C’est ce que suggèrent nombre d’observateurs face à la situation d’enlisement de la France, dont le dossier dans la Tribune de Genève d'hier. C’est aussi ce que propose le Front de Gauche et son animateur Jean-Luc Mélenchon. Diverses pistes sont reprises ces jours dans la presse, effet des sondages catastrophiques et de la mise à charge sur le président de l’impuissance gouvernementale.
Un président des chrysanthèmes?
Déclarer être un président normal dans une fonction qui ne l’est pas est un effet de rhétorique, pas une réalité. Il faut une ambition démesurée pour briguer cette place. En France en particulier, où le président est doté de pouvoirs que ne contrebalancent pas le gouvernement ni les assemblées. Le président ne rend de comptes à personne jusqu’aux élections suivantes. Il est intouchable pénalement et politiquement.
Un premier objectif d’une VIe République serait de rééquilibrer les pouvoirs. Le président ne serait plus le porteur d’un projet gouvernemental mais un arbitre. Arbitre de quoi? Les mauvaises langues diront: arbitre des chrysanthèmes, qu’il arrosera une fois l’an lors de la fête de l’armistice. Car s’il n’est plus porteur d’un projet il deviendra comme en Italie: il nommera le premier ministre selon le résultat des élections législatives, et représentera le pays lors de voyages officiels où il soutiendra la politique décidée par le gouvernement, qu’il soit ou non du même parti que ledit gouvernement.
Certes la fonction sera moins attractive. Le poids de la responsabilité politique et la gloire des projecteurs se porteront sur le Premier ministre, véritable 1er personnage de l’Etat dans les faits. Cette moindre personnalisation rendra une partie de son pouvoir au parlement, qui pourrait être composé de partis dont aucun n’obtient la majorité absolue. Les alliances feront la loi. Pour renforcer le parlement un professeur d’Histoire contemporaine, Jean Garrigues , suggère: «On peut notamment envisager que les conditions de la motion de censure soient modifiées, et que celle-ci soit adoptée à la majorité relative et non plus à la majorité absolue».
Mais en France les alliances ont mauvaise presse. Même en cas d’alliance - c’est le cas aujourd’hui entre le PS et les Verts - un parti domine et décide pendant que l’autre remplit son CV de la mention de quelques ministères, profitant de cette aura pour gagner en visibilité et en audience.
Vers une révolution culturelle
Mais admettons que le président perde ses prérogatives et que le parlement voie les siennes renforcées. Comment garantir que ce système permette la durée et la stabilité d’une action politique? La Ve République proposée par Charles De Gaulle et acceptée par référendum avait en particulier pour but de renforcer l’autorité de l’Etat et de permettre une action dans la durée par des gouvernements disposant d’une vraie majorité politique pendant plusieurs années.
L’idée de réintroduire la proportionnelle à un tour, parfois évoquée en France, produirait des résultats morcelés. Ce qui marche dans nombre de démocraties habituées à la négociation et au consensus pourrait vite devenir une cause de désordre et de nouveau blocage politique en France, qui pratique le clivage comme une religion: on est d’un bord ou de l’autre et basta. Faute d’une majorité parlementaire les gouvernements finiraient par accompagner le président dans l’arrosage des chrysanthèmes.
Un système négocié n’a pas de base culturelle en France, pays du tout ou rien. Créer une telle base est un long processus. Peut-être l’alternance actuelle des majorités et leur impuissance successive conduira-t-elle à considérer que le mode de penser la politique en France est lui-même la cause de cette impuissance. Peut-être qu’à force de patiner sur un miroir les citoyens finiront-ils par s’y regarder au lieu de stigmatiser les autres, et par comprendre qu’ils doivent faire une sorte de révolution culturelle - comme par exemple en finir avec la haine de l’argent afin de donner envie à tous d’en produire sans culpabilité. L’idéologie égalitaire en prendrait un coup. Mais peut-être faut-il aussi repenser ce qu’est l’égalité, car en tant que dogme elle impose des contraintes et en fait envisager d’autres.
Un parlement «ethnicisé»?
Par exemple les partisans d’une VIe République souhaitent que le parlement soit représentatif du pays dans sa diversité. Ils souhaitent imposer la parité et une représentation de la mixité sociale. Dans Le Monde d’hier, un conseiller d’orientation des Verts, Bastien François, écrivait ceci:
«Le Parlement, qui s'est transformé en club de vieux mâles blancs bourgeois et sexagénaires cumulant les mandats, ne ressemble pas aux Français et aux Françaises.»
Cette vision ethnique confine au racisme auquel malheureusement une partie de la gauche française nous a habitué et en fait impunément usage. Le mâle blanc est l’ennemi à abattre. Peu importe de stigmatiser ainsi une catégorie et de la désigner à la vindicte voire au lynchage intellectuel. Dans cet état d’esprit toutes les dérives langagières sont possibles. Ainsi, paraphrasant Bastien François, faut-il élire au Parlement une majorité de jeunes femelles mates et vingtenaires, disant «yo putain chier de connard» à chaque phrase?
Le parlement doit-il être préconditionné par une loi? La parité elle-même n’est-elle pas une contrainte qui empêche les citoyens de voter pour soit une majorité d’hommes, soit une majorité de femme, selon leur libre volonté garantie par la démocratie? Le fait d’être femme ou homme est-il automatiquement garant de compétences et d’honnêteté? Faut-il un Parlement prédécoupé en tranches: tant de blancs, tant de blacks, tant de beurs, tant de lesbiennes, tant d’hétéros, tant de pères séparés de leurs enfants, tant d’éboueurs, tant de trentenaires, tant de pilotes de ligne, etc, etc?
Découper ainsi le parlement est un déni de démocratie. Cela laisse entendre que les élus ne travaillent pas pour l’ensemble mais uniquement pour leur propre communauté. L’esprit de la démocratie est que les élus portent un projet plus large qu’eux. Le communautarisme dans le Parlement conduirait à de nouvelles alliances au-delà des appartenances partisanes. Imaginons aussi les luttes d’influences avant les élections, pour être tête de liste dans une catégorie! Enfin le citoyen verrait sa liberté de choix et de vote restreinte par ces conditions catégorielles, comme il le serait par la parité.
Le travail ne manque pas
Quoi qu’il en soit, un éventuel changement constitutionnel en France n’est pas l’urgence. Le pays a de nombreux chantiers auxquels une majorité parlementaire formée sur des alliances ne saurait faire face avec la fermeté et ce malgré le risque d’impopularité inhérent à la fermeté. Paradoxalement le système actuel est encore le seul qui permette de réformer la France de manière quelque peu autoritaire mais efficace, avant l’irruption d’un despote éclairé ou non, ou d’une liquéfaction générale du pays. Quitte à modifier ensuite l’équilibre des pouvoir.
Parmi les réformes à envisager:
- alléger la bureaucratie et faciliter la vie aux PME en particulier,
- lancer de grandes industries novatrices,
- simplifier l'administration,
- alléger d'au moins une couche la représentation électorale (canton? Département?),
- alléger le code du travail,
- remodeler la Ve République pour un rééquilibrage ultérieur des pouvoirs,
- casser les corporatismes au nom même de l'égalité républicaine,
- refondre la fiscalité de manière plus égalitaire pour qu'elle rapporte ce qu'elle doit rapporter sans l'augmenter,
- faire un vrai travail d'intégration de l'immigration, dont l'exigence d'une bonne connaissance de la langue,
- donner aux citoyens l’envie de porter le pays en avant.
Cette liste des grands chantiers n’est pas exhaustive. Il y a du travail. Pour cela il ne faut pas des bisounours qui prétendent être «humains». Il faut des décideurs qui vont au feu et tranchent, le temps de remettre le pays sur les rails. Après il sera temps à nouveau de chanter «Douce France», version moderne (en haut du blog, colone de droite).
Commentaires
Il peut y avoir un despote, un grand capitaine éclairé ou non, prendre des mesures avec poigne, sans aucun humanisme bisounours, pour trancher des situations etc . etc. Il n'y aura aucune embellie, tant qu'une certaine logique de chiffre ne soit pas considérée.
Je reviens par là sur cet article 123 du traité de Lisbonne, qui oblige les états membres de l'Europe à emprunter aux banques commerciales à des taux d'intérêts de 7 à 10%. Depuis que ce système est en place, les dettes suivent une courbe qui monte en flèche. Un enfant aurait déjà anticipé le principe depuis longtemps.
Il y aurait-il des raisons qui échappent aux simples quidams, des paramètres trop complexes pour la compréhension du public ?
Non ! Comme disait un expert en économie, les hommes politiques sont tout simplement archi nuls dans cette discipline, dans leur grande majorité.
En 2011, la question de cet article 123 posée à un futur candidat à la présidentielle dont la destinée est connue de tous, semble emprunté au possible. Il tergiverse, enfonce des portes ouvertes, tente de trouver un fil ou se raccrocher. Pour masquer son manque de connaissance du dossier, son manque de positionnement.
Comme le dit le commentaire;" S'il est honnête c'est grave, s'il roule pour d'autres, cela restaure son QI" Dans les deux cas c'est inacceptable.
http://www.youtube.com/watch?v=jxqbtkheYTA
Aoki, d'accord sur la question de la dette et du rôle de la banque centrale. Pourquoi donc s'être interdit de lui donner le rôle de prêteur? Je ne comprends pas le motif. Est-ce pour faire grossir les banques qui ensuite remettent l'argent en circulation par les petits et gros crédits (ce qui est plus leur rôle que celui de l'Etat)? Mais le déséquilibre consécutif est bien trop important pour justifier encore ce système, semble-t-il. C'est bien un des noeuds actuels.
Pourtant la philosophie libérale peut s'accommoder de cette puissance accordée à la BCE, dans la mesure où cela peut créer un équilibre politique autant qu'économique.
Sur le pourquoi ?
Peut être que le fait d'accuser Pompidou avec sa loi de 1973, d'une complicité réelle avec le monde de la finance, monde auquel il appartenait, n'est pas si naïf !
Juste avant l'application de la loi, il annonçait un grand emprunt;... A ce moment précis ... ! Ce qui allait lier, la France à la banque Rothschild pour des années, par des intérêts importants. Le motif implicite de cette nouvelle modalité était la lutte contre l'inflation.
Le fait est que quelques années après, le pays rencontrait les difficultés qui se sont amplifiés jusqu'à maintenant.
Le vrai mécanisme est que cela donne les clés des états au monde financier, qui ne lâchera plus son os.
Il a été le précurseur, ensuite, le conformisme du monde politique qui n'a jamais empoigné le problème, par manque de vision ou de connaissances du sujet tout simplement, a permis que cette ineptie s'ancre dans les moeurs. (conf, la vidéo plus haut).
En 2010, la crise des subprimes étalent encore ses méfaits, bien des sites dénoncent déjà le problème plus cuisant encore de l'argent virtuel, du coût létal des intérêts et l'endettement qu'il suscite auprès des nations. Des personnalités plus en vue prennent la parole.
La classe politique ignore tout cela avec dédain, l'anathème du "délire conspirationniste" suffit aux médias pour faire de même. L'auto-hypnose absolue !
Donc en 2010, la tête dans le sac, dans une vision à court terme, et avec l'assentiment de tous, Sarkozy lance un nouveau grand emprunt qui a pour nom "investissements d'avenir".
Juste après, la crise de la dette fait enfin son entrée dans les médias et 3 ans après qu'est devenu cet avenir ?
Aujourd'hui la dénonciation de ce système passe automatiquement par une dénonciation du traité de Lisbonne et donc la structure de l'Europe actuelle. Tel est le piège dont il faut se dépêtrer. Il faut aussi souligner qu'à ma connaissance c'est surtout l'Allemagne qui s'oppose à invalider cet article. Je n'en connais pas les raisons.
Dans le thème général du billet
Dupont-Aignan qui essaie de sortir de isolement médiatique qu'il subit, offre une paire de lunette à Hollande pour l'anniversaire de son élection.
C'est ce que rapporte le Point qui à cette occasion met en ligne un interview de NDA dans laquelle il déclare à la fin: "Il faut un traitement de choc", "Nous sommes à la veille d'une révolution politique, Il faut la réussir pour qu'elle soit paisible" !
http://www.lepoint.fr/politique/dupont-aignan-offre-symboliquement-des-lunettes-a-hollande-06-05-2013-1663910_20.php