Cela se passe à Cologne, en Allemagne, lors d’une foire d’art. Une dame est nue sur des praticables. Elle se nomme Milo Moiré. Elle est «performeuse». Entendez par là qu’elle fait de l’art en direct, devant du public. D’accord, le mot «art» est ici peut-être excessif ou inapproprié.
Mais enfin, dans une époque où l’on peut vendre même son bébé, pourquoi pas? Si le fait d’être vue et éventuellement de vendre son produit est le critère de l’art... Pour moi c’est plutôt une mise en scène, le but ici étant de se faire connaître. Et c’est réussi. Milo Moiré - ou son agent - a su attirer la presse et diffuser sa prestation (voir plus bas).
Laquelle prestation se résume au fait de faire tomber des oeufs depuis son vagin. Elle pousse et regarde le fruit de sa haute inspiration chuter sur ce qui va devenir une toile, une toile qu’elle va tenter maintenant de vendre.
Les oeufs sont de différentes couleurs - pas forcément appétissantes. J’imagine qu’elle les a remplis de colorants avec une seringue. Ou que certains sont pourris? Au fait, combien en met-elle à la fois? Quelle est le contenu de son vagin? Si, si, la question est opportune. Parce que c’est très pratique pour faire ses courses sans sac à commission tout en gardant les mains libres pour envoyer des textos. Il faut seulement éviter de serrer les jambes dans le bus pour que l’omelette ne précède pas la poêle.
Tiens, cela me fait penser aux grandes artistes que sont les Pussy Riots, celles que des occidentaux adulent pour avoir chanté dans une église à Moscou et pour s’être enfilé un poulet dans le vagin entre les rayons d’un supermarché. Le sexe sert à tout.
Eh bien chacun en pense ce qu’il veut. Pour moi c’est juste se foutre de la gueule du monde de parler de performance et de vendre cela dans l’enceinte d’une foire d’art. Je ne vois pas où est la valeur, et s’il se trouve une personne assez stupide pour acheter la toile c’est à désespérer de l’humanité.
L’art aujourd’hui est-il devenu le refuge des nuls? Le mépris du public a-t-il atteint un tel degré? Le mépris de soi-même et le peu d’exigence personnelle sont aussi à la mode. Or l’art véritable procède d’un travail intuitif ou intellectuel qui met en branle des compétences que l’oeuvre doit démontrer. Ici rien n’est démontré, sinon un coup de pub comme il est facile d’en faire. La production et la consommation de stimuli visuels ne définit pas l'art.
Que l’on montre de vraies performeuses: Catherine Destivelle dans la Tour du Diable aux Etats-Unis (image 1), ou la marathonienne à bout de force Gaby Andersen-Schiess (image 2), sublime de dépassement de soi dans cette arrivée hallucinante aux JO de Los Angeles en 1984. Là je parle de performance. Pas spécifiquement artistique? Et alors? Ici l’art est le produit direct de la vie. Ici elles touchent quelque chose de sublime. Elles pourraient inspirer un peintre ou un écrivain.
Milo Moiré, à côté, c’est déjà has been. Ce n’est pas que la nudité publique me dérange: je ne serais pas choqué de voir les gens faire l’amour dans les parcs. Non, c’est l’abrutissement des foules que représente ce genre de prestation. Si encore elle avait proposé, comme performance, puisqu’elle fait dans le sexe, une masturbation avec orgasme permanent pendant plusieurs heures, là je m’inclinerais. Nous vivons dans une société hypersexualisée, allons au bout des intentions de la révolution sexuelle! Cela permettrait un débat de société ô combien plus intéressant que ses oeufs pondus.
On pourrait dire, bien sûr, que la pression musculaire de son vagin est comme la pression dans les doigts du peintre. Ou que la provocation sociale est à prendre en compte. Mais où est la provocation quand elle est payée, qu’elle souhaite vendre son crachat vaginal, et qu’elle ne risque même pas une intervention policière? La bourgeoisie conformiste se porte de plus en plus tôt.
Pour ma part je pense que ce n’est ni de l’art ni de la culture. C’est du rien. C’est du démantèlement. Ou la fin de l'art subversif. La fin de l'art éveilleur de conscience. Ou la fin de l'art. Car il y a des critères, il y a une discrimination à garder quand on propose une prestation supposée être au-delà du quotidien (puisque «l’artiste» est payée pour).
Les oeufs pondus-crachés par le vagin de madame Milo Moiré? Délire urbain déraciné! Bullshit!
Commentaires
Excellent blog comme d'habitude : je suis tout à fait d'accord avec vous.
Rien à ajouter, tout est dit et très bien écrit.
Magnifique pour l "image de la femme déjà que les 3/4 des hommes nous prennent pour des pondeuses......j 'avoue que nous progressons à grands pas vers le monde de l 'art.......
cette femme est comme les féministes une imposteur.
ça c'est de l'art
http://8jmc24.free.fr/index.php?post/2008/10/19/Iman-Maleki
où ça
http://www.insecula.com/oeuvre/O0029596.html
Cela m'a rappeler ceci, même si c'est très différent au fond:
Un jeune peintre japonais se suicide en 1959 en se jetant du haut d’un immeuble sur une toile étendue dans la rue. La mort de l’artiste accèdera au statut d’oeuvre posthume par le legs de sa toile ensanglantée au Musée d’Art Moderne de Tokyo.
Milo Moiré : artiste perfomeuse