On dirait la Porte des Etoiles. On s’attend à débarquer sur une nouvelle planète avec quelques aliens bigarrés et des ciels mauves sur fond de planète turquoise. Je pourrais traverser la Porte, fouler le sable de Gliese581g. D’ailleurs, dans l’anneau du scanner, il y a par moment le même genre de bruit que dans la Porte des Etoiles.
Inhomogénéités
Mais ce n’est pas un voyage extraterrestre. C’est plutôt une exploration intracorporelle. Presque onze mois depuis l’opération. Un cancer, cela se suit. Régulièrement. Par des prises de sang et par le scanner. Parfois l’IRM. Je continue ici à en parler, pour deux raisons: par désir de donner un sens à une maladie en général mystérieuse et insaisissable et pour la dédramatiser. Mes précédents billets sont regroupés en un pdf qui peut être téléchargé ici.
En gros, après la forte anémie post-opératoire du printemps, cela allait. De la fatigue, encore, mais il y a pire. En octobre, deuxième scanner post-opératoire, après celui de mai. Le pancréas va bien, les cicatrices aussi, les ganglions qui semblaient un peu plus gros que la moyenne (de 1 mm) n’ont pas bougé. Mais...
Mais il y avait des taches au foie. Des inhomogénéités. On ne peut dire ce que c’est. Tous les cas de figure sont possibles, y compris d’éventuelles métastases. Décision est prise avec l’hôpital de rapprocher le prochain scan et de voir s’il y a évolution. J’ai passé un mois et demi dans l’attente de ce nouveau scan. De nombreuses réflexions m’ont accompagné. Et aussi trois jours de saignements intestinaux qui m’ont remis en anémie, mais rien de grave au point de vue organique. Le scanner a parlé: il a montré que rien n’a bougé dans le foie et les analyses de sang indiquent qu’il fonctionne normalement: pas de quoi s’inquiéter donc. Parole de scanner!
L’avenir
Pendant cette période j’ai pris un positionnement clair. Je ne me vois pas recommencer une deuxième opération, peut-être une troisième, comme cela arrive. Ni une chimio - je n’ai pas fait celle proposée en post-opératoire car elle supposait 6 mois d’incapacité. Or, j’ai des engagements professionnels vis-à-vis de mes étudiants et je leur dois d’aller à terme.
De plus les dégâts professionnels suite à la fausse accusation dont j’ai été l’objet sont loin d’être réparés. En 20 ans j’avais construit une réputation solide et positive; il n’a fallu que quelques années pour être sali. Et comme beaucoup de gens ne réfléchissent pas par eux-mêmes alors même qu’une longue procédure a rétabli ma vérité, la bataille pour ma totale réhabilitation n’est pas finie. Je ne ressasse pas, je constate. J’aurais pu commencer à engranger les résultats d’années de travail: la procédure a cassé cette dynamique. C’est dur et ma situation reste précaire. Toutefois je ne peux rester sans rien faire face à cette situation. Je dois trouver de nouvelles ressources. Je ne peux donc envisager d’opération ou de traitement lourd sans prendre le risque de voir tout s’arrêter définitivement. Ce plan-là ne m’intéresse pas. D'ailleurs ce n'est pas à l'ordre du jour. Et si cela était un jour, l'hôpital a entendu et, je crois, compris ma position. Il la respecte.
Enfin je veux rester droit dans mes bottes et ne pas avoir pour horizon une éventuelle succession d’opérations, avec perte progressive de mes moyens. J’irai le plus loin possible et à fond. J’ai acquis une belle maturité professionnelle, je suis rempli d’une expérience que je souhaite transmettre aussi par l’écriture, donc pas le temps de me plaindre ni d’hésiter sur la route à suivre. J’ai l’envie d’aller plus loin. Dans ma tête et dans mon coeur, ma vie est loin d’être finie. Après on verra. L’avenir ne m’appartient pas. Mais je n'ai pas d'inqiétude.
Le cheminement intérieur
Je sens aussi que je n’ai pas encore touché le plus essentiel de ce que je dois apprendre et prendre de cette maladie. Je ne prétends pas qu’une démarche intérieure suffit à modifier son évolution, mais je ne l’exclus pas non plus, par l’amélioration de la transmission nerveuse (moins de stress) et de l’immunité.
Je sais que je dois encore toucher quelque chose de plus profond. Cela viendra. 2011 sera davantage placée pour moi sous le signe du chamanisme. La démarche chamanique est une recherche de lien entre quelque chose d’intérieur, physique ou psychique, et les forces de la nature. J’ai déjà abordé cette démarche et je sens avoir à y aller plus à fond. Lors d’une récente séance de thérapie en décodage biologique, dont le but est de déprogrammer les restes de stress passés, j’ai rencontré le loup. C’est la deuxième fois qu’il revient. Peut-être ne m’avait pas quitté mais je ne l’avais pas encore compris. Acculé, le loup perd ses moyens, ou réagit en pure agressivité, mais pas forcément avec efficacité.
Je dois maintenant prendre de lui son endurance, son calme, plus encore qu’avant car je connais mes points faibles: s’il le faut le loup fait des dizaines de kilomètres dans le froid et sans manger pour arriver là où il veut. Il sait aussi pénétrer profonde dans la nature, y développer une écoute intime des bruits, odeurs et signes. Je vais programmer un temps d’immersion dans la nature l’été prochain pour marcher avec le loup en moi.
Le loup, bel animal. J’en ai déjà parlé à propos de la pianiste Hélène Grimaud. Et pourtant l’icône de mon blog est le busard. Je garde les deux, chacun à une place.
Le feu de la vie
J’ai toujours autant le feu de la vie en moi. Ecrire, dire, communiquer, faire avancer. Le blog est un des espaces où je m’investis. Ma profession aussi. Ce sont deux choses différentes. Autant je peux être perso, parfois même polémique sur mon blog, autant je suis plus mesuré et sais faire preuve d’équanimité dans mon travail. Ce qui se dit autour d’une table ou sur un forum, sur la politique, la religion ou la société, n’est pas se qui se dit en cabinet de soin ou de coaching. J’ai appris à bien faire la part des choses. Pour moi il reste toujours prioritaire de soutenir quelqu’un dans sa démarche, quelles que soient ses opinions et les miennes.
Je m’investis aussi dans l’écriture où je pense avoir certaines qualités. Bref, je vais droit où la vie me porte et m’appelle. Je peux vivre quoi? Un an? 10 ans? 30 ans? J’irai jusqu’au bout le plus droit possible et avec la même passion qui m’a toujours animée. Mais avec aussi un peu plus de recul et de sagesse.
Ce qui est fort appréciable.
Un seul regret là où j’en suis: le nom de ma famille a été sali par la procédure judiciaire. J’aurais souhaité que l’accusatrice, confondue lors du procès, reconnaisse la vérité. Elle ne risque plus maintenant de poursuite pénale. Seulement le désaveu de son entourage. Ce qui est peu en comparaison du tort qu’elle m’a fait.
Mais je dois peut-être, là encore, apprendre à renoncer à toute vraie reconnaissance, et simplement faire mon chemin selon ce qui me semble intérieurement juste. Continuer à aimer la beauté, à chercher à comprendre le monde et l'humain.
La justesse intérieure: un bon repère.
Hélène Grimaud, la femme aux loups:
Commentaires
J'espère que le crabe ne vous embêtera plus. Soyez fort, comme le loup et l'admirable femme aux loups!
Merci Kissa. Oui ce sont de bons modèle, tant la femme que les loups. Bonne soirée!
Je ne suis pas touché sorry et pourtant je vous lis depuis juin 2009. Courage et bonne chance quand même,
Impressionnée par le feu de la vie, je n’ai pas su écouter ...
Quant au langage, je sais déjà pas danser avec les loups, trop forts pour moi, alors parler ...
Bien à vous Hommelibre (o_~)