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Série « Broadchurch » : clap de fin

Le jeune violeur fait penser à Orange mécanique. Froid, déterminé, toujours prêt à commettre son crime. Un peu extraterrestre. On lui imputera quatre viols. Quatre crimes qu’il filme lui-même pour se voir ensuite.

 

broadchurch,série,latimer,hardy,viol,Interrogé et démasqué par les deux enquêteurs, Alec Hardy et Ellie Miller, il se dit fier de ses actes. « Pendant un moment, vous faites ce que vous voulez. C’est vous qui décidez. C’est beau ». Je transcris de mémoire.

La petite ville fictive de Broadchurch (en réalité la ville de Bridport dans le Dorset) est une nouvelle fois le décor de la série qui s’est achevée hier. Avec les mêmes personnages principaux: le capitaine Hardy et le lieutenant Miller, ainsi que le couple Latimer.

En saison 1 le couple avait perdu un enfant, un fils, assassiné dans des conditions troubles. Cette saison 1 faisait découvrir la région du sud de l’Angleterre, en particulier la côte jurassique. Les paysages étaient et sont un élément important de la réussite de la série. Ils imprègnent l’ambiance de chaque épisode.

broadchurch,série,latimer,hardy,viol,L’intérêt de cette première saison était la découverte des personnages. Ni héros, ni parfaits. Au contraire. La vie mélangée, avec par exemple des tromperies discrètes qui éclatent au grand jour. L’intrigue était bien menée, complexe, sans que l’on puisse anticiper la fin. Les caractères, bien dessinés aux multiples facettes. Et un excellent panel d’acteurs et d’actrices, tous et toutes crédibles.

Il n’y a pas de héros dans cette série. Les deux policiers creusent avec soin toutes les pistes mais doutent, tâtonnent, se disputent. On voit comment une enquête peut être difficile, comment rien n’est dit au départ.

Les personnes ne se laissent pas enfermer par le scénario. C’est l’une des grandes forces de la série: une forme de réalisme terre à terre.

La première saison avait passionné les anglais, au point où une suite a été réalisée. En saison 2 on assistait à la suite de l’enquête et au procès du suspect. Là encore l’intrigue était complexe toujours portée par l’intensité des rapports humains. Mais une seconde intrigue avait alourdi quelque peu l’histoire et le fil.

broadchurch,série,latimer,hardy,viol,France 2 l’a passé en intégrale il y a un mois. Nuit blanche. Puis a diffusé en quatre soirées la saison 3, qui s’est achevée hier. Le créateur a annoncé qu’il n’y aura pas de suite.

Je suis sur ma faim avec cette dernière saison. Connaît-on trop les personnages principaux? L’intrigue est plus linéaire, la séparation du couple Latimer trop téléphonée. La fin termine si rapidement qu’on se demande où est la lente construction de l’ambiance. Le capitaine Hardy et le lieutenant Miller tombent soudain dans une simple banalité. Peut-être justifiée, mais avec une chute trop rapide pour donner poids à ce final.

Par contre cette saison est marquée par l’idéologie moderne: femme victimes ou très forte, hommes suspects ou lâches et faibles. À part de jeune violeur, qui détonne dans le paysage. On voulait faire comprendre la psychologie d’un violeur? On n’échappe pas au poncif du pouvoir masculin. Je doute que la réalité soit aussi simpliste. Que la cinquantenaire victime du viol soit libertine, cela semble normal. Mais que des hommes trompent leur épouse est très mal vu moralement.

L’épouse Latimer se la joue abandonnée par son mari lâche, égoïste et faible à ses yeux, et qui ne s’occupe plus assez d’elle. Elle dit cela avec tant de sensibilité qu’on adhère presque à son propos. Le genre de femme héroïne moderne. Celle que les hommes ne devraient pas épouser. Le « Je t’aime, moi aussi, mais on se sépare », sent le réchauffé.

broadchurch,série,latimer,hardy,viol,Et lui abandonne la partie et quitte femme, enfants et la ville. L’abandon de l’homme traduite par deux images: celle sur un canapé, avachi, et celle d’une voiture qui s’en va quand tout s’est dénoué. Rien qui laisse entrevoir sa profonde solitude.

À la toute fin, le capitaine Hardy décrit le violeur comme un monstre. Il dit à sa collègue que tous les hommes ne sont pas ainsi. Ah bon? Fallait-il le préciser? Ou bien pense-t-on a priori qu’ils sont tous des violeurs? En creux, cette dernière saison participe à la grand-messe accusatoire contre les hommes, même si plus mesurée que dans la presse de notre époque. Dommage. Et pas de suite pour montrer l'envers: par exemple une fausse accusation, comme dans le film La Chasse. Il y aurait là de quoi creuser dans les psychologies, et dans les alliances occultes d’une ville de province.

Tant dans le jeu trop lisible des acteurs, même s’ils restent excellents, que dans la simplicité de l’intrigue et dans cet aspect de moderne idéologie où les hommes sont les nuls ou les mauvais, je ne mettrai pas cette troisième saison au même niveau de qualité que les deux premières. Pour surfer sur le succès des deux premières saisons, il fallait faire un scénario nouveau, mais trop bricolé à mon goût. L’inspiration du créateur est visiblement au bout de son originalité, si bien rendue dans les deux premières saisons.

 

 

 

 

Catégories : Art et culture 10 commentaires

Commentaires

  • @ hommelibre,

    Je n'ai pas encore visionné les deux épisodes de la fin de la saison 3, mais m'en réjouis.
    Le problème des fictions sur le viol, c'est que généralement le violeur est un homme. Si on décide d'en parler, c'est difficile de le faire d'une façon totalement neutre ou innovante.
    Le personnage surprenant dans "Broadchurch", c'est la femme violée, qui se demande "pourquoi moi ?". Certains autres personnages le disent aussi, et on comprend que c'est parce qu'elle est effectivement peu attractive, selon les critères en cours. D'apprendre qu'elle a des admirateurs et qu'il lui arrive de chercher l'aventure sexuelle nous surprend forcément.
    Il me semble que la description du choc post-traumatique est intéressante et l'exposition du problème des femmes qui cachent le viol subi et ainsi permettent la récidive, sans qu'elle en ait l'air.
    Autrement dit : si on ne dépose pas plainte, parce qu'on craint les conséquences personnelles, on diminue les chances d'identification et arrestation du coupable. En ne pensant qu'à soi, on oublie la dimension de la solidarité.
    Les affres des personnages féminins sont des cas de figure qui peuvent expliquer qu'on ne dépose pas plainte. L'impact sur toute la communauté est également bien dépeinte, ce que ça fait lorsque tous les hommes sont perçus comme potentiellement coupables.
    Je verrai bien, qui était le violeur, même si votre billet et des indices des épisodes précédents peuvent donner une bonne idée.

    J'ai vu un scénario assez original dans une autre série anglaise "Happy Valley", qui est plus brutale que "Broadchurch" et diffusée avec un logo rouge. C'est à la limite de ce que je supporte, mais il y a un humour très subtil pour contrebalancer une réalité très fruste. Tout le monde a un côté mesquin, sombre, suspect.
    Une femme-policier y est soupçonnée de s'être vengée sur une femme en la violant avec une bouteille. Elle devrait se démener pour donner un alibi et comme elle est vexée et butée, ne s'en occupe pas vraiment. Le soupçon plane sur elle, parce qu'elle est assez violente et a vécu une dépression grave. Et le règlement est le règlement.

    Les séries anglaises sont formidables, elles ont un côté bien plus crédible que les séries américaines, parce que les héros ne sont pas beaux et sexy. Elles mettent en scènes des situations complexes, dans un décor souvent primordial pour le scénario et ce ne sont pas forcément des paysages urbains.
    Ma préférée : "Morse".

  • Calendula, je ne connais pas "Morse", mais je partage votre avis sur les séries anglaises. Cela fait du bien de voir des gens lambda dans leur complexité. Le succès de Broadchurch montre que c'est possible et même "commercial", dans le bon sens du terme.

    En effet la cinquantenaire violée n'entre pas dans l'imaginaire, elle n'est pas séduisante, pas sexy. C'est bien de la montrer sous l'angle d'une presque banalité.

    Bien sûr que les viols sont très majoritairement un crime commis par des hommes. Ce que je regrette est qu'au final un homme doivent s'en défendre, donc le film n'a pas évité l'écueil d'un risque de généralisation propre à notre époque.

    Sur le mari, vous verrez, vous me direz aussi comment vous le percevez. Le déchirement du couple est réel. Je connais des couples qui, par exemple, n'ont pas survécu à la maladie grave d'un enfant. Mais là c'est un peu trop appuyé et stéréotypé à mon sens.

    Raison pour laquelle je trouve que le scénario de cette troisième saison est plus faible, moins creusé et moins subtil que les précédents. Plus dans l'air du temps, alors que les deux premières saisons échappaient au temps ou aux modes. C'est aussi ce que j'y appréciais: le scénariste ne donnait dans aucun stéréotype. Ce qui en faisait pour moi une série lumineuse et intelligente, traitée avec sensibilité et distance.

  • Downton Abbey, The Peaky Blinders, Broadchurch, Morse, Vera et même Luther, le pied !

  • @hommelibre,
    C est hors sujet!
    Juste pour vous dire que votre texte sur le blog de M. M.-R.H. est excellent.
    J avais dit là bas ceci ( serait-il publié?) ceci:
    -------------------------
    @hommelibre
    Votre analyse est honnête, très objective et intéressante voire meilleure, à mon humblissime avis, à celle de l Editeur de ce blog, M. le professeur M.R.-H. que je ne partage nullement.

    Bien à Vous.
    Charles 05
    -----------------------

  • @hommelibre,
    C est hors sujet!
    Juste pour vous dire que votre texte sur le blog de M. M.-R.H. est excellent.
    J avais dit là bas ceci ( serait-il publié?) ceci:
    -------------------------
    @hommelibre
    Votre analyse est honnête, très objective et intéressante voire meilleure, à mon humblissime avis, à celle de l Editeur de ce blog, M. le professeur M.R.-H. que je ne partage nullement.

    Bien à Vous.
    Charles 05
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  • @hommelibre,

    Hier soir, j'ai visionné les deux derniers épisodes, en essayant de garder à l'esprit vos remarques et d'observer le personnage de Mark Latimer, le mari.

    Le scénario : Je ne me souviens pas dans le détail des saisons 1 et 2, que j'ai vus lors de leur première diffusion, il y a quelque temps déjà. J'avais adoré la saison 1, comme c'est souvent le cas. La plupart des séries sont condamnées à s'aplatir au fur et à mesure, on a souvent l'impression que l'inspiration se tarit.
    Ici, Broadchruch saison 3, il pourrait y avoir un projet un peu didactique sur le thème du viol. D'une part, trois organismes d'aide aux victimes sont cités dans le générique de la fin et on lit aussi qu'il y a eu supervision de la police sur les parties concernant l'enquête sur le viol.
    D'autre part, l'accompagnement de Trish, celle qui va voir la police, est explicitée et elle est prise en charge d'une façon vraiment idéale.
    Ce n'est pas pour autant qu'elle s'en sort facilement, puisque sa vie intime est exposée au grand jour, elle passe par une phase de mise à l'écart, on se rend compte qu'elle n'est pas une mère de famille sans histoires et que sa démarche amène le chaos dans la petite ville.
    Les femmes qui se sont tues ont préservé la société de cette information qui dérange et elles n'en sont bien sûr pas plus heureuses. D'autant plus qu'elles ont une responsabilité indirecte dans la récidive.
    Le violeur et organisateur de viol le dit explicitement : j'ai recommencé, puisque personne n'en a parlé, personne n'est venu me voir pour dire que j'étais soupçonné.
    Il y a du vrai là-dedans, sans aucun doute. Du point de vue de la police, il est évident qu'elle ne peut rien faire, s'il n'y a pas plainte. Cela fait référence à la statistique, selon laquelle 1 viol sur 10 est dénoncé.
    Ensuite, il y a la grande difficulté à prouver le viol.
    Dans un dispositif social idéal, il faudrait que la femme soit assez informée, pour pouvoir faire un parcours sans faute après l'événement.

  • Je n'oublie pas la seconde trame narrative, avec l'histoire de la famille Latimer !
    Le personnage du mari, je le considère surtout comme le père incapable de supporter la mort violente de son fils. L'épouse se concentre sur les deux enfants vivants.
    La scène sur le canapé m'a dit autre chose :
    sa femme et sa fille sont là, l'encadrent dans un tableau d'une domesticité rassurante ( la femme dort d'une façon complètement abandonnée tout contre lui, elle est donc encore davantage avachie !), sa fille adolescente qui lui témoigne un amour filial à toute épreuve, est soulagée de voir son père et sa mère réunis.
    J'y ai vu quelque chose de l'ordre d'une piétà contemporaine ! Cet homme trop souffrant a quelque chose qui inspire la pitié. Ses proches sont impuissants face à sa solitude, puisqu'ils ne peuvent pas ramener le fils perdu à la vie. " Un seul être vous manque , et tout est dépeuplé."

    A ce moment-là, la réunification pouvait sembler possible, tout est là pour la réaliser. Cet homme a encore une fillette de 3 ans, il pourrait se projeter dans le futur, voir ce qui lui reste ( = beaucoup), mais il dit que le lieu est trop chargé de souvenirs et il décide de partir.
    Même s'il n'y aura pas de saison 4, à mon avis, le couple a encore une chance.
    Le jeune pasteur part aussi, il ne croit pas être à sa place, puisque il prêche généralement pour 5-6 personnes. A la fin, il échange un regard lourd de sens avec Mark, qui ensuite monte dans sa camionnette. Le pasteur est en échec, il avait œuvré pour réunir le couple.
    La scène finale dans l'église est étrange, je ne sais pas si elle est réussie. Elle est en tout cas pessimiste.
    Je suppose que c'était une façon de réunir les personnages du drame et d'insister sur l'importance de la communauté en dehors de l'église, désormais inutile, et qui doit subsister malgré les événements qui la font exploser par moments.

  • Bonsoir Calendula,

    Merci pour vos commentaires très complets.
    Mon sentiment:

    Vous relevez l'aspect didactique et vous faites bien. Les mentions d'associations m'avaient échappé. Eh bien je pense que c'est une partie du problème que j'esquisse dans mon billet. Cet aspect didactique enferme les personnages dans ce que l'on veut faire dire d'eux, probablement parce que c'est un sujet socialement très sensible. J'ai écrit que les personnages ne se laissent pas enfermer par le scénario, mais c'était plus pour la saison 1 et en partie la 2.

    Sans tomber dans des stéréotypes marqués, ni une victimisation sans recul, je vois quand-même une option assez convenue. Le fait également que la police ait supervisé la partie de l'enquête ramène le film en partie à une chronique de fait divers et ne va pas aussi loin dans la psychologie que dans la saison 1. J'ai eu ce sentiment dès le premier épisode de cette troisième saison.

    Je remarque quand-même que les femmes sont présentées comme fortes, décidantes: épouse Latimer, rédactrice en chef qui démissionne, jeune journaliste prédatrice, lieutenant Miller plus affirmée qu'en saison 1 et 2, par exemple.

    Les hommes soit n'ont pas agi, soit sont lâches, soit abandonnent. À part Hardy, bien sûr. Il reste debout. Et le seul qui agit vraiment est le jeune violeur.

    Je ne peux pas donner crédit à ses paroles. Le fait qu'on n'ait rien dit l'aurait encouragé à récidiver? Avait-il besoin de cela alors qu'il est visiblement sociopathe? Je ne le crois pas. On lui prête une phrase destinée au public, pas une phrase qui viendrait de l'intérieur, à mon avis. Il est étrangement le seul personnage presque libre. Les autres sont tenus par les co-dépendances morales et sociales. Entre le crime et la loi il n'y a pas de présence intermédiaire, "citoyenne", ou si peu. Peut-être est-ce le reflet de notre monde. Ou pas.

    L'image ce Piéta, je l'ai bien vue, il était difficile de la rater tant elle était montrée avec esthétisme et insistance. Trop pour moi. Je ne vois pas l'épouse comme avachie, mais plutôt abandonnée quelques instants, alors que lui l'est. Je trouve l'évolution psychologique de cette épouse trop rapide, trop sur commande de l'auteur, entre sa rage de voir son mari prendre une route de souffrance et son jugement très dur sur sa faiblesse, et ensuite ce retour trop plein de sensibilité dans les Je t'aime si paradoxaux. Cette séquence aurait pu être magnifique, comme dans le peep-show de Paris Texas, là ça va trop vite. Il manque des étapes intermédiaires. Et pour elle, même si son propos est plutôt nuancé dans la forme, il ne faut pas s'y tromper: c'est la fin. Sa position à lui, "j'aurais dû partir", est aussi trop rapide. Pourquoi ne propose-t-il pas que toute sa famille parte? Il y a là un manque de réelle profondeur, surtout au vu de la série entière. Il est dans un désespoir sans relief. Combien d'année prendra sa reconstruction? Je l'imagine longue, et trop lente pour sa femme. Elle sera déjà ailleurs. Les femmes reviennent rarement en arrière, il me semble.

    Ses larmes sont insupportables, on le voit bien enfermé dans l'impuissance, la rage et la souffrance. Qu'aurais-je fait à sa place dans une telle situation? Je ne sais pas. Mais je sais que je n'aime plus les larmes des hommes, sauf quelques exceptions, et pas dans ce genre de situation. Je n'ai jamais vu mon père pleurer, et c'est tant mieux.

    Je pense que nous y voyons chacun selon nos propres expériences. Et aussi en tant qu'homme et que femme.

    Donc déçu par le scénario, par les raccourcis, par l'aspect didactique qui à mon avis est contre-productif parce que l'on ne ressent pas vraiment ce qu'ils vivent.

    Enfin, c'est mon point de vue!

    Merci encore pour votre contribution. Je continuerai à y réfléchir car je pense ne pas avoir fait le tour de tout ce qui peut être extrait de cette série.

  • Bonsoir Calendula,

    Merci pour vos commentaires très complets.
    Mon sentiment:

    Vous relevez l'aspect didactique et vous faites bien. Les mentions d'associations m'avaient échappé. Eh bien je pense que c'est une partie du problème que j'esquisse dans mon billet. Cet aspect didactique enferme les personnages dans ce que l'on veut faire dire d'eux, probablement parce que c'est un sujet socialement très sensible. J'ai écrit que les personnages ne se laissent pas enfermer par le scénario, mais c'était plus pour la saison 1 et en partie la 2.

    Sans tomber dans des stéréotypes marqués, ni une victimisation sans recul, je vois quand-même une option assez convenue. Le fait également que la police ait supervisé la partie de l'enquête ramène le film en partie à une chronique de fait divers et ne va pas aussi loin dans la psychologie que dans la saison 1. J'ai eu ce sentiment dès le premier épisode de cette troisième saison.

    Je remarque quand-même que les femmes sont présentées comme fortes, décidantes: épouse Latimer, rédactrice en chef qui démissionne, jeune journaliste prédatrice, lieutenant Miller plus affirmée qu'en saison 1 et 2, par exemple.

    Les hommes soit n'ont pas agi, soit sont lâches, soit abandonnent. À part Hardy, bien sûr. Il reste debout. Et le seul qui agit vraiment est le jeune violeur.

    Je ne peux pas donner crédit à ses paroles. Le fait qu'on n'ait rien dit l'aurait encouragé à récidiver? Avait-il besoin de cela alors qu'il est visiblement sociopathe? Je ne le crois pas. On lui prête une phrase destinée au public, pas une phrase qui viendrait de l'intérieur, à mon avis. Il est étrangement le seul personnage presque libre. Les autres sont tenus par les co-dépendances morales et sociales. Entre le crime et la loi il n'y a pas de présence intermédiaire, "citoyenne", ou si peu. Peut-être est-ce le reflet de notre monde. Ou pas.

    L'image ce Piéta, je l'ai bien vue, il était difficile de la rater tant elle était montrée avec esthétisme et insistance. Trop pour moi. Je ne vois pas l'épouse comme avachie, mais plutôt abandonnée quelques instants, alors que lui l'est. Je trouve l'évolution psychologique de cette épouse trop rapide, trop sur commande de l'auteur, entre sa rage de voir son mari prendre une route de souffrance et son jugement très dur sur sa faiblesse, et ensuite ce retour trop plein de sensibilité dans les Je t'aime si paradoxaux. Cette séquence aurait pu être magnifique, comme dans le peep-show de Paris Texas, là ça va trop vite. Il manque des étapes intermédiaires. Et pour elle, même si son propos est plutôt nuancé dans la forme, il ne faut pas s'y tromper: c'est la fin. Sa position à lui, "j'aurais dû partir", est aussi trop rapide. Pourquoi ne propose-t-il pas que toute sa famille parte? Il y a là un manque de réelle profondeur, surtout au vu de la série entière. Il est dans un désespoir sans relief. Combien d'année prendra sa reconstruction? Je l'imagine longue, et trop lente pour sa femme. Elle sera déjà ailleurs. Les femmes reviennent rarement en arrière, il me semble.

    Ses larmes sont insupportables, on le voit bien enfermé dans l'impuissance, la rage et la souffrance. Qu'aurais-je fait à sa place dans une telle situation? Je ne sais pas. Mais je sais que je n'aime plus les larmes des hommes, sauf quelques exceptions, et pas dans ce genre de situation. Je n'ai jamais vu mon père pleurer, et c'est tant mieux.

    Je pense que nous y voyons chacun selon nos propres expériences. Et aussi en tant qu'homme et que femme.

    Donc déçu par le scénario, par les raccourcis, par l'aspect didactique qui à mon avis est contre-productif parce que l'on ne ressent pas vraiment ce qu'ils vivent.

    Enfin, c'est mon point de vue!

    Merci encore pour votre contribution. Je continuerai à y réfléchir car je pense ne pas avoir fait le tour de tout ce qui peut être extrait de cette série.

  • Bonjour Hommelibre, je viens de terminer la saison 3, je n'avais pas lu votre commentaire avant, craignant (à juste titre) d'y découvrir quelques "spoilers".

    Je partage hélas votre déception, autant les deux premiers volets m'avaient enthousiasmé, autant celui-ci m'a laissé sur ma faim, peut-être moins en raison de la nature du scénario (qui n'a pas grand chose à voir avec les deux premières, ce qui peut en soi déjà déstabiliser le spectateur) que par son traitement.

    J'ai en effet trouvé une vraie lourdeur et un manque de crédibilité certain dans le traitement psychologique des personnages, par exemple on sent un jugement moral constant dans la manière dont les deux policiers regardent leurs différents suspects, comme consternés de découvrir l'abîme sans fin de la perversité masculine. D'ailleurs avez-vous relevé la phrase que Hardy prononce à un moment, "j'ai parfois honte d'être un homme"... eh oui, de nos jours il est de coutume de lutter contre toutes formes d'amalgames, sauf lorsqu'ils s'appliquent à une certaine catégorie d'humains. Et comme vous le releviez, ce jugement moral ne s'applique a contrario jamais aux femmes libertines, que ce soit Trish (qui trahit pourtant sa meilleure amie... mais reçoit à la fin des excuses de cette dernière!) ou la jeune serveuse qui couche avec Jim Atwood dans les bois pendant la fête. Jim semble avoir fait quelque chose de monstrueux, alors que la serveuse (consentante) n'a rien fait de choquant.

    Et puis lorsque Hardy se sent obligé, à la fin, de préciser que tous les hommes ne sont pas comme ça... on sent Miller peu convaincue.

    Bref, il est heureux qu'il n'y ait pas de saison 4. La 3 était déjà de trop.

    Au fait, au chapitre des déceptions, avez-vous vu la série Liar, la nuit du mensonge, diffusé récemment sur TF1 ? Une femme qui accuse un homme de viol suite à une soirée arrosée? Une série qui commence de manière prometteuse, mais qui finit par s'enliser dans les poncifs de l'homme forcément et par nature violent, pervers et manipulateur.

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