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Monsieur Gros Nez et les étranges visages de Picasso

Gamin je n’aimais pas Picasso. Ses formes ni ses couleurs ne me parlaient, j'y voyais une déstructuration plus qu'une composition. Alors que les ondulations ébouriffées et colorée de Van Gogh m’enthousiasmaient.

picasso914.jpgAdulte, pendant longtemps je ne comprenais toujours pas la peinture de l’espagnol célèbre. Bien sûr, il y avait Guernica. Oui, Guernica passait bien. Non que ses formes fussent plus explicites, mais pour l’histoire que le tableau représentait: un massacre pendant la guerre civile espagnole où les habitants du village de Guernica furent bombardés par l’aviation de Hitler qui venait en aide à Franco.

Et puis j’ai avancé dans ma recherche des dimensions multiples de l’humain: sa part de lumière et d’ombre, ses facettes. En particulier, j’étais attentif au fait que quand on regarde quelqu’un, on ne voit qu’une face de la personne. Si quelqu’un a un gros nez, il devient Monsieur Gros Nez. Un chauve devient Monsieur Chauve. L’esprit fixe en un instant la partie visible, montrée, comme si l’identité se réduisait à un gros nez ou à une calvitie.

Cette réduction de la perception de l’humain m’a toujours dérangé. Moi-même je n’acceptais pas d’être réduit à une seule définition. D’ailleurs dans ma vie j’ai souvent fait plusieurs choses et défendu plusieurs options - même si elles étaient contradictoires. Cela ne m’empêche pas de faire des choix ou de prendre des positions mais en étant conscient de la relativité de cela.
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Cette recherche des multiples facettes s’est durablement ancrée en moi. Et un jour, je suis tombé sur un visage peint par Picasso. Après un premier réflexe de résistance à l’image, j’ai regardé plus attentivement. Et j’ai compris quelque chose de cette peinture: Picasso peignait les gens sous plusieurs angles en même temps. Je m’expliquais soudain ces visages apparemment décomposés, ces yeux pas au bon endroit, ces nez de profil alors que le reste du visage est de face. En somme, presque une image animée dans la fixité du tableau.

J’ai eu le sentiment qu’il voulait peindre l’humain sans le réduire à un seul point de vue. Enfin, c’est ce que je me dis, Je ne sais pas si les spécialistes du peintre en font la même analyse, mais celle-ci me va bien.

Depuis lors, en regardant un visage peint par Picasso, je cherche à reconstituer les multiples angles de vue du peintre: où était-il par rapport à son modèle quand il a peint les oreilles? Et les yeux? Et peu à peu je fais le tour presque complet du visage.

Depuis lors également, quand je me surprends à ne voir chez l’autre qu’une seule facette, je repense à Picasso et je cherche à découvrir tout ce que je ne vois pas encore, et qui existe pourtant.
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Et je m’étonne toujours que toutes ces facettes, toutes ces différences de vue, sont la même et unique personne. Une et multiple.

Apprendre à ne pas voir qu'un seul aspect des choses et des gens. Dans le même esprit, les sémanticiens mettent en garde contre les définitions uniques. Ainsi, ils rajoutent “etcoetera” à la fin d’une description, pour laisser la porte ouverte à ce que nous n’avons pas encore vu.

Ainsi, je pourrais dire:

- Bonjours Monsieur Gros Nez Etcoetera!
- Bonjour Monsieur Chauve Etcoetera!

Et ainsi de suite.

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Catégories : société 2 commentaires

Commentaires

  • Très bon travail, merci pour votre aide, et notez dans un premier temps que je "plussoie" moi aussi votre positon ! Permettez-moi d'insister, oui votre travail est bien bon, très instructif ! PS : J'attends avec impatience la suite !

  • Moi non plus je n'aime pas Picasso. Quand j'étais petite, je me souviens juste que je voulais le connaître car tout le monde autour de moi en parlait. Maintenant que j'ai vu ces œuvres, je ne vois pas vraiment ce qui l'a rendu si célèbre.

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