Nom: Transatlantic Free Trade Area (Tafta), ou Accord de Partenariat Transatlantique (APT), ou TIPP (Transatlantic Trade and Investment Partnership), ou encore PTCI (Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement). Fonction: créer une zone de libre-échange euro-américaine forte de plus de 800 millions d’habitant, représentant à eux seul la moitié du PIB mondial et le tiers des échanges commerciaux.
Dans les bénéfices attendus: la création d’emplois et une croissance économique.
Obstacles non-tarifaires
Le texte est à l’étude de manière très discrète par des représentant de la Commission de Bruxelles et du gouvernement américain. Le débat semble cependant devenir public et la critique du projet est de plus en plus documentée. La suppression des barrières douanières n’est pas le seul objectif de Tafta:
« L’accord visera à éliminer les obstacles inutiles au commerce et à l’investissement y compris les obstacles non tarifaires existants. »
Le problème se situe en particulier sur ces obstacles non tarifaires existants. Il s’agit des normes sociales et environnementales. Les normes de sécurité alimentaire par exemple ne sont pas les mêmes des deux côtés de l’atlantique. Le mandat des négociateurs précise que «l’Europe conservera « le niveau de protection [qu’elle] juge approprié ». Côté américain, le président Barack Obama a assuré ne pas avoir l’intention de signer un accord qui « affaiblirait la protection des consommateurs [et] les normes environnementales », car il n’en a « aucun intérêt ».
Soit. Mais alors pourquoi mentionner les normes non-tarifaires comme un obstacle? Quelles sont les garanties que l’on n’aura pas un nivellement par le bas, soit un alignement des meilleures règles sur les moins bonnes? La sécurité alimentaire a un coût. Ce coût se répercute sur le prix de détail. Les fabricants qui ont le moindre coût de production (donc éventuellement la moindre sécurité alimentaire) sont avantagés - à moins d’aligner les règles sur le plus petit dénominateur.
Des tribunaux délocalisés
Le Tafta prévoit que ce ne sera pas le cas. Mais ce pourrait être un voeu pieu, car l’accord envisage de donner plus de pouvoir aux entreprises contre les Etats - comme c’est souvent le cas en ce qui concerne les accords internationaux. Ce plus de pouvoir signifie en particulier qu’une entreprise peut attaquer un Etat non devant sa justice mais devant un tribunal arbitral international, qui pourrait faire appliquer les règles de non-concurrence les plus favorable et faire fi des normes de sécurité. Par exemple les OGM pourraient être imposés aux pays qui n’en veulent pas.
« L’accord devrait viser à inclure un mécanisme de règlement des différends investisseur-État efficace et à la pointe, assurant la transparence, l’indépendance des arbitres et la prévisibilité de l’accord, y compris à travers la possibilité d’interprétation contraignante de l’accord par les Parties. »
Selon Le Monde:
«Délocaliser le règlement des différends des conflits vers une cour internationale place, à l'inverse, Etats et entreprises sur un plan d'égalité, favorisant du même coup les intérêts commerciaux, comme de nombreux précédents le confirment.
En 2012, l’Equateur a été condamné à payer 1,77 milliards de dollars à Occidental Petroleum par le Cirdi. Sa faute : avoir mis fin par une décision politique à sa collaboration avec le géant pétrolier après que celui-ci eut lui-même violé leur contrat. Le tribunal arbitral a jugé que cette décision soudaine violait le traité d’investissement bilatéral Etats-Unis-Equateur.
Autre exemple : le cigarettier Philip Morris a utilisé en 2010 et 2011 le mécanisme d’arbitrage pour réclamer plusieurs milliards de dollars de réparation à l’Uruguay et l’Australie, qui mènent des campagnes anti-tabagisme, contraires selon lui à leurs accords de libre-échange respectifs avec la Suisse et Hong-Kong.»
Absence de pédagogie et de questionnement démocratique
Les populations seront démunies contre les conséquences de cet accord. Les règles de sécurité contredisent la Tafta. Señorita Europe pourrait se retrouver nue et sans protection.
Ajoutons que cet accord vise également à compléter l’Otan par un volet économique ouvertement tournée contre la Russie, comme l’analyse le New York Times:
«Une résurgence de la Russie signifie que l’Occident a besoin de trouver des moyens de coordonner et de consolider ses intérêts. Ainsi, le partenariat est le projet le plus ambitieux à ce jour pour lier les deux côtés de l’Atlantique dans une union de l’Ouest plus étroite, et d’ajouter un pilier économique à l’ancien pilier militaire représenté par l’OTAN».
La carotte d’une croissance économique hypothétique et la division de l’Europe (l’Ouest contre la Russie). Les lignes directrices de la géopolitique mondiale sont de plus en plus claires.
L’absence de pédagogie de cette négociation fera encore monter la défiance à l’égard des gouvernants européens ainsi que les sentiments nationalistes et anti-américains.
Danse, Señorita, danse dans ta robe de Tafta: tu es nue devant l’aigle.
Commentaires
La multinationale américaine X ne peut pas exploiter ses OGM sur le territoire Y européen pour cause du vote démocratique négatif d'un pays souverain? = manque à gagner du vorace vautour économique = millions d'indemnités versées à l'Amérique à travers une amende salée = le peuple souverain d'un pays souverain condamné à payer par l'impôt une somme d'argent se chiffrant en dizaines voir centaines de millions de dollars à une société américaine privée juste parce que la pauvre malheureuse ne peut pas vendre ses produits sur sol européen. Les peuples du monde donnent gratis leur argent à des monstres qui les sucent sans même avoir commencé le moindre investissement sur leur territoire! Chantage monstrueux des monstres. C'est pareil pour l'exploitation du gaz de schiste et sans doute, à l'avenir, dans bien d'autres domaines de la génétique et des sciences à la pointe du "progrès" dont des citoyens plus ou moins éclairés se méfient des bienfaits vantés par un monde de fric et de contrats juteux.
Nos regards du côté de Genève, aujourd'hui... Il ferait beau avoir l'Ukraine du côté du libre-échangisme américain. OGM, je vous aime... Sortir de la dépendance de l'ours russe pour tomber dans la dépendance de l'aigle américain, quelle drogue animale est la moins toxique pour cet état tampon (sic)...et pour nous-mêmes Européens... Euh...La Suisse, t'as gueule!... T'es nulle part sur la carte des intérêts et tu sers exclusivement de coffre-fort à tous ses salauds si bien intentionnés.