« N’être qu’un, oui, mais lequel? » disait Alphonse Allais il y a environ  cent ans. Cette phrase, qui est une de mes devises, me paraît étonnamment actuelle. Habités par diverses facettes, nous en privilégions souvent une seule.

Derrière l’humour apparent de cette boutade de l’humoriste, il y a une vraie question. Nous sommes multiples. Une hiérarchie intime permet d’organiser cette multiplicité.

Picasso est pour moi un exemple de cette approche du multiple. Pendant longtemps je ne comprenais pas sa démarche picturale. Jusqu’au jour où j’ai réalisé qu’il présente en même temps, sur la même image, deux aspect du visage, deux faces de la personne que l'oeil ne pourrait normalement pas voir. Du moins c’est ce que j’ai compris.

Voir les choses sous plusieurs angles, prendre le contrepied d’une analyse sociétale, c’est élargir les champs du réel que nous percevons. C’est tenter de voir le monde sous plusieurs côtés et non sous un seul. C’est tenter un regard plus complet, moins partiel.  

La contradiction est nécessaire dans une société complexe. Elle devrait être menée par principe. Aucun sujet n’est tabou dans une démarche dialectique. Aucune situation ne devrait échapper à une analyse détaillée et contradictoire – en trois dimensions, non manichéenne. Je peux ainsi adopter certaines idées de gauche et en même temps d’autres de droite, si je les trouve toutes bonnes.

Une démarche de pensée plus globale, plus multiple, prenant en compte la complexité des individus et du réel, me paraît de nature à produire une société plus stable et plus apaisée que la séparation en classes, en corporations, en communautés, en lobbies, en idéologies concurrentes.

C’est pour cela que je préfère les individus aux groupes. J’aime les personnes, quel que soit leur bord. Chaque individu est un univers.

Sur ce j’entre en studio pour enregistrer mon deuxième album, dont j’ai déjà parlé et dont je reparlerai ici.

Je ne suis pas sûr d’être disponible pour mon blog pendant ce temps: le travail en studio est intense et exige une grande concentration. Je fais donc une probable pause de quelques jours.