Le Colisée, le Parthénon et nombre d’autres monuments de l’antiquité ont été construits en bonnes et lourdes pierres. De l’épais, de l’imposant, du solide. L’époque était au durable. Et pourtant, sur les milliers de bâtiments construits en dur autour de la Méditerranée et ailleurs en Europe, il n’en reste que très peu entiers.
Comment est-il possible qu’il ne reste que des ruines? La simple usure du temps expliquerait-elle les dégradations, comme le vent, la pluie et le gel érodent progressivement les montagnes?
La plupart des destructions ne sont pas d’origine naturelle. Le Parthénon par exemple était initialement composé des colonnes, de murs fermant une salle et d’un toit. Les nouvelles attribution religieuses de ce temple ont eu comme conséquence la modification de l’architecture originelle. Les pillages et les guerres ont contribué à la destruction. En 1687, dans un épisode de la guerre entre l’empire ottoman et la république de Venise, il a été gravement détruit par une explosion de poudre à canon. Des frises décoratives ont été emportées et sont exposées dans des musées.
Laissés à l’abandon, transformés, détruits lors d’invasions, pillés, les grands ouvrages n’ont pas reçu au cours des siècles l’attention dont ils sont l’objet aujourd’hui. A Rome et dans différentes villes italiennes les pierres et marbres étaient utilisés comme matière première pour la constructions de nouveaux édifices. C’est ainsi qu’à l’époque dite de la Renaissance italienne:
«A Rome, trop de beaux monuments ont été détruits ou reconvertis tant bien que mal en forteresses privées ou églises, sans que les maîtres de l'heure, au Quattrocento, et les mécènes ne songent à les restaurer. Au meilleur temps de ce "retour à l'antique", aucune ruine n'est remise debout et chacun continue allègrement temples, théâtres, amphithéâtres comme véritables carrières. Chacun continue allègrement à exploiter temples, théâtres et amphithéâtres comme de véritables carrières. Les chaufourniers allument toujours leurs fours à chaux qui brûlent jour et nuit, chargent l'air d'âcres fumées sur le champ de Mars et en plein coeur de chaque forum; les marbriers arrachent des blocs de marbre, des colonnes et des architraves, des balustrades et des pierres tombales aux monuments déjà malmenés par le temps; ils les utilisent sur place, pour les palais des cardinaux ou des banquiers florentins, et en envoient à différentes régions d'Italie : à Pise et à Lucques, au baptistère St Jean de Florence, à Orvieto. Ces carrières romaines de marbre antique faisaient toujours concurrence à celles, naturelles celles-ci, de Carrare ; cela revenait moins cher et le respect de la Rome ancienne, tant célébré dans les écrits, n'était pas assez fort, dans les années 1500, pour mettre un terme à de telles pratiques dévastatrices.»
Jacques Heers, Le Moyen-Âge une imposture. Editions Tempus.
Si aujourd’hui on considère que les anciennes civilisations font partie de notre mémoire collective et de notre évolution, et que leurs traces doivent être préservées, certaines époques n’ont pas témoigné de la même préoccupation.
Commentaires
"certaines époques n’ont pas témoigné de la même préoccupation."
Je n'aime pas trop cette formulation...
Il faudrait peut-être dire que les gens qui côtoient ces monuments ne sont pas les mêmes que ceux qui les ont construits. Antonio Hodgers nous apprend qu'un tiers des Suisses sont d'origine étrangère. Quand nous en serons à deux tiers, plus personne ici ne saura plus ce qu'est le chocolat, les banques et le fromage. Mieux vaut ne pas parler de l'horlogerie...
Et les Sandrine Salerno, les Ada Marra, les Antonio Hodgers auront accompli leur mission : venger leurs parents "exploités" par les méchants Suisses...