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Eurovision : l’amour, entre Disney et manga

Je m’étais promis de ne pas regarder. Et j’ai finalement craqué: j’en ai vu un tiers. Plus quelques prestations pendant la semaine. Quelques réflexions autour de ce grand show européen.

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Je suis d’abord frappé par l’importance prise par le visuel. Si l’art est devenu un divertissement, ici le divertissement (la chanson) se divertit lui-même par les décors réels ou virtuels, par les effets spéciaux, par une mise en scène supposée apporter un supplément de sens.

Les spectateurs sont habitués à voir des spectacles grandioses, sur scène ou à la télévision. Et pourquoi pas? S’il faut divertir, autant en avoir plein les yeux et les oreilles.

La victoire de la chanteuse représentant l’Ukraine montre cependant qu’il n’est pas besoin d’avoir des danseurs et des danseuses ou des parures psychédéliques pour gagner. 

La chanson est sobre, magnifiquement interprétée à mon goût par une chanteuse inspirée, et – surprise – relativement peu formatée pour l’Eurovision, où les chansons ont souvent cette montée en puissance, ce climax, qui soudain emporte l’auditeur vers de vastes espaces musicaux.

 

 

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Autre remarque, l’évolution de plus en plus marquée vers des styles d’inspiration ethno, tant par l’habillement que par certaines musiques ou par l’usage d’instruments spécifiques.

Les identités culturelles nationales s’expriment et se revendiquent.

Mais on a aussi des inspirations méta-ethno, plus proches du conte ou de l’héroïc fantasy. Cela offre un spectacle superbe au point de vue du look des interprètes. Je pense par exemple à l’Allemagne et sa chanteuse au style inspiré des mangas japonais (image 3), ou à la chanteuse croate portant une robe féerique de 80 kilos digne de Disney (image 2).

L’italienne, ma préférée (image 1), porte un message écolo dans une mise en scène enfantine mais j’ai apprécié sa manière d’habiter cette chanson belle et simple dans son décor champêtre. Le thème: nous sommes différents comme les fruits d’un même arbre, mais nous venons tous de cet arbre. Jolie métaphore mais un tel thème mériterait au moins une bibliothèque entière d’écrits.

N’empêche, c’est joli et ça se suffit, et même si la chanteuse ne bouge pas beaucoup son corps, sa présence et sa gestuelle m’ont captivé. Avec l’Eurovision on assiste à un défilé improbable de personnages et de signes visuels que l’époque psychédélique n’aurait pas reniés.

Mais au-delà du spectacle débordant de multiples rêves, il y a les prises de position. Car l’Eurovision devient de plus en plus une tribune pour des thèmes de société. Pourquoi pas? La poésie, l’art en général, n’ont pas de limite quant aux sujets. 

 

 

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La politisation de la musique de variété n’est pas nouvelle. Rappelons-nous Jean Ferrat et sa magnifique chanson Nuit et Brouillard, ou Léo Ferré et l’Affiche rouge. Alors une chanson sur la déportation des Tatars en 1944, une sur l’écologie, une sur la violence faite aux femmes (et pas aux hommes…), pourquoi pas. Si la chanson est un divertissement, un instant de plaisir partagé, il en reste parfois quelques mots, une phrase ou deux, qui vont durer et proposer un autre regard sur une situation.

Mais, même si le standard Eurovision permet quelques approches au parfum ethno et politique,  il reste très formaté. La mondialisation passe aussi par la musique et j’ai parfois l’impression d’écouter les mêmes chansons que les années précédentes! Cela limite les prétentions philosophiques et politiques des auteurs-compositeurs. Il faut être assez lisse, et plaire plus que convaincre. Ou marcher dans le rang moral contemporain: on aime tout le monde et tout le monde est beau et gentil. Comme si l’amour pouvait régler les problèmes du monde. 

Cela dit, si l’Eurovision est une tribune en partie politique, j’espère que la victoire de l’Ukraine n’est pas une simple revanche contre la Russie.

 

 

 

Je poste la vidéo de l’Italie ci-dessous, et celle de l’Allemagne en haut de la colonne de droite. Ce sont mes préférées.

Et tout cela me ramène à mon actu: sous peu je vais passer en studio pour l’enregistrement de mon deuxième album, qui devrait sortir pour l’été. J’y reviendrai. Et puis il y a un stage que je propose avec un collègue coach. 5 jours en juillet pour faciliter la communication. À voir ici.

 

 

Francesca Michielin pour l'Italie avec No Degree Of Separation:

 

 

 

 

Catégories : Art et culture 7 commentaires

Commentaires

  • Cher hommelibre,

    - « Eurovision : l’amour, entre Disney et manga »
    - « Je suis d’abord frappé par l’importance prise par le visuel. Si l’art est devenu un divertissement ... décors réels ou virtuels ... par une mise en scène ...»

    Ptet que c'est parce que quelqu'un cherche à _vendre_ quelque chose de "visuel" ?

    Ptet que quelqu'un essaie de faire croire que c'est un bonne idée d'acheter une télé 4K, pour aider à vendre les télés 8K plus chères qu'on vendra demain, ou ptet que c'est pour vendre des lunettes "3D", ou des produits "virtuels", comme de la "réalité" "virtuelle". Apparemment, les produits de _réalité réelle_ et les _défauts visuels_ ... ca se vend moins bien ... ou pas assez bien. Ptet que ... ce que sont les êtres humains, avec leurs défauts, et ce qu'ils vivent et leurs défauts de comportement, et ce qu'ils voient dans leur vie de tous les jours et leur _capacité de douter_ ... ça ne "divertit" pas assez ("divertir" ... ca veut bien dire ... faire oublier ce qu'on vit ou ce qu'on est, non ?), ... ou ptet que ça ne vend pas assez ?

    Ou ptet que c'est pour mieux "voir" les marques qui ont _sponsorisé_ "l'évènement" ?

    - « ... les prises de position. Car l’Eurovision devient de plus en plus une tribune pour des thèmes de société. »

    Comme pour ... _vendre_ des ... idées ?

    - « Pourquoi pas? La poésie, l’art en général, n’ont pas de limite quant aux sujets. »

    Oui. C'est tout à fait étonnant, non ? C'est ptet pour ça que l'homme a inventé ... et continue d'inventer ... des styles ?

    - « La politisation de la musique de variété n’est pas nouvelle. ... Jean Ferrat ... Léo Ferré »

    Lä, vous faites référence à la propagande communiste, n'est-ce pas ?

    - « Alors une chanson sur la déportation des Tatars en 1944, une sur l’écologie, une sur la violence faite aux femmes (et pas aux hommes…), pourquoi pas. »

    Oui, ca provque des émotions. Vous, ça ne vous émeut pas trop, on dirait ? Mais ça n'a pas l'air de trop vous embêter non plus. Ptet parce que c'est des ... _bonnes_ émotions ? Mais pour la chanson sur l'écologie, vous pensez à qui ?

    - « La mondialisation passe aussi par la musique et j’ai parfois l’impression d’écouter les mêmes chansons que les années précédentes! »

    Ptet que c'est parce que c'est toujours _les mêmes_ qui essaient de _vous vendre_ quelque chose ... Ptet que c'est parce qu'ils essayent de _vous vendre_ la même chose ... ou de _vous vendre_ quelque chose toujours de la même façon ... Ptet que c'est parce qu'ils utilisent toujours les _mêmes émotions_ pour _vous émouvoir de la même façon_. Ptet que c'est parce que ... c'est des robots _programmés_ pour _vous_ convaincre de leur donner _votre argent_ ?

    - « Il faut être assez lisse, et plaire plus que convaincre. »

    Ptet parce que c'est _plus facile_ de donner votre argent à quelqu'un qui vous plaît, qu'à une association pour aider les animaux affamés qui ont peur, qui font du bruit, qui sont sales, qui puent, et qui ont des maladies.

    - « Comme si l’amour pouvait régler les problèmes du monde. »

    C'est marrant, je n'aurai jamais pensé que l'amour pouvait servir à ça. Mais ... est-ce que "régler les problèmes du monde", c'est pas comme ... régler les problèmes ... _entre_ les hommes ?

    - « Cela dit, si l’Eurovision est une tribune en partie politique, j’espère que la victoire de l’Ukraine n’est pas une simple revanche contre la Russie. »

    Comme quand on considère ... la "politique" comme un _sport_ ... et que l'on espère que l'arbitre n'est pas _vendu_ ?

    - « Et tout cela me ramène à mon actu: sous peu je vais passer en studio pour l’enregistrement de mon deuxième album, qui devrait sortir pour l’été. »

    Dans les environs de Geuuu-nèèèève ?

    - « Et puis il y a un stage que je propose avec un collègue coach. 5 jours en juillet pour faciliter la communication. »

    Enseigner (_expliquer_ des choses aux autres) est un excellent moyen pour savoir si l'on a bien compris ce que l'on explique. Je suis curieux ... est-ce que ça aide ... pour _vendre_ des stages pour faciliter la communication ?;-)

  • @ Chuck:

    Vous écrivez:

    "Oui, ca provque des émotions. Vous, ça ne vous émeut pas trop, on dirait ? Mais ça n'a pas l'air de trop vous embêter non plus."

    Pour éviter un procès d'intention sans avoir à me justifier de ce que je choisis de mettre en avant, j'ai mis le clip de ma chanson "Doa", en bas à droite.

  • "Je suis d’abord frappé par l’importance prise par le visuel. Si l’art est devenu un divertissement, ici le divertissement (la chanson) se divertit lui-même par les décors réels ou virtuels, par les effets spéciaux,..."

    Je l'ai également écrit. Certaines chansons passaient bien en dessous des effets spéciaux. Je me demande sur quel critère le jury a voté?!!!

    "j’espère que la victoire de l’Ukraine n’est pas une simple revanche contre la Russie."

    La Russie pas contente et l'a fait savoir : Vote politique.....

    L'Ukraine a mérité sa victoire. C'était exceptionnel comme interprétation. Elle m'a transportée contrairement à ce cirque d'effets spéciaux. Idem pour la magnifique chanson, son interprétation, la voix, et quelle voix, du chanteur qui représentait Israël! J'ai également beaucoup aimé la jeune de 18 ans, italienne, comparée à Michael Jackson, qui représentait... oups oublié le pays :)

    Bon week-end

  • Cher hommelibre,

    - « ... Pour éviter un procès d'intention sans avoir à me justifier de ce que je choisis de mettre en avant, ... »

    Hou la la la la !!! Mais bien au contraire !!! Pour le compte, je crois que c'est à moi de me justifier. C'est très bien, ... vraiment trés bien que vous ayez mis en avant ... Ferrat et Ferré ... et loin, très loin de moi l'idée de vous faire un procès d'intention pour votre _choix_ ! Je disais simplement que ... les gens s'expriment plutôt sous le coup de _mauvaises_ émotions que sous le coup de _bonnes_ émotions (comme dans les manifs), ce qui laisse penser qu'ils sont _indifférents_ aux choses qui pourtant leur provoquent des _bonnes_ émotions. N'êtes vous pas d'accord ? J'aurai beaucoup de peine à croire que c'est sous le coup de mauvaises émotions que vous avez cité Ferrat et Ferré.

  • @ Chuck,

    Le visuel est attractif. Je ne sais pas s’il permet de mieux « vendre » l’Eurovision, probablement car l’image nous accroche. Que quelqu’un veuille vendre quelque chose ainsi ne me dérange pas. Il faut que l’argent vienne de quelque part. Vendre est un job, autant le faire bien si possible. Vendre fait travailler et vivre de nombreuses personnes.

    Personnellement, si je ne boude pas les grands spectacles avec de beaux visuels, j’aime aussi imaginer par moi-même ce que raconte l’histoire à l’écoute d’une pièce de musique. J’aime qu’on ne me mâche pas le travail et que mon imaginaire fonctionne par lui-même à partir des mots, de la musique et des intonations.

    Mon test est d’écouter pendant un moment avec les yeux fermés.


    « Ptet parce que c'est _plus facile_ de donner votre argent à quelqu'un qui vous plaît »:

    oui, c’est souvent ainsi. Mais cela limite la créativité.


    Pour mon album: Genève était prévu initialement mais j’ai changé. Ce sera en France. J’en reparlerai.


    Je confirme: enseigner est aussi un excellent moyen pour savoir si l’on a bien compris. Mais cela n’a pas d’incidence sur la « vente » d’un stage, où ne viennent que ceux qui y sont intéressés.


    Pour Ferrat et Ferré, merci pour vos précisions qui écartent le risque de malentendu. Ferrat et Ferré, quelle que soit leur orientation politique, restent de grands artistes que j’aime même si parfois je peux critiquer tel ou tel texte. Penser à eux est en effet une émotion positive.

  • Comme vous, John, j'ai beaucoup aimé l'Allemagne qui a terminé dernière... Pour le coup, le look, certes amusant, de la jeune chanteuse, m'a paru trop en décalage avec la chanson, à la mélodie obsessionnelle et entêtante, comme peut l'être parfois la pop à son meilleur.
    Sinon, le rocker chypriote et la mignonne autrichienne francophile m'ont bien plu, comme le minet suédois et l'israélien à la voix de velours.

  • Le mystère du succès de ce happening annuel reste entier. Comment se fait-il qu'on investisse tant de temps, d'argent et d'énergie pour des chansons qui ont presque plus jamais une carrière auprès du public ?
    Le gagnant est au centre de l'intérêt médiatique pendant environ une semaine et puis c'est fini.

    Comment se fait-il que des chanteurs capables de créer de chansons pop réellement belles et créatives, que l'on peut chanter ensuite chez soi ou au volant de sa voiture, ne viennent pas en présenter une à ce happening ?
    Cette question n'est pas inédite, mais je n'ai jamais entendu de bonne réponse.
    Prenons Milow, dont le "Technology Ayo" était et reste une merveille ( mais le clip est atroce, même s'il est bien en rapport avec les paroles ...) et dont le "Howling at the moon" serait une consolation, après tout ce déferlement de watts et de pixels stroboscopiques :

    https://www.youtube.com/watch?v=pUcREla9gzY

    L'Eurovision-Eurosong est un monde parallèle, probablement la survivance de ces émissions de variété des années 70, où justement le visuel était très soigné. Malheureusement, on a perdu les "tubes", ces chansons que ma génération connaît par cœur, même si on ne les aimait pas.
    C'était une esthétique différente des clips d'aujourd'hui.
    En visionnant l'Eurosong en diagonale et en replay, je me suis dit que désormais, on essaye de faire des clips en live, mais pas encore trop trash ou angoissants. Çà viendra peut-être.
    On dirait que la plupart des chansons ne peuvent plus suffire à elles-mêmes, en tant que phénomènes auditifs, on dirait qu'il faut ce narratif en images pour donner un surplus de sens.
    Je me souviens des premiers clips que j'ai vus en 1983, bizarrement en Islande sur des ferries et dans des stations-service au milieu de nulle part. Des ados restaient hypnotisés devant ces écrans de télé, et ces histoires qui me semblaient déjà assez incompréhensibles. Il faut dire que je n'arrivais souvent pas à entendre la chanson à cause du bruit ambiant, et je regardais les ados qui regardaient l'écran.... A l'époque, je croyais que c'était un phénomène islandais, mais la suite des événements m'a donné tort, ils étaient juste en avance, ou en tout cas en avance sur moi ! ;-)))

    Il me semble que de sortir du formatage ( dont les animateurs suédois se sont très bien moqués, d'ailleurs) est une bonne stratégie, mais elle peut tomber à plat.
    Cette année, la chanteuse ukrainienne a été crédible et étonnamment, elle a réussi à casser le moule du chanteur presque irréel et quasi robotique (c'est ainsi que j'ai perçu la belle Australienne ) .
    Je critique les clips, mais la présentation du chanteur russe était magique. Fascinée par l'image, j'en ai totalement zappé la chanson, n'arrivant plus à percevoir les deux choses en même temps ...
    Il devrait y avoir un prix pour le visuel et un pour l'auditif !

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