Alors que la France est plutôt bon élève dans la gestion de ses forêts à risque, d’autres pays semblent n’avoir pas encore pris la mesure de l’importance de les protéger. Résultat: le sud de l’Europe brûle. Le sud, ou presque.
Je reprends le titre d’un article du Figaro. Un titre qui montre une fois de plus la surenchère médiatique et le gonflement des événements:
« Le sud de l’Europe ravagé par les flammes »
Les médias sont parfois énervants. Je ne m’y fais pas. C’est quoi, le sud de l’Europe? C’est une profonde portion de territoire située entre la Méditerranée et les grandes chaines de montagnes (Pyrénées, Alpes, Carpates, Balkans).
Elle s’étend de Lisbonne à Istanbul, et même Alanya au sud de la Turquie. Soit plus de 4’500 km d’ouest en est et une profondeur de 500 à 1’200 km selon les régions.
Soyons clairs: ce n’est pas le sud de l’Europe qui brûle. Aussi intenses soient-ils, ces feux ne représentent que de petits points sur la Terre, comme les montrent les deux images de la © Nasa.
Cela ne veut pas dire qu’ils sont négligeables. Mais ils ne couvrent que de relativement faibles surfaces, si l’on sort de l’effet loupe des télévisions et de leurs reportages au coeur du brasier.
Je minimise pas l’intensité de ces feux. Je tente de placer les événements liés au climat dans une perspective plus large et ne minimise que le discours médiatique superlatif. Je refuse de manière fondée la panique collective qu’on veut nous imposer et à la philosophie qui se profile derrière.
La France est bon élève. Elle a pris la mesure de la gestion sylvestre depuis les années 1960, avec des résultats selon des études que j’ai consultées.
D’abord l’origine des incendies:
« À 90 % d’origine humaine, lorsque l’origine du départ de feu est connue… (…) Les départs de feux sont généralement d’origine accidentelle, à l’exception de certains départements du littoral méditerranéen où les actes de malveillance sont la cause principale. La présence diffuse et croissante de l’homme et des activités humaines dans les massifs forestiers et en parallèle l’absence de débroussaillage autour des constructions concourent à augmenter les risques de départs de feux. »
D’autre part la forêt brûle moins selon une étude statistique portant sur les années 1978-2008, image 2 en nombre. image 3 en surface. Quant aux causes, image 4, elles sont généralement involontaires bien que l’on recense une forte part de malveillance, en augmentation. Je rappelle qu’une température même de 50° au sol ne peut enflammer une brindille.
Le premier document cité plus haut propose des solutions, celles qui marchent plutôt bien en France:
Surveiller les forêts - La surveillance comprend le guet terrestre fixe, à partir de tours de guet, ou mobile en patrouilles, complétées par les dispositifs aériens de prévention. La surveillance permet de détecter au plus tôt les feux naissants et ainsi de les circonscrire rapidement;
Aménager et entretenir - L’aménagement de l’espace forestier permet de prévenir les feux ou de diminuer les temps d’intervention, grâce :
– à l’entretien des massifs boisés ;
– au débroussaillement ;
– à la création d’allées pare-feu permettant de limiter les départs de feux et réduire les zones exposées;
Dans l’aménagement il faut aussi mentionner la déprise agricole:
« D’après l’IFN, les surfaces forestières ont augmenté de 20 % sur les 30 dernières années. La déprise agricole, c’est-à-dire l’abandon définitif ou pour une longue période de l’activité de culture ou d’élevage, est l’un des éléments explicatifs de cette augmentation. L’abandon des surfaces agricoles conduit à la colonisation de ces surfaces par des friches très sensibles au feu. »
Autrefois cultivés, ces espaces agricoles non boisés coupaient la progression du feu. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
On peut aussi faire évoluer les forêts avec des espèces mixtes ou moins vulnérables, et penser l’urbanisme en tenant compte des risques. Élémentaire, mon cher Watson. Beaucoup de choses peuvent être faites, on les connaît. On peut commencer demain matin.
Mais pour modifier par exemple les zones de production agricole des États-Unis, qui assèchent le sud-ouest du pays alors que la région semble être dans un cycle de sécheresses, ce sera plus difficile.
Et puis s’il changent tout et que la pluie revient, à quoi cela aura servi? Alors ils font comme toujours: espérer des jours meilleurs.
Quant aux feux de Sibérie, trop compliqués à éteindre, la Russie laisse faire la nature. Comme avant l’implantation humaine.
Commentaires
« Aussi intenses soient-ils, ces feux ne représentent que de petits points sur la Terre… »
Et pourtant, ils sont bien nombreux, dans le sud-est de l’Europe, en ce samedi 7 août !
Voir, ci-dessous, une autre image de la NASA, dans le blog de Météo Suisse, « Beaucoup de pluie au Tessin » :
https://www.meteosuisse.admin.ch/home/actualite/meteosuisse-blog.subpage.html/fr/data/blogs/2021/8/chi-troppo-e-chi-troppo-poco.html
Donc oui, il est possible de relativiser, mais alors dans les deux sens !
Ils sont nombreux, oui. Mais si l'on va dans le détail, on doit nuancer l'image. Vue en petit les feux ont un air de grandes plaques qui couvrent d'immenses régions.
Mais en regardant sur le site source:
https://worldview.earthdata.nasa.gov/?v=29.08248259001016,35.43947432291278,33.66149279612265,38.47343471001184&l=VIIRS_NOAA20_Thermal_Anomalies_375m_All,MODIS_Aqua_Thermal_Anomalies_All,MODIS_Combined_Thermal_Anomalies_Day,MODIS_Combined_Thermal_Anomalies_All,OrbitTracks_Aqua_Ascending,Reference_Labels_15m(hidden),Reference_Features_15m(hidden),Coastlines_15m,VIIRS_NOAA20_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),VIIRS_SNPP_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),MODIS_Aqua_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),MODIS_Terra_CorrectedReflectance_TrueColor&lg=true&t=2021-08-07-T22%3A48%3A42Z
et en zoomant fort, les gros points deviennent de tout petits points. En cliquant sur mles points on fait apparaître les données techniques. On constate que beaucoup de ces feux ont une aire très réduite, quelque dizaines ou centaines de m2, et une irradiance faible.
En regardant il y a 9 ans le 8 août 2012, il y a déjà beaucoup de feux dans la même région. C'est une situation récurrente, alors soit "c'est e destin", soit on décide de s'occuper des forêts.
https://worldview.earthdata.nasa.gov/?v=-21.977777563299217,24.950634190474002,53.78246863111495,75.14785488325481&l=VIIRS_NOAA20_Thermal_Anomalies_375m_All,MODIS_Aqua_Thermal_Anomalies_All,MODIS_Combined_Thermal_Anomalies_Day,MODIS_Combined_Thermal_Anomalies_All,OrbitTracks_Aqua_Ascending,Reference_Labels_15m(hidden),Reference_Features_15m(hidden),Coastlines_15m,VIIRS_NOAA20_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),VIIRS_SNPP_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),MODIS_Aqua_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),MODIS_Terra_CorrectedReflectance_TrueColor&lg=true&t=2012-08-08-T22%3A48%3A42Z
Et en 2008, année moins chaude:
https://worldview.earthdata.nasa.gov/?v=-22.317007202488387,16.498805716921282,71.27861289941563,78.51338769275641&l=VIIRS_NOAA20_Thermal_Anomalies_375m_All,MODIS_Aqua_Thermal_Anomalies_All,MODIS_Combined_Thermal_Anomalies_Day,MODIS_Combined_Thermal_Anomalies_All,OrbitTracks_Aqua_Ascending,Reference_Labels_15m(hidden),Reference_Features_15m(hidden),Coastlines_15m,VIIRS_NOAA20_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),VIIRS_SNPP_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),MODIS_Aqua_CorrectedReflectance_TrueColor(hidden),MODIS_Terra_CorrectedReflectance_TrueColor&lg=true&t=2008-08-08-T22%3A48%3A42Z
Pour moi c'est une raison de plus de ne pas tout prendre en bloc.
Pour les pluies au Tessin, c'est encore un classique, quand les masses d'air humide se heurtent aux Alpes. C'est arrivé assez souvent dans le passé.
L'influence du réchauffement (anthropique ou non, ou partiellement anthropique) est, je trouve difficile à quantifier.
Il est clair qu'un feu de forêt peut avoir plusieurs causes : accident, négligence d'entretien, départ de feu volontaire ou naturel. Une période de chaleur et de vent contribue également au désastre. Mais on est toujours dans la météo. On ne peut donc pas directement attribuer tel ou tel incendie au climat. La seule chose qui puisse impliquer le réchauffement climatique c'est peut-être la fréquence des phénomènes et leur intensité. Mais cela reste compliqué à prouver car il est nécessaire de faire des observations sur une longue période, comme cela a été fait pour la fonte des glaciers. On voit bien que certains journalistes ne se soucient pas de toutes les précautions qu'il est nécessaire de prendre avant de désigner le coupable. Seul le consensus, parmi les scientifiques, me paraît légitime.
A quand un petit billet sur les mensonges et inexactitudes d'articles de propagande, comme celui-ci:
https://www.lematin.ch/story/une-vague-dair-brulant-sur-le-sud-de-leurope-775950439533