Faut-il qu’elle ait le cuir épais pour supporter les missiles de campagne. Faut-il qu’elle ait un gosier bien large pour avaler autant de couleuvres! Le dernier missile contre elle est tiré par l’écrivain et journaliste Patrick Besson. Sur une page dans le magazine Le Point, il raille l’accent de la candidate des Verts.
L’accent venu d’ailleurs
«Salut la Vranze ! Aujourd'hui est un krand chour : fous m'afez élue brézidente te la République vranzaize!»
Et ainsi sur une pleine page. Aussitôt les cadors Verts montent au créneau et clament bien fort toute leur détestation de la xénophobie subie par leur pouliche à lunettes. Etrangement, dans les mêmes jours, le petit Napoléon nationaliste et socialiste Arnaud Montebourg pourfend l’ennemi allemand de toujours et dénonce «Une politique à la Bismark», «Une politique d’expansion» et «Un ordre allemand», rappelant les haines franco-allemandes que toute l’histoire récente tente de guérir grâce entre autre à la construction européenne.
Les Verts ne se sont guère émus de la sortie du Napoléon rose. Il peut rappeler le passé nazi de l’Allemagne et même en tirer un parallèle avec l’actualité sans que Mamère, Duflot et compagnie ne s’offusquent de ces propos. Pour certains la politique est décidément l’art du double langage.
Mais revenons à l’accent d’Eva Joly. La collision avec les propos de Montebourg font prendre à cette caricature écrite par Patrick Besson une connotation particulière. L’attaque personnelle ne devrait pas être utilisée mais elle est inévitable. Tout le monde en fait usage. La critique de mollesse par Aubry à l’encontre de Hollande en était un exemple. Il y en a d’autres. Est-ce, dans le cas de madame Joly, un rejet de l’origine étrangère, et une manière de dire que son origine ne lui permet pas de gouverner la France? Possible. Eva Joly est particulièrement attendue sur ce terrain depuis qu’elle a critiqué le défilé du 14 juillet l’été dernier.
Eva Joly est française, et norvégienne. Il n’y a aucun doute sur ce point. Elle a donc toute légitimité pour briguer la présidence française. Il serait totalement déplacé d’affirmer le contraire.
Mais cette affaire montre autre chose. Les Verts ont peut-être sous-estimé l’impact d’un accent dans une campagne de ce niveau. Les français veulent être gouvernés par une personnalité qui les représente tous, donc sans accent. La Suisse a depuis longtemps dépassé cette question, pas la France. Imaginons qu’un candidat se présente en parlant «Yo»: il n’aurait aucune chance. Ou même un accent prononcé alsacien ou cht’i: cela ne passerait pas.
L’accent d’Eva Joly fait remonter des souvenirs peu agréables à certains. Il est de plus difficile à écouter longtemps: certaines sonorités en sont absentes et les sons cassants, heurtant l’oreille, dominent. Mais cela ne justifie aucune exclusion. Il est peut-être regrettable qu’étant en France depuis l’âge de 20 ans elle n’ait pas amélioré son parler. Pour une carrière politique cela lui aurait facilité les choses. Mais de grâce, respectons la candidate pour son programme avant de l’attaquer sur sa personne.
La prison verte
On a assisté aussi, il y a quelques jours, à un recadrage complet du parti. Tous les cadors font maintenant partie d’un comité de campagne pléthorique. Est-ce réellement un soutien pour donner l’image de l’unité retrouvée? Ou est-ce une mise sous tutelle de la candidate, un peu trop «perso»? Elle est pour le moins sous surveillance. Il y a maintenant 3 porte-paroles: plus aucune position non orthodoxe ne devrait sortir de là. Même l’ancien, qui avait démissionné, est de retour.
Elle ne parle plus de l’accord avec le PS ni de la position de François Hollande, qui pourtant vient encore de dire que sil est élu il n’appliquera de cet accord que ce qu’il voudra bien appliquer. Avale, Eva, avale, c’est de la couleuvre.
L’image donnée d’Eva Joly est assez terrible selon le prisme avec lequel on la regarde. La vidéo ci-dessous montre tous les cadors verts derrière elle. Le symbole est donc: «Nous sommes derrière toi, Eva». C’est, on peut le supposer, l’intention consciente donnée à cette muraille de Verts. Mais Eva n’est pas une enfant: quelques-uns auraient sans doute suffi à faire le compte. Et de préférence à côté d’elle plutôt que derrière. Car être derrière, à une certaine distance, c’est surveiller. Et soudain l’image montre autre chose: elle est enfermée. Il n’y a pas un seul couloir de dégagement, aucune sortie de la scène - sauf si les autres le veulent bien.
C’est la prison verte!
Terrible, la symbolique de l’image... Que de méfiance et de suspicion à l’égard d’une candidate trop indépendante, derrière les sourires de circonstance.
Commentaires
Eva Joly fait moins de fautes de français que Sarkozy. Qui l’a remarqué ?
Elle a un accent, et alors ? Bayrou aussi a un accent, personne ne le lui reproche.
Quant à Montebourg, il a repris les arguments des socialistes allemands qui reprochent depuis longtemps à Merkel son côté Bismarck.