et/ou sexuelles par leur conjoint ou ex/conjoint) en France métropolitaine, dont 213 000 femmes. »
Dont 213 000 femmes? Et donc dont 82’000 hommes, soit près d’un tiers. Sachant que les hommes ne dévoilent presque jamais ce genre de situation on peut penser que leur nombre est beaucoup plus important.
Si j’ai pu défendre le fait qu’une femme donne une claque à un homme qui l’importune (quoique, je n’en suis plus si sûr), ici ce n’est pas la même chose. Le degré de violence et l’intention diffèrent.
Quatennens n’a pas tabassé, enfermé, tué. Faut-il le jeter ainsi à la fosse? N’est-il que ce geste, que cette gifle? C’est effrayant. Il a commis un geste détestable, mais on ignore s’il a par exemple été victime de violence psychologique.
Ce n’est pas exceptionnel lors des divorces conflictuels, et les femmes ne sont pas moins téméraires que les hommes dans ce domaine. Quant il ne s’agit pas de fausses accusations destinées à faire avancer sa propre cause. De son côté, pour se défendre, Quatennens a accusé à son tour sa femme de chantage et de violence psychologique. Et l’affaire privée est devenue un spectacle public.
On ne doit pas passer aux coups, mais il faut en graduer la gravité. Personnellement je n’irais pas au tribunal pour une gifle, je prendrais sur moi ou en ferais cas directement avec la personne.
Cela dit j’ai lu les réactions de Jean-Luc Mélenchon, un Merluche qui dans un premier temps trouvait courageuse la reconnaissance des faits par son dauphin. Quoi? Le chef suprême soutient cet abominable homme du patriarcat? Horreur, malheur. Cela a été très mal perçu chez LFI. Il a rétropédalé par la suite mais le mal était fait.
Pourtant peu après, en conférence de presse, ni Clémentine Autain ni Danielle Obono, entres autres femmes LFI habituées à dénoncer la violence faite à certaines femmes, n’ont voulu répondre aux questions des journalistes sur le sujet. Circulez y a rien à voir.
Mais Sandrine Rousseau, la radicale, wokiste et procureure générale de la justice de rue, a sauté sur l’occasion pour dénoncer un de ses collègues d’EELV. Julien Bayou en l’occurrence, secrétaire général du parti. Celui-ci a été accusé de violences par son ex-compagne. L’affaire est pendante. Je ne commenterai pas ce que nous ignorons. Je signale seulement que M. Bayou dit qu’il s’agit d’une rancoeur de son ex dans une séparation très difficile.
De son côté Sandrine Rousseau (lire à son sujet l’article de Contrepoints), qui sait exister médiatiquement sur le dos des autres, a ajouté ceci à propos de la même petite amie:
« Sandrine Rousseau a expliqué avoir reçu à son domicile l’ex-compagne de Julien Bayou. "Au moment où j’ai reçu cette femme, elle était dans un état très déprimé, elle était très mal, elle a d’ailleurs fait une tentative de suicide quelques semaines après", a révélé la députée. Selon elle, Julien Bayou aurait eu "des comportements de nature à briser la santé morale des femmes. »
Si c’est véridique (mais elle n’a pas vérifié), elle devait signaler cela à la police, pas à la presse. Or elle livre plutôt en pâture au public les problèmes et l’état de santé d’une personne qui cherchait du réconfort auprès d’elle. C’est terrifiant.
D’une part à cause de cette justice de rue, expéditive et sans procès, d’autre part pour l’indécence morale d’exhiber ainsi un cas (qu’elle n’a pas vérifié puisqu’elle se contente de croire ce qu’on lui dit) comme un trophée qui fait la gloire de la « justicière » délatrice.
La justice s’effondre. Le préjugé sexiste contre les hommes fleurit partout. Parlons pourtant un peu des violences faites à certains hommes (1/3 des victimes), et des « hominicides » ou « viricides ».
On dit que ce sont des femmes victimes qui tuent leur conjoint? Pas celles qui tuent sans légitime défense comme Jacqueline Sauvage, icône féministe et meurtrière, à moins de légitimer le meurtre de conjoint et d’autoriser à faire justice soi-même. Pas celles qui violentent psychologiquement leur homme, de cette violence qui ne laisse pas de traces visibles mais qui fait saigner l’âme.
Dans deux débats, des intervenantes ont demandé si l’indignation médiatique serait aussi forte si une femme giflait son conjoint (car cela arrive, bien sûr).
Dans les deux cas la réaction a été: non car un homme est physiquement plus fort qu’une femme et donc c’est moins choquant. Et cela a passé comme ça, comme si cette idée était normale, sans autre commentaire.
D’ailleurs dans la mini-série télé un peu bébête Nos chers voisins, il n’est pas rare que l'une ou l’autre des deux jeunes femmes attractives de la série, tape sur un des garçons, et pas tendrement. Cela ne suscite aucune réaction. Taper un homme serait normal. Il serait bien que l’on règle ce biais car en l’occurrence c’est de la pub pour la violence envers les hommes, qui semble ici légitime, comme normale.
Bon. On en est là, dans un biais monumental.
Les hommes ne sont pas tous dotés d’une force physique supérieure, et peu osent en faire usage. C’est donc un stéréotype sexiste. On combat le sexisme « patriarcal » par un autre sexisme.
Au-delà de la misandrie crasse des médias, le pire est cette mise à la rue d’informations accusatoires, sans vérification, sans explications, sans tentative de médiation, sans procès contradictoire, sans analyse nuancée de la situation. La justice populaire est une régression morale collective de la société. Les méthodes actuelles discréditent la cause défendue.
La volonté d’humilier est trop évidente, en plus d’être une forme de cruauté mentale.
L’État sauvage revient. Cela commence avec cette armée de procureurs auto-proclamés, ces cohortes de Robespierre, qui envahissent les médias.
Je pense qu’il ne faut plus entrer dans ce jeu de massacre. Il faut résister, ne plus alimenter cette machine infernale qui prétend remplacer la justice élaborée par des millénaires de civilisation.
Si nous ne le faisons pas, il ne faudra pas longtemps pour que le bruit de bottes (ou de cuissardes) remplace celui des chaussures cirées et des baskets. Ces comportements accusateurs publicisés nous y préparent.
Personne ne peut accepter de violence faite à certaines femmes, cependant celle faite à certains hommes n’est pas plus acceptable. Parlons-en. Parlons aussi de ce qui se passe dans la tête et le cœur des hommes maltraités. C’est complexe.
Le féminisme, idéologie émargée du marxisme, est porteur d’un monde binaire avec les gentils d’un côté et les mauvais de l’autre.
Le genrisme devient un motif de division des sexes et de la société. Or tout le monde peut, en certaines circonstances, commettre des actes de violence de toute nature. Malheureusement les faits divers nous le montrent tous les jours.
On fait bien de débusquer la violence intrafamiliale, mais on se contente de n’en traiter qu’un seul versant. C’est une discrimination, une injustice, et cela affaiblit l’impact des campagnes.
Tout cela est très douloureux. On devrait mieux analyser les contextes, motivations et mécanismes qui sont en place, et ne pas se contenter de théories générales ni de rejet implacable. La violence est un fléau sans sexe.
Toutefois je pense aujourd’hui que les hommes ont un rôle à jouer dans un apaisement entre les sexes en gardant plus de réserve envers les femmes. C’est en partie ce que certaines d’entre elles demandent et je leur donne raison. Cela n’empêche pas un homme de tenter une approche d’une femme. L’homme s’avance davantage que la femme mais elle peut refuser. La recherche de partenaire expose les hommes plus que les femmes. De là à victimiser ces dernières par système, le pas est franchi.
Tant pis pour une certaine idée de l’égalité, de la liberté et de la spontanéité des êtres. Courtoisie et patience ne sont pas dévalorisants pour un homme. Ce sont deux qualités utiles pour compenser en partie la dissymétrie des relations femmes-hommes.
Sur le même sujet, un article intéressant de Causeur.
Commentaires
Je pense que tout est dit dans ce texte, à propos de la violence entre les sexes. La logique du raisonnement et les statistiques montrent combien il est nécessaire de s'appuyer sur la preuve et la justice pour tirer des conclusions qui ne soient pas erronées. La violence conjugale, des insultes aux coups en passant par l'humiliation, est largement partagée au foyer. Et je ne peux qu'approuver cette idée selon laquelle "la justice populaire est une régression morale collective de la société". Tout cela en dit long sur l'inanité de "Me Too", pourtant porté aux nues par nos féministes.
Un détail cependant à propos du "féminisme, idéologie émargée du marxisme". Il me semble que c'est plutôt Engels, collaborateur de Marx, qui a écrit sur la condition de la femme au 19 ème siècle. A l'époque, elle n'avait pas les mêmes droits que les hommes mais la vie des bourgeoises n'était en rien comparable à celle des femmes du peuple. Mais Marx n'a jamais créé, avec les femmes, une nouvelle classe sociale exploitée par le Capital ou par l'homme. Que la gauche actuelle associe la catégorie femme, vue comme homogène, à une communauté victime de tous les maux, n'a rien d'une analyse marxiste. Elle fait la même chose avec les minorités LGBT, noires, musulmanes, etc. Chez nous, les femmes ont autant de droits que les hommes et il y a autant de femmes que d'hommes, chez les riches comme chez les pauvres. Le marxisme ne peut donc s'appliquer aux sexes.
Mais cela n'enlève rien à la pertinence des propos de notre chroniqueur.