À Brienz, séquence érosion et nécessité du doute.
C’est un très gros morceau de montagne qui menace le village grison. Sa chute est attendue dans les deux semaines et les habitants ont été évacués. L’événement en cours a pris une importance médiatique mondiale.
C’est ainsi que les montagnes s’aplanissent, que les glaces et les eaux creusent des vallées. Les roches réduites en sable et en poussière enrichissent les sols en minéraux que nous retrouvons ensuite dans notre assiette pour notre plus grand bien. L’érosion c’est bon pour la santé.
Ah, la Terre!... On contemple un paysage de cimes, on plonge le regard en contrebas, et l’on oublie les catastrophes inouïes qui ont dû se produire pour limer les masses rocheuses émergées de son ventre incandescent.
On n’imagine pas tout ce qu’il a fallu de chaud et de froid, de sec et de mouillé, inlassablement répétés, parfois extrêmes, pour faire bouger ces monstres que sont les montagnes. Sans érosion la planète serait hérissée de pics éternels trop hauts pour être habitables. L’érosion c’est bon pour la vie.
Les membres du comité pour le oui à la loi sur le climat qui passe en vote le 18 juin en Helvétie ont sauté sur l’occasion de Brienz. Ils ont publié une affiche (image 1, clic pour agrandir) reliant la situation, soit un affaissement de montagne, avec le réchauffement.
Colère d’un élu de droite UDC, Michael Graber, cité dans 20minutes:
« C’est complètement hors de propos et carrément pervers que le comité du oui exploite le sort de ces gens pour son idéologie utopique. »
Les membres du comité ont finalement modifié leur position avec cette déclaration de Sophie Fürst, co-directrice de la campagne:
« Selon les spécialistes, la menace d’éboulement à Brienz n’est pas la conséquence directe du changement climatique. »
La diffusion de l’affiche est arrêtée.
L’érosion naturelle, elle, suit son cours, quelle que soit l’influence ou non du réchauffement.
Il n’y a pas besoin d’invoquer le réchauffement pour comprendre sur l’image 2 qu’un tel événement devait arriver Copie Google, Brienz est en bas). Selon la vidéo figurant dans l’article du 20minutes, la déforestation et des épisodes pluvieux plus violents pourraient être en cause.
S’il y a eu déforestation (après l’incendie du village en 1874) évidemment que le sol n’est plus fixé. Pour les précipitations j’ai consulté des archives régionales et je ne vois rien de probant.
À Albula par exemple, lieu proche de Brienz et disposant de relevés météo (image 5 météoblue), les précipitations les plus abondantes – donc en général les plus intenses – sont à hauteur de 10 à 20 mm par 24 heures, et exceptionnellement à 50 mm. On est loin des épisodes méditerranéens, où 200 mm et davantage peuvent tomber en quelques heures.
Et puis qu’importe? Le processus de glissement de la montagne est normal. Il s'est accéléré ces dernières années? Encore normal. De fait il s’agit d’un phénomène naturel et toute variation climatique peut l’influencer, mais l’actuel réchauffement ne semble pas jouer un rôle dominant dans ce processus qui est en route depuis des décennies.
C’est l’érosion et c’est bon pour la planète.
Et il se trouve que Brienz est situé sur une zone géologiquement instable. L’image 3-4 synthétise la situation (© Hausler et al., 2021, Geophysical journal international, source). Une situation classique, naturelle, inévitable.
À force d’exagérations et de surenchères, la croisade climatiste confine à la désinformation. Les activistes pourraient bien émousser l’intérêt et l’adhésion du public à cause de leur stratégie de communication.
Ils contribuent au sentiment que les catastrophistes amplifient systématiquement les annonces, comme le fait le GIEC sur la montée des océans (voir note précédente). Avec ce faux-pas sur Brienz, au fond, ils contribuent à justifier la nécessité (ou même l’impérative nécessité) de garder ses doutes, face au grand plongeon dans l’inconnu qu’on nous impose.
Albula, Grisons:
Commentaires
Et votre foi anti-réchauffement climatique, soulève bien des montagnes.... Bon dimanche.
@ frenkel,
Je ne dirais pas la chose ainsi. Je ne suis pas anti-réchauffement, puisque celui-ci a lieu. Mais je ne le crains pas, et je ne crois pas à la surenchères d'annonces dramatisantes. De plus je redoute les décisions précipitées, prises dans l'urgence.
Bonne journée.
Cher Monsieur,
Avec votre petite BD en fin d'article, tout est dit !
A propos de la surenchère sur le réchauffement, il suffit de regarder la météo sur la 2. Les journalistes de cette chaîne sont tenus de produire des infos qui vont toutes dans le même sens. Mais à force de remplir la cruche à la même fontaine, il arrive un jour qu'elle se casse...
La pub nous disait autrefois : "la montagne ça vous gagne" -
tout naturellement.
Belle journée.
C'est un peu l’hôpital qui se fout de la charité.
Alors oui le comité a exagéré dans son affiche.
Mais que l'UDC se plaint d'une affiche mensongère , alors que leurs affichent ne font pas mieux (loi sur les minarets, etc..)
Quand à votre petite BD à la fin, je ne comprend pas ce qu'elle fait là. Les experts n'ont jamais dit que c’était du au réchauffement climatique ce qui se passe à Brienz.
D'ailleurs on pourrait la retourner contre vous: imaginons que tout les experts sont d'accord pour dire que ce n'est pas du au réchauffement climatique, et qu'un expert est contre cette idée. Faite vous partie du groupe majoritaire?
Je ne trouve pas que ce soit pareil. Les affiches de l'UDC sont souvent réductrices et grossissent à la caricature le sujet illustré. On a souvent la même chose avec les affiches du PS ou des Verts. Ces grossissements sont l'expression d'opinions. On le sait et l'on peut faire la part des choses. Aucune affiche de ce type n'oriente mon vote.
Par contre l'affiche sur Brienz n'exprime pas une opinion mais prétend délivrer une vérité scientifique. Les messages ne sont pas du même ordre. Je ne les compare pas.
Pour la mini BD: tout le monde est facilement propulsé expert ou relayant un expert, dans les médias et les associations. Tous ou presque ont clôt le débat et dénigrent assez systématiquement ceux qui doutent.
C'est l'ambiance.
Pour votre question, il est possible en effet que je fasse dans ce cas partie du groupe majoritaire. C'est ponctuel et délimité, et même dans ce cas j'irai vérifier quelques points car le sujet me passionne depuis très longtemps, et j'ai besoin de comprendre par moi-même. Mais je n'écarterais pas une hypothèse différente si elle est plausible. Et pour moi l'invocation du réchauffement pour chaque événement un peu intense suscite ma curiosité critique.
En matière d'érosion il faut peut-être rester prudent dans l'interprétation des événements de ce type.
Le réchauffement peut accélérer certains processus, c'est d'ailleurs normal, c'est le cas avec les sécheresses, mais chaque cas doit être étudié en détails. Invoquer le réchauffement de manière générale et imprécise revient à évoquer une sorte de diable, une création abstraite multi usages. La peur est un aliment de choix pour ce diable. Pour ma part je refuse de me soumettre à cette peur entretenue.