La chaleur est pourtant accablante et les températures diurnes dépassent 30° depuis 5 jours. Mais il manque un critère: des températures nocturnes au-dessus de 20°. Le tout pendant au moins trois jours consécutifs. À Genève nous n’y sommes pas.
Les critères de MétéoSuisse sont précis:
« Il y a canicule lorsque les températures se maintiennent plusieurs jours de suite au-dessus de 30 °C et qu’elles ne descendent pas en dessous de 20 °C pendant la nuit. »
Or si à Genève nous avons dépassé les 30° depuis mardi, les nuits sont encore en-dessous des 20° – sauf celle de jeudi à vendredi avec 20,2°. Mais la nuit dernière la température est retombée à 16,5°.
En l’état il n’y a pas de canicule proprement dit, même si les températures diurnes sont de type caniculaire et le ressenti accablant pour de nombreuses personnes. Ce n’enlève rien à la puissance et à la précocité de cette vague de chaleur.
Au point où le record absolu des températures en France a été relevé ce vendredi 28 juin vers 16 heures, à Gallargues-le-Montueux dans le Gard: 45,9°.
Le département du Gard est particulièrement sec et chaud. Il n’est pas étonnant qu’on y ait enregistré le record absolu des températures en France depuis le début des relevés.
Nous sommes ici en climat dit méditerranéen, au même titre que le climat du Maghreb. Le réchauffement le pousse un peu plus dans sa pente naturelle.
La vague de chaleur n’est pas due simplement au réchauffement du sol par le soleil estival. L’air chaud et sec vient du Sahara et s’engouffre vers le golfe du Lion par le sud, via la Méditerranée et l’Espagne.
Là il contourne les Pyrénées et s’écoule vers le nord-est sur la bande côtière, fermée au nord par la Montagne Noire et les monts de Lacaune (image 1). Plus loin les Cévennes forment un butoir.
C’est donc une région propice aux records. Celui de vendredi est énorme. On trouve d’habitude cette mesure dans le sud du Maroc. Toutefois cela n’a duré qu’une seule journée. Aujourd’hui à la même heure on a mesuré 36° « seulement ».
On voit sur l’image 2 (capture écran Ventusky, clic pour agrandir) que vers Castres, à moins de 200 km du record, la température est de 30°. Soit 15° de moins. Les différences de coloration sur la carte montrent les quelques poches localisées de chaleur extrêmes.
Un record est spectaculaire mais il dit assez peu sur le climat puisqu’on constate une variation dans une fourchette de plusieurs degrés depuis plus de 2’000 ans. C’est un indice d’une tendance ou d’un cycle.
Enfin, sans mettre en question l’intensité de cette vague de chaleur, je me pose la question de la fiabilité de la station météo de Gallargues-le-Montueux. Elle n’est pas conforme aux règles internationales.
Une station doit être installée dans la nature (image 3), avec un couvert végétal bas alentour, sans obstacles (maisons, arbres, haies), et les instruments doivent être protégés par une boite ventilée peinte en blanc, posée à deux mètres du sol.
À Gallargues-le-Montueux, en image 4, on voit un mât. Au sommet, l’anémomètre; ses mesures du vent sont influencées par les turbulences dues aux maisons.
Au 2/3 de hauteur du mat soit environ 1,20 m des tuiles, un boîtier noir et blanc est attaché. Ce sont le thermomètre et l’hygromètre, un système reconnaissable aux sortes d’anneaux empilés. Or le boîtier noir et le toit accumulent la chaleur le jour (allez marcher pieds nus sur un toit de tuile à 16 heures l’été…), et l’irradient encore la nuit.
C’est selon les mesures d’une machine de qualité moyenne, placée hors des normes à un emplacement qui favorise le forçage de la température, que l’on annonce avec tant de fracas un record absolu? Je suis perplexe. Même plus: dubitatif. Je ne peux m’empêcher de penser que la réalité doit être en-dessous.
D’ailleurs la description technique d’une machine presque identique admet une variation des mesures de l’ordre de 2° à midi solaire. Peu importe, il fait très chaud. C’est exceptionnel et ne deviendra pas la norme. Mais il faudra s’y faire, quelques jours parfois, certaines années.
La vague de chaleur (et non la canicule) est annoncée en léger retrait. L’arrivée d’orages, qui précèdent une masse d’air atlantique, pourrait d’abord comprimer l’air chaud et très ponctuellement faire gagner encore un ou deux degrés.
Toutefois MétéoSuisse est prudente. Les 37° à 39° annoncés il y a quelques jours sont revus à la baisse. C’était exagéré. Très exagéré.
Enfin pour les records: pour le 26 juin, 2019 détient désormais le record de chaleur. Mais pour le 29 il n’est pas détrôné: 34,2° en 1950. Et le 30 juin de la même année: 35,7. À voir demain.
Commentaires
Loin de moi l’idée de remettre en question les chiffres que vous indiquez, qui découlent certainement d’une source fiable, mais je remarque tout de même que, depuis la nuit du 24 au 25 juin, ma station Netatmo n’a pas mesuré de température inférieure à 20°. Sauf la nuit passée, où nous sommes certes descendus à 19° entre 6h30 et 7h15. Sous réserve des mesures à venir la nuit qui vient, j’ai donc techniquement subi une mini-canicule personnelle. Pourtant, habitant d’une périphérie arborée et en lisière de Rhône, je pensais bénéficier de températures légèrement inférieures à celles de la ville de Genève... Tout fout l’camp, satané dérèglement climatique!
Bonjour Olivier,
En effet il y a des endroits où il y a bien eu "techniquement" une canicule. Pas partout, pas à Genève (Cointrin a mesuré 16,5° quand vous en mesuriez 19), mais chez vous oui!
:-).
Cela varie selon l'environnement immédiat et l'emplacement précis (à moins de 10 mètres ce peut être très influent). Une variation d'un ou deux degrés est vite arrivée. Mais aussi selon l'environnement un peu plus large (p.ex. de 100m à 1 km).
On sent bien, l'été, en se promenant en campagne, les différences de températures selon un type de champ ou un changement de direction d'une brise. On sent parfois, à l'aube, un souffle chaud venu d'on ne sait où.
Je ne sais pas comment cela peut avoir ou non une influence sur votre station. L'îlot de chaleur devrait faire la ville plus chaude, mais il y a probablement une raison locale au fait que ce ne soit pas le cas.
Je ne connais pas les stations Netatmo. J'ai regardé sur le site de la marque. Ça a l'air sympa et facile d'utilisation. Le descriptif la recommande pour un usage domestique devant chez soi. Je n'en sais pas plus.
Les "poches" de chaleur que je signale sur l'image 2 sont assez vastes pour être visibles, mais il y a aussi des micro-micro-climats, des variations selon une pente abritée ou non, etc.
J'ai pris Genève parce que j'y suis, mais en France j'aurais trouvé par régions une canicule "techniquement" réalisée.
En fait c'est un problème pour une bonne partie des stations au sol: un emplacement peu adéquat. À part les stations pro bien placées et protégées, les services météo reçoivent les données de nombreuses stations moins performantes.
J'ai regardé l'emplacement d'autres stations dans la même régions, elles présentent presque toutes des biais d'emplacements, et ce n'est pas forcément parce que l'extension des villes a avalé les emplacement d'anciennes stations plus rurales à l'origine. Certaines plus fiables servent d'étalon pour, au besoin, corriger des moyennes.
Au final les données satellites sont de plus en plus la référence au niveau global car elles ne présentent pas ce problèmes d'emplacement et de variations locales. Mais elles ne permettent pas de savoir s'il a fait plus chaud en centre-ville, au bord du Rhône où vers Jussy.
Cette nuit, minimum de 21.5° mesuré entre 6h et 7h du matin, validé par deux instruments de mesure différents placés à deux endroits autour de mon domicile. La canicule « locale » se confirme ;-) Ceci dit, si vous vous référez à Cointrin, qui est bien plus excentré que chez moi par rapport à la ville et, qui plus est, me semble légèrement plus en altitude, il est en effet possible que des écarts soient aussi importants. Je gage qu’au centre de la ville de Genève, les mesures montreront des températures encore plus élevées.
Netatmo est en effet sympa et très simple d’utilisation, avec bien évidemment les limites inhérentes à ce genre de dispositif non professionnel et possiblement mal placé. Il y a une possibilité de mise en réseau des données des utilisateurs, j'ai parfois jeté un coup d’oeil à celles des autres (aussi bien autour de chez moi que dans des endroits que j’allais visiter), et il n'est malheureusement pas rare d’y trouver des données aberrantes.
Bonjour Homme Libre, ici en Espagne on ne parle pas de canicule pour le moment, mais de vague de chaleur. Pourtant les nuits sont à plus de 20º. et les "grosses chaleurs" durent depuis 8 jours.
En vous lisant je me disais que tout cela est tellement relatif. Avoir des températures diurnes de 33º est certainement caniculaire pour les habitants du Nord de L'Espagne, mais est normal ici et encore plus dans le sud du pays en été.
N'empêche que j'aimerais beaucoup n'avoir "que" 33º aujourd'hui.
Bonne journée!
Ouch, je me suis trompée d'adresse-blog, celle-ci est de TDG, c'est mieux, perdón!
Merci de prolonger. Je me demandfais combien vous aviez ce matin. À Cointrin c'est 19,9.
Mais vous faites bien de préciser que Cointrin n'est pas le centre ville. J'ai oublié de le mentionner. En effet cela peut faire une bonne différence. Quand on va dans le très local les chiffres varient et les moyennes officielles contiennent une part d'approximation. De combien? Difficile à évaluer. Dans certaines régions comme le midi de la France, quand je vois un bon nombre d'emplacements discutables, je pense qu'il y a un forçage vers le haut.
Merci également pour les infos sur le Netatmo, et aussi sur ses limites. Les données aberrantes doivent trouver une explication, mais cela demanderait une analyse très fine de chaque emplacement. En tous cas c'est super de vous lire.
Colette, je n'ai pas tout fouillé mais il y a des critères différents selon les pays. Il y a peut-être un autre critère que j'ignore pour l'Espagne.
Ici la hausse a été brutale, après une période plus mitigée. Cela donne un effet de coup de massue (enfin, c'est une métaphore...) :-)
PS: J'ai corrigé.
Une chose m'impressionne pour l'Espagne, Colette: sur l'image 2 c'est le ruban rouge qui contourne les Pyrénées à l'est, et suit le littoral. C'est un ruban, ou un fleuve d'air très chaud poussé par les montées du sud favorisées par une dépression atlantique, et redirigé par la topographie française.
L'atmosphère n'est pas homogène, elle est faite de mélanges et de contrastes. Je trouve passionnant de pouvoir la visualiser. Ici c'est la chaleur au sol qui est modélisée d'après toutes les données météo. En altitude, à 1500m, pour le même jour et même heure du record, le flux est plus global et fluide sur les Pyrénées car l'effet de barrage par les montagnes sur les basses couches est atténué.
https://www.ventusky.com/?p=48.3;13.2;4&l=temperature-850hpa&t=20190628/1500
HL, merci pour la correction:-)
J’imagine en effet que les pays ont différents critères, ce n'était pas du tout une critique, seulement une info bien sûr.
L'expression "un temps de chien" viendrait de can-canicule, de la constellation du grand chien...mais tant en français qu'en espagnol l'expression s'applique de nos jours au mauvais temps....j'ignore pourquoi.
Tout à fait passionnant, je suis depuis plusieurs jours ces flux sur Ventusky (dans l'espoir sans doute d'un changement).
Merci!
Tout-à-fait, et dans ce domaine je pencherais pour uniformiser les critères afin que tout le monde parle de la même chose.
Seulement, si un Espagnol du sud ne sent pas la même température de la même manière qu'un autre du nord, les critères de l'uniformisation parleront à certains et pas à d'autres. Et donc le discours sur le phénomène sera possiblement différent lui aussi.
Ceux qui sont le plus habituellement touchés, pour des raisons entre autres géographiques, soit les Espagnols, dramatisent moins que les français qui inondent les médias de canicule et d'émissions spéciales.
"J'ai pris Genève parce que j'y suis, mais en France j'aurais trouvé par régions une canicule "techniquement" réalisée."
C'est bien de le préciser en commentaire, mais cela aurait été tellement mieux de le mettre en titre. Car tel qu'il est sans précision du lieu, ce titre est mensonger, alors que c'est bien la France qui a annoncé une période de canicule, Sans compter que le ressenti peut être différent d'une définition technique.
Il y a au moins 6 département qui ont connu des températures jamais vues. Il faudrait cesser de minimiser cette vague de chaleur exceptionnelle. Pour la suite on verra. La vague de 2003 avait été exceptionnelle par sa durée accompagnée de sécheresse.
Le titre est d'autant moins adéquat que la première carte concerne l'Occitanie...
Bon, je viens de vérifier. Il faudra complètement remanier une partie de votre présentation, car il contient des propositions trompeuses ou mensongères.
1) Vous confondez météofrance avec une station amateur.
2) Cette station amateur pour la journée du 28 annonce une température maximale de 44.1°, On est loin de la température annoncée par météofrance qui a ses propres instruments de mesure.
3) Le site de cette station amateur est ici:
https://www.infoclimat.fr/observations-meteo/archives/28/juin/2019/gallargues-le-montueux/000OZ.html
Je me demande pourquoi vous avez publié une photo de ce site sans le lien adéquat.
4) Le forçage des températures maximales par la position de la station amateur tombe à plat.
Maintenant c'est à vous de voir. Mais je ne peux m'empêcher de penser que vous avez un parti pris dans cette question des températures caniculaires en France,
Pour remettre certaines choses à leur place:
https://global-climat.com/2019/06/29/459c-nouveau-record-de-chaleur-en-france/
@ Daniel:
Je précise deux fois dans le billet qu'il s'agit de Genève:
"À Genève nous n’y sommes pas."
et:
"Or si à Genève nous avons dépassé les 30° depuis mardi, les nuits sont encore en-dessous des 20° – sauf celle de jeudi à vendredi avec 20,2°. Mais la nuit dernière la température est retombée à 16,5°."
De plus je mentionne expressément les critères de MétéoSuisse avec un lien. Je pensais que c'était assez clair. Votre accusation de mensonge, un peu répétitive, tombe à faux. Tout au plus le titre est-il une invitation à lire en proclamant le contraire de ce que les gens ressentent. Quand on lit on comprend, je pense. Vous peut-être pas.
La première carte introduit les mouvements de l'air d'une manière localisée pour illustrer un phénomène de concentration de chaleur. Elle prépare la deuxième qui donne la vue globale de ce phénomène à l'échelon de l'Europe de l'ouest et cela, je l'espère, permet d'identifier par soi-même la non-homogénéité de la masse d'air.
Je ne minimise certainement pas l'intensité de cette vague de chaleur. Je la souligne, au contraire. Je ne nie ni réchauffement ni records, qui sont inévitables puisqu'il y a une phase de réchauffement.
Mais je ne me contente pas d'une annonce télé, surtout quand cette annonce alimente un contexte que je n'approuve pas.
Mais, oui, c'est très chaud. Et on y survivra.
Nous devons nous adapter, et pour cela il me paraît indispensable de développer un regard positif.
Alors, oui, peut-être, exprimer ma perplexité en voyant dans quelles conditions un record national est annoncé, peut paraître minimiser.
Ce n'est pas mon intention, rien dans mon texte ne le suggère sinon peut-être une différence notoire de ton et d'angle de vue d'avec les alarmistes.
Bonjour
Un petit lien, merci les obs...
https://www.polemia.com/hysterie-caniculaire-dictature-climatique/
La température la plus élevée de nuit mesurée sur mon balcon - plein sud - a été de 15.7° depuis le début des grandes chaleurs en précisant que j'habite Morges à environ 10 minutes à pied de la gare.
Merci pour l'info, Lise.
Daniel, j'ai trouvé une piste pour la station météo. Météo-France a même publié aujourd'hui une page explicative. J'y reviens demain.
Le résultat de mes recherches fait l'objet d'un nouveau billet. Il est en ligne:
http://hommelibre.blog.tdg.ch/archive/2019/07/02/chaleur-sur-l-europe-45-9-les-details-du-record-299604.html