Le libre choix est roi. En particulier du côté des amours. Choix de la personne, choix de faire ou non l’amour. Le consentement est aujourd’hui largement admis comme marqueur fondamental des relations. Et tant mieux.
Mais s’assurer du consentement peut devenir une entreprise compliquée. Pour éviter tout glissement vers la contrainte sexuelle, on doit s’assurer que les deux partenaires sont en accord. Un guide a été publié en Suède à l’attention des hommes sous le titre: Comment s’assurer qu’elle est consentante et désirante - un guide pour les hommes qui ne veulent pas violer. L’image 1 (cliquer pour l’agrandir et la lire) donne une idée du parcours à réaliser avant de conclure.
Ce schéma contient des idées de base évidentes pour tout mâle. Car, contrairement au biais supposé par l’intitulé du sous-titre, les mâles dans leur écrasante majorité ne veulent pas violer. Mais que d’obstacles avant d’atteindre le Graal.
Quelle que soit la logique de ce schéma il ne peut servir de modèle dans la réalité. Les choses se passent de manière plus naturelle, ressentie ou instinctive que ce qu’il laisse entendre. On ne dit pas à froid à une femme: je désire faire l’amour avec toi, en missionnaire, en levrette, j’aimerais te lécher, es-tu d’accord? On ne demande pas le consentement à chaque étape, et encore moins si des signes sont lancés.
Cela permettrait de valider chaque étape. Car une femme peut entamer des préliminaires, puis dire non, et ce sera non. Mais par respect de l’homme et de sa libido, peut-être serait-il préférable qu’une femme qui commence des préliminaires soit d’accord d’aller au bout.
Le désir de l’homme n’est pas un jouet.
De plus l’homme a vocation, par nature, à insister. Sa morphologie le commande lors d’une défloration. Ce que l’on attend d’audace et de courage de l’homme passe entre autres par l’insistance dans une entreprise, quelle qu’elle soit.
Jeu amoureux
De plus encore, à cause de la dissymétrie physique des sexes, l’homme demande et la femme ouvre ou non sa porte. Elle en joue parfois, laissant attendre l’homme pour le tester. Le jeu amoureux passe ainsi par des avancées-résistances. Il permet à la femme de rester maîtresse d’elle-même et à l’homme de montrer sa vaillance et son ingéniosité, voire sa patience. Le jeu amoureux, dans la littérature, est généralement décrit sur ce mode.
Deux adolescents qui se désirent ne demandent pas un consentement à chaque nouveau geste. Car à chaque geste de l’un correspond un geste d’acceptation ou de résistance de l’autre. Tout est limpide si les intentions sont claires.
Or tout ne semble pas si clair. Par exemple cet avis leur sur un site sur le consentement est plutôt problématique:
- … ce n’est pas à la personne de vous signifier qu’elle n’est pas pas d’accord, c’est à vous de vous assurer de son consentement avant d’entreprendre quoi que ce soit. Une personne n’est pas « par défaut » sexuellement disponible : dans le doute, il faut considérer qu’elle ne l’est pas.
Que l’on ne soit pas disponible par défaut, d’accord. Mais je pense que chacun est responsable de soi. Chacun doit donc dire s’il n’est pas d’accord. L’accord peut se montrer par des gestes, le désaccord doit faire usage de mots et d’un ton sans équivoque.
Les relations sont sensibles avant d’être judiciarisées. Il se peut qu’une femme ayant eu un rapport sexuel le regrette ensuite. Il n’y a pas viol pour autant. Il se peut aussi qu’un homme ne sache pas décoder les propos d’une femme s’ils ne sont pas d’une clarté indiscutable. Le viol ne commence que quand le non a été exprimé avec une netteté qui écarte toute possibilité de malentendu ou de jeu amoureux.
Un homme normal sait reconnaître la majorité des signes non verbaux. Et il n’est pas tenu d’entendre ce qui n’est pas dit explicitement par le corps ou par le verbe. Être à l’écoute, tenir compte de l’autre, connaître certains codes instinctifs, ne donne pas pour autant de diplôme de psychologie ou de talent de divination. Mais il peut être utile de rappeler, comme sur ce guide, que l'ivresse n'est pas un oui. Utile aussi pour des ados d'en parler, afin de vérifier les codes et de les mutualiser.
Commentaires
Cher hommelibre,
-- « Un guide a été publié en Suède à l’attention des hommes sous le titre: Comment s’assurer qu’elle est consentante et désirante - un guide pour les hommes qui ne veulent pas violer. »
Petit détail de rien du tout, vous vouliez dire bien sûr "... à _l'intention_ des hommes ...", oui ?
-- « Le viol ne commence que quand le non a été exprimé avec une netteté qui écarte toute possibilité de malentendu ou de jeu amoureux. »
« Un homme normal sait reconnaître la majorité des signes non verbaux. »
Puisque vous évoquez le fait de "dire non", vous voulez bien sûr dire ici .. "des "signes de refus", n'est-ce pas ?
Et un tout petit détail de style, par "Un homme normal ... etc ... ", vous voulez très certainement dire ... "Tout homme ayant vecu en société sait reconnaître un signe de refus exprimé par un autre être humain.", oui ?
Par contre, je ne comprends pas ce que vous voulez dire par ... « Et il n’est pas tenu d’entendre ce qui n’est pas dit explicitement par le corps ou par le verbe. »
Vous voulez dire ... par sa conscience ? par la loi ? par une prophétie ? par les signes de son dieu ou de ses dieux ?
-- « Utile aussi pour des ados d'en parler, afin de vérifier les codes et de les mutualiser. »
Est-ce là un bon conseil ?
Vous venez vous-même d'écrire plus haut ... « Quelle que soit la logique de ce schéma il ne peut servir de modèle dans la réalité. » et « Un homme normal sait reconnaître ... ».
De surcroît, vous décrivez comment reconnaître les signes de _refus_, alors que le "guide" décrit très précisément "Comment s’assurer qu’elle est consentante et désirante", donc des signes de _garantie_ (puisqu'il faut _s'assurer_) de _consentement_ ET de _désir_.
Et puis ce guide affirme être fait ... "pour les hommes qui ne veulent pas violer". C'est très, très ennuyeux, parce que cela veut dire que tous les hommes qui ne suivent pas ce guide, ou un autre guide qui affirme aussi être fait "pour les hommes qui ne veulent pas violer", ... eh bien ... ces hommes ... c'est parce qu'ils _veulent_ violer, et que donc, sitôt qu'ils s'approchent de quelqu'un, sans son consentement, _même_ sans intention de faire un câlin, ... *** ils sont alors des violeurs ***.
Personellement, je me verrais très mal démander à un ado d'étudier ce désormais fameux guide suédois, aussi fameux que la cuisine du même pays, sans lui dire qu'il doit impérativement faire signer un acte de consentement avec le protocole que lui et sa partenaire, tel un acte médical, devront respecter rigoureusement, et une déclaration écrite de désir, et mettre ces deux documents de décharge légale en lieu très sûr avant même de rencontrer sa partenaire.
Et enfin, un dernier, tout petit, petit détail ... ce guide ... il a été publié en Suède ... sous quelle forme, par qui et investi de quelle autorité ?
Chuck,
Par homme normal je veux dire en effet "Tout homme ayant vecu en société sait reconnaître un signe de refus exprimé par un autre être humain", mais aussi tout homme qui est simplement attentif aux signes sans problématique qui l'en empêche. La norme est que nous comprenions le langage verbal comme le non verbal. Ne pas les comprendre résulte éventuellement d'une configuration psychologique particulière, non normative, d'une pathologie, ou d'un défaut d'éducation. Le principe étant de ne pas contraindre, la norme est d'avoir un comportement naturel et acquis qui permette d'être averti et conscient de cette limite. Cela se passe souvent par l'apprentissage sur le terrain. Les jeux d'enfants servent à construire les relations, par exemple.
En parler avec des ados devrait permettre de vérifier s'ils sont au clair et en accord. C'est une façon de programmer l'esprit. Mais il ne s'agit pas d'en parler avant ou pendant une relation ou à chaque rapport. Cela doit être fait hors situation pour laisser ensuite la spontanéité et l'approche progressive et non verbale faire son oeuvre.
Oui je voulais dire "à l'intention des hommes". Je l'ai d'ailleurs écrit.
Les signes de refus sont les signes à mon avis les plus importants. Un refus clair est indiscutable. Une hésitation n'est pas un consentement ni une absence de consentement. En cas d'hésitation d'un partenaire, je pense que l'autre a un droit d'insister. Si le non devient très clair alors il doit arrêter ses tentatives. S'il n'y a pas de consentement par défaut, il y a cependant une entente tacite quand les gestes se succèdent par étape sans provoquer de résistance manifeste part le geste ou la parole.
Je me souviens de mon adolescence. Une copine qui ne voulait pas qu'on touche sa poitrine, par exemple, savait très bien l'exprimer, sans équivoque.
Je suis d'accord que le sous-titre est particulièrement désagréable pour les hommes, et contient potentiellement cette affirmation en creux: les hommes veulent violer sauf ceux qui lisent ce guide. Je n'y souscris pas. Mon propos est de reconnaître l'importance des codes relationnels, la libre détermination de chacun, mais aussi de dire que dans la réalité les choses ne sont pas si tranchées et que l'on ne doit pas tendre vers une judiciarisation complète des relations amoureuses.
@hommelibre
Et pour mon dernier tout petit petit petit détail ?:-)
Il y avait une expression qui ne trompait pas comme ,des yeux qui pissent l'amour ! ce qui en l'occurrence était un merveilleux guide sexuel
Cette expression couramment utilisée aurait elle aussi disparu du vocable ?
J'ai réussi à lire: "La menacez-vous avec une arme ou non?" et si oui: "Stoppez immédiatement". A croire qu'ils sont débiles en Suède ou à tout le moins ceux ou celles qui ont rédigé ce "guide".
@ Charles : je suis d'accord avec vous.
Cette rédaction du guide montre l'homme comme par principe, potentiellement, dangereux.
@ Chuck: origines peu claires, voici un lien:
http://antisexisme.net/2014/01/31/guide-du-consentement/
C'est très peu de choses et le fil se perd vite. Mais le thème est intéressant. Il est récurrent dans la littérature féministe: l'homme est dangereux et il faut l'éduquer. Il n'y a pas besoin d'autorité pour rédiger et diffuser cela. On en trouve des bouts dans assez de livres pour que cela ressasse un discours. Je peux me tromper mais l'authenticité du document (autorité sous laquelle il a été rédigé, comité de rédaction ou auteur) m'intéresse moins que le contenu qui parle de lui-même.
Cher hommelibre,
- « Il n'y a pas besoin d'autorité pour rédiger et diffuser cela. »
Vous avez tout à fait raison :-)
Mais "l'autorité" de l'auteur aide pour connaître la _valeur_ conférée par d'autres lecteurs à un travail, qui trouve ses qualités par exemple dans la recherche documentaire effectuée, ou la formulation, ou la cohérence, ou même comment un travail s'inscrit par rapport aux travaux d'autre chercheurs, cette "autorité" se mesurant assez facilement en fonction du nombre de références aux publications d'un auteur par d'autres scientifiques _connus_ pour travailler dans le même domaine.
Chuck,
Je conviens que la connaissance de l'auteur ajoute ou retranche à la valeur d'un document. Mais dans ce cas, c'est un genre de document qui, bien que peu référencé, fait son chemin et est repris tel quel comme faisant autorité.
Cher hommelibre,
« Mais dans ce cas, c'est un genre de document qui, bien que peu référencé, fait son chemin et est repris tel quel comme faisant autorité. »
Et ne voyez vous pas une lègère contradiction entre ... "peu référencé" ... et ... "faisant autorité" ?
Contradiction selon les normes classiques d'autorité, validée si possible par une équipe, et les normes modernes, où par exemple un document internet fait le buzz et influe sur des esprits sans que l'on sache qui en est à l'origine.
Ici le plus important à mon sens, je le redis, est le contenu qui est une traduction fidèle du discours ambiant. Il fait autorité non par les personnes qui l'ont rédigé mais par la foi que d'autres lui accordent.
Cher hommelibre,
- « un guide du consentement sexuel »
« Ici le plus important à mon sens, je le redis, est le contenu qui est une traduction fidèle du discours ambiant. »
« Il fait autorité non par les personnes qui l'ont rédigé mais par la foi que d'autres lui accordent. »
J'ai quelques difficultés à vous comprendre. D'une part vous dites que ce "guide" est ... "une traduction fidèle du discours ambiant", ... mais vous ajoutez ... "Il fait autorité non par les personnes qui l'ont rédigé ... ", ce qui revient à dire que ... l'autorité de ceux qui ont écrit ce guide est ... _douteuse_.
Si cette "autorité" est douteuse, ... comment peut-on affirmer que ... "le contenu" est une traduction _fidèle_ du "discours ambiant" ?
Comme dirait l'autre "l'amour ne se commande pas"
Ca doit pas être tous les jours joyeux chez les gens qui s'imposent des règles autres que ceux régissant le bon sens commun.
Ce doit être les descendants directs des coincés du 19ème siècle
Comme d'habitude, la police des mœurs (des couples) a pignon sur rue, et comme d'habitude au dépens des hommes, à l'instar de la violence conjugale : qui devrait être rebaptiser violence des hommes, car pour le quidam moyen, la femme n'est pas violente ou si elle l'est, c'est par légitime défense : merci Mme Sauvage.
Plus sérieusement, quand-est ce que cette société de minables va s'effondrer, en même temps que la connerie humaine ?