Du garçon objet de la rivalité, on ne sait rien. On sait par la presse que son coeur était convoité par deux filles de 13 ans. Et que cela se serait mal passé. Très mal. Les deux filles en étaient déjà venues aux mains. Les insultes auraient ensuite agrémenté leurs babillages d’écolières en mal d’amour - ou de reconnaissance, ou de possession du joli coeur.
Insultes relayées sur Fesse-Bouc. Et là il semble que cela ait pris des proportions incontrôlables. On a beau n’avoir que 13 ans, on est déjà capables de se flinguer par écran interposé. Et l’écran amplifie. C’est tellement plus facile d’injurier quelqu’un en étant tranquillement assis devant l’ordi. Le problème est que de l’autre côté on n’a que les mots, pas le ton, pas le déroulement normal d’une conversation qui, ayant dérapé, peut être rectifiée.
L’écran fige les mots. Le fil des échanges garde ces mots durablement. Si en plus on s’en prend nommément à quelqu’un, bonjour les dégâts! L’agressé-e lit et relit, monte les tours, rumine, se ravage d’adrénaline non utilisée. En plus il a le temps de monter un plan.
Ici c’est le frère d’une des adolescentes qui monte le plan. Un plan furieux, un plan de colère et de vengeance. Car l’honneur de sa soeur est atteint. En digne grand frère d’une famille sans présence paternelle il prend le commandement. Va à la sortie de l’école. Apprenti boxeur depuis 4 ans, il tabasse la rivale. Qui tombe au sol. Qui meurt peu après.
A 13 ans. Pour une affaire de garçon et d’honneur.
Au Moyen-Âge la majorité des homicides étaient dus à l’honneur blessé ou bafoué. L’honneur, ou le sentiment d’une estime de soi. Tout ce qui injurie et rabaisse l’autre atteint son honneur. Faut-il n’y voir qu’une survivance d’un autre temps? Non car la loi reconnaît comme des délits les atteintes à l’honneur: injures et calomnies.
Mais une plainte pour injures prend beaucoup de temps, n’aboutit souvent pas. Le désir de faire justice soi-même est grand. La manière la plus simple est de renvoyer l’injure. Je sais, ce n’est pas mieux, mais cela défoule. 1-1. On peut aussi calomnier l’autre et en rajouter. On ne devrait cependant pas oublier que ce qui sort de notre bouche sort d’abord de notre esprit et de notre coeur. Ce qui salit l’autre est donc la représentation de notre propre saleté.
Ah, facile à dire! Il faudrait alors être zen, comme un sage sur son nuage. Laisser filer l’injure ou la calomnie. Etre au-dessus de cela.
Eh oui, mais cela ne marche pas. Ou rarement. L’injure peut salir durablement une personne, dès l’adolescence. Elle peut la stigmatiser et l’exclure psychologiquement. Elle demande réparation. De plus celui ou celle qui ne réagit pas à l’injure est généralement perçu comme faible par ses camarades. Ce qui amplifie le rejet et l’exclusion. On n’aime pas les faibles.
Tout cela est teinté de stéréotypes. Oui. Mais ces stéréotypes sont profondément ancrés. Tendre la joue gauche quand on nous frappe sur la joue droite n’est pas encore vraiment entré dans les moeurs.
Dans ce drame il y a eu tentative de palabre. Vu l’ampleur prise par ce conflit le maire de Florensac avait contacté les deux mamans pour tenter une médiation. Les événements sont allés plus vite.
Mourir à 13 ans. C’est une extrême violence. C’est la valeur que ces adolescentes ont donné à leur vie. C’est le prix de l’honneur. Ou plutôt: le prix d’une jalousie. C’est très cher payé.
Ce soir de 18 à 20 heures: apéritif pour la parution de mon roman, et dédicaces.
Commentaires
@Hommelibre,la justesse de votre commentaire est combien réel de ce que beaucoup essayent mais en vain de faire comprendre à ceux qui croient les yeux fermés quitte à mettre à l'index des innnocents tandis que sournoisement des adultes ayant depuis longtemps dépassé l'âge des 13 ans comme cet ado continuent à harceler des personnes âgées et ce de nuit afin de les empécher de dormir ce qui montre bien que l'envie de tuer peut prendre n'importe qui et à n'importe quel âge,les pulsions de survie peuvent aussi se transformer en pulsions meurtrières qui seront bien entendu calmées par des anxiolytiques et frustrants pour ces personnes âgées ainsi mises à l'abri afin de ne plus pouvoir manifester leur peur,la subissant alors sans contrainte et par le harceleur et par elle-même,pauvre monde pauvre humanité car priver de bien vivre grâce à des calmants des humains pour avoir la paix de fait on agit avec eux comme pour les petits vive la TV les parents sont soulagés leurs petits et leurs ainés auront l'esprit occupé et ne réagiront même plus aux éventuels bassesses de leur entourage immédiat,et là je parle bien entendu de gens encore à leur Domicile et non en institution,la jalousie ne connait aucun palier tout le monde peut en faire les frais un jour ou l'autre,mais être jaloux de ce que l'autre ne possède pas y'a vraiment comme un malaise dans ce bas monde!
toute bonne soirée à vous et plein succés vous est souhaité!
http://www.parlons-feminisme.fr/reponses/autre-cas-violence-feminine-florensac-herault-message-36784451.html
"Jean-Marie Petitclerc: : Cette violence est en effet très préoccupante, et les adolescents, qui peuvent aujourd'hui s'entretuer pour des raisons futiles, en sont les premières victimes. Le psychanalyste Tony Anatrella qui s'est interrogé sur les causes de ce phénomène, a écrit : "Une société sans père est une société sana repère". D'après lui, la montée de la violence à laquelle nous assistons aujourd'hui n'est pas seulement due aux phénomènes d'exclusion, mais elle est aussi une conséquence de l'effacement du rôle des pères.
La violence n'est pas un phénomène nouveau. Comme le dit André Comte-Sponville, l'agressivité est naturelle chez l'être humain. Par contre, la convivialité et la paix sont le fruit de l'éducation. Ce qui est nouveau aujourd'hui, c'est l'absence de crédibilité des adultes pour réguler cette violence et, chez les jeunes, l'absence de repères et de limites. A Argenteuil, un gamin de 1' ans a mortellement blessé avec un couteau un autre de 16 ans pour un blouson prêté et rendu sali. Je ne partage pas l'avis de certains psychiatres évoquant des désordres graves de la personnalité. Ce sont, en fait des enfants comme les autres. Ces enfants souffrent d'un déficit d'éducation : ils n'ont pas appris à supporter la frustration."
http://www.uniondesfamilles.org/absence_du_pere.htm
"Vu l’ampleur prise par ce conflit le maire de Florensac avait contacté les deux mamans pour tenter une médiation."
c'est plus qu'une médiation qu'il aurait fallu c'est restaurer une véritable autorité paternelle dans ces deux familles appelée pudiquement monoparentales.
ce ne sonts en réalité pas des familles mais des dyades mére enfant pas autre chose.
http://gisme.free.fr/docs/text/PARENTALITE.pdf
"Les différentes instances d'encadrement social de l'enfant
détournent ainsi du père une partie importante des tâches qui traditionnellement
reposaient sur lui.
Les tendances actuelles semblent ainsi s'orienter vers la dépossession du père de
toute une partie de son pouvoir traditionnel, et au clivage de la notion de
paternité."
Bonjour hommelibre,
Vous mettez le doigt sur un point crucial de l'affaire sans pour autant le développer: l'absence de père.
Vous ne parlez absolument pas du role de la mère dans cette affaire. Or on apprend sur Orange.fr que d'après elle, il était partie pour protéger sa fille. On arrive dans ce que vous décrivez avec brio: la logique de clan, base de toute société matriarcale. Quelle a été le role de la mère dans la montée de ce qui a culmunée avec un meurtre? Que lui a t-elle dit?
C'est une piste à explorer meme si les gens tiennent au bouc emissaire girardien dans l'inconscient collectif. Cette femme n'est peut etre pas si étrangère que ca à cette explosion de violence (je viens de commettre un crime de lèse majesté).
En espérant lire une version amélioré de votre article sur AV tenant compte de tout ca. Au fait qu'en est-il de votre série sur le séxisme. A t-elle passé la modération?
@ SSBC:
Bonjour,je n'avais pas cette information sur la mère. Je voulais dans ce billet laisser chacun penser ce qui lui semble opportun, sans tirer vers un constat qui risque d'être plus théorique qu'adapté précisément à cette situation.
L'absence d'un père a pu en effet laisser au frère une place que rien de contrebalance. Je serais volontiers parti sur cette piste si j'en avais une certitude précisément pour cette famille. Je vais creuser les infos les plus récentes pour compléter le billet si cela se peut.
Pour AV, en effet je pourrai placer une version plus pointue, dès que j'ai des infos dans ce sens. Ma série sur le sexisme n'a visiblement pas passé la modération. Dommage. Mais AV est assez spécial comme support. En plus du taux d'insultes étonnamment haut, plus les préjugés en cascades, plus les calomnies de certains que la rédaction n'enlève que sur demande expresse (rédaction qui ne fait pas respecter sa propre charte), les choix éditoriaux sont trop dépendants des modérateurs.
Je pense arrêter AV prochainement.