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Canicule : mais tous ne mourront pas…

Très alarmée, une jeune activiste affirme lors d’un débat: « 40°! Vous vous rendez compte? On ne peut plus vivre, ils vont mourir! Nos enfants vont mourir! » L’actuelle vague de chaleur, qui n’est techniquement pas encore une canicule à Genève, relance l’alarmisme.

 

Température-Max_2-m-au-dessus-du-sol_ICON-Auto_20220618TZ.jpgVivables

Avec raison? Je partage ici à nouveau mes recherches et réflexions. Et je reprends quelques propos, ceux d’un présentateur météo d’abord. 

« La France va cramer ». C’est une image, bien sûr. La France ne va pas cramer. Elle subira peut-être des incendies de forêt, comme toujours depuis au moins les années 1950. Des forêts peuvent brûler, qui repoussent ensuite. Des maisons peuvent brûler près de ces forêts. 

Mais la France reste vivable, il y a de l’eau au robinet, de l’ombre par endroits, des forêts rafraîchissantes, la boulangère qui fait ses pains, des bouchons aux heures de pointe.

Selon l’activiste sur le plateau l’humanité est menacée de disparition en de vastes régions:

« 40° ça veut dire que plus rien ne pousse. Ça veut dire qu’on ne peut pas vivre là-bas. Dans 20 à 30 ans toute l’Amérique centrale c’est fini. Une bonne partie de l’Afrique, l’Australie, l’Asie du sud-est, on peut plus y vivre. »

À 40° il y a des végétaux qui poussent. Certains pays ont des moyennes très élevées. Les températures maximales à Douala au Cameroun passent régulièrement la barre des 40°. De même pour Libreville au Gabon. Et puis, quelques températures maximales ne font pas une moyenne, or elle parle de 40° comme d’une moyenne.

En Algérie, au Botswana, en Égypte, au Cambodge, en Chine, pour n’en citer que quelques-uns, les extrêmes ont déjà atteint 40°, 45°, 50° et même plus.

Dans ces régions il y a des villes, des villages, des habitants. Cela veut dire qu’on peut y vivre. Il y a certes des contraintes, comme partout. Chaque région a les siennes. 

 

cni22-03.pngMinoen

Parfois on quitte les grandes villes trop chaudes en été, comme en Chine à Chengde:

« C’est une ville chinoise quelconque: peuplée, bruyante, en pleine mutation, juxtaposant des vieux quartiers pas très reluisants et des grandes tours. L’intérêt de la ville réside dans le fait qu’au XVIIIè et XIXè siècles, les empereurs mandchous venaient y passer six mois par an avec toute leur Cour, fuyant la chaleur estivale étouffante de Pékin. »

Le réchauffement favorise la venue de vagues de chaleur précoces. Mais seul il n’explique pas tout de cette précocité, dont on trouve déjà des traces dans le passé. Le réchauffement saisonnier normal, soit l’accumulation estivale de chaleur par l’action du soleil, même avec 1° de plus attribué au CO2, ne saurait produire seul des pics à 40° dans le nord de l’Europe.

La chaleur qui s’installe en Europe vient du Sahara. J’expliquais précédemment qu’elle est aspirée par les pressions sur l’Europe de l’ouest et centrale. On ne peut rien y faire. Mais cela survient-il plus souvent?

Ces dernières années on pourrait le penser. Cependant je n’accorde pas à la répétition d’épisodes rapprochés une valeur de tendance de fond. Les certitudes exigent du recul et plus de temps.

On peut me dire que si la maison brûle on n’a plus le temps. Oui, mais la maison brûle-t-elle vraiment? On estime qu’il a fait plus chaud qu’aujourd’hui à l’époque minoenne de l’Holocène, à la période romaine, ou lors de l’optimum médiéval. On vivait alors.

 

cani22-01.pngMoutons

Une étude universitaire a par exemple montré qu’il n’y avait pas de glace dans les Alpes du Tyrol il y a environ 6’000 ans, et que les températures étaient plus hautes qu’aujourd’hui.

Il faut aussi se rappeler que l’inclinaison de la Terre évite aux régions tempérées de subir des chaleurs annuelles continues. Toute vague de chaleur est forcément limitée.

Cela même en Espagne, même à Séville où les 45° sont régulièrement atteints depuis  40 ans en saison chaude. Il y a de grandes villes, des cultures, des populations nombreuses. On n’y meurt pas en masse, même à 45°.

L’Espagne, justement, pose problème car aujourd’hui elle favorise et amplifie les vagues de chaleur venues du sud. J’ai abordé ce problème dans ce billet. Toutes les forêts de Méditerranée ont été surexploitées depuis 3’000 ans.

Les besoins militaires en bois ont explosé après la Reconquista. Mais le plus destructeur a été les moutons. Les grandes transhumances ont dévasté les forêts centrales, appauvri et tassé le sol. Or régénérer les sols est un processus très long.

« Les conséquences environnementales sont évidemment massives, et terribles. Au fil des années, les moutons grignotent peu à peu la couverture forestière de l’Espagne –exactement comme les lapins ont pu le faire, au XIXe et XXe siècles, en Australie. Dès la fin du XVe siècle se multiplient les sécheresses, qui sont en grande partie dues à ces changements environnementaux. »

 

cani22-02.pngL’eau

Le climat y est déjà excessif, et ce n’est pas dû au réchauffement. Le nord-ouest, balayé par les vents de l’Atlantique, est humide. Le sud-est dominé par l’anticyclone du Sahara est semi-aride, aride ou désertique. Et le sol sec favorise les hautes températures diurnes. Les autorités ont tenté depuis des décennies de modifier la répartition des eaux sur le territoire.

Aujourd’hui le sud de l’Espagne est cultivé intensivement avec des méthodes très coûteuses en eau, ce qui aggrave le problème.

La combinaison d’une météorologie déjà problématique avec la destruction du couvert végétal a probablement sonné le glas de ce pays. Le manque d’eau pourrait ruiner 50% de son territoire. Il va se désertifier, comme le Sahara le fit il y a 6’000 ans, alors qu’il était vert et parcouru de cours d’eau. La mousson d’Afrique se serait alors déplacée pour des raisons encore hypothétiques.

Cela m’intéresse. Quel mécanisme global peut modifier durablement les grands courants aériens et assécher de vastes régions? Est-ce ce qui se passe aujourd’hui entre le Sahara et l’Europe? Je l’ignore et il faut encore creuser.

La désertification est en cours en Espagne. Son couvert végétal ne tempère plus les vagues de chaleur saharienne. Au contraire elle y contribue, elle les amplifie par une sorte de « pré-chauffage » local. Cet air passe allègrement l’obstacle des Pyrénées. 

Dans quelques siècles, si rien n’est fait pour reforester et améliorer la distribution d’eau, l’Espagne ressemblera au nord de l’Algérie.

Et d’ici là elle va encore nous chauffer.

 

 

Catégories : Environnement-Climat, Météo 5 commentaires

Commentaires

  • La canicule . . . Tout le monde s’affole devant un phénomène naturel contre lequel les écologistes peuvent s’époumonner en vain. Croire que l’homme peut maîtriser la nature relève de l’utopie infantile. Il y a tout d’abord une cause naturelle. Après une ère de glaciation arrive un réchauffement probablement dû à une modification de l’angle de l’inclinaison de l’axe terrestre. Le climat aride remonte vers l’hémisphère nord et le climat tempéré bascule vers l’hémisphère sud. Encore une fois personne n’y peut mais. L’autre cause est humaine, la dégradation de l’environnement par une surproduction pour satisfaire une surconsommation. Trop tard, pas moyen de revenir en arrière !
    Les météorologues n’ont rien prévu ou les gouvernements ont bien été avertis mais, comme d’habitude, n’ont rien fait. On attend les catastrophes pour les constater puis on invente le sparadrap à mettre sur sa jambe de bois !
    Vous dites que l’Espagne est condamnée à la désertification. Peut-être bien mais ce pays, sous l’influence des arabes, a su merveilleusement s’adapter à ses conditions naturelles en développant un modèle d’irrigation en milieu aride qu’il transformé en un merveilleux jardin, la Huerta de Valencia et son Tribunal des eaux. 40° C en Espagne est courant. On travaille de bonne heure, on fait la sieste pendant les grandes chaleurs et on retravaille jusqu’au coucher du soleil et personne n’en meure.
    Si les hommes avaient su économiser les ressources, éviter le gaspillage et respecter la nature on n’en serait pas là. Quant aux incendies et feux de forêt, si les hommes les avaient entretenues, vidées de leur bois mort pour se chauffer et cuire leurs repas comme il y a une cinquantaine d’années en Europe et comme cela reste le cas dans les pays dits ’pauvres’, si les campeurs ne laissaient pas des braises en partant et si les automobilistes fumeurs renonçaient à jeter leurs mégots par la fenêtre de leurs voitures, peut-être que le réchauffement climatique ne serait pas devenu une nouvelle pandémie !

  • Je viens de déposer un com sur le post précédent sans avoir lu celui-ci et ça corrobore ce que j'avais constaté : vents du sud prononcé, moins d'arbres.

  • En effet Gilbert, et je cherche à comprendre cette situation météo récurrente qui est une fabrique à vagues d'air chaud.

  • @ Bernard
    Je pense que votre analyse rejoint celle d'Homme-libre.
    D'une part, le climat n'a pas besoin de l'homme pour se modifier. On sait que la planète Mars a vraisemblablement connu des fleuves, des lacs et des mers par le passé, alors qu'elle n'était pas habitée car on ne trouve aucune trace de civilisation. Mais cela n'a pas empêché cet astre de devenir un désert.
    D'autre part, comme vous dites, sur Terre, l'action humaine n'est pas étrangère aux chaleurs. La déforestation, le bétonnage, la concentration urbaine, la circulation, la consommation mondialisée, l'élevage intensif, le gaspillage, etc, ne sont pas de nature à protéger, à long terme, les êtres vivants. Mais, si notre espèce a une influence non-négligeable sur la météo et le climat, l'homme est capable d'en avoir conscience. Il est donc en mesure de corriger ses actes négatifs et de freiner le réchauffement climatique. Celui-ci sera forcément lent, même s'il est irréversible. Il y aura sans doute des pics difficiles à supporter mais il faut faire confiance à la faculté humaine de s'adapter et trouver des solutions. Par conséquent, Homme-libre a raison de dénoncer les extrémistes écolos qui ne cessent de terroriser la population.

  • En ce qui concerne l'adaptation l'agroforesterie se développe.
    En Suisse on constate que deux variétés d'arbres sont très perturbées par les vagues de chaud. On envisage de planter à leur place des arbres moins sensibles à la sécheresse, comme le chêne.

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