Météo capricieuse, nuages inattendus, vents contraires: Solar Impulse n’a pas pu relier Bruxelles à Paris hier. Parti en fin d’après-midi, tentant de profiter d’une fenêtre météo, il a rebroussé chemin presque à mi-parcours. L’avion solaire n’a pas été en mesure de charger suffisamment ses batteries faute de soleil. Une partie du vol devait être effectué de nuit et le risque de panne était trop grand.
Après le vol sans pépin de Payerne à Bruxelles il y a quelques semaines c’est le premier échec du prototype. Echec? C’est ainsi que la tentative d’hier est qualifiée par le staff du projet:
«L'échec de samedi est cependant vu comme une expérience utile. "Nous avons beaucoup appris sur les ressources de l'avion exposé à des conditions difficiles" a expliqué le pilote André Borschberg (ats).»
Il s’agit alors d’un échec utile. Dans ce monde que l’on divise un peu trop vite et schématiquement entre «winner» et «looser» - gagnant et perdant - il est bon de se rappeler qu’un échec est d’abord une expérience et une source d’apprentissage.
L’échec, si l’on veut nommer ainsi le non-aboutissement d’une tentative, est un «mal» nécessaire. Un enfant qui apprend à marcher échoue de très nombreuses fois, avant enfin de sentir comment garder son équilibre. Il ne marche pas du premier coup. Pareil pour aller à vélo, jouer d’un instrument, apprendre une langue: tout apprentissage est jalonné d’échecs.
On n’apprend jamais aussi bien que par l’expérience. Cela a été étudié: lire un manuel produit un résultat assez maigre, alors que faire soi-même produit le meilleur apprentissage. Il faut donc expérimenter, accepter l’échec, ne pas le craindre, le regarder en face et en analyser les raisons.
Dans le cas de l’avion solaire, comme de toute innovation technologique, il est important de connaître les points faibles de la machine. Pour les connaître il faut les rencontrer. C’est à cela que servent les vols expérimentaux, de même que tous les tests que l’on fait subir par exemple aux voitures ou aux programmes informatiques. L’expérience révèle les lacunes et permet de les combler. En refusant l’échec, en l’évitant, en s’obstinant sans apprendre, on n’apprend effectivement rien.
Mais pour apprendre de l'échec on doit l'accepter comme un maître au sens pédagogique du terme, et non comme une perte ou une déchéance. On doit analyser l’expérience objectivement, sans affect, afin de corriger ce qui a mené à cet échec. Les parents devraient tenir le rôle de coach auprès de leurs enfants et leur apprendre à voir un échec sans déception, positivement.
Solar Impulse est un premier prototype. Un second, plus grand et plus performant, fera le tour de monde. L’échec d’hier, en révélant des fragilités, est donc une étape importante en vue de la réussite finale du projet.