La valse sondagière, symptôme d’une possible anxiété politique collective, est repartie de plus belle chez les Hexagonaux. Ils en reprennent pour cinq ans. Les instituts, auxquels les français n’ont rien demandé, pondent régulièrement ces instantanés sur l’actualité sans aucun recul ni analyse.
On apprend ainsi, grâce à une enquête de l’Ifop publiée par le Journal du Dimanche et reprise par l’Express, que le jeune Emmanuel perd 10 points dans les sondages. Il est probable qu’en cinq ans il en perdra beaucoup plus.
Précisément:
« … le total des mécontents passe de 35% à 43% de juin à juillet, se répartissant entre "très mécontents" (15% en juillet, contre 12% en juin) et "plutôt mécontents" (de 23% à 28%). 3% des sondés ne se prononcent pas, contre 1% le mois dernier. »
Ce n’est pas franchement instructif. Savoir que les très mécontents passent de 12% à 15% des sondés nous fait une belle jambe. C’est le score du parti de Mélenchon ajouté de quelques irréductibles anti-libéraux.
En démocratie on n’imagine pas qu’un élu en charge des affaires publiques puisse monter dans les sondages – sauf situation politique exceptionnelle. Le pouvoir use parce qu’aucun élu ne peut satisfaire toutes les clientèles. Sur la durée il en déçoit forcément une partie.
Si la chute est brutale comme l’écrit l’Express, elle n’a rien d’extraordinaire. Tous les présidents élus de la Ve ont connu cette descente relativement rapide.
Avec les premières confrontations du nouveau président, à propos du général de Villiers ou de la réduction de l’aide au logement, un décrochage était inévitable.
Pourtant le nouvel élu ne ménage pas ses effets pour donner de lui-même une image positive. Il se déguise en pilote pour l’armée de l’air, se fait hélitreuiller sur un sous-marin, et joue au tennis sur le bord de Seine en fauteuil roulant pour soutenir la candidature de Paris pour l’organisation des JO de 2024.
Ces mises en scène du président-caméléon délivrent plusieurs messages. D’une part elles expriment une volonté de se montrer proche de ses interlocuteurs, ou issu de la même tribu qu’eux comme l’analyse la conseillère en image Caroline Baly.
Elles montrent un président proche des français, en apparence, grâce à des images qui suggèrent les slogans « Je suis l’armée » ou « Je suis les sportifs handicapés ».
Cette sorte « d’effet Charlie » – qui consiste à s’identifier à un groupe pour s’en attirer les bonnes grâces autant que pour lui apporter la caution de la nation – n’est pas le seul effet recherché. Cette communication permet également de rendre une cause plus populaire, la présence du président assurant une forte visibilité dans les médias.
Personne ne lui en voudra de n’avoir pas fait l’armée. Tout le monde n’est pas Wonder Woman. Mais la multiplication des symboles en affaiblit la puissance. Combien de fois le scénario pourra-t-il se répéter avant qu’il ne perde toute force symbolique?
De plus le port de l’uniforme ne fait pas le moine: Macron n’est pas un militaire. Le conflit qui a conduit le général de Villiers à démissionner n’est pas éteint. Le candidat Macron avait promis d’augmenter les moyens de la Défense, or l’élu Macron fait marche arrière.
En changeant ainsi d’uniforme selon ses interlocuteurs, Macron-caméléon se donne en spectacle dans un numéro de transformiste tel Arturo Brachetti (image 3). Pourquoi pas si les sorties en déguisement sont rares. Ici elles sont répétées de manière rapprochée et pourraient rapidement passer pour une mise en scène sans vrai contenu, une auto-promo présidentielle. Ou pour de l’agitation politique.
Ou pire: pour de la télé-réalité ou pour un numéro de cirque.
Commentaires
Au fond qu'attendent les Français de leur Président ? Qu'il règle tous les problèmes de la République et ses citoyens en ne changeant strictement rien ? Il serait sans doute plus sage de ne pas trop s'attarder sur la réalité de l'emballage et se concentrer sur le contenu du colis.
Et un président en scooter, c'était un numéro de quoi ?
Vous résumez bien la question: "Qu'il règle tous les problèmes de la République et ses citoyens en ne changeant strictement rien ?"
L'emballage, c'est ce qu'il montre depuis quelques temps, même je dirais depuis le début. Et il n'est pas sans connexion avec la personnalité et la manière de vouloir faire de la politique. En soi l'emballage est utilisé ici comme un message politique à part entière, à mon sens. Le contenu n'est pas encore assez clair, à part une dose de libéralisme que je soutiens (loi travail p.e.).
Pour le scooter, était-ce un numéro d'équilibriste? Ou une manière d'échapper à sa fonction?
Alors je préfère un hélitreuillage.
:-)
Mais là cela fait beaucoup en peu de temps. Et dans ce domaine, avec cette visibilité publique, beaucoup c'est vite trop. Le style devient prévalent sur le contenu. En l'occurrence, à propos des forces armées, à part sa promesse de candidat, il n'a pas exprimé beaucoup de contenu dans le conflit avec de Villiers.
@ Sommer
"Il serait sans doute plus sage de ne pas trop s'attarder sur la réalité de l'emballage et se concentrer sur le contenu du colis."
Le problème est qu'il n'est que l'emballage, le contenu du colis il est ailleurs. Le contenu du bonhomme, on le connaît très bien: Guyane = une île, fécondité des femmes africaines = 7 à 8, colonialisme = crime contre l'humanité, puis discours néo-colonial une fois élu, etc. Bref la manifestation d'une ignorance évidente. S'il y avait un contenu, il serait dans son bureau en train d'y travailler. On ne demande pas à une marionnette de "travailler", mais seulement de passer les plats préparés ailleurs. Il n'est que la voix de ses maîtres, d'où le show permanent.
Michel Sommer: "Qu'il règle tous les problèmes de la République et ses citoyens en ne changeant strictement rien ?"
Le problème c'est que:
1. Il ne change rien et ne fait que continuer la même politique que son prédécesseur. (baisse des budgets des collectivités, baisse du budget de l'état, en particulier de l'armée, approfondissement des mesures de la loi El Khomri)
2. Il avait promis des ruptures dans certains domaines, comme dans le cas de l'armée, mais il ne tient pas ses promesses. (comme prévu...)
3. Bien qu'élu démocratiquement, il ne bénéficie que d'une assise très faible dans la population. Même ceux qui ont voté pour lui ne sont sans doute pas conscients de la violence de son programme économique. Et ils descendront dans la rue avec les autres quand ils la découvriront.
Ne dit on pas que "Jupiter rend fous ceux qu’il veut perdre, ou le poisson pourrit par la tête?"