Trop content d’avoir trouvé un bouc émissaire à la frustration des français, Valls pérore comme un coq sur la supposée victoire de la République contre Dieudonné. Or cette victoire est en réalité une défaite grave, à plusieurs titres.
1. L’antisémitisme serait jugulé grâce à la décision du Conseil d’Etat, dont la surprenante rapidité laisse penser qu’il est à la botte du pouvoir. Au fait: s’il y a réellement une recrudescence du racisme, c’est que beaucoup de gens, des jeunes en particulier, ne comprennent pas ce que cela signifie. La répression ne pourra pas combler le manque de pédagogie. Cette supposée recrudescence pose en premier lieu l’échec ou le manque de volonté des pouvoirs publics de clarifier une question présentée comme si essentielle. La peur de la différence y ajoute une couche, et l’on ne peut aborder librement des thèmes comme l’origine ethnique de la délinquance: c'est le même mouvement de peur et de limitation incompréhensible de la liberté.
2. Actuellement tous les groupes humains se définissent par leur appartenance non à la République, mais à leur communauté. Le communautarisme mine la France et l’Europe. En criant à l’antisémitisme à la moindre blague acide, les juifs confirment leur communautarisme exacerbé. Celui-ci leur a sans doute permis de survivre à deux mille ans de persécutions, il leur a donné la foi en un avenir respectant leur identité - ce qui est légitime, chacun se prévalant aujourd’hui fièrement de ses origines. La société se morcèle et chacun défend son territoire. En effet, Juifs, musulmans, gays, lesbiennes, femmes, affirment haut et fort leur communautarisme. Comment dès lors s’étonner que le discours général mentionne ces appartenances revendiquées qui envahissent jusqu'à saturation l'espace intellectuel et émotionnel?
3. Il suffit de lire des sites de blogs comme Agoravox ou Mediapart pour réaliser à quel point les militants de gauche tapent sur Israël à longueur d’année, de manière souvent très violente. L’antisionisme de gauche, ajouté au ras-le-bol de la victimisation des juifs qu’expriment nombre de français, voire aux injures politiques, comparant Israël à un Etat nazi qu’il faut éliminer, prépare très efficacement le terrain à l’antisémitisme et porte une lourde responsabilité dans le délitement actuel du débat en France.
4. Le débat, parlons-en. On peut bien parler des absents. La France ne débat pas, elle impose, contraint, assène, balance, pourvu que chacun ait pu dire sa petite phrase. Je m’étonne que l’on parle encore d’esprit français tant ce concept est aujourd’hui totalement vidé de tout sens. Le débat se limite au clivage habituel et à une prise de parole autoritaire. L’arrogance remplace l’argument, la violence fait jouir ceux qui crient le plus fort. La France est devenue un désert intellectuel vivant sur un passé usé. Son modèle est surévalué, sauf à vouloir signaler la déliquescence d’une période marquée par la fin des idées. Des idées que les réformettes destinées à détruire un peu plus les racines de la société, comme le mariage gay, ne remplacent pas. Une fin même des compétences intellectuelles à cause d’une immigration qui parle et connaît le français et sa culture comme un alien à peine débarqué. «Oh yo, putain con, quoi, tu vois, nique ta mère!»: la langue est détruite par l’absence d’exigences de l’Etat, qui s’aplatit devant ces fausses victimes de la colonisation.
5. La volonté d’imposer une religion laïque, de promouvoir l’indifférenciation des sexes, d’user du mot mariage hors de son sens originel, la destruction de la masculinité et de la paternité, le culte de la victime, le fait d’éviter les débats qui fâchent, le désir d’arabiser le pays - un des commissaires du rapport sur la France arabe demande que l’on fasse taire les clochers au nom de la laïcité - font sauter les bases sur lesquelles les gens ont posé leurs références depuis des siècles. Quand des repères sociétaux majeurs sautent, d’autres tombent en même temps par effet viral.
6. La violence de la stigmatisation des opposants à la politique menée (là où il y en a une) et la division du pays par le pouvoir actuel ne peuvent que banaliser un langage violent et excluant. La gauche continue sur la lancée de Sarkozy. L’esprit de contrainte, de mise en coupe idéologique de la France à défaut de réaliser les vraies réformes, ne peut qu’engendrer une violence en retour. Je rappelle ici cette image qui a circulé pendant le débat sur le mariage pour tous (image 3): «Mieux vaut une paire de mères qu’un père de merde». C'est cela, aujourd'hui, la culture et l'intelligence françaises. La violence extrême de ce slogan est impardonnable. Jamais on n’avait osé aller aussi loin dans le mépris et la négation de l’autre, du différent, depuis les années 1930. Le fascisme rose et LGBT sont des cancers. Jamais aucune excuse ne fera disparaître la violence de l’agression contre les pères et hommes hétérosexuels. La seule chose à répondre: «Mieux vaut un père, même de merde, que la confusion de mères-pères qui se font des bébés comme on achète un jouet: pour leur confort personnel et leur image de normalité, pour posséder un enfant-marchandise, une peluche vivante».
7. La décision du Conseil d’Etat de confirmer l’interdiction de Dieudonné est un pas de plus dans l’autoritarisme et la réduction du champ des libertés publiques. Mieux vaut un débat, même difficile, qu’une interdiction sans aucune valeur pédagogique. Surtout qu'ici on est dans le deuxième degré. Il n'y a pas de diffamation, pas d'appel à nuire à une population. L’Etat décide donc de ce qui doit être pensé et dit, au nom d’un concept ahurissant: la dignité de la personne. Dorénavant toute personne ou groupe s’estimant atteint dans sa dignité pourra demander la mise à l’index. La liberté a foutu le camp hier, un peu plus encore. Dorénavant on peut interdire La dernière tentation du Christ, Nymphomania, Emmanuelle, les oeuvres de Sade et de Henri Miller, celles de Marx contre la religion, les blagues sur les blondes et les belges, et quelques milliers d’ouvrages divers. Dorénavant on pourra interdire un meeting critiquant l’islam ou le christianisme. On pourra brûler les films ou écrits qui ne plairont pas aux féministes sous prétexte d’atteinte à leur dignité (Agoravox, où je poste certains de mes billets, a déjà commencé cette censure en faisant barrage à mes billets qui critiquent le féminisme).
Le résultat est un peu plus d’oppression, venant d’une mouvance politique qui en 1968 est descendue dans la rue pour défendre la liberté d’expression! On n’ose pas y croire. Mais c’est fini. Cette mouvance n’a plus ni idées ni légitimité intellectuelle. Cette gauche ressasse la victimisation des classes, cherche à accuser (patrons, cathos, mâles, etc) plutôt qu’à trouver des solutions. Elle n’ose pas parler vrai: il y aura de moins en moins de travail et il faut réorganiser la société. C’est la raison des 35 heures de Martine Aubry, et la raison également de ce que plus de la moitié des actifs en France vivent sur l’Etat, donc ne produisent pas directement de richesse eux-mêmes. Problème: sans le travail et la lutte des classes la gauche n’a plus de raison d’être. Dans un monde où les gens doivent se prendre en main elle n’a plus d’écho. Elle ne fonctionne qu’avec des victimes zombisées. La gauche n’a donc plus rien. A part cracher sur les cathos et apprendre aux enfants du primaire qu’ils ne sont ni filles ni garçons et qu’ils peuvent indifféremment choisir d’être hétéros ou homos. La société française est clairement en guerre contre elle-même. Il faut l’assumer et mener une nouvelle guerre de libération, qui passera par une révolution culturelle et la poubellisation des théories en vigueur depuis 40 ans et de ceux qui les défendent. De l'air!
Cette société en cours de reformatage est un modèle de mort et de non-reproduction. Comment ne pas y réagir avec toute la force nécessaire pour arrêter la marche vers l’abîme et pour se réveiller de ce cauchemar? Faudra-t-il que le pouvoir en vienne à brûler les livres, comme dans Farenheit 451, pour que le peuple se réveille contre ses nouveaux oppresseurs? Ou faut-il multiplier les quenelles, comme celle de l'équipe de Pékin express (image 1)?
Liberté!
Commentaires
"l’absence d’exigences de l’Etat, qui s’aplatit devant ces fausses victimes de la colonisation."
et ces fausses victimes peuvent se permettre de pousser une ado au suicide à force de la harceler en toute inpunité. voir le suicide de Marion.
pousser une Ado au suicide est moins grave que ça "deux lycéens ont été mis en garde à vue pour une quenelle"
cette gauche est vraiment tombée sur la tête !!!
"
Le résultat est un peu plus d’oppression, venant d’une mouvance politique qui en 1968 est descendue dans la rue pour défendre la liberté d’expression! "
c'est vrai c'est assez fou, il est vrai que la gauche mange dans la main des féministes quand on sait comment elles fonctionnent il n'y a rien d'étonnant à ce quyi se passe actuellement.
Belle analyse, John. Merci de nous la faire partager.
Je pense, Michel, qu'il y a une profonde trahison de la gauche, la gauche libertaire de 68 à laquelle on pouvait apporter un soutien intellectuel même en étant libéral - parce que c'était le vrai libéralisme philosophique, celle qui faisait rêver d'un monde ouvert et plus libre.
Il faudrait analyser plus en détail les 40 dernières années pour tenter de comprendre comment on en est arrivés là.
Avant-hier, on ne pouvait pas discuter du mariage pour tous sans être homophobe. Hier encore, on ne pouvait pas discuter de la prostitution sans être un violeur esclavagiste. Aujourd'hui, maintenant on ne peut pas discuter de la liberté d'expression sans être un antisémite. Cela commence à bien faire tout ce terrorisme intellectuel d'état.
Je n'ai pas votre culture politique mais est-ce cela la gauche ? une secte où il est interdit de penser ? ou n'est-ce pas plutôt l’ère du temps, la crise ou je ne sais quoi qui fait que les gens deviennent fous.
Un film qui m'avait marqué, à l'époque, était "Gangs of New-York". On y vient doucement et on sait comment il a fallu que cela finisse pour que les esprits se calment.
En France, tandis que les taux de braquages et de cambriolages explosent, on a don Quichotte au ministère de l'intérieur qui part en guerre contre un comique.
En France, tandis que le chômage et la dette font des ravages, on a un clown, pour le coup, qui comme président trouve encore le temps de batifoler avec sa nouvelle maîtresse. On comprend mieux pourquoi le quartier de l'Elysée est interdit de circulation le soir...
Non mais "Allo quoi" ! Finalement, dans ce pays la seule personne qui a raison c'est Nabilla et nous sommes la risée du monde entier.
Je crois que vous n'avez pas tout à fait raison quant à la censure de la parole sur tout les sujets. Car ce que je vois, c'est qu'elle n'est, au final, interdite que pour les sujets qui touchent une certaine communauté. Deux exemples vous démontreront le contraire:
1) Pour l'islam, quand Houellebecq l'a qualifié de "religion la plus con", ou dans l'affaire des caricatures de Mahomet, la liberté d'expression a tout de même été préservée, et c'est très bien.
2) Dans un cas plus proche, la loi de pénalisation de la négation du Génocide arménien, le Conseil constitutionnel a retoqué la loi au motif de préserver la liberté d'expression. On aurait pu se réjouir de cette décision , si ce même Conseil n'en avait pas profité pour réaffirmer l'intangibilité de la loi Gayssot qui punit la négation de la Shoah, en montant pour cela un argumentaire juridique fumeux, qui à ce titre échappe au sens commun. Premier malaise: toutes les victimes ne sont pas égales devant la loi.
Finalement, cette décision du Conseil d'Etat ne peut que renforcer le sentiment qu'il y a une certaine communauté qu'on ne peut en aucun cas toucher, sur laquelle on ne peut plaisanter (à moins d'en faire partie), et va certainement alimenter encore la haine et le ressentiment dont cette même communauté ne cesse justement de dénoncer l'augmentation ces dernières années.
suite
"et ces fausses victimes peuvent se permettre de pousser une ado au suicide à force de la harceler en toute inpunité. voir le suicide de Marion."
http://penserrendlibre.wordpress.com/2012/03/21/une-jeune-francaise-de-14-ans-massacree-par-une-racaille-immigree-dans-lindifference-generale/
voilà la suite
http://www.defrancisation.com/un-stage-pedagogique-sera-propose-aux-auteurs-dactes-antisemites/
on rééduque comme les communistes !!!
"Trop content d’avoir trouvé un bouc émissaire à la frustration des français, Valls pérore comme un coq sur la supposée victoire de la République contre Dieudonné. Or cette victoire est en réalité une défaite grave, à plusieurs titres."
C'est drôle comme chacun perçoit les choses différemment.
Voyez-vous, j'ai trouvé que Valls faisait plutôt dans la sobriété et que sa détermination sans faille tranchait avec la politique de négation de l'antisémitisme importé, voulue, pour des raisons évidentes, par le pouvoir, depuis Jospin et qui vaut à la France ses infâmants "Territoires perdus de la République".
Cela dit, libre à vous de faire un procès d’intention à Valls et donc de lui préférer un individu bouffi de haine, repris de justice multirécidiviste et assassin par procuration, au nom de la saine liberté d'expression, cela va de soi. Vous tenez peut-être votre nouveau Dreyfus là, non ?
"Au fait: s’il y a réellement une recrudescence du racisme, c’est que beaucoup de gens, des jeunes en particulier, ne comprennent pas ce que cela signifie. La répression ne pourra pas combler le manque de pédagogie."
Si je vous rejoins sur ce terrain là, c'est simplement le timing qui fait la différence entre nous deux, vous avez plus de 15 ans de retard voire d'autisme en la matière à votre actif.
Ce n'est pas faute de diagnostic très officiel, posé en temps réel, par le Rapport Obin en 2004 déjà mais immédiatement et très méticuleusement enterré par le pouvoir.
Cruel et sans appel, il identifiait parfaitement l'origine du mal qui ne cesse depuis de ronger la France, en particulier.
http://www.lamaisondesenseignants.com/index.php?action=afficher&rub=5&id=1545
Pire encore et toujours en 2004, le Rapport Ruffin, il identifie même les criminels, il appelle un chat un chat. Aux oubliettes !
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/044000500/0000.pdf
Pédagogie dites-vous ?
Bon bon eh bien allez donc dispenser votre bonne parole et appliquer le programme officiel de l'académie dans les pépinières Françaises à sauvageons. Certaines malheureuses et malheureux s'y sont risqués. A défaut de support de la part de leur hiérarchie ils ont jeté l'éponge et la mauvaise herbe prolifère depuis.
http://www.lexpress.fr/informations/des-profs-face-a-l-islamisme_649295.html
Où étaient les honnêtes commerçants en morale d’aujourd’hui pendant que ces enfants se faisaient quotidiennement martyriser ?
C'est, je crois, Madame Taubira qui ne voulait pas introduire de volet sur la traite esclavagiste arabe, ni interafricaine dans sa loi visant uniquement la traite dite occidentale. Disons que, partie d'un bon sentiment, elle s'en était justifiée en disant qu'il ne faut pas trop évoquer la traite négrière arabo-musulmane pour que les "jeunes Arabes" "ne portent pas sur leur dos tout le poids de l'héritage des méfaits des Arabes".»
Pédagogie disiez-vous ? Bel exemple, il vient de haut.
Aujourd'hui, rouges-bruns-verts ayant très officiellement opéré leur jonction sur la base d'une idéologie scélérate commune constituent, avec les idiots utiles de la liberté d'expression, le vivier d'un escroc devenu fou. Attendons la 25 ème heure, comme d'hab, tout ces braves gens finiront par se tondre entre eux.
"Voyez-vous, j'ai trouvé que Valls faisait plutôt dans la sobriété ..."
Finalement Jonas se révèle être aussi un bouffon. De ce fait il devrait plutôt exprimer sa solidarité avec son collègue français.
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/044000500/0000.pdf
ce texte est un torchon bobo déconnecté de la réalité.
une analyse plus lucide.
Violences dans les banlieues : regarder la réalité en face
http://www.communautarisme.net/Violences-dans-les-banlieues-regarder-la-realite-en-face_a646.html
par Jean-Pierre Le Goff, sociologue, président du club Politique autrement
La mort de deux jeunes à Clichy-sous-Bois a servi de déclencheur à des violences et des actes de vandalisme de bandes de jeunes dans les banlieues. Les formules, provocatrices et indignes d’un homme d’État, du ministre de l’intérieur accompagné d’une cohorte de journalistes et de caméras, avaient auparavant contribué a exacerber la tension. Ces violences dans les cités révèlent une réalité dont il faut prendre la mesure en évitant l’angélisme et les faux-fuyants.
Jean-Pierre Le Goff (photo d'Olivier Roller, 2002) Quelle solidarité première ?
La vie dans les banlieues ne se confond pas avec les images de ces nuits de violence et de destruction. Des réseaux d’entraide et de solidarité entre habitants se sont mis en place dans des conditions souvent difficiles. La grande majorité désire plus de sécurité, plus d’emploi, de meilleures conditions de vie et d’habitat. C’est sur ce terreau-là qu’une dynamique positive peut se développer et non sur les bandes de jeunes adolescents et post-adolescents qui ont basculé dans la délinquance et la destruction.
Attaquer les pompiers, brûler la voiture de son voisin, ou tuer ce dernier comme par inadvertance, - « sans le faire exprès » diront certains -, incendier des magasins, des écoles, des gymnases du quartier où l’on habite, arrêter des bus pour y déverser de l’essence et y mettre le feu devant des passagers affolés... Face à de tels actes sauvages, la condamnation claire et la nécessité urgente d’un retour à l’ordre ne se discutent pas. C’est le préalable à tout débat sensé sur la question.
Mais, là aussi, on a pu assister à des réactions minoritaires, au sein du milieu journalistique et gauchiste, qui rompent avec la morale et le civisme élémentaires. Le mouvement spontané de sympathie ne se tourne pas vers les victimes des violences qui sont, non seulement les pompiers et les policiers, mais les habitants de ces quartiers qui craignent pour leur sécurité et leurs biens, se voient privés de moyens de transport, de commerces, d’écoles... On ne prend guère en considération la crainte des autres jeunes des quartiers qui ne veulent pas être confondus avec les bandes, continuent de croire à l’école et au travail pour « s’en sortir ».
Chez certains beaux esprits s’opère un curieux renversement : ce sont les agresseurs eux-mêmes qui sont considérés d’emblée comme les victimes. De telles réactions délétères rejoignent la façon dont les agresseurs mettent en avant leur statut de victime comme justification de leur violence et de leurs exactions ; elles contribuent à enfoncer un peu plus ces jeunes déstructurés dans l’impasse.
Les mesures pour rétablir l’ordre donnent lieu pareillement à des protestations qui dénoncent aussitôt les mesures prises comme une marque supplémentaire de répression et de « stigmatisation » des banlieues, sans se soucier outre mesure du climat de peur et de « ras-le-bol » des populations concernées.
On peut se demander si la prolongation des mesures de couvre-feu est l’instrument approprié du retour au calme ; on doit demeurer vigilant contre des brutalités policières et des atteintes possibles à l’État de droit. Mais considérer la répression nécessaire comme une dangereuse atteinte aux libertés ou une marque supplémentaire de la « stigmatisation » des banlieues relève d’une idéologie gauchisante de plus en plus coupée des réalités et du sens commun.
Comment interpréter les événements ?
De multiples analyses et commentaires interprètent les événements avec des schémas qui, pour l’essentiel, se refusent à voir ou secondarisent le caractère sauvage, désespéré et nihiliste de la révolte des bandes de jeunes. Certains y voient un signe de la montée des communautarismes, de l’emprise de l’islam radical, voire la concrétisation d’une guerre des civilisations. D’autres au contraire les considèrent à tout prix comme l’expression d’une pure révolte contre les discriminations et les inégalités, ou encore, à l’inverse de toutes les apparences, comme étant le signe d’une intégration. De tels schémas idéologiques ont pour effet de rabattre des événements dans des catégories générales prédéterminées qui en dissolvent la singularité. Avant même d’aborder les conditions qui ont rendu possible de tels événements et de le situer dans le cadre des banlieues et de la société, il convient de délimiter le phénomène et de cerner ses aspects nouveaux.
Il importe en tout premier lieu de prendre en compte ce que les éducateurs, les enseignants, les psychiatres observent depuis des années. Il existe un phénomène de bandes constituées de jeunes adolescents et de post-adolescents en situation d’échec et désocialisés, animés par le ressentiment et la haine à l’égard de la société et des institutions. Ces jeunes minoritaires sont désœuvrés et déstructurés ; ils ont perdu l’estime d’eux-mêmes et le sens du réel. Leur sentiment d’appartenance se limite souvent à leur quartier ou à leur immeuble. Leur langage colle aux affects et aux pulsions ; ils ne mesurent pas la portée de leurs actes et le sentiment de culpabilité est le plus souvent absent. Fascinés par les clichés sur la réussite et l’argent, ils vivent dans un univers où l’image est maître, et ils acquièrent des comportements de dépendance à l’égard des stupéfiants. Ils se réfugient dans des bandes machistes où les rapports de force dominent avec les phénomènes de caïds et s’enferment dans une sous-culture de la délinquance et du ghetto. Nombre d’animateurs, d’éducateurs sociaux, mais aussi d’enseignants se trouvent désemparés devant de tels individus perpétuellement agités, aux comportements asociaux et immaîtrisables. Ces jeunes ont une image dépréciative d’eux-mêmes qui peut se retourner en agression. Lors des nuits de violence, ils sont entrés dans une logique de destruction et d’autodestruction en s’attaquant aux quartiers où ils habitent.
C’est précisément cette réalité dérangeante qu’il s’agit d’aborder en face. Des militants de gauche et des journalistes bien-pensants la dénient en y collant des formules passées en complet décalage. C’est ainsi qu’on répète bêtement la formule attribuée aux classes dominantes de l’ère industrielle : « Classes laborieuses, classes dangereuses », pour l’appliquer aux actes de vandalisme des banlieues. Quel rapport avec des jeunes désocialisés qui ne travaillent pas et ne forment pas une classe ? S’il fallait tenter des comparaisons historiques, la notion de lumpenprolétariat serait plus proche de la réalité. Mais là aussi, le caractère très jeune des casseurs qui ne sont guère en haillons [1] et agissent souvent par mimétisme télévisuel, sort du schéma.
On invoque également le chômage pour expliquer les événements. Mais il est d’autres périodes dans l’histoire de France où le chômage était massif, comme dans les années trente, sans qu’on assiste pour autant à de pareils phénomènes de destruction. Comme on oublie souvent de le dire, ces jeunes ne sont pas en total abandon, mais ils sont assistés par l’État providence. Leur univers n’est pas la survie matérielle, mais ils sont fascinés par l’argent facile et les marques du look branché. Les chômeurs ne s’attaquent pas, que l’on sache, aux écoles, aux gymnases, aux centres sociaux, aux bus... comme le font ces bandes. Et si l’on tient, là aussi, à la comparaison historique, il faudrait poser la question : a-t-on jamais vu les chômeurs des années trente s’attaquer à la « soupe populaire » ?
Quant aux conditions matérielles de vie et de logement dans les cités, elles n’ont rien à envier à la pauvreté et aux logements insalubres des cités ouvrières du début du siècle. Chômage et habitat, s’ils entrent bien en ligne de compte, ne suffisent pas à expliquer le phénomène dans sa nouveauté. Contrairement à ce que laissent entendre nombre de commentateurs attitrés, le type de violence auquel on assiste aujourd’hui n’est pas mécaniquement et unilatéralement déterminé par la situation économique et sociale des banlieues, sinon c’est à un autre mouvement de révolte d’une bien plus grande ampleur à laquelle on aurait assisté. La misère existante dans les cités de banlieues n’est pas comparable à celle qu’ont pu connaître les couches populaires dans le passé : il existe des mécanismes d’assistance sociale qui, s’ils ne transforment pas les conditions matérielles de vie, en atténuent la dureté.
Les événements des banlieues relèvent moins de la pauvreté et de la misère telles qu’on a pu les connaître autrefois que de phénomènes de déstructurations identitaires qui sont plus difficiles à comprendre. Les violences des bandes de jeunes des banlieues révèlent de façon paroxystique une désaffiliation due à l’érosion des collectivités d’appartenance qui inscrivaient l’individu dans une collectivité et le structuraient « de l’intérieur » : famille, collectivité de travail, classes sociales, appartenance nationale... Autant d’éléments qui sont aujourd’hui érodés ou en crise et qui, contrairement aux discours angéliques « post-modernes », sont constitutifs des identités individuelles et collectives. Les situations de chômage et d’habitat dégradé se combinent avec une déliquescence des liens familiaux, pudiquement dénommée « famille monoparentale » : le plus souvent absence du père, la mère subsistant tant bien que mal des revenus de l’aide sociale et étant la plupart du temps absente lorsqu’elle travaille. Dans les familles issues de l’immigration, cette situation peut être aggravée par une inadaptation des parents à la culture française, entraînant une désorientation des jeunes qui coincés entre deux cultures peuvent « errer sans repère dans une sorte de no man’s land anthropologique » [2]. C’est sur ce terreau que les groupes fondamentalistes musulmans présents dans les quartiers peuvent tenter de se développer en présentant leur doctrine comme le levier d’une restructuration identitaire et leur encadrement des jeunes désœuvrés comme la condition de la paix sociale dans les banlieues.
Que faire ?
Face à cette réalité, il n’existe pas de remèdes simples dont les effets seraient immédiats. Mais il est important à la fois de fixer des repères et de tirer des leçons des pratiques passées. Avant même d’envisager des mesures particulières, il est des questions centrales auxquelles il n’est plus possible d’échapper.
Tout d’abord, la question de l’érosion de l’autorité parentale n’est pas facile à traiter. Les mesures de sanctions financières envers les parents des familles décomposées sont démagogiques et ne résolvent rien. Les associations aidées par des psychologues et des psychiatres pour s’occuper des parents et des enfants en difficulté paraissent indispensables, mais on ne peut reconstruire de façon volontariste des familles déstructurées. La puissance publique ne peut pas se substituer complètement aux familles et les aides psychologiques ne peuvent pas tout. Le problème n’est pas seulement à poser dans des termes psychologiques - le risque existe bien de s’enfermer dans cette problématique - en dehors du terreau social et culturel, d’un ethos commun. On ne peut échapper à la question de la famille comme une des structures anthropologiques de base de la société que des conceptions modernistes et gauchistes ont rapidement mis de côté. Il en va de même des fonctions structurantes de la morale, de l’interdit et de la limite qu’un angélisme post-soixante-huitard et rousseauiste a trop longtemps dénié. Dans ce domaine, comme dans d’autres, ce qui se passe dans les banlieues, reflète de façon extrême des phénomènes que l’on retrouve à différents degrés dans l’ensemble de la société.
D’autre part, le comportement fortement instable et violent d’une minorité de jeunes en grande difficulté n’est compatible ni avec l’enseignement ni avec le travail en entreprise. La réponse à cette situation ne peut pas être seulement répressive. Elle implique avant tout un type d’aide et d’encadrement social relevant d’institutions spécialisées, avant même d’envisager de les réinsérer dans le cursus scolaire ou dans les entreprises. Il existe des stages fortement encadrés mêlant vie collective, travail, réalisations concrètes et activités physiques dans des lieux fermés ou ouverts qui sortent les jeunes de la cité. L’idée d’un service civil pour tous les jeunes alliant réalisations de tâches utiles, apprentissage de la vie collective et formation professionnelle va dans le même sens. Cela suppose d’importants moyens, particulièrement en termes d’encadrement, et tout cela à un coût pour des résultats qui ne sont pas acquis pour la totalité des jeunes concernés.
L’apprentissage, s’il doit être pleinement pris en compte et valorisé, ne constitue donc pas une panacée. L’appel constant à l’« éthique » et à la « citoyenneté » des entreprises, pour nécessaires qu’il puisse paraître, ne suffit pas : même si les entreprises peuvent faire des efforts pour accueillir des jeunes en difficulté, leurs perspectives d’embauche sont liées à celles des carnets de commande et leurs critères restent avant tout ceux de la compétence et de l’efficacité. Les employeurs ne sont pas vraiment désireux de prendre en charge des jeunes instables, peu assidus. Et l’association de l’idée d’apprentissage à celle de jeunes en grande difficulté risque de nuire à la revalorisation de l’image de l’apprentissage dans l’opinion.
Il n’y a donc pas de solution simple. Mais il n’en demeure pas moins que la réalisation de tâches pratiques, l’insertion dans un collectif de travail, sont des éléments indispensables pour retrouver une confiance en soi pour ceux qui sont en situation d’échec scolaire, quitte à retrouver une filière scolaire après cette expérience. Qu’on le veuille ou non, dans sa dimension anthropologique, le travail demeure un élément fondamental de la structuration individuelle et sociale. Il est un élément décisif de la constitution de l’estime de soi, de la confrontation avec la réalité et de l’apprentissage de la limite, de l’insertion dans les rapports sociaux. Toute la question est de savoir quelles conditions favorables sont à mettre en place pour que l’insertion et la formation des jeunes en situation de travail puissent se faire dans de bonnes conditions. L’expérience des entreprises dites « intermédiaires » » qui insèrent les jeunes dans le travail en échappant pour partie aux contraintes et aux lois du marché méritent, dans cette optique, d’être valorisées.
Le discours généreux de la citoyenneté coupée du travail est une impasse. Toutes les mesures d’assistanat économique et social, de même que les activités associatives multiples, pour nécessaires et utiles qu’elles soient, ne peuvent suppléer à l’absence de travail. Les responsables associatifs, les animateurs, les formateurs, les psychologues..., malgré tous leurs efforts, se voient condamnés à jouer un rôle d’accompagnateur ou de « pompier » du social, s’il n’existe pas d’activité de travail et de perspective d’emploi pour les jeunes en difficulté.
Le modèle républicain implique un modèle d’égalité et de citoyenneté qui fait fi des appartenances ethniques et communautaires. Ce modèle a un caractère d’idéalité qui ne coïncide jamais avec les faits, mais c’est ce caractère d’idéalité lui confère sa dynamique et il a su au cours de l’histoire passer des compromis. Ce modèle s’appuie sur une certaine morale du travail, sur une culture commune liée à notre histoire, sur l’idée de promotion sociale... Ces points-clés sont en panne, mais la question est de savoir comment les relancer, plutôt que d’affirmer qu’il a définitivement échoué et passer rapidement à un autre modèle de type anglo-saxon qui n’a pas d’ancrage solide dans notre tradition et qui montre aussi ses limites. La discrimination positive dans le domaine économique et social mérite d’être évaluée à la lumière de ses résultas effectifs et non aux « bonnes intentions » qu’elle affiche. Elle peut créer des effets pervers comme l’évaluation des ZEP l’a montré. Dans le domaine de l’habitat, la discrimination positive apparaît comme une mesure pouvant favoriser la rencontre et l’échange entre les différentes catégories sociales. Là aussi il convient d’examiner avec soin à quelles conditions précises elle peut être efficace, en évitant les effets qui amèneraient les catégories sociales plus favorisées à aller habiter ailleurs. Mais dans ces deux domaines, la discrimination positive nous paraît rester dans le cadre du débat sur les adaptations possibles et nécessaires.
La discrimination positive à destination de ce qu’on appelle désormais les « minorités visibles » - autrement dit une différence de traitement, notamment à l’embauche, fondée sur les critères de race et de couleurs de peau - , est d’une autre nature et portée. Elle ouvre la boîte de Pandore en favorisant la généralisation de la suspicion de racisme dans les rapports sociaux, l’hypertrophie des plaintes et des droits. Elle renforce la « victimisation » existante dans une logique de concurrence sans fin entre tous ceux qui s’estiment être des victimes, contribuant ainsi au délitement du lien social et de la citoyenneté. _ La discrimination positive en faveur de ce qu’on appelle les « minorités visibles » constitue un nouveau tremplin pour le courant xénophobe et raciste, et peut favoriser à terme des affrontements ethniques.
On ne saurait enfin passer outre la question de la nation comme cadre central d’intégration, élément constitutif de l’existence collective d’un peuple, et partie constitutive de l’héritage européen. Qu’on le veuille ou non, la nation demeure une référence identitaire et le lieu central de la citoyenneté. Elle constitue un pôle d’identification avant même l’appartenance européenne dont la prégnance demeure faible, tout particulièrement dans les banlieues. Cela implique l’acceptation de l’ambivalence de son histoire en étant conscient qu’aucun peuple en l’affaire ne dispose d’un blanc-seing et un patriotisme qui ne se confond pas avec le nationalisme chauvin et xénophobe. À l’inverse, toute une idéologie gauchisante minoritaire au sein du milieu associatif réduit l’histoire de notre pays à ses pages les plus sombres et renforce la mentalité victimaire des jeunes désaffiliés en présentant leur situation dans la continuité de celle qui fut celle des esclaves et des peuples colonisés. Cette idéologie travaille à l’encontre de l’intégration et elle peut recouper ou se trouver mêlée à des thèmes fondamentalistes musulmans. Sans nier les pages sombres de notre histoire, l’intégration implique la conscience des acquis de notre histoire et le partage d’un patrimoine culturel commun. C’est aussi dans ce cadre, que l’éducation populaire peut retrouver un nouveau souffle. La citoyenneté n’est pas l’affichage des différences dans une logique de victimisation, mais elle implique le souci de partager les acquis de notre propre histoire et de créer un avenir commun.
L’histoire n’est pas tracée d’avance ; elle est ouverte sur de possibles régressions. Les violences récentes nous le rappellent. Les problèmes rencontrés dans les banlieues sont les nôtres, ils concernent une partie de nos compatriotes fragilisés par la crise que nous vivons. Dans cette affaire, notre responsabilité est engagée et il importe à la fois de regarder la réalité en face et de savoir quel modèle de vivre-ensemble et de citoyenneté nous voulons essayer de faire prévaloir au milieu du chaos ambiant. Les paroles d’Albert Camus « empêcher que le monde se défasse » prononcées dans d’autres circonstances [3] gardent leur acuité dans la situation présente.
Notes
[1] Lumpen signifie miséreux, en haillons.
[2] Emmanuel TODD, Le destin des immigrés, Seuil, Paris, 1994, p. 382.
[3] Albert CAMUS, Discours de Suède (1957), Folio Gallimard, Paris, 2001, p. 19.
les jeunes musulmans de banlieue ont besoin de plus d'autorité.
" D’un point de vue psychologique et humaniste, il est très clair que des personnes de cultures différentes ont des besoins différents, quand ils ont ou quand ils créent des problèmes. Ma propre expérience est que les musulmans ne comprennent pas notre façon toute occidentale de gérer les conflits par le dialogue. Ils sont élevés dans une culture comportant des figures d’autorités et des conséquences externes à l’individu et très bien définies. La tradition occidentale, qui utilise compromis et introspections comme principaux outils pour gérer les conflits tant intérieurs qu’extérieurs, est considérée comme une faiblesse dans la culture musulmane. Dans une large mesure, ils ne comprennent tout simplement pas cette façon plus douce et plus humaniste de traiter les affaires sociales. Dans le contexte du travail social et de la politique, cela signifie que l’individu a besoin de plus de limitations et de conséquences plus sévères pour être en mesure d’adapter son comportement"
et ça le rédacteur Ruffin ne là pas compris, les jeunes des banlieue c'est de passage à tabac dans les postes de police qu'ils ont besoin comme en Algérie (ça c'est déjà fait et ça marche trés bien), pas d'autre chose. il est juste capable de nous sortir l'éternelle rengaine sur la supposée discrimination. il mange dans la main à la Licra et au Mrap et leur lois de censure inapplicable qui participent à la régression intellectuelle de la France.
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/044000500/0000.pdf
"Comme l’écrit Michel Wieviorka « Dans ce paysage social
renouvelé, le racisme se construit contre les immigrés et leur descendance de façon elle aussi
nouvelle. Jusque là il participait de l’exploitation des travailleurs inclus dans les rapports de
production, il va maintenant surtout contribuer à exclure leurs enfants de l’emploi, à les
discriminer ou à les tenir à l’écart dans l’espace urbain »."
affirmation déconnectée de la réalité !!! digne d'un bobo pur jus
http://blog.lefigaro.fr/education/2011/04/discrimination-dites-vous.html