Marine Le Pen est-elle raciste et diabolique oui ou non? Et si oui, pourquoi le parti socialiste ne le serait pas? Car ce parti, par la voix de son porte-parole Benoît Hamon, s’est finalement aligné sur Marine Le Pen: la laïcité de l’espace public doit être garantie. Le PS prend enfin ses responsabilités! Oh, du bout des lèvres…

Le parti socialiste français prend position

Il aura fallu attendre plusieurs jours pour que ce parti prenne position, laissant ainsi passer une polémique gênante pour lui s’il était entré dans le débat plus tôt. Courageux, mais pas trop quand-même. On doit donc considérer que le PS est islamophobe, comme on l’a fait pour Marine Le Pen. Certes il n’a pas mentionné l’occupation. Pas besoin, elle l’avait fait avant, mais il a reconnu que les prières des musulmans dans les rues (donc l’occupation de rues entières) ne peuvent plus durer.

L’art de récupérer un thème chaud sans se salir les mains! On envoie le porte-parole, pas un dirigeant. Cela fait moins de vagues. On peut d’ailleurs constater le bel opportunisme du PS qui intervient après la publication du sondage selon lequel 39% des français approuvent  MLP. Dont presque 20% des sympathisants de gauche. On ne va quand-même pas perdre ces 20% de «fascistes» roses aux prochaines élections!

Catholiques traditionalistes = terroristes?

Au passage, il veut faire jeu égal avec Marine et balance sur l’intégrisme catho qui inspire le Front National. Chacun son dérapage, après tout. En se dédouanant vis-à-vis des musulmans de France, qui pourraient faire partie de son électorat, le PS traite les traditionalistes de poseurs de bombes - oh pardon, d’intégristes!… Ben oui, quoi: si la référence à l’occupation par MLP est supposée assimiler les musulmans aux nazis comme je l’ai lu, alors la référence à l’intégrisme fait des catholiques des poseurs de bombes. Chacun ses excès, chacun son hystérie!

Je suis pourtant très loin d'être fan du catholiscisme traditionaliste (d'aucune religion en réalité)! Un reportage avait d'ailleurs montré une troublante mansuétude à l'égard de l'idéologie nazie dans un collège traditionaliste.

L'islam: une question de société

Au fond, l’important est que le PS ait enfin pris une position claire. Et qu’il reconnaisse que la prière des rues a pris des proportions insupportables:

«Ce sont des situations qui ne sont pas tolérables beaucoup plus longtemps, on a une situation de tension avec les riverains et il faut trouver des solutions.»

Benoît Hamon argue donc de la gêne pour le voisinage, mais aussi de la nécessaire laïcité de la République. MLP elle argue de l’illégalité de ces réunions sur la voie publique. Chacun a raison! Il reproche à MLP de n'en vouloir qu'à l'islam sans vraiment défendre la laïcité, tout en reconnaissant que la prière de rue n'est plus tolérable. Une manière peu courageuse de critiquer les musulmans en en laissant la responsabilité à l'autre. Il accuse le gouvernement de n’avoir rien fait. Mais le PS n’a rien fait non plus quand il était au pouvoir. Et depuis des années il n’en parle pas. Il se réveille ces jours parce que MLP en parle. Sinon, il ronronnerait encore. Aucune auto-critique. Pourtant c’est cela qui pourrait redonner à la gauche un peu de crédibilité. On peut ensuite reprocher à MLP de faire un coup médiatique pour se mettre en avant. Mais on oublie un peu vite qu’à gauche, Ségolène Royal ne fait que des coups médiatiques!

Au moins il ne laisse plus le monopole du débat sur la question de l’islam qu'au seul FN. Car il y a bien une question de l’islam. Il ne suffit pas de crier au raciste pour évacuer cette question. Et évoquer l’islam en tant que question de société n’est pas être raciste. Un peu trop facile de dire cela. Comment alors aborder ce sujet sans tomber dans la généralisation et la stigmatisation de tous les musulmans? Comment parler de l’islam, y compris de manière critique, sans être assimilé au FN ou à un quelconque racisme? On peut bien sûr rappeler que l’islam n’est pas une race ni une ethnie et qu’il ne peut y avoir de racisme. Comme la notion de racisme a été étendue, on peut parler de racisme par le fait de stigmatiser une communauté dans son ensemble à cause de son appartenance. Mais c’est alors reconnaître qu’il y a un communautarisme! Le communautarisme est une forme de préférence donnée à certains au nom de leur appartenance. Un peu comme un privilège. Le communautarisme est incompatible avec la démocratie de l’égalité.

Comment donc, ne partageant pas le protectionnisme du Front National, donc ni sa préférence nationale, ni le lien avec le traditionalisme religieux, ni son nationalisme, comment parler du FN comme d’un élément politique ordinaire et non du diable? Comment ne pas le sacraliser en voulant le rejeter? Car cela ne fait que donner plus de terrain au FN. S’arrêter sur le mot occupation, c’est encore une fois se laisser piéger. Le problème du FN c’est son nationalisme, en gros. On sait ce qu’ont donné les nationalismes dans le passé. Et pour moi qui suis fan des galaxies et de l'astronomie, qui sait que nous sommes des particules en voyage dans l'immensité, le nationalisme me semble une ridicule prétention de microbes. Mais comment trouver l’équilibre entre bien vivre et faire la loi dans sa propre maison, et rester ouvert sur le monde? C’est bien l’enjeu que pose l’existence du FN. Ce n’est pas en le diabolisant qu’on répond à cet enjeu. Au contraire: on fait seulement preuve de son impuissance, comme un roquet qui aboie sans rien faire.

Mais la question de l'islam reste, quels que soient les aboiements. J'y viens dans le prochain billet de cette mini-série.



(A suivre)