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Caïn et Abel sont parmi nous, ou le destin des nomades

Après avoir vécu de chasse et de cueillette, les humains ont progressivement domestiqué le sol et les animaux. Quand ils étaient nomades ce sont eux qui allaient vers la nourriture: vers des régions riches en gibier et en fruits. A cette époque la terre n’appartenait à personne.

Nomades2.jpgLa sédentarisation a inversé le mouvement: la nourriture est venue a eux et y est restée. Avec l’agriculture et l’élevage est venue la propriété attribuée à une personne ou un groupe. Car pour cultiver il fallait avoir un champs sur lequel on travaillait à l’année et de façon pérenne. De même il fallait avoir des pâtures pour les animaux domestiqués.

Les nomades ne travaillaient pas vraiment: ils vivaient au jour le jour, avec les risques de famine - conséquence de la non-capitalisation de la terre et des bêtes. La sédentarisation a amené le travail, la peine, et la privatisation des fruits du travail: celui qui produisait gardait ses produits, moins une part pour payer des soldats pour se défendre, ainsi qu’une administration.

Dans “Le rois des aulnes”, l’écrivain Michel Tournier fait un intéressant parallèle avec le mythe de Caïn et Abel de la Bible. Abel était berger, donc nomade et sans propriété privée. Caïn était cultivateur, donc sédentaire, fixant son territoire dont il pouvait exclure ceux qui n’étaient pas de son clan, comme les nomades.

En tuant Abel, Caïn a symboliquement donné la victoire à la sédentarisation, à la propriété privée, à l’anticipation, mais aussi au travail, à la peine, et à la convoitise et ses guerres d’appropriation des richesses.
Sédentarisation.jpg
Les nomades vivaient libres et pauvres, les sédentaires vivaient non-libres mais moins pauvres. L’identité s’est peu à peu fondée sur l’appartenance territoriale - en partie du moins. Le nomade, libre, n’avait pas besoin d’identité fixe ni d’administration. Le sédentaire a besoin d’actes de propriété. donc d’un état civil, et de toute la lourdeur de l’administration.

Aujourd’hui encore, les nomades sont mal vus. Paradoxalement les sédentaires se nomadisent: voyages, déplacements, déménagements, exils, exodes de populations pour des raison de guerre, de famine ou de trouble climatique.

Les changement du climat pourraient bien amplifier les mouvements de populations. Et peut-être que de nouveaux mouvements de contestation d’une société trop organisée se feront, sous la forme de tribus nomades formées d’occidentaux recherchant les vraies valeurs humaines plus que les appartenances figées et formelles.

Sera-ce la revanche d’Abel sur Caïn?


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Catégories : société 18 commentaires

Commentaires

  • Rien à dire ! AMplement d'acord avec vous !

  • Heureusement que Greypowered ne lit plus les blogs de la Tribune, sans quoi, on aurait droit une fois de plus à son fameux : "rigueur scientifique".

    Tirer des parallèles comme ceux du livre que vous présentez, John, est une manière intellectuelle de prévenir par la présentation du passé, les erreurs du futur.

    J'ai hâte de lire les commentaires suivants.

    ;o)

  • Hum, les nomades comme vecteurs de nos rêves de paradis terrestre...

    Gengis Khan était un nomade non ?

    CE

  • Oui c'est vrai, la représentation que nous pouvons nous faire des nomades tient du mythe du paradis. Mais avec le nombre d'humains sur la planète, difficile quand-même de nous imaginer tous nomades! (:o)...

    Un néo-nomadisme devrait rester limiter, car je doute qu'il puisse assurer le développement de la technologie par manque d'ancrage (unités de recherche et de production) et de capacité d'utiliser les ressources naturelles.

    Gengis Khan faisait partie de tribus plus ou moins nomades, mais en fait par l'unification qu'il a réalisé des tribus et par les conquêtes territoriales, il a fondé un empire qui a tenu un siècle, et qui a laissé comme empreinte une nation plus sédentarisée.

  • @ Victor: Grey nous manque parfois!

  • C'est vrai qu'elle nous manque, mais son éternel "rigueur scientifique", non.
    Je crois qu'elle est occupée à sa thèse de doctorat, mais elle revient de temps à autre.

  • Oui, oui, HL, pour avoir été partiellement nomade, je peux confirmer que cela tient un peu du mythe du Paradis...

    C'est une grande liberté et beaucoup de contraintes, avec des avantages et des inconvénients...une autre manière de vivire, avec le plaisir du changement, qui ouvre l'esprit, et les contraintes de ne pouvoir construire nul part quelque chose de plus évolué.

    D'une certaine manière, les peuples nomades, en étant plus libres dans leurs déplacements, sont plus enfermés dans leur société, donct ils dépendent eux-mêmes...

    Question philosophique à 2 balles

    Le mythe de la croisière au grand large....on y pense comme à une formidable ouverture, et pourtant, qu' y a-t'il de plus proche d'une prison qu'un bateau sur l'océan?

    :=))

    Ark

  • Houla!

    Insinueriez-vous, connaissant le sort réservé à Caïn dans ses lignes, que la bible condamne la propriété privée du sol?

    Ceci dit, l’opposition nomades/sédentaires en relation avec le concept de propriété, de liberté et de richesse et pauvreté, me semble un peu tirée par les cheveux.

    Le fait d’être « chasseur/cueilleur» n’implique nullement le nomadisme, tout au plus un déplacement dans un espace vital qui est déjà une forme de propriété privée du sol. Ne manquent que les « barrières ». Certains peuples d’Amazonie sont des chasseurs/cueilleurs et pourtant sédentaires. Et sans être à proprement parlé « propriétaires » de leur espace vital il n’en demeure pas moins que si d’autres «chasseurs/cueilleurs viennent empiéter sur "leur" territoire, la rencontre est rarement amicale.

    Les nomades étaient – sont, aujourd’hui encore- essentiellement des bergers, et c’est la disponibilité de la nourriture pour les troupeaux qui préside au déplacements des hommes.C’est encore le cas en Asie centrale ou , à dire vrai, en Suisse, lors des inalpes et désalpes, ou des transumances. De plus, affirmer que ceci ne constitue pas un "vrai" travail démontre que vous n'avez jamais gouverné des vaches, ou un troupeau de chèvres. Quant au caractère paradisiaque de ces activités, disons qu'il m'échappe.

    Il me semble que votre interprétation du nomadisme se limite à celui des « tziganes» d’aujourd’hui. Rien a voir avec les migrations massives passées, présentes ou à venir.

    Quant au néo-nomadisme touristique….

    Tout ce qui précède juste pour le plaisir de la contradiction, bien sûr.

  • La contradiction est bienvenue Azrael car j'ai plaisir à ouvrir un débat sur une proposition et à lire les compléments, rectificatifs ou contre-propositions. J'ai parfois une idée forte sur un sujet, mais il y a peu de sujets sur lesquels j'ai une vision relativement d'ensemble, soit parce que je n'ai pas un maximum d'informations ou de pratique personnelle, soit parce que je n'ai pas encore aboutit ma réflexion, ou que je n'ai pas les pistes pour l'aboutir.

    Je suis assez perso - je veux dire que si j'ai une idée qui me tient bien je l'essaie avant parfois d'avoir tous les éléments et je complète en faisant - mais je pense depuis longtemps que nous sommes plus complets à plusieurs. J'accepte d'être amené à changer mon point de vue si les éléments apportés par d'autres me convainquent et semblent ou se vérifient solides.

    Pour ce billet, en effet je n'ai jamais été berger, à part accompagner quelques fois des bergers lors de vacances, mais je n'ai jamais eu cette responsabilité.

    Je définis peut-être ce que je mets dans le mot "travail": activité dont le but est directement de produire quelque chose. Il me semble que le berger utilise plus la production de l'animal qu'il ne produit directement. Un cultivateur utilise aussi la production du sol mais il travaille davantage ce sol par ses propres mains pour orienter sa production vers un produit précis. De plus il capitalise le résultat, organise son travail sur au moins deux ans ou plus. Il y a transformation plus que simple utilisation, c'est là que je mets la notion de travail.

    Mon point de départ dans ce billet est le parallèle fait par Michel Tournier, que j'ai trouvé intéressant. Un peu schématique mais originale cette différence entre l'utilisateur et le transformateur qui va à la peine.

    Cela dit, vous avez raison: les vrais nomades sont rares et même les clans ou tribus qui se déplacent à l'intérieur d'un territoire considèrent que ce territoire est leur propriété. Les amérindiens n'avaient pas de maison en dur, et suivaient les déplacements des troupeaux sauvages ou se déplaçaient selon les saisons, mais la propriété était finalement un grand territoire et appartenait à un clan ou une tribu.

    Sur le fait que la Bible condamne la propriété privée du sol, je ne crois pas, car elle admets que les tribus existantes avaient leur territoire.

    Merci de ces compléments, contradiction utile, et j'apprécie quand vous développez car je comprends mieux votre point de vue.

  • je (e remercie pour ces images :)

  • Oui, ca c'est completement vrais. Caïn et Abel represent le problemme constante de l'humanite...Et je pense qu'il finira seulement quand l'humanite rencontrera son bout...

  • Nous souhaiterions reprendre votre texte dans notre revue (tirage 2500 ex en France) consacrée au monde rural. Merci d'avance de votre autorisation.

  • @ Agir en rural:

    Ok, je suis d'accord. merci de m'informer de la parution.

    Bonne journée.

  • @ Agir en rural:

    Ok, je suis d'accord. merci de m'informer de la parution.

    Bonne journée.

  • Si vous avez l'occasion, regardez les nomades marcher dans le désert.
    C'est impressionnant, parce que c'est à ce moment précis qu'on les sent absolument libres.

  • Merci, avec plaisir pour vous envoyer un exemplaire (parution fin octobre), à l'adresse qui vous conviendra (notre site/ http://cmr.cef.fr)

  • Merci, avec plaisir pour vous faire parvenir un exemplaire de la revue (parution fin octobre), à l'adresse qui vous conviendra.
    (notre site http://cmr.cef.fr)

  • La revue d'octobre de AGIR EN RURAL est sortie,
    vous pouvez nous indiquer vos coordonnées postales
    pour un justificatif.
    agirenrural@cmr.asso.fr

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