Hier je posais comme principe, à la suite d’Edgar Morin, que la liberté individuelle est une valeur fondamentale de tout groupe ou ensemble, et qu’elle doit en même temps tenir compte des liens, de la reliance sans laquelle le groupe explose et l’individu lui-même disparaît.
J’aborde aujourd’hui la notion de responsabilité. Car la liberté individuelle est indissociable de la responsabilité de chacun. Dans une société à structure collective (sociétés tribales par exemple), la notion de responsabilité est endossée par la collectivité. Elles acceptent cependant la responsabilité individuelle dans certains cas, comme les crimes.
Le développement de l’individualisme, facteur de créativité de nos sociétés, s’accompagne d’une plus grande prise de décision de chacun au sein du groupe. Le droit de vote, l’intéressement dans l’entreprise, la liberté d’entreprendre, la diversité culturelle dans l’art, multiplie les choix et donc augmente la responsabilité individuelle.
Pourtant, si l’on regarde les taux de participation électorale à Genève et en Suisse, on peut se demander si les citoyens se sentent responsables de l’évolution de la société. Et s’ils s’y sentent une place. Il est vrai que des citoyens peuvent se sentir déçus et avoir l’impression que de toutes façons voter ne change rien. Ce n’est pas un bon prétexte pour abandonner ses responsabilités, mais c’est ainsi. Beaucoup ne se sentent jamais entendus, comme si les jeux étaient faits d’avance.
Pour développer la reliance entre le citoyen et la communauté, pour le motiver, il est important de l’écouter. Je plaide pour l’instauration à Genève, si possible dans la Constituante, d’un service d’ombudsman, de médiateurs chargés d’entendre les doléances et propositions des citoyens sur tous les sujets qui les touchent. Ce service devrait avoir le pouvoir d’enquêter, d’auditionner qui de droit, de proposer des solutions aux politiques ou aux services concernés, de suivre les dossiers, et de rendre des rapports publics.
Dans le même esprit je soutiens la proposition de développer la médiation dans la justice, comme première étape de toute procédure. Les résultats de cette pratique dans d’autres pays ont allégé les tribunaux, et ont produit par exemple un grand apaisement dans les procédures de divorce conflictuelles. Les parents qui font une médiation avant le divorce posent leurs problèmes et tensions. Cela évite d’utiliser les enfants comme enjeu et moyen de pression.
Quand on voit le coût des procédures judiciaires qui traînent, on ne peut qu’encourager la médiation comme préalable à toute action en justice.
Responsabilité et pouvoir
Les personnes occupant une fonction de pouvoir doivent être placées devant leurs responsabilités. La crise financière est un exemple: ceux qui ont gagné de l’argent avec des pratiques douteuses ne peuvent être exonérés de leurs responsabilités dans la crise. De même les élus doivent rendre des comptes au peuple souverain qui leur a donné mandat. Les élections périodiques ne suffisent pas toujours à booster un élu. L’initiative destitutive, avec des audits de l’action menée par les magistrats, sera un instrument par lequel le peuple souverain disposera d’un contre-pouvoir face aux élus.
En ce qui concerne les magistrats judiciaires, la chose est très sensible. Lors d’un débat récent j’ai soulevé la question de rendre les magistrats responsables de leurs actes. La gauche comme la droite ont réagit très vivement par la négative. Deux arguments ont été opposés à cette idée: d’une part les juges sont représentants de l’Etat, c’est donc l’Etat qui doit endosser leur responsabilité. D’autre part, pour pouvoir prendre leurs décisions en toute sérénité, ils ne doivent pas être soumis au risque de poursuites civiles ou pénales.
Le fait de représenter l’Etat ne devrait pas procurer d’immunité car les magistrats judiciaires prennent personnellement (et non sur injonction de l’Etat) des décisions qui peuvent être très graves pour la vie des citoyens. Je suis bien placé pour le savoir. Cet argument est curieux, car par exemple dans l’armée, un officier responsable d’une erreur avérée est sanctionné. A mon avis les juges devraient être responsables de leurs actes en cas de fautes avérées, pas sur les décisions finales. L’immunité ressemble trop souvent à un privilège d’un autre âge.
A défaut d’obtenir cette disposition démocratique - la suppression de l’immunité des juges en cas de faute - il faudra remanier le Conseil Supérieur de la Magistrature en le composant en majorité de non juges, ce qui donnerait un peu plus de crédit à ses décisions. A défaut, il faut revenir à l’élection des juges, afin qu’ils puissent être sanctionnés par les urnes. A défaut encore, le service de médiation - ombudsman - devrait pouvoir les superviser, et d’une manière ou d’une autre il faut une supervision des magistrats. Cela renforcera le pouvoir du peuple souverain face à cette forteresse inaccessible qu’est le pouvoir judiciaire.
Car si la responsabilité individuelle est une des forces des systèmes démocratiques, l’immunité des juges donne un très mauvais modèle de cette responsabilité.
Les juges compétents, qui travaillent bien, ne risqueraient rien d’une telle mesure.
John Goetelen
Liste No 9 MCG
Mouvement Changer Genève
Commentaires
Bonsoir,
L'idée de l'ombudsman est très intéressante, et mérite que l'on s'y penche. Comment inscrire cela dans la Constitution? Faudrait-il faire une initiative?
Quant à la responsabilité des juges, il faudrait au moins que les fautes avérées de rigueur dans la procédure soit imputées au magistrat, pour cela, faudrait-il que le serment du magistrat devienne une loi?
Suis pas très forte en politique, mais concernant le taux d'abstention en Suisse...cela vient de ce que les gens sont globalement satisfaits de leur conditions de vie, donc peu enclins à vouloir changer les choses ( beaucoup de nos contitoyens ne savent même pas qui est l'actuel président du conseil fédéral) et de ce fait s'intéressent assez peu à la politique....