Depuis deux siècle la première feuille du marronnier de la vieille-ville de Genève annonce le printemps. C’est une tradition souriante. Les dates sont consignées dans un registre officiel et sont annoncées publiquement.
Dans un article daté du 21 mars, la Tribune de Genève souligne l’évolution de l’éclosion de cette première feuille. Résultat: elle suit l’évolution du réchauffement. Et, surprise: la tendance a changé depuis 20 ans.
L’image 1 (clic pour agrandir) est extraite du site de la république genevoise. Sa présentation est curieuse. Par un banal effet de perspective la période actuelle est agrandie. Au sommet, le trait rouge horizontal rajouté par mes soins montre l’important degré de chute attribué au graphique. L’extrémité à droite est plus basse que celle de gauche d’environ 20 degrés.
Quel message veut-on faire passer? Au minimum, on veut grossir la période présente. Ou gommer visuellement la tendance au recul depuis une vingtaine d’années?
Sur l’image 2 j’ai disposé la figure à l’horizontale autour de la médiane. Puis, sur la 3, j’ai resserré les lignes des mois (grisées), afin qu’elles soient parallèles entre elles, donc non déformées et grossies à droite comme sur l’original. J’ai également posé des flèches de tendances.
Si les séquences montrées par les flèches sont plutôt courtes, donc non représentative à long terme, elles présentent cependant des irrégularités intéressantes. On voit par exemple un pic de précocité en janvier, vers 1980-1985, puis avant et autour de 2000, et vers 2008-2009.
Ces pics sont concomitants avec les puissants Ei Niño qui semblent à chaque fois, depuis les années 1980, donner un coup de chaud à l’atmosphère. Je pense toujours que l’on sous-estime l’importance d’El Niño et des grands fonds océaniques dans la variation climatique très récente.
On remarque également une concomitance avec les relevés satellites de la basse troposphère (près du sol) fournis par l’Université de l’Alabama à Huntsville (UAH, image 4). On distingue la phase de plateau entre 2000 et 2016, interrompue légèrement en 2010, puis en 2016 par un très puissant El Niño. Depuis la tendance est à la descente, toutefois moins rapide qu’en 1999. Il manque des ouragans, en puissance et en nombre, pour évacuer une partie de la chaleur vers la stratosphère.
Cet indice botanique doit être relativisé. Les végétaux réagissent d’abord aux conditions saisonnières. Les indications apportées par leur feuillaison sont limitées dans le temps et l’espace.
Néanmoins la date d’éclosion de la première feuille du marronnier de la Treille a avancé d’avril à février ou janvier, jusqu’en 2000 environ. Depuis lors, cette éclosion recule à nouveau. Durant cette dernière décennie, la date d’éclosion était 8 fois en mars pour une fois à fin février. L’image 5 de Météosuisse montre encore plus clairement la variation de la date d’éclosion. En l’état, personne n’a d’explication.
Les temps changent. Le climat, lui, varie.
Commentaires
Bonsoir John, j'ignorais que l'éclosion de la première feuille de marronnier était aussi significative. Intéressant.
En vous lisant je me demandais si ces arbres réagissaient immédiatement aux variations de climat.
Peut-être qu'ils s'adaptent lentement et que dans leur grande sagesse ils ont décidé que février c'était vraiment trop tôt pour être sûrs que leurs tendres feuilles ne vont pas geler:-)
Un week-end superbe ici, j'espère que vous avez eu l¡occasion de vous balader.
Et be je savais pas qu’y avait des marrons en Suisse jcroyais qu’y’ avait que du chocolat en vache et du ricola qui y poussaient, c’est quand que vous nous refaites une chanson pour l’eurovision avec les marronniers ;) ?
Bonjour Colette,
Peut-être. :-)
Cependant « décider » serait signe d’une forme d’intelligence active. Peut-on en attribuer à un arbre? En comparaison le saule pleureur est quasiment insensible au type d’hiver. Il fleurit en mars, parfois tôt, qu’il fasse doux ou qu’il y ait de la neige. De quelle nécessité impérieuse est-il marqué? Plus loin: y a-t-il un lien d’utilité mutuelle entre les différentes périodes de floraison des différentes espèces? Hypothèse.
Je penche plutôt pour l’intelligence adaptative passive. Il faut j’imagine de nombreuses générations d’arbres pour qu’une adaptation répétée devienne un caractère acquis et soit identifiable matériellement (ce qui serait l’aboutissement de sa sagesse), et que les conditions climatiques qui provoquent l’adaptation perdurent.
@ Frieda,
:-DDD
Non je ne refais pas, je ne suis pas formaté pur ça.
Dans l'article de la Tribune de Genève, le graphique se présente très différemment de ceux affichés ici. On voit très clairement des points correspondant aux dates d'éclosion et le changement de tendance est net : l’éclosion se passe en hiver, depuis environ 1960 et cela presque sans exception.
L'article est assez dédramatisant parce qu'il fait état d'une grande variabilité.
https://www.tdg.ch/geneve/actu-genevoise/marronnier-eclot-plus-tot-mauvais/story/24124929
Par ailleurs, il me semble me souvenir que l'ancien marronnier a dû être récemment abattu et qu'un nouvel arbre-témoin a été désigné.
Calendula,
le graphique de la TdG est intéressant visuellement. Il accentue l'effet de descente de l'image (donc de débourrement précoce) sans en montrer les nuances.
L'exception a cours depuis 2003 avec une tendance très nette et rapide au recul vers mars.
Le titre de l'article: "Le marronnier éclot de plus en plus tôt, mauvais signe?" est plus alarmiste que le contenu, plutôt dédramatisant en effet, et surtout plus honnête intellectuellement.
La question de l'arbre-témoin joue aussi mais je n'ai pas d'éléments pour l'apprécier.
Je vais revenir sur le sujet, dont je n'ai pas encore fait le tour.
Oui, le titre est un peu alarmiste, mais il y a le point d'interrogation.
En le voyant, je me suis dit : il va y avoir un " mais" dans la réponse.
Le ? a attiré mon attention.
Ces procédés journalistiques peuvent être discutables.
J'ai constaté que dans la presse finlandaise, ils mettent souvent une question en titre, puis une phrase du type : " Deux raisons/ réponses/ astuces surprenantes pour répondre à ce problème."
Il est très difficile de résister à la curiosité ainsi suscitée.
A la lecture de l'article, je suis presque toujours déçue. Et pourtant, je me laisse avoir à nouveau le lendemain ...