Elle est terrible, la petite voix qui sourd derrière une vanne bien claquante. Terrible, cette habitude de vouer tant de haine à ceux dont l’origine sociale ou l’appartenance ne nous plaît pas. Terrible cet alignement de suspects qu’il faudra bien guillotiner un prochain jour.
Et ça continue. Après toute la série de phobies déjà connues, et malgré le faux-sens induit par ce suffixe, voici venir la bourgephobie (haine du bourgeois), la mochephobie, et bien d’autres que les esprits chagrins ne manqueront pas d’inventer.
Si le suffixe -phobie est erroné – car le non-amour ou la critique de l’autre ne sont pas des phobies – il sert néanmoins de frontière entre les individus et leurs groupes de référence.
Ce qui vaut pour certaines communautés ou minorités ne vaut pas pour d’autres. Le deux poids deux mesures est un mode de pensée répandu, et l’amour du prochain est très sélectif. Le dernier exemple en date est ce cas de Virginie Calmels: il y a des groupes haïssables.
C’est encore de Christine Angot que nous vient la bonne nouvelle: la haine de classe est toujours d’actualité. Des extraits de l’émission de Ruquier du 10 mars montrent la chroniqueuse s’en prendre avec une virulence digne de 1789 à la vice-présidente des Républicains, Virginie Calmels.
Dans causeur.fr Élisabeth Lévy résume à sa manière la séquence:
« Samedi soir, Christine Angot (…) voyait en Virginie Calmels, exactement comme en Fillon, non pas une personne particulière, mais l’emblème de sa classe sociale. Elle était coupable non pas de ce qu’elle avait dit ou fait, mais de ce qu’elle est : une bourgeoise, une possédante – qui circonstance aggravante, couche avec d’autres possédants. »
Pour se justifier Christine Angot a eu cette petite phrase malheureuse, ou terrifiante, pour ce qu’elle recèle de possibles guillotines:
« Avec ces gens-là il faut y aller fort… », ajoutant, sur question l’invitée, qu’elle les déteste.
Ces gens-là. Tout est dit. Et une porte s’est ouverte. Car ce bout de phrase Ces gens-là, ceux qu’on déteste pour leur appartenance sociale, pourrait être appliqué à tous les groupes sociaux.
Les noirs? Les sikhs? Les arabes? Les cathos? Les gauchos? Les droitos? Tous tellement Ces gens-là qu’il se trouve toujours quelqu’un pour les détester. Et si tous nous détestons quelqu’un, alors plus rien n’est mieux qu’autre chose.
Angot montrait le vrai visage du Camp du Bien: la détestation par catégorie. Ici, la bourgephobie. Ou classophobie, ou classisme. Le classisme se range à côté du sexisme au rayon des grandes généralités.
Je rappelle ici l’article 2 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948. Cet article reprend de manière implicite le commandement de Jésus: Aime ton prochain comme toi-même:
« Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. »
On peut constater que madame Angot s’assied sur les Droits de l’Homme et chie dessus. Comme nous le faisons presque tous dès lors que nous ne sommes pas dans l’amour universel et inconditionnel, dans l’acceptation aveugle et indiscriminée. Autant dire tous, donc.
Pourtant elle devrait remercier la bourgeoisie. Cette classe sociale a gagné toute la société et introduit ce libéralisme qui permet à tous et toutes de revendiquer leur liberté individuelle. Elle a imposé ses valeurs, placé ses élites aux différents pouvoirs: politique, économique, culturel. C’est grâce à elle qu’une Christine Angot, pasionaria auto-proclamée des petits, peut prendre place avec arrogance aux côtés des grands.
Mais non. L’extraction sociale de madame Calmels est à ses yeux plus significative que tout, et cause d’opprobre. La chroniqueuse alimente les habituels clivages de classe haineux, particulièrement ancrés dans la culture française.
Ces gens-là… Ça peut s’adresser à tout le monde, à n’importe quel groupe. Cette expression sert à elle seule de verdict et prépare les échafauds (image 3: N-A. Taunay, Triomphe de la Guillotine). Comme une nostalgie de 1793 et de la Terreur. Cette terreur si profondément greffée dans le coeur et l’esprit des français qu’ils y voient encore une forme normale de communication.
En France, mais ailleurs aussi, quelle que soit notre origine, on est tous de Ces gens là pour quelqu’un.
Commentaires
J'essaie de choisir mon camps.
J'hésite entre misanthope et anthropophobe.
Mon coeur balance, je suis déchiré-e en deux, comme un androgyne à l'entrée des toilettes publiques !
Je me contritionne, je ne voulais blesser personne # balance ton androgynophobe
:-DDDD!!!
Merci pour l'humour Aoki.
Bourgeoisie: une étape d'organisation et de planification.
C'est bien parce qu'ils sont les fruits de cette bourgeoisie qu'ils la détestent comme la progéniture déteste son géniteur ou ses parents.
Mais que veulent-ils nous faire croire?
Qu'ils sont issus de divinités?
Sont-ils eux-même Divinités?
... Ou des élus de Dieu?
Ou du Prince Ténébras,l'Innaccessible?
Sont-ils ces enfants qui veulent tuer leur Père pour qu'on n'y voit point leur ressemblance à ce père!?
L'arrogance et le mépris, c'est la peur d'être lu, reconnu et mis à nu. Un mauvais cache-misère.
La terreur vient aujourd'hui de tous côtés la gauche bolcheviste veut aussi ériger des gibets!