Les manières lentes et un peu raides, la carrure carrée, le parler mesuré et très construit, le timbre de voix un peu rentré de celui qui n’a pas toujours eu la partie facile, Michel Barnier n’est pas un personnage moderne. Mais ce n’est pas grave.
Qui l’aurait vu candidat? Il semble si loin de la France, à Bruxelles, dans des sphères à mille lieues des préoccupations des hexagonaux en difficulté. Pourtant il est là, force tranquille et garantie de sérieux.
C’est vrai qu’il ne donne pas le sentiment d’être un joyeux luron. Mais ce n’est pas la qualité première que l’on attend d’un président. Il n’a pas l’élégance de danseuse unijambiste de Macron, dont on ne sait jamais où est le point d’équilibre.
Barnier c’est le vieux monde: solide. Il transpire l’équilibre par toute sa personne. Même sa proposition d’un moratoire sur l’immigration est mesurée. Il reconnaît cependant le diagnostic que fait presque toute la France aujourd’hui, sauf les islamo-gauchistes: le pays a mal à son immigration.
C’est une caution apportée à ce thème, thème qui sort si brutalement aujourd’hui en raison de l’étouffement qui en a été fait pendant au moins 40 ans. Étonnamment personne ne traite Michel Barnier de fléau d’extrême-droite, de fasciste, de raclure nauséabonde, de pourriture xénophobe.
Barnier se montrant comme un personnage moral, rigoureux et modéré, il cautionne ce discours plus que n’importe qui. Parler d’immigration, exprimer son intention de la maîtriser, est donc légitime.
En 2009, à propos de sa prise de position moins favorable à l’entrée de la Turquie dans l’UE, il déclarait au Bondy Blog:
« … je me permets de rappeler qu’il y aura dans l’UE des pays musulmans comme l’Albanie, la Bosnie qui sont clairement en Europe. Ces pays, dont la majorité des citoyens sont de confession musulmane, vont entrer un jour dans l’UE. Les yeux dans les yeux, je vous dis que ce n’est pas la religion le problème. Le problème, c’est celui de faire entrer dans l’UE un pays qui n’est pas sur le continent européen, qui est un très grand pays et d’encourager ce sentiment d’une Europe qui n’a pas de frontières et pas de limites. »
En 2021 il propose un moratoire sur l’immigration:
« Il faut décider dans ce pays un moratoire en matière d’immigration, de trois à cinq ans", pour "prendre le temps de vérifier, d’évaluer, le cas échéant de changer, les procédures et les pratiques", a estimé Michel Barnier. »
Il va même un peu plus loin:
« L’ancien ministre (Agriculture et Affaires étrangères a par ailleurs assuré qu'"il y a des liens" entre l’immigration et "les réseaux terroristes qui utilisent les flux migratoires, qui les infiltrent".
Pour autant, il ne "pense pas que tous les immigrés, et notamment ceux qui essaient de traverser la Méditerranée pour rejoindre un avenir meilleur, sont des terroristes en puissance ou des délinquants en puissance. »
On comprend qu’en parlant d’immigration il parle de celle d’Afrique subsaharienne et de l’arabo-musulmane. Mais il évite de mentionner nommément cette dernière. Il reste prudent et ne condamne pas vraiment le flux de l’immigration illégale. Il faut dire que Barnier n’a pas l’audace de Xavier Bertrand. Celui-ci va plus loin sur l’islamisme.
On trouve aussi ceci chez Michel Barnier:
« … a annoncé vouloir taper du poing sur la table vouloir mettre au point un « électrochoc d’autorité », en créant un ministère de la Sécurité publique et en interdisant dans la Constitution de « se prévaloir de son origine ou de sa religion » pour « s’exonérer de la règle commune. »
Là encore il évite de nommer ses cibles, qui sont en France principalement les personnes d’origine ethnique arabe, et culturelle musulmane.
On remarque ailleurs que lui, Michel Barnier, ancien dirigeant à Bruxelles, grand négociateur, homme de la terre et des cabinets, prend une petite rasade de souverainisme:
« Enfin, concernant l’immigration, Michel Barnier juge "qu’il faudra à la fin changer la Constitution sur certains points, notamment pour avoir plus de marge par rapport à des textes ou des règlements européens ». »
Europe et immigration sont donc des points fondateurs de sa candidature. On notera qu’il a stupéfait la « Planète Europe » par ses propos sur l’immigration et la proposition d’un moratoire. On ne s’attendait pas à entendre ceci dans sa bouche:
« Nous ne pouvons pas faire tout cela sans avoir retrouvé notre souveraineté juridique, en étant menacés en permanence d’un arrêt ou d’une condamnation de la Cour de justice européenne ou de la Convention des droits de l’homme, ou d’une interprétation de notre propre institution judiciaire. »
Au fond, il représente le RPR canal historique, plus proche de Zemmour que de Bertrand. Il déclare son amour en même temps à la France et à l’Europe. Il est « patriote, gaulliste, européen ». Sans brillance mais opiniâtre, cet homme a dans sa stature quelque chose du centurion romain défendant à la fois Rome et l’Empire.
Mais quelles sont les chances de ce patriote? Un tel discours en même temps fleure bon un certain idéal passé, en échec, mais semble peu en phase avec l’époque présente défaitiste, hargneuse et clivée. Son principal atout est peut-être d’être stable et rassurant.
Cela ne suffira pas. Il est en position faible dans les intentions de vote LR pour la désignation de la personne candidate. Et les récents sondages que j’ai vus ne mentionnent même plus son nom comme hypothèse pour le premier tour de l’élection.
Un Corse célèbre était monté à Paris pour sauver la France. Lui, Barnier le Savoyard, le centurion, n’ira probablement pas à l’Elysée.
Commentaires
"Barnier le Savoyard, le centurion, n’ira probablement pas à l’Elysée."
C'est probablement très dommage.
Il n'aime pas la Suisse !!!
En revanche, il a le courage de ses opinions sans passer par des phrases qui trop souvent ont trois sujets et quatre affirmations avant la conclusion !