"La seule condition requise pour recevoir le message de Rachmaninoff est la sincérité; la sincérité et l'absence de tout pédantisme; la sincérité et le consentement à l'ivresse qui nous emporte. Rachmaninoff était le dernier des grands poètes russes du piano, le dernier des musiciens inspirés - car en ce temps-là le mot inspiration avait un sens."
Vladimir Jankélévitch.
Il y aurait tant à dire sur ce musicien russe des profondeurs de l’âme et des vastes émotions. Beaucoup l’ont dit si bien. Tous les textes de ce billets sont repris du site sur le compositeur.
"Rachmaninov était un compositeur de grande aristocratie, de grande élégance. J'aime qu'il ait toujours eu le courage de ses opinions ; il s'est placé à contre-courant du langage de son époque."
(Hélène Grimaud dans ses Variations sauvages, Pocket, 2003)
Les vocalises
Rachmaninov l’a répété toute sa vie : la mélodie est la musique, sa base absolue, son principe moteur. Écrite en avril 1912 (elle concluait le recueil des 14 mélodies opus 34), puis révisée en septembre 1915, pendant la première guerre mondiale, la célébrissime Vocalise du compositeur russe reste sans doute, en ce domaine, une de ses inspirations les plus pures et les plus parfaites.
Qu’on s’imagine une musique sacrée, se déployant généreusement, avec cependant des accents douloureux, des airs de gouffre. Qu’on s’imagine une musique religieuse, invoquant on ne sait quelle divinité, et pourtant élégiaque, noblement désenchantée, comme recueillie, calmement, devant une Providence négative : celle qui accable le sort des hommes et des peuples. On aura alors la Vocalise de Rachmaninov, animée à la fois par la sérénité et, quelque part, par une sourde et muette complainte…
La cantatrice: Anna Moffo (27 juin 1932 - 9 mars 2006) était une soprano américaine d'origine italienne. Elle possédait une voix de soprano lyrique au médium particulièrement riche et à l'ample tessiture et dotée d'une formidable technique de colorature, admirée autant pour ses dons vocaux et dramatiques que pour sa grande beauté.
Anna Moffo, Leopold Stokowski - Rachmaninoff «Vocalise», op. 34, #. 14
Commentaires
Merci pour la belle voix. La vocalise, je la joue au violoncelle, même si elle ne mérite pas cette maltraitance! Tous mes vœux.
V. Jankélévitch était un passionné de musique et la Russie parlait à son coeur (à son âme). Belle voix et cette vocalis eu "violoncelle" n'est certainement pas une maltraitance; le son de cet instrument est chavirant.
Pour poursuivre avec Jankélévitch, mais avec Fauré :
"Il est presque incroyable, à notre époque si désespérément sèche, qu'on puisse parler de charme et qu'une musique ose s'adresser fraternellement au cœur de chacun... Et pourtant c'est un fait : la grande phrase du sixième Nocturne trouve d'emblée, comme une amie, le chemin du cœur. A condition, bien entendu, qu'on en ait un."
[JANKÉLÉVITCH VLADIMIR, Fauré et l’inexprimable. « De la musique au silence », Plon, Paris 1974
Ambre: Il y a une très belle version des vocalises au violoncelle. L'instrument se prête bien au thème.
Fauré, ah Fauré... Une place à part. Même dans la douceur il a toujours un souffle. Jamais fatigué! Et ma foi, bien d'accord pour ce qui est de la nocturne no 6. Difficile à décrire. Un équilibre étonnant entre douceur, puissance paisible et cet autre chose qui est l'étrangeté de Fauré.