L’histoire des mineurs qui monnaient lourdement leurs interviews continue à alimenter mes réflexions. Quelque chose me dérange dans la relation à l’argent telle qu’on la voit s’étaler. Quelle est l’attitude juste devant le spectacle du monde, et faut-il trouver une attitude ou simplement laisser faire? Y a-t-il quelque part un principe qui puisse fonder l’attitude juste?
Je commence par les bonus des pdg, qui récompensent indifféremment la réussite ou l’échec. On l’a vu avec la débacle de Swissair, avec UBS dont la direction couvrait les actions illégales, et en maintes occasions. Les responsables s’en sont sortis avec de belles sommes dont on ne voit plus le lien avec un réel mérite. Le capitalisme à l’origine était le fait d’entrepreneurs qui engageaient leur propre argent et prenaient les risques. L’échec était payé cash. On en est loin.
Les montants joués par les traders comme si le monde était un casino font perdre toute notion de réalité à l’argent. Et aujourd’hui où les programmes informatiques prennent la décision de vendre ou acheter en quelques millisecondes, le divorce entre l’argent en tant que résultat d’une activité réelle ou la réflexion sur les résultats d’une activité d’une part, et des chiffres alignés sur un écran d’autre part, est presque total.
Je me méfie de la jalousie à l’égard de ceux qui ont plus. On sait que la jalousie ou l’envie est un des moteurs de la tyrannie. Je me refuse à construire une théorie sociale sur l’envie ou sur la frustration d’un pouvoir économique qui m’échappe. Je ne crois pas à une égalité totale qui nivellerait les talents, les envies, les capacités de réalisation et d’action. Nous ne sommes pas égaux. Mais nous pouvons continuer à avancer sur le chemin de l’égalité juridique et du respect, ainsi que du partage qui soude une communauté humaine et lui donne de la force.
Actuellement ceux qui ont une responsabilité dans la société, économique en particulier, participent à l’éclatement des liens de solidarité et de confiance mutuelle. Et pourtant tout le monde court après l’argent. Les mineurs du Chili se vendent, comme les traders, les péripatéticiennes ou les acteurs de la télé-réalité.
Si l’on admet que chacun gagne sa vie, il n’y a rien à reprocher aux mineurs. Ni aux gamins qui jouent dans Secret Story: ils font leur job. On leur demande d’être idiots et ils remplissent manifestement très bien leur contrat. Rien à redire. Les mineurs ont trouvé un filon, ils en profitent, rien à redire. Tant que rien d’illégal n’est accompli rien à redire ni aux mineurs, ni aux acteurs, ni aux traders, ni aux banquiers, ni à personne.
Les traders, les mineurs, les acteurs, tous font partie soit d’un ordre opportuniste qu’il faudra bien accepter et il n’y a rien à redire, soit d’un désordre auquel il faut apporter un remède, s’il existe.
Et pourtant le malaise subsiste. Voir l’absence de mérite de certains responsables récompensée, il y a quelque part un ordre des choses qui ne colle plus à la réalité. Un salarié sait que s’il sabote son travail il le paiera cash, soit par le licenciement soit par la perte de marchés pour l’entreprise où il travaille. Quand je vois aussi combien j’ai dû me donner dans mon métier pour le construire, en valorisant toujours les échanges gratuits où l’humain est au centre, et qu’un dérapage de la justice sur une fausse accusation a pu détruire mon travail et me laisse au bord de l’abime, je vois bien, intimement, que quelque chose n’est plus ajusté sur le réel. Je cite mon expérience individuelle car à un moment donné c’est celle-ci qui peut pousser à vouloir renverser un système ou à s’affranchir de toute éthique, ou au contraire à s’ancrer davantage dans ses propres valeurs quel qu’en soit le prix. Je ne suis pas obligé d'imiter le pire du monde.
Je ne sais pas quel est le principe qui devrait faire recoller les choses à la réalité. Je ne reprends pas à mon compte le discours sur les capitalistes voleurs car il contient lui aussi la même tension d’éclatement des solidarités et les têtes de file qui tiennent ce discours sont autant prédateurs que ceux qu’ils critiquent. Au pouvoir, ils feront comme les mineurs face à la presse: ils se serviront.
Pour moi, au-delà du système, c’est l’humain qui est en cause. Je ne crois pas à un humain qui serait seulement le produit des conditions ou constructions sociales. Les conditions et le système sont à l’image de ce que nous portons intimement en nous. Et plus que de chercher un système parfait je cherche ce qui fonde la conscience individuelle dans la justice et la justesse. Je crois que l’individu est le lieu où le travail doit se faire.
Je cherche un principe qui ne soit fondé ni sur une jalousie, ni sur une morale par trop réductrice, ni sur un égalitarisme forcé qui nierait les différences et qualités propres à chacun. Mais ce n’est peut-être qu’un rêve, car si l’éclatement de la cohésion sociale, déjà bien engagé, va encore plus avant, la solution sera une remise en ordre forte, violente et contraignante, d’où qu’elle vienne. On entend déjà le durcissement des positions sociales et politiques. On voit des conversions religieuses s’opérer pour retrouver un ordre et une idéologie forte. La baisse durable de l’économie fera augmenter inévitablement les précarités, et de nouvelles organisations sociales devront se mettre en place. L’Etat ne pourra plus servir de parent providentiel. Les familles devront se recomposer pour soutenir ceux qui n’auront plus de travail.
Une nouvelle révolution technologique pourrait modifier partiellement ce scénario. Les énergies vertes, les nanotechnologies et d’autres secteurs, bénéficiant du savoir-faire euraméricain, sont des perspectives possibles.
Mais plus encore, c’est au point de vue philosophique qu’il faut trouver de nouvelles perspectives. Les vieux systèmes de pensées, les clivages politiques, les postures de dominants-dominés, les fantasmagories religieuses comme la peur de l'enfer, ne permettent plus d’aller de l’avant. A l’instar d’Edgar Morin, la philosophie, qui avec Sartre avait aboutit à la fin de l’ère théorique et détachée du réel, pour revenir à l’expérience individuelle, doit maintenant arpenter le champs de la complexité et trouver des voies nouvelles pour la pensée. La manière de penser conditionne le contenu de la pensée - contenu religieux, philosophique ou autre. C’est la manière de penser plus que le contenu de la pensée qui doit être un chantier d’avenir. Il faut travailler non plus sur les appartenances politiques, ou religieuses mais sur le mode de fonctionnement de l'individu.
Cela ne sert à rien de faire une révolution avec au coeur la même violence que celle de l’oppresseur. Quand un oppresseur remplace un autre oppresseur, c’est toujours l’oppression qui gagne. Et le risque dans le désordre qui se développe, est que l’oppresseur ne revienne sous les habits du sauveur. L'oppression, nous avons tous donné. Seule une éthique librement incarnée dans l'individu peut éviter le recours à un nouveau sauveur-oppresseur.
Commentaires
"Les conditions et le système sont à l’image de ce que nous portons intimement en nous."
Et d'où vient ce que nous portons en nous?
"Quand un oppresseur remplace un autre oppresseur, c’est toujours l’oppression qui gagne."
Exact. Mais comment mettre fin à l'oppression, quand les oppresseurs ne vont certainement pas se laisser dépouiller de leur pouvoir?
"Seule une éthique librement incarnée dans l'individu peut éviter le recours à un nouveau sauveur-oppresseur."
Dans le fond vous ne semblez pas si éloignez de la formule:
De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. Ou bien?
@ Johann: D'où vient ce que nous portons en nous? Bonne question. De mécanismes de survie de l'espèce animale, possiblement, mécanismes qui se sont élaborés avec le temps. Ou encore d'ailleurs? De schémas inhérents à la structure même de l'espace (p.e: grand-petit avec dominant-dominé, mais ce serait à développer et affiner). La construction sociale tend, me semble-t-il, à poser des règles du jeu, à instaurer des lois pour tous et plus de justice - même si cela se fait lentement. Les mécanismes relationnels classiques peuvent être tempérés ou désamorcés par la civilisation.
Comment mettre fin à l'oppression sans la reproduire? C'est peut-être un des gros enjeux. Gandhi s'y est essayé, et d'autres. A défaut d'avoir déjà le mode d'emploi, au moins peut-on dire les options à exclure: ni gestapo ni kgb. Mais dans l'état du monde, ce n'est pas très réaliste...
"De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins." Pour les moyens, oui, pour les besoins c'est plus changeant un besoin. Et il faudrait encore faire la part des vrais besoins et des besoins compensatoires. L'idée est: comment aller vers une société plus fluide et plus juste sans passer par la coercition ou la domination?
En fait, quelque soit le système il y aura toujours des petits et des grands profiteurs qui exploiteront toutes les failles et les possibilités de gains faciles. Des individus qui chercheront sans vergognes à se faire une place au soleil.On retrouve ce comportement dans toutes les échelles de la vie animale. Il semble même que cela fasse partie de l'évolution des espèces.
Il n'y a pas de systèmes qui puissent empêcher cela.
Seul un aspect culturel est capable de créer de nouveaux mèmes, qui sont aux comportement ce que sont les gènes pour le corps. Les mèmes sont en quelques sortes des éléments culturels quasi matérialisés et équivalent aux gènes.
Dawkins a écrit justement "le gène égoïste" et dans ce même ouvrage à inventé le terme "mème": contraction de gènes et mimétisme.
La nature et la sélection naturelle ont aussi inventé des "mèmes" altruistes que l'ont appelle "effet réversif". Un comportement altruiste et de compassion. Ce qui se passe quand des loup recueille "un petit d'homme", ou des dauphins sauvent des gens de la noyade.
Bref, on ne peut pas s'opposer de front aux grands courants collectifs, mais on peut user de sa créativité pour créer de nouveaux comportements culturels propres à former de nouveaux "mèmes"
Suite;
A l'aube de l'ère industrielle, issue directement du siècle des lumières, a émergé la notion de progrès. Tant au niveau de l'esprit humain qu'au niveau du progrès matériel. On a promulgué l'idée que le progrès industriel allait extirper la condition humaine du poids du travail et de ses activités harassantes. Libérer l'homme de ses chaînes qui rendent la vie pénible. La machine allait s'occuper de tout. A l'arrivée on constate que le gain apporté par la technique industrielle n'a pas été rendu à l'homme, mais au contraire l'a remplacé.
Aujourd'hui, on crève moins de travaux pénibles que de stress ou de désespérance d'être sur la touche. On crève de suractivité ou de manque d'activité.
A la suite de ces "progrès" la société humaine a été propulsée dans le monde de la virtualité. Notre argent est virtuel, le rapport social est virtuel, nos loisirs deviennent virtuels, nos besoins et nos dépensent deviennent également virtuels. En effet ce progrès nous possède totalement, bien plus que nous ne le possédons.
Faut-il aussi y voir une évolution sélective ?
Culturellement et philosophiquement nous sommes en retard et pas à la hauteur de ce train d'enfer. D'où la déliquescence et l'éclatement des repères sociaux,éthiques et moraux. Chacun se construit un référentiel philosophique, religieux ou culturel dans son coin pour survivre et tente parfois de l'imposer aggravant par là, la cacophonie ambiante, tout en pensant y remédier.
Une des sources actives de ce progrès est représenté par les Etats Unis, où l'opportunité d'une réussite fulgurante à la portée de tous est constitutionnel.
Mais sous ses apparences d'hypermodernité, les Etats Unis sont encore empêtré dans une culture qui prévalait déjà au temps des colons. Un puritanisme suranné et sévère, un juridisme hypocrite, une foi aveugle d'être un peuple protégé par Dieu, une conscience restreinte à sa propre population.
Une très bonne représentation de l'abîme qui s'est constitué entre le progrès et l'évolution culturel.
Peut être qu'il faut commencer à se réveiller du rêve américain qui a pris la forme du cauchemar actuel ?
Allez au point où j'en suis, je continue ... d'un point de vue psychologique.
A la révolution française, pour bien marquer l'irréversibilité du changement on a coupé la tête du roi. Quelques années plus tard la psychologie freudienne soulignait la décapitation symbolique des parents lors de l'adolescence, aujourd'hui la science s'efforce, de "couper la tête" de Dieu. Le titre du livre de Dawkins; "Pour en finir avec Dieu" parle de lui même.
Je ne sais pas si on évalue pleinement à quel point ces décapitations successives de ce qui représentait un ordre social et moral, laisse l'humain désorienté psychologiquement. C'est à dire qu'en procédant de la sorte nous avons également décapité les images intérieures représentants nos propres ressources d'ordre moral, l'instance au dessus de nos turpitudes capables de donner une direction. Nous avons effacé le capitaine qui tient la barre de notre bateau en même temps que le phare qui illumine la nuit et indique la direction à suivre. (au passage je pense que c'est aussi la cause de la perte de repère de l'identité masculine. C'est un autre aspect).
Je me demande parfois presque avec amusement, si nous n'actualisons pas de la sorte des vieux thèmes bibliques qui représente le passage de l'adolescence. Comme l'acquisition de la connaissance et l'autonomie qui se paie par l'expulsion du paradis et de l'adage "tu gagneras ton pain à la sueur de ton front".
Oui je crois que collectivement nous sommes dans une grosse crise d'adolescence. Et que Papa et Maman ne sont plus là pour nous accompagner d'une main protectrice.
Tout ceci pour dire, HL, que votre quête profonde de nouveaux paradigmes philosophiques et culturels est ô combien importante et qu'il faut la nourrir encore et encore. Et chaque contribution qui va dans ce sens constitue une des gouttes qui forment les rivières et les océans.
A plus ! ou Amen ! (-_-)
@ aoki: continuons à éclabousser ce monde de gouttes!
J'ai souvent eu l'impression que notre époque, depuis les années 50, est dans une sorte de no man's land. Pas d'idéologie dominante, pas de courant philosophique ou artistique dominant, déstructuration des anciennes croyances, descente dans la structure même de l'humain, de la matière (physique nucléaire et quantique), de l'impulsion artistique ((art abstrait qui semble parfois représenter l'infiniment petit vu au microscope, ou comme Dubuffet décomposant le mouvement - c'est-à-dire montrant les phases du mouvement (du processus) là où les anciens montraient une forme d'achèvement ou de monde fini et statique, sans espoir autre que dans une autre vie après la mort)). La religion et la philosophie ont proposé des réponses là où ils suffisait de reformuler les questions, des solutions là où l'acceptation du problème était la solution, des pistes balisées là où il aurait été préférable de humer les odeurs pour trouver la direction. Aujourd'hui, le mythe du progrès a ceci de bon qu'il a remplacé l'image d'un monde fermé où toute réponse était forcément définitive. L'espoir est venu à portée de tous, dans cette vie et non dans l'hypothétique autre vie.
Dans cet éventail très incomplet que je suggère je ne peux oublier Picasso et ses visages vus sous deux angles à la fois! Il proposait déjà la sortie des paramètres linéaires, il proposait presque une posture bilocalisée, une sorte de mode d'emploi pour sortir de la vue unique proposée par l'Oppression. Les dadas aussi, les surréalistes aussi, proposaient cette provocation à redécouvrir par soi-même le monde et à quitter le chemin balisé et désespéré. Mais à ce moment il y avait encore la prégnance de l'idole qui a succédé à Dieu: les Etats-Nations, l'identité nationale, l'idéologie des peuples nationaux et des races ayant remplacé celle de peuple de dieu, et le Chef, le Führer qui est le garant de tout cela.
Mais n'oublions pas que ce n'est pas par hasard si les Lumières ont descendu Dieu de son piédestal et sa posture d'inaccessibilité.
Pourrions-nous tenir suffisamment longtemps dans le no man's land, sans guerre, sans tyrannie, sans religion dominante, pour que les gouttes jetées aient le temps de former peu à peu un nouveau fleuve, un nouveau livre, un nouveau logos sans propriétaire, un fleuve intégrant la science la plus pointue, la neuro-psychologie, et bien d'autres choses encore? Le génie humain s'exprime aujourd'hui dans tant de domaines: espace, physique, sciences en général, technologie, poésie, etc, bon sang qu'il serait regrettable que cela n'aboutisse pas et qu'un nouvel obscurantisme - religieux ou autre - vienne imposer sa loi à la demande d'une majorité d'humains angoissés n'ayant su prendre leur vie en main. Des humains dont le manque de père et de re-pères ouvre grande la porte à de nouveaux sauveurs-oppresseurs.
C'est d'ailleurs bien le risque d'un certain féminisme, qui contrairement à ce qu'il prétend n'est pas une libération humaniste: il présente le risque d'ouvrir la porte aux nouveaux tyrans, aux ersatz de père, aux chimères dévoreuses et pourvoyeuses d'incohérence. La tyrannie du père a ceci de bien qu'elle est visible et que l'on peut s'y opposer. La tyrannie de la mère est invisible et ce serait déloyal - et donc culpabilisant -- et donc désespérant car de nature à nous rendre impuissants par inhibition - de s'y opposer.
Le désespoir est-il plus grand aujourd'hui qu'autrefois? On constate son expansion en littérature au 19e siècle, au temps de l'idole "Nationalisme", où toute déviance ou insatisfaction par rapport aux réponses définitives de l'époque était source du plus grand désarroi. Les désespérés d'aujourd'hui ne sont peut-être que les nostalgiques de la tyrannie d'autrefois.
Aoki, très content de vous retrouver après votre pause. Vous manquiez.
J'ajoute sur la mère et le féminisme:
La mère suscite l'inceste par l'aspect corporel du contact (allaitement, soins, tendresse), et elle l'interdit en même temps. Terrible ambivalence! Ambivalence par nature castratrice. Je n'invente pas. Regardons ce qui s'est passé avec l'affaire Dutroux: les hommes, les pères ne touchaient plus leurs enfants. Le contact de l'homme est perçu comme pervers, pas celui de la femme. La castration masculine est la seule solution d'impunité. Quand des féministes américaines affirmaient que la pénétration masculine était par nature un viol, ou quand on criminalise un regard de l'homme sur la femme comme du harcèlement.
Ce féminisme-là qui affirme la toute-puissance de la femme et de la libre disposition d'elle-même (par exemple avorter sans l'avis du géniteur) est le terreau de la prochaine dictature - aussi invisible et efficace que la tyrannie maternelle.
Je pense que le désespoir n'est ni plus grand, ni plus petit, mais qu'il a changé de modalité, s'est transposé dans d'autres secteurs.Comme bien d'autres choses d'ailleurs. La nostalgie serait un effet, plus qu'une cause. La nostalgie d'avoir un ennemi identifiable justement.
S'il y a quelques choses que je retiens d'une mise en perspective à travers l'histoire; c'est justement les avancées linéaires.
On se définit par rapport à ce qu'il y avait avant. On pense faire une percée par rapport au passé.C'est dans cette manière que l'on s'expose au mécanisme de retour de balancier.
C'est peut être pas ou plus la bonne manière de faire.
Un exemple: dans le no man's land du 20ème siècle, il y a eu quelques fulgurances comme le "flower power" mouvement de contre-culture aspirant à la liberté individuelle, anti- consumériste et intégrant d'autres cultures . Mais les enfants du Summer of Love de 1967 sont devenus des cadres parfois dirigeants bien rangés aujourd'hui, pratiquant la réal-politique. Pourtant c'est vrai que cela a laissé une trace. Il y aurait à revenir sur quelques aspirations de ce mouvement.
On pense facilement que les civilisations successives ont servi de socles aux suivantes par empilements et que nous possédons au fond de nous les acquis des précédentes. Ce n'est pas si sûr. Plusieurs ethnies vivent encore en tribu dans un contexte quasi paléolithiques. D'autres aux moyens ages dans des conditions de servages en Asie par exemple. Ces peuples sont curieusement aptes à adopter nos modes de vie assez rapidement. Mais à l'inverse donnez un puissant psychotrope végétal à un cadre de la finance et il aura plus besoin de l'aide d'un chaman, que du médecin qui ne saura que lui injecter éventuellement un tranquillisant peu efficace en l'occurrence.
Ce que je veux dire c'est que nous ne considérons pas les acquis, nous les oublions sans les avoirs digérés avec conscience, ce qui donne cet impression d'éternel recommencement et ses retours de balancier.
Je crois que nous devons digérer notre histoire. Cet à dire faire un tri, prendre la moelle essentielle des choses et savoir en éliminer les déchets sans intérêts.Intégrer les paradoxes et les contraires. Par exemple dans les percées scientifiques formidables d'aujourd'hui, je suis toujours déçu de l'interprétation et de l'usage à ras les pâquerettes qui en ressort. Et j'ai souvent le sentiment que la science est le lieu de substitution de la foi. Avec ses dignitaires qui affirment comment penser et la cohorte de fidèles. On coupe la tête à Dieu, mais on a rien digéré et on reconduit de manière transposée des défaut d'avant.On est encore dans le système de balancier. Aux envolées mystiques et lyriques on oppose une vision cynique, institutionnalisée et académique.
Avez-vous remarqué qu'aujourd'hui on fait des études sur tout et n'importe quoi, que l'on en ressort tout et son contraire jusqu'à l'absurde. Il y a tout de même des personnalités scientifiques admirables dans leurs ouvertures qui admettent que le champs à investiguer est incommensurable et que chaque vérité est amplement relative.
Alors j'aime bien l'exemple de Picasso et la posture bilocalisée. Cela a d'ailleurs émergé de manière synchrone avec la découverte des particules "omnilocalisées" Les artistes ont souvent ce flair pour (je vous cites) "humer les odeurs pour trouver la direction". Réaccaparer ses sens, utiliser ses deux cerveaux sont sans doutes les leçons que nous ne tirons pas de notre histoire alors que l'émergence de nouveaux paradigmes passent sûrement par là.
Et plic !
"Quand des féministes américaines affirmaient que la pénétration masculine était par nature un viol, ou quand on criminalise un regard de l'homme sur la femme comme du harcèlement."
Quand je disais que les états-unis était un lieu de juridisme hypocrite ou tout simplement pervers !