En cette année 2022 un événement planétaire avait mis en pâture télévisuelle la vie et les tribulations d’un couple célèbre. Ce furent six semaines de procès médiatisé dans ses détails les plus crus et troublants.
En ce temps de grâce il suffisait d’être un homme pour être coupable, et d’être une femme pour obtenir le statut de victime. La généralisation était triomphante et la présomption de culpabilité faisait son chemin.
« On te croit, on te croit! » répétait religieusement la procession des Gorgones. C’était un mantra. Le message devait briser toute résistance intellectuelle et pénétrer dans la matrice des certitudes comme un virus.
Les prêtresses de #MeToo tentaient de baliser leur pré carré: les violences conjugales, devenues les violences faites aux femmes. Entendez par là: aux seules femmes. Pourtant en France ou au Canada par exemple, 30% à 50% des victimes sont des hommes.
Combien d’accusations lancée sous les labels MeToo ou BalanceTonPorc étaient vérifiées? Extrêmement peu. On donnait du crédit à une parole sans autre argument que la bonne foi (réelle ou non) d’une plaignante. C’est une régression. Quelques mots sous un pseudo ne sauraient faire justice, ou alors la notion de justice est bonne pour la poubelle.
Les accusations publiques se multipliaient, soutenues et complaisamment relayée par quelques Gorgones ou militantes partisanes.
Le verdict du procès intenté par Johnny Depp contre son ex-femme fut donc un pavé dans la marmite, dans la mare #MeToo.
On a vu alors les bergères du troupeau féministe professionnel expliquer que #MeToo n’était pas en cause, ou que le verdict ne « … remettait pas en cause les violences qu’a pu subir Amber Heard. »
Il ne fallait pas que le fond de commerce soit affaibli par un tel procès. S’il y a eu de vraies victimes dans le mouvement #MeToo, il tournait autour d’elles une nuée de femmes intéressées à charger les hommes plus qu’à appeler à la raison judiciaire ou à une réconciliation/réparation.
L’utilisation des rézos zociaux pour attaquer nommément, une pratique épouvantable et profondément méchante, était devenue banale. On voyait la vie de couples offerte à tous les vents, même les plus mauvais. Dans tous ces témoignages invérifiables on ne distinguait plus un geste de drague maladroite d’un viol caractérisé avec violence.
Le procès Depp-Heard a été un sommet d’indécence, d’exhibition et de voyeurisme.
La vie privée était privée de sa plus élémentaire dignité: la discrétion. On s’éventrait sur le regard acéré du public comme une crucifixion auto-administrée.
En ces temps on ne s’encombrait plus des procédures légales, garanties d’un procès à peu près équitable. La justice publique et les rézos produisait des saccages, des ruées de prédateurs et de prédatrices qui voyaient dans ces pogroms (qui n’en avaient pas le nom mais l’esprit) un moyen d’exorciser toutes les victimes – et toutes les femmes l’étaient forcément – et de terroriser les hommes. Il y avait dans dans les dénonciations publiques un relent de délation comme en d’autres temps, et une volonté de tuer socialement.
Les Gorgones ne s’en cachaient d’ailleurs pas. Les dommages collatéraux inévitables étaient le prix à payer pour que la honte change de camp. Ce slogan en disait d’ailleurs long: La honte doit changer de camp.
Il ne s’agissait pas de justice mais de vengeance, et l’on ne savait plus faire le tri entre les deux. Souvent le pire l’emportait dans l’imaginaire. La honte? La reproduire, la faire porter par les hommes collectivement, parce qu’hommes, faisait d’elles des prédatrices comme les pires hommes.
On a donc presque tout su de la courte vie maritale des deux amants. Je passe rapidement sur nombre de détails, comme l’étron dans le lit conjugal. Selon AH c’était le fait de son chien. Selon une personne de service c’était tout sauf un étron canin. Mais nous n’y étions pas.
Plus grave est le climat où cette relation a évolué. Se filmer comme pour accumuler les preuves de faute (si j’ai bien compris) dès les premiers moments en dit beaucoup sur le biais qui habitait cette relation possiblement toxique.
Plus grave encore sont les témoins, nombreux, qui ont contredit AH.
Et les mensonges de AH, et les explications tirées par les cheveux ou chevauchant les stéréotypes victimaires modernes. De gros mensonges, comme prétendre avoir versé 7 millions de dollars à deux associations de soutien aux femmes, alors que ce versement n’a jamais été effectué. Elle l’avait pourtant affirmé sous serment à un tribunal londonien. Cela devait rehausser son image publique de femme bienveillante.
Et ce détective privé payé par AH pour trouver de quoi noircir JD? Voici ce qu’il a déclaré:
« Les avocats d’Amber m’ont contacté en me disant que j’étais l’homme qu’il leur fallait pour le job, c’est ainsi que j’ai commencé.
Elle était émotive et tourmentée, c’était une relation instable.(…) J’ai cherché aux Etats-Unis, en France, en Italie, au Royaume-Uni, partout où Johnny Depp a pu aller (…) , je n’ai pas pu trouver un seul cas, ou du moins un cas avéré, où il a été physiquement violent envers une femme, où il a giflé ou battu. C’est un ange. Pas un témoin pour en dire du mal. »
Ange, je n’y crois pas. Il n’y a pas d’anges. Tous et toutes nous avons des progrès à faire.
En condamnant lourdement AH le tribunal validait la thèse de la diffamation. Il ne s’agissait certes que d’une procédure civile. Mais ce verdict résonnait en creux comme reconnaissance de non-culpabilité. Les accusations de AH dans un éditorial en 2016, où elle affirmait avoir été battue par JD, étaient considérés sans fondements. Selon TF1 Info:
« Les cinq hommes et deux femmes du jury ont estimé unanimement qu’Amber Heard avait émis des fausses déclarations en se décrivant comme victime de violences conjugales dans le titre et deux passages d’une tribune publiée dans le Washington Post en 2018, et qu’elle avait agi "avec une intention malveillante", même si elle ne nommait pas son ex-époux dans ce texte. »
JD avait lui aussi été condamné, mais pour des déclarations faites par son avocat, Adam Waldman. Celui-ci avait parlé de coup monté par AH, ce qui n’était pas démontré. Pourquoi condamner Depp et non Waldmann? Parce qu’il a été estimé que ce dernier parlait au nom de son client, et sous sa responsabilité.
Quoiqu’il en soit l’attaque de AH contre JD était beaucoup plus grave. Et aujourd’hui elle est perdante, financièrement, en image, en crédit.
Des féministes ont pris sa défense. Certaines craignent que ce procès ne sape le mouvement #MeToo. Mais MeToo n’est pas une bible intangible. Tout n’y est pas vérifié. Tout n’y est pas vrai a priori. Et les femmes de MeToo ne sont pas des oies blanches, à l’instar d’Asia Argento, co-fondatrice, empêtrée dans une histoire sexuelle avec un garçon très jeune.
JD a perdu un même procès (diffamation) contre le Sun à Londres. Pourtant AH n’a apporté aucune preuve. Ses seules déclarations sont la preuve « substantielle ». En effet selon le tribunal:
« … après avoir « examiné en détail » 14 épisodes, le juge Nicol a estimé dans son jugement que les qualifications du Sun étaient « substantiellement vraies. »
Substantiellement? Substance suppose qu’il y a matière concrète. Or il n’y a rien, rien que les déclarations de la plaignante, déclarations non vérifiées. Aucune preuve formelle pouvant servir de substance.
Amber Heard n’a produit aucune preuve performante pour donner corps à ses accusations. Cela n’empêche pas nombre de féministes de se sentir obligées de baliser le champ narratif du procès: une femme ne peut mentir, ne peut inventer cela, ne peut être que sincère et victime.
On dit qu’elle, petite chose, n’a pu se défendre contre l’homme puissant. Stéréotype bullshit. La petite chose qui a tenté de faire croire en ses propos lors de son témoignage très performant, est aussi sortie avec Elon Musk. Pas de quoi faire penser à Cosette. Elle ne surfe pas avec les manutentionnaires de La Poste. Ce n’est pas une faute, c’est un constat.
Cette nouvelle théologie juridique du substantialisme dématérialisé était boiteuse mais se répandait comme une tache d’huile. Par exemple on lisait que ce verdict n’empêchait pas que la dame ait été victime réellement. Affirmation gratuite.
On n’en sait rien et puisqu’il faut choisir son camp, et croire plus que réfléchir, alors je préfère le camp de Johnny Depp. Pas par principe, pas parce que c’est un homme, mais parce que les éléments du procès ont privé AH de tout crédit à mes yeux. Même si elle se pose en défenseure des autres femmes (ça ne mange pas de pain).
D’ailleurs il ne s’agit pas du procès de #MeToo, mouvement qui ne fait pas l’unanimité. Une écrivaine féministe, Sabine Prokhoris (image 6), en fait une critique sans complaisance dans son livre Le mirage #MeToo (image 7).
Dans ce procès il s’agit de deux célébrités. L’une a invoqué une croisade en faveur des femmes battues, ce qui est une manière de donner de l’importance à son cas personnel; l’autre a évoqué son propre statut de victime dans cette relation toxique.
Pourquoi une femme mentirait-elle (ou un homme?)
Elle peut mentir de bonne foi sur un malentendu. Ou parce qu’on l’a convaincue qu’elle est victime. Ou par trouble mental. Ou par colère, ou esprit revanchard. Parfois aussi pour des raisons sordides: obtenir de l’argent ou des avantages.
Ce n’est ni exceptionnel ni rare, j’en ai documentées un certain nombre. Et c’est dévastateur. Malheureusement le mouvement #MeToo amplifie ce phénomène en sacralisant la parole des femmes avant même toute enquête, en généralisant (elles sont les femmes), et en faisant preuve d’un parti-pris décomplexé et sauvage qu’elles font passer pour une sorte d’humanisme moderne.
AH, dépitée, a invoqué les femmes en général pour justifier son cas personnel. Elle a déclaré que la décision du tribunal était un recul pour les femmes. Bla bla.
Il y aura appel, ce n’est donc pas terminé.
En France, l’auteuse de #balancetonporc, Sandra Muller, a finalement obtenu gain de cause en cassation, après avoir été reconnue coupable de diffamation. Elle avait accusé nommément un homme de comportement sexuel agressif.
Pour casser le premier jugement la Cour de cassation invoque la bonne foi:
« … le bénéfice de la bonne foi doit être reconnu à Sandra Muller. » Ses propos reposeraient reposeraient, selon le tribunal, sur « … une base factuelle suffisante. »
En ces temps-là les déclarations non étayées et non vérifiées avaient donc acquis le statut de preuve factuelle ou substantielle. Le féminisme corrompait de plus en plus la démocratie. On pouvait accuser sans preuve et sans risque.
C’étaient les temps modernes d’une époque vaguement déglinguée où le monde devenait une série de zooms catastrophiques. Encore un peu et l’on allait voir fleurir le hashtag #MeTooMan.
Commentaires
Pourquoi une femme mentirait-elle ? bah...Bien souvent dans ces affaires, c'est pour l'argent. Depardieu a été très finaud en installant des caméras dans son appartement, Apparemment ça lui a évité des déconvenues malgré sa passion pour la chair. Le balance ton porc me fait penser à un événement qui s'est produit hier soir dans mon voisinage...Alors je balance ma truie : Depuis quelques temps, une nouvelle habitante d'un bâtiment proche pousse des vocalises sexuelles assez inédites par leur intensité, et ce, toutes fenêtres ouverte. Jusqu'à présent elle avait récolté quelques cris moqueurs et imitatifs mais hier soir, une voisine excédée a hurlé "Ta gu__le p_tain !!!" Ce fut efficace.
Merci à Homme-libre pour avoir fait toute la lumière sur ces dérives féministes. Pourquoi sacraliser Metoo quand on sait que la parole des femmes n'est pas, comme on disait autrefois, une "parole d'évangile" ? Permettez-moi de reprendre les propos de Jean-Michel Delacomptée dans "Causeur" : " Croire la parole des femmes sans autre forme de procès n'a aucun sens. La vérité ne sort pas plus de leur bouche que de celle des enfants". On aimerait bien que certains juges y pensent également.
Le procès américain n'était pas censé statuer sur le fond de l'affaire ( les violences physiques), mais sur la diffamation qui aurait nui à la carrière de JD.
Il aurait perdu des contrats suite aux révélations de AH et en particulier l'article où elle ne le nomme pas, tout en laissant comprendre de qui il s'agit.
https://www.washingtonpost.com/opinions/ive-seen-how-institutions-protect-men-accused-of-abuse-heres-what-we-can-do/2018/12/18/71fd876a-02ed-11e9-b5df-5d3874f1ac36_story.html
JD a eu le bon flair en demandant que le procès soit public et télévisé. Sachant qu'il y aurait un jury, les choses se présentaient différemment qu'avec le juge britannique. Et JD a tablé sur sa notoriété plus grande.
Je n'aurais pas cru qu'il puisse ainsi réunir des millions de fans derrière sa bannière. Car un des aspects spectaculaires de ce bizarre lavage de linge sale devant un public planétaire, c'est que tant de personnes aient milité en faveur de JD.
Tout ceci est tellement américain !
L'idée d'exposer urbi et orbi et sans vergogne les coulisses de sa vie conjugale - n'est-ce pas étrange ?
Et surtout si on a mené une telle vie. Effectivement, personne n'est un ange, mais ces deux-là font partie d'une catégorie très spéciale que je n'essaye pas de qualifier. Difficile de dire qui est le plus excessif ou la plus excessive.
Je ne prends parti pour personne. Leur monde, ses règles et valeurs sont au-delà de la réalité commune. Ce procès et ses tenants et aboutissants sont assez peu transposables à la vie de tout un chacun.
Comment sortent-ils de ce show lamentable ? JD a reçu davantage d'argent en dommages et intérêts que AH, donc on considère qu'il a gagné.
Mais à présent, nous en connaissons un bout sur ses turpitudes. Peut-être pas toutes, mais suffisamment pour ne pas être charmés.
Drogue, alcool, démolition de cuisine. Quel héros !
Et elle ? Elle sort rétamée de cette affaire.
Je suis curieuse de voir la suite de leurs carrières.
Car après tout, il s'agit de ça : briller dans le monde du show-biz.
On a vu plus brillant et moins pathétique.
Excellent article, Mais quelle est la responsabilité des réseaux sociaux ?
Elle est d'amplifier, ou de créer des polémiques clivantes sur la base de presque rien, sans vérification. Elle est de se constituer en tribunal parallèle qui s'affranchit des règles élémentaires de la justice.
On ne peut pas contrôler les réseaux sociaux. La censure n'est pas non plus la solution car qui va le faire et sur quels critères ? Par contre, les médias les plus sérieux (journaux et télévisions) devraient déjà se taire tant que l'accusé n'est pas mis en examen. La règle à suivre quand on est journaliste c'est la présomption d'innocence. La dérive Metoo illustre les dangers qui menacent notre société démocratique.