J’ai traversé Genève en voiture à quelques reprises ces derniers mois. Mon impression est qu’il est pire d’y circuler sous l’ère Barthassat que sous l’ère Künzler. Les ondes vertes en particulier sont aléatoires, voire inexistantes. Les feux clignotants oranges mis en place à certains carrefours la nuit ne modifient pas la donne.
De la Place des Nations à Chêne-Bougeries par exemple, il arrive de devoir s’arrêter à chaque feu tricolore, même à 23 heures. Les vacanciers étrangers roulent entre 25 et 40 km/h. Les motos et scooters déboulent et dépassent comme des fous à droite ou à gauche, souvent au péril de leur propre vie. Pas étonnant que Genève détienne la palme des accidents de deux roues. La pression sur la mobilité est telle que des comportements de plus en plus dangereux apparaissent.
La solution est-elle de supprimer un moyen de transport au profit des autres? Je ne vois pas comment une interdiction croissante peut être synonyme de liberté individuelle. La mobilité est un atout majeur dans la prospérité d’une société. Le blocage progressif étouffera peu à peu cette prospérité.
Il manque singulièrement de nouveaux cadres d’analyse de la mobilité. Par exemple on devrait hiérarchiser les moyens de transports selon leur plus ou moins grande facilité à se mouvoir en ville. Ceux qui ont le plus de facilité à bouger et s’adapter sont les piétons et les vélos. Les trams sont ceux qui ont le plus de difficultés. Les priorités de circulation pourraient s’inspirer de cette hiérarchie. Piétons, bus et voitures ne sont pas à égalité de fonctionnement et l’on doit en tenir compte. C’est parfois déjà le cas mais pas systématiquement.
On pourrait aussi brancher le système des feux tricolores sur une observation en temps réel de la circulation, par capteurs ou satellites, afin d’établir des ondes vertes ou des limitations selon le besoin du moment. Cela permettrait de diminuer les temps morts inutiles, comme les arrêts aux feux quand personne ne traverse notre route.
A défaut d’une conception novatrice, dont le ministre des transports genevois semble pour le moment incapable, le département de Monsieur Barthassat tente des petites mesures pour gratter quelques possibilités de rouler. Le projet d’autoriser la circulation aux deux roues motorisés sur les voies de bus est de celles-là. C’est mieux que rien. Les motos et scooters sont rapides et démarrent sans délai, ce qui pourrait s’harmoniser avec les transports publics sans les ralentir - enfin, l’expérimentation nous le dira.
La voie publique réservée aux TPG serait ainsi utilisée plus rationnellement, car actuellement elle est vide de tout occupant quand il n’y a pas de bus. Quel gâchis, quel choix irrationnel! Cela concourt probablement à faire de Genève une des villes les plus encombrées, davantage que Paris!
« Genève est la ville suisse connaissant les pires embarras de circulation, selon l’indice TomTom 2014, rendu public à la fin de mars par ce fabricant néerlandais de navigateurs GPS. La cité du bout du lac apparaît pour la première fois dans ce classement qui se base sur les mesures de vitesse recueillies dans l’énorme base de données de la firme. »
Alors, oui, Monsieur Barthassat, osez penser, osez agir. On se fiche des Verts qui vous critiquent. Is ne savent qu’empêcher et culpabiliser. Ils n’ont pas d’idées audacieuses à proposer. Ils sont immobilistes et ultra-conservateurs. On voit ce que va donner la « plage de Genève », qu’on pourrait nommer la « misère de Genève ». Essayez de jouer au ballon en famille sur le bout rikiki que le WWF veut bien concéder aux habitants - WWF sur qui vous vous êtes malheureusement aligné pour éviter la confrontation politique et juridique. Si vous vous étiez battu, si vous aviez imaginé d’autres solutions, cela aurait pris plus de temps certes, mais on échapperait peut-être à cet ersatz de plage qui fera de Genève la risée du monde.
Couper ses propres ailes est très genevois, malheureusement.
Ce n’est pas un seau d’eau glacé sur votre tête qui fera bouger Genève, Monsieur Barthassat. Prenez des risques pour améliorer vraiment la vie des gens, tous transports confondus.
Image 2: Haute Ecole du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève (Hepia).
Commentaires
Bonjour John, Merci de botter un peu le cul à notre ministre des transports.
Au sujet de la hiérarchisation je ne suis pas sûr de comprendre.
Pour moi, le moins mobile doit être prioritaire. En ce sens je fustige ces boutons pressoirs qui font arrêter un poids lourd pour laisser passer un piéton qui sera déjà passé avant que le feu passe au vert.
Mon expérience de circulation à moto en Inde m'a convaincu que c'est au petit de s'écarter et c'est très bien ainsi.
Rendre le piéton prioritaire est pour moi une aberration qui va à l'encontre de toutes les lois et surtout du bon sens premier, terrien, matériel du principe de survie.
Oui Pierre, je veux dire la même chose à propos des priorités. Je partage cette logique de la hiérarchisation des priorités. C'est un apprentissage qui devrait se faire partout: le petit bouge, c'est sa survie d'abord, et aussi une adaptation aux conditions réelles. Mettre le petit au même plan que le gros c'est lui désapprendre l'adaptation et l'encourager à surestimer ses droits au détriment du premier de ces droits: rester en vie.
Cela n'empêche pas de mettre la sécurité des personnes en avant. Mais c'est justement dans cet esprit qu'une hiérarchie doit être reconnue. La tôle d'une voiture n'est pas de même nature que la peau d'une personne. On ne peut tout remettre sur une organisation mécanique de la société.