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La question musulmane (4 et fin)

Si la Question juive s’est posée, le christianisme aussi a été questionné au XIXe siècle: selon Joseph Proudhon une des vertus chrétiennes, la grâce, serait incompatible avec la démocratie. 

isl-2-.jpgAcclimatation

La gauche française est d’ailleurs en guerre permanente contre le christianisme. Vincent Peillon déclarait en 2013 que l’on ne pourra jamais construire un pays de liberté avec la religion catholique (vidéo en bas). Des propos qui fleurent un vrai racisme sous la forme d’une haine sociale irréductible.

La Cour Européenne de Justice est d’avis que la loi islamique est incompatible avec la démocratie et les droits de l’Homme. Cela mérite réflexion.

À cela s’ajoute l’antériorité. Dès qu’une région est habitée par des humains ceux-ci y disposent d’une antériorité de fait sur toute immigration future. Cette antériorité passe par une hiérarchie des personnes décisionnaires: les plus anciens sur place font la loi parce qu’ils sont « chez eux »

Ce chez eux est fondamental. Nous avons tous un chez nous, un homeland auquel nous avons le sentiment d’appartenir par le simple fait par exemple d’une présence continuelle. 

  

Homeland

En retour nous estimons que ce homeland est sous notre responsabilité. C’est à nous, résidents d’origine et installés, redevables envers nos commensaux et l’administration, de faire des choix et d’orienter la politique.

Et le voyageur, l’étranger? Celui qui arrive écoute et observe. Il étudie les codes du pays pour les reproduire. Ils s’adapte. Le résident se comporte lui comme un dominant. C’est normal. Il a construit un monde favorable aux humains et il veut logiquement décider de sa suite. Le nouveau venu ne prendra pleinement une place décisionnaire qu’avec le temps.

Comme dans le Petit Prince les êtres doivent s’apprivoiser. Si l’on est invité on s’adapte aux règles de la maison qui nous accueille. 

Je fais une analogie entre le corps d’une personne et un État. Tôt dans l’enfance nous apprenons la frontière du corps. Il y a un intérieur de chair, de sentiments et de pensées, et il y a un extérieur. La préservation de sa propre intégrité passe par le contrôle sur la disponibilité de notre corps et par le tri des influences extérieures. Pour une nation c’est pareil.

 

isl-3lim-3-Estableciendo-límites-a-los-hijos.jpgLimites

Nous avons un droit fondamental: celui de décider à qui nous nous ouvrons. Il faut donc trouver un équilibre entre la limite et l’ouverture, entre l’intérieur et l’extérieur. Dans mon corps c’est moi qui décide. Dans le pays dont je suis citoyen aussi. Mais si je viens de l’extérieur je laisse la préséance aux résidents avant de me positionner.

Je rejette purement et simplement l’accusation moralisatrice d’égoïsme lancée contre ceux qui parlent de limites. C’est un mauvais procès d’intention et une tartufferie puisque chacun dans sa vie trie avec qui il veut être. 

D’une part la politique ne devrait pas être affaire sentiments: un État ne ressent pas, il administre. D’autre part il y a toujours une limite, toujours, à un moment ou à un autre. La France ne va pas accueillir 100 millions de migrants. La question est alors: où place-t-on la limite?

Le cas français est particulier. Ce pays est baigné dans une culture autoritaire et jacobine. La multiculturalité revendiquée n’y trouvera pas sa place. Il n’y a qu’une loi pour tous. Seule l’intégration puis l’assimilation y sont possibles, malgré le discours officiel.

  

Que faire?

Depuis la montée en puissance des rigoristes les tensions sont exacerbées. Cette montée en puissance se nourrit de la situation du Proche-Orient depuis environ un siècle, mais aussi de la tentation fasciste des Frères musulmans, des interventions d’armées occidentales sur les terres arabes, de l’Histoire et ses ressentiments.

On oublie certains processus naturels, plus lents mais utile. Par exemple s’il est normal qu’un citoyen d’origine étrangère reste attaché à sa culture ancestrale (qui fait partie du concept de homeland) celle-ci doit être en partie mise en retrait devant la culture d’accueil, à cause de l’antériorité et parce que la société où cet étranger arrive est déjà constituée. 

Deux pouvoirs au même endroit, c’est un pouvoir de trop.

C’est ainsi dans tous les pays. C’est ce que nous faisons quand nous allons à l’étranger. Personne ne va s’installer en Algérie sans montrer patte blanche et s’il n’accepte pas la société algérienne.

On peut donc et on doit demander à un nouveau citoyen de s’engager à respecter les lois et les coutumes du pays qui le reçoit. Il gardera certaines de ses propres coutumes, en pratique privée. C’est la période d’apprivoisement. Car en plus d’être une culture forte l’islam est très intimement arabe, par sa langue et son look. Or en Europe nous ne voulons pas forcément devenir arabes.

 

 

isl-5-bu.jpgVoie dure

Je ne suis pour autant pas dérangé par le port du voile et du burqini. Cela tient de la liberté individuelle (la burqa étant un autre problème). Je ne prétends pas être dans la tête des femmes qui les portent pour évaluer leur degré de libre choix ou de contrainte familiale. Je pose comme principe qu’elles décident de le porter. Et je suis opposé à ce que la Constitution suisse interdise ce vêtement: la Constitution n’est pas le vestiaire des cultures ni l’intendance des bonnes moeurs.

On peut bien sûr décider de lois d’exception permanentes, dans l’esprit de l’état d’urgence, lois visant spécifiquement les citoyens ou les étrangers de confession musulmane. Ce serait extrême, discriminant, mais plus clair. Plus besoin de trier entre les rigoristes dangereux et les autres. Il suffit d’invoquer les versets guerriers du coran pour juger qu’il y a dans tous les cas un risque pour l’ordre public. C’est la voie dure, qui conduit à l’exclusion de ce qui nous menace.

Pourtant je ne suis pas convaincu par la théorie du grand remplacement d’une population par une autre ou d’une culture par une autre. Cela ne s’est pas produit en sept siècles d’occupation militaire, administrative et culturelle de l’Espagne, et les Maures d’alors ne s’étaient pas tous levés comme un seul homme un couteau entre les dents pour tuer des mécréants. Ils ont même en partie collaboré avec les juifs et les catholiques. L’Histoire ne confirme pas la théorie.

 

Envahissement

Visiblement la majorité des musulmans en Europe ne se sent pas liée par les versets guerriers. Le sentiment de leur propre dignité passe par le respect de la vie.

On peut aussi, comme le suggère Éric Zemmour, arrêter toute immigration d’origine nord-africaine ou moyen-orientale. Un moratoire de cinq ou dix ans sur cette question permettrait peut-être de reprendre le débat de manière moins polémique, plus technique, et de tenir compte de l’apprivoisement culturel. 

Le sentiment d’envahissement n’est pas anormal: il survient quand le nombre dépasse notre capacité d’apprivoisement et change par trop nos repères. Une femme seule en voile peut intriguer et éveiller la curiosité; mais un million de femmes voilées cela devient une masse indigeste et un paysage étranger. N’y cherchez pas un mauvais esprit ou une quelconque xénophobie: tous nous fonctionnons avec des seuils et des mécanismes identitaires de base, comme de privilégier le ressemblant. Même les moralisateurs.

 

isl-1-rachid_arhab_2004_saumur.jpgVoies nuancées

Mais si les limites sont nécessaires, les échanges le sont tout autant. Les personnes qui viennent en Europe et que nous avons décidé d’accueillir doivent trouver un environnement favorable. L’intégration passe par le fait de bien parler la langue, par des activités intégrées dans la vie, du travail associatif sur le terrain et un relais par les locaux. Il ne semble pas y avoir de formule magique mais un ensemble de mesures qui s’additionnent.

TF1 proposait hier soir un reportage sur le village auvergnat de Bellenaves, où une vingtaine de réfugiés afghans et érythréens ont été installés. Le reportage est sur ce lien. Ces réfugiés sont intégrés dans l’équipe de foot et apprennent intensivement la langue avec des bénévoles. C’est fondamental. Et l’on voit ici que le gouvernement a choisi le placement en petits groupes dans des régions austères, ce qui devrait atténuer le risque de repli communautariste. 

Dans cette idée on devrait accueillir des migrants de plusieurs cultures différentes plutôt que d’une culture principale.

Je ne refuse pas la confrontation quand elle est utile. Un reportage de M6 sur l’islam en France la semaine dernière (Tabou) montre des jeunes prêts à en découdre physiquement avec les journalistes. Le passage par le corps existe toujours. Plus on se montre souple ou compréhensif plus l’adversaire nous croit faible et prend des libertés.

  

Conclusion

Cela veut dire que nous devons soutenir et affirmer avec force notre culture. Je ne dis pas que les musulmans dans leur ensemble dénigrent l’Europe mais ceux qui le font sont bruyants et trouvent des disciples prêts à s’engager. Il me paraît donc impératif de désigner un adversaire précis et de le pourchasser à cause de sa grande capacité de nuisance: le salafisme (ou quelque nom que prennent les rigoristes dangereux). Le pouvoir a trop cédé de terrain en France. Une approche plus dure et moins maternante serait peut-être préférable face à des jeunes encouragés à haïr leur pays. 

La question musulmane n’est pas simple, on le voit. Je ne prétends pas en faire un tour exhaustif. D’autres le font aussi dans d’autres contextes. Peut-elle se résumer à quelques règles de base imposées par le pouvoir, comme ce fut le cas lors de la question juive? Au point actuel j’en doute: le déficit de respect mutuel est astronomique. La réparation de ce déficit sera longue, probablement faudra-t-il une génération pour desserrer l’étau des haines vives. 

Il faut admettre qu’une immigration prend plusieurs générations pour que les conflits et mécanismes adaptatifs soient épuisés. Même si certains, modèles positifs, vont plus vite que d’autres pour s’assimiler: je pense au journaliste des années 1980 Rachid Arhab. Personne ne lui aurait fait une remarque désobligeante car il inspirait naturellement le respect. Les modèles intégristes actuels n’inspirent pas ce même respect et envoient des jeunes dans les champs de la mort.

La France ne devrait plus connaître « d’identité heureuse » avant longtemps.

 

 

 

Précédents billets de cette série:

La question musulmane 1

La question musulmane 2

La question musulmane 3

 

 

Catégories : Philosophie, Politique 5 commentaires

Commentaires

  • "Dès qu’une région est habitée par des humains ceux-ci y disposent d’une antériorité de fait sur toute immigration future."
    Rappelons, cependant, que c'est là le point du vue du dernier envahisseur. C'est le point de vue de celui qui a su imposer sa présence, souvent sa domination sans partage, par la force. Les exemples les plus connus (et encore bien présents à nos esprits) sont ceux des Indiens des deux Amériques ainsi que les Aborigènes d'Australie.
    Qualifier les autochtones, parfois issus d'une immigration antérieure (ce n'est pas le cas des exemples cités plus haut) de "sauvages" et autres adjectifs dénotant une "infériorité" morale ou technologique) justifie généralement la spoliation de leurs terres, si ce n'est pas leur élimination physique. Dans ce processus les religions ont souvent joué un rôle sinon décisif, du moins très en vue.
    Ces quelques remarques font référence, en dehors de tout jugement moral qu'elles suscitent inéluctablement, à une réalité historique fondée tout d'abord sur des processus assurant la survie, donc biologiques, et exploités comme prétextes à diverses époques et par divers chefs de guerre pour étendre leur propre pouvoir et celui de l'idéologie dont ils se sont faits les champions.

  • En effet Mère-Grand. De ce point de vue les couches successives de domination sont nombreuses et difficilement modifiables. C'est donc le dernier qui prend la place, par quelques moyens que cela soit.

    Aujourd'hui nous sommes entrés dans le concept que les nations pourraient ne plus chercher la conquête et la domination (enfin, pas partout). Mais ce n'est pas encore tout-à-fait vrai. Cependant ce concept émerge à une époque où le temps lui est favorable. En d'autres temps la force et le statut de guerrier étaient les moyens de préserver un groupe, ou de le faire croître.

    Je ne sais pas si les peuples du passé voyaient cela comme immoral, ou seulement comme une souffrance ou un mécanisme inévitable. Aujourd'hui, selon le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et le libre consentement, cela paraît immoral. Pourvu que ça dure!

  • Cher hommelibre,

    - « Aujourd'hui nous sommes entrés dans le concept que les nations pourraient ne plus chercher la conquête et la domination (enfin, pas partout). »

    Vous croyez ?

    Moi je dirais plutôt que nous sommes entrés dans le concept que les "nations" ne sont plus un concept valable, et que le concept qui le remplace c'est plutôt le concept de _jurisdictions_. A moins que l'on ne soit entré dans le concept des "constellations", ou le concept des "maisons", ou des "tribus", ou des "clans", ou des "familles", ou de "cultures", ou de "genres", bref tous ces concepts qui nous font croire qu'on est UN avec les autres, et donc DEDANS.

    - « Cependant ce concept émerge à une époque où le temps lui est favorable. »

    Ben oui. Quand il fait beau, on aime bien aller dehors. Par contre, quand il pleut, on préfère rester dedans. Après, quand on est dehors, on peut avoir des bonnes raisons de rentrer dedans. Comme quand on est dedans, on peut avoir des bonnes raisons d'aller dehors. Par exemple quand les histoires de nations, ou de jurisdictions, ou de maisons, ou de tribus, ou de genres, etc ... deviennent très ennuyeux.


    - « En d'autres temps la force et le statut de guerrier étaient les moyens de préserver un groupe, ou de le faire croître. »

    Oui. La "force" et le "statut" sont des concepts qui se montrent facilement. Ca c'est parce que le concept de "guerrier", ben dans ses concepts à lui, le guerrier donc, ben ... la "nation", c'est lui ! Et que pour faire la guerre aux autres, il a besoin que les autres la fassent, pour lui! Donc il doit "forcer" les gens à se battre pour lui, ou leur donner une bonne raison pour les convaincre de se battre, ou de travailler pour lui.

    Par exemple, en leur disant ... "Vous voyez toutes ces terres, et ces arbres, et ces montagnes, et ces lacs, et ces vaches, et ces moutons. Ils sont à moi! C'est pour ça que moi j'ai réussi dans la vie! Mais de temps en temps, ils sont à vous aussi, quand je le décide. C'est pour ça qu'ils sont aussi à vous! Moi, et vous, et tout ce que j'ai dit avant, tout ça, c'est notre NATION! Et c'est pour ça que vous devez les défendre contre ces gens qui sont pas comme nous, les PANOUS! Qui vont tout piquer, et vous dire que tout ça c'est pas à vous! Et si vous les laissez faire, c'est que vous êtes des mous et des faibles et des lâches."


    - « Je ne sais pas si les peuples du passé voyaient cela comme immoral, ou seulement comme une souffrance ou un mécanisme inévitable. »

    Je crois que ca dépend beaucoup si les peuples du passé avaient déjà les concepts "immoral", "souffrance", et "mécanisme".


    - « Aujourd'hui, selon le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et le libre consentement, cela paraît immoral. »

    Je crois que ca dépend beaucoup si les peuples d'aujourd'hui ont les concepts "droit des peuples" et "libre consentement" et "immoral", et des noms différents pour chacun pour ne pas les confondre. Parce que avoir des noms différents pour des mêmes concepts, c'est comme avoir trois noms différents pour décrire la même station de métro, ou trois dates différentes pour décrire le même jour ... aujourd'hui.

  • Personnellement, il y a un point crucial sur lequel je suis en opposition totale avec Zemmour, c'est quand il dit que le débat sur l'identité est plus important que le débat sur la souveraineté. L'afflux actuel de réfugiés est avant tout provoqué par la perte de souveraineté des nations européennes et la soumission de ces dernières à l'empire américain. C'est par l'UE et l'OTAN que les USA ont fait entrer les nations européennes dans une confrontation avec l'islam qu'ils ont provoquée. Donc sans retour à la souveraineté, il ne sert même à rien de parler d'identité puisque nous n'avons pas notre mot à dire sur cette question. C'est l'UE et derrière elle les USA qui dictent la politique migratoire. Donc si la France veut régler ses problèmes, il faut sortir de l'UE et de l'OTAN avant tout. Ensuite nous pourrons reparler de politique intérieure et internationale.

  • @Kad
    Je pense que vous vous trompez et que pour la plupart des Européens inquiets c'est la religion d'une grande partie des immigrés qui pose problème. Il se trouve que toute référence à cet aspect des choses est immédiatement taxée de xénophobie anti-islamique et je crains que cette réaction ne fasse qu'envenimer la situation.
    Taire une vérité ne fait qu'attiser le problème qu'elle recouvre. Lorsque la gauche européenne s'en est pris avec violence, surtout verbale heureusement, à l'influence de l'Eglise et du clergé catholique au siècle passé, les termes d'irrespect et de haine ont aussi utilisé, mais le caractère endogène du conflit l'ont en quelque sorte circonscrit au domaine politique.
    Il me semble que ni les défenseurs de l'immigration ni les Musulmans eux-mêmes ne font assez pour mettre en lumière le fait qu'une grande majorité d'entre ces derniers sont heureux de vivre dans une société plus ouverte que celles de certains pays à la dictature théocratique, et cela malgré le fait qu'ils sont fiers de leur culture d'origine et qu'ils en respectent certains rites.
    Malheureusement, de mon point de vue du moins, nous manquons de données objectives pour étayer ou infirmer cette affirmation, et c'est dû en grande partie à une certaine "omerta" (à défaut d'un terme moins connoté) due aussi bien à la crainte de subir les reproches cités au début de mon texte qu'aux manoeuvres de ceux qui ont avantage à attiser incompréhensions et ressentiments pour nourrir leur calendrier politique ou politico-religieux.

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