Le crédit d’étude pour la (peut-être future) traversée du lac a donc été voté par une majorité de députés genevois. Avec un amendement proposé par deux députées PLR: « Et pourquoi pas prévoir de donner un nom féminin aux infrastructures routières liées à la traversée? »
Personnellement je préfère les noms géographiques, génériques ou symboliques: Pont du Mont-Blanc, Pont des acacias, Route des Jeunes, Avenue de la Paix. Le cas du Pont Butin est différent: il porte le nom du donateur qui a légué un million de francs en 1913 pour son édification, David Butin.
Le Pont de la Coulouvrenière, « la Coulou » comme on dit ici, porte un nom féminin. Ce n’est pas un nom de personne. Une coulouvrenière était un emplacement où l’on s’exerçait à tirer à la coulouvrine, sorte de pièce d’artillerie.
Pont de la Machine, passerelles de l’Ile et du Seujet, suggèrent une saveur féminine à la fois métallique et boisée. Cependant aucun pont ne porte de nom d’une femme connue alors que deux autres ponts genevois sont dédiés à des hommes, en plus du Pont Butin: le Pont Hans-Wilsdorf, du nom du créateur de la fondation caritative connue des genevois qui a financé l’ouvrage, et le Pont de Saint-Georges.
Alors en effet, pourquoi ne pas donner un nom de personne féminine au (peut-être) futur pont ou tunnel (qui entre parenthèses doit impérativement être utile au trafic local genevois comme au transit international)? Un concours d’idée pourrait être lancé. Je commence.
Pourquoi pas Catherine Royaume, dite la Mère Royaume? Selon sa légende c’est le genre de femme de caractère qui se passe de demander si elle peut: elle fait. Le contenu bouillant de sa marmite a mis en fuite des soldats étrangers.
La Mère royaume est certes un modèle de femme populiste et souverainiste, et la fête de l’Escalade si chère aux genevois est symbole de l’érection… des murs et forteresses. Ce n’est pas très inclusif mais ce n’est pas la peste, et à l’époque ils ne connaissaient pas les Bisounours.
Les giratoires de raccordement au réseau routier pourraient suggérer cette marmite, où l’on tourne et tourne, et touille le jus des moteurs, et les sueurs des automobilistes.
Il y a cependant une impossibilité: jamais la Mère Royaume n’aurait cautionné l’invasion du bitume local par des hordes d’outre-Foron (petite rivière frontalière de la rive gauche).
Alors qui? L’ancienne Conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey pardi! Pensez donc: un pont haubané coiffé d’un voile, quel succès auprès des touristes du Golfe. On pourrait même réaliser une attraction pédagogique: pour la parité on ne laisserait circuler les femmes et les hommes que de manière alternative. Trop compliqué? Bon pas de Micheline.
Alors Henriette D’Angeville, la première femme a avoir gravi le Mont-Blanc en 1838. Cela bien que le club alpin suisse fût alors réservé aux seuls membres masculins. Elle a vécu à Genève. Son goût pour les hautes cimes serait en affinité avec des piliers élancés d’un pont suspendu. Le Pont d’Angeville, ne serait-ce pas romantique?
Et si c’est un tunnel, symbole des profondeurs intimes de la Terre et des longues pénétrations? Je le verrais bien baptisé le Tunnel Grisélidis Réal, du nom de feu la célèbre péripatéticienne genevoise qui a su faire respecter son métier et sa personne.
Un tunnel au nom d’une prostituée célèbre? Quel pied de nez aux femrad.