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Delphine, Romane & Elsa (partie 26)

Episode précédent: voir ici.

murs-provence.jpg- Aïcha! Aïcha!

Romane grimpe maintenant l’escalier qui va vers la cuisine et l'appartement de Bouki.

- Aïcha! Il faut que je te dise!

Sur l’esplanade en haut de l’escalier, à l'ombre d'un parasol, Aïcha écosse les haricots avec Bouki et Gilles. Quatre chats sont couchés sur le muret. Romane, débordante de ferveur, raconte son aventure dans le ravin. Gilles l’écoute. Il n'est pas surpris.

- Il se passe parfois des choses étonnantes dans ce ravin. Certaines personnes disent y avoir vu un elfe, ou une sorte de présence qui faisait penser à un elfe. C’est un lieu de méditation.

Romane paraît déçue.

- Ce que je viens de vivre n’est pas unique?

- C’est unique. Mais tu n’es pas la seule.

- Comment est-ce unique si je ne suis pas la seule.

Bouki sourit.

- C’est unique à toi. Ta vision t’appartient. Personne d’autre ne la vivra.

- Ce n’est pas qu’une vision: c’est incroyable, j’entendais les sons de très loin, comme si mon audition était multipliée.

- Ici des personnes du groupe travaillent avec des représentations d’animaux, reprend Gilles. Chaque animal possède des qualités particulières, et le vivre développe en nous ces qualités.

- Ils vivent l’animal? Comment font-ils?

- J’en sais ce que l’on me raconte. Il y a d’abord une identification de l’animal par ce que l’on connaît de lui. On cherche ensuite quels aspects nous intéressent pour notre recherche personnelle. Ils laissent passer un jour ou deux, puis un soir ils partent dans la nature.

- Et alors?

- Alors ils entrent dans la peau de l’animal, continue Bouki. Ils ne parlent plus l’humain. Les sons et les mouvements sont inspirés de leur animal.

La jeune femme à la panthère arrive de la salle où le cours de l'après-midi se termine, et se mêle à la conversation.

- Les prédateurs mangent, les proies sont mangées, comme dans la vie! dit-elle en riant.

- Quand ils sont mangés, ils ont perdu?

- Non. Il n’y a pas de perdant. Ce n’est pas le but.

- Mais s’ils sont morts?

- Ils revivent chaque fois autant qu’ils veulent. On apprend quelque chose d’être proie et de mourir.

- Et comment se comprennent-ils? demande Romane, intriguée par ce qu’elle ne sait comment nommer: ce jeu de rôle? Cette sorte de théâtre?

- Nous parlons l’animal. Nous somme l’animal.

- C’est comme toi dans le ravin. Tu es devenue l’animal.
colorado-rustrel_0166.jpg
Bouki comprend bien ces choses-là. Elle sait les dire.

- Et vous jouez où?

- Guillaume nous a parlé d’un endroit extraordinaire avec des falaises d’ocre.

- Le Colorado. Une ancienne carrière.

- Voilà, dit Aïcha, les haricots sont prêts. De quoi as-tu besoin?

- Si tu veux bien préparer la table et sortir le pain? Vous mangez sous la tonnelle?

- Oui! dit la panthère.

- Il faut tout transporter.

- Tu m’aides Romane?

Pendant que les deux filles s’activent un nuage vient s’étendre sous le soleil. Le premier depuis des semaines. Une traîne d’orage. D’un orage qui ne pleut ni ne tonne. Un souffle se lève avec l’ombre. La chaleur ne diminue pas mais on a l’impression de mieux respirer. La voix de Paul s’élève du chemin.

- Ah non! Non! Pas de nuage!

Elsa rit. Depuis le bois nos mains moites ne se quittent pas. Nous arrivons au gîte.

- Et bien, quoi? Une contrariété? demande Gilles appuyé sur le muret.

- Non, ce n’est pas possible. Le seul jour où il ne faut pas de nuages!

- Pourquoi?

- A cause de la soirée ouverte à l’observatoire ce soir. Nous y allons. Alors, pas de nuage, justement pas aujourd’hui!

Tout le monde rit. C’est assez cocasse une plainte contre un pauvre nuage inoffensif alors que jour après jour la canicule tasse un peu plus les gens, la plaine et les collines. Jusqu’à Lure et son sommet pelé qui semblent au loin se dessécher comme un melon brûlé. Je propose à qui le souhaite de se joindre à nous. Romane est partante. Aïcha a du travail. Bouki répète sa musique. Gilles viendra.

Abeilles-sur-cadre-necta.jpgElsa se joint à Aïcha pour préparer la table. Je la regarde marcher. Son mouvement me remplit. Fluide, tranquille. Et cette clarté dans ses gestes: tout d’elle est limpide. Je respire à son rythme. Elle se retourne et me sourit.

- Tu viens?

Je les rejoins et prends la pile d’assiettes blanches que Bouki m’indique. C’est une petite ruche ici. Nous volons là, là, lalala, il y a dans ce remue-ménage quelque chose qui apaise et fait du bien.


A suivre.


(Images: 1: vieux murs - Paysage provençal. 2: Colorado provençal - Rustrel. 3: ano)



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