Belle histoire (27) : la légende du charbon.

Cette note peut surprendre ou générer des désaccords. Sa beauté n’est peut-être pas très évidente. Pourtant, au final, la part positive du bilan est énorme.

Carbonisation

Le charbon est l’un des plus anciens amis de l’espèce humaine. C’est un combustible aux usages multiples: chauffage des habitations, cuisson, forge, il est présent dans les domaines les plus essentiels du vivant.

Le charbon de bois n’est pas le plus réchauffant comparé au charbon de terre (la houille). Mais il est la plus ancienne ressource énergétique porteuse de chaleur, mis à part le bois naturel qui a d’autres usages.

Comme le mentionne Wikipedia:

« Durant des siècles, toute une civilisation s’est développée sur une économie du bois. Les villes, gourmandes en bois d’eau comme en bois de construction, se sont jointes aux fours, forges et fourneaux dévoreurs de bois-bûches et de charbon de bois, ainsi qu’aux chantiers navals, avec leurs bois de marine, aux vignerons avec leurs échalas et leur merrain à tonneaux, pour solliciter intensément le monde de la forêt.

Durant des siècles, la pénurie en bois s’est faite sans cesse plus pressante. C’est qu’il fallait fournir à la fois des quantités gigantesques et des produits de mieux en mieux calibrés, de plus en plus normalisés. »

Le charbon de bois est la matière issue de la carbonisation du bois sans présence d’oxygène. Il est simple à produire.

Forêts

Le bois est débité en morceaux. Ils sont assemblés serrés dans un dôme posé sur le sol (image 2, Précis illustré de mécanique, 1894). Au centre un trou est laissé sur toute la hauteur et le charbonnier y met le feu. Ce feu:

« …consiste en charbon de bois allumé, puis on le referme totalement et on met une couche de terre ou de gazon sur toute la surface pour éviter les courants d’air. Il brûle dans cette position pendant quinze jours ou trois semaines suivant la qualité du bois… »

Par la suite des fours en métal furent construits (image 3, Wiki, four à charbon de bois en Provence).

La population augmentant et le bois étant de plus en plus utilisé comme ressource principale, les forêt se sont réduites.

Au Moyen-Âge les forges fondaient à plein régime, les maisons étaient en bois, l’édification des cathédrales décimait des forêts, les marines marchandes et militaires en consommaient à tout va. Dès le 14e siècle en Europe on a limité le nombre de forges dans certaines régions.

« L’usage intensif du charbon de bois dans les forges a provoqué des déforestations qui ont touché la Chine antique puis l’Europe romaine et médiévale. Ainsi, en France, une ordonnance de 1339 obligea la destruction des forges dans un rayon de trois lieues autour de Grenoble afin de stopper la déforestation provoquée par l’usage intensif du charbon de bois pour la fabrication de l’acier. »

Maison

Pourtant ce charbon de bois a permis le développement des sociétés humaines, partout sur Terre.

L’exploitation du charbon de terre, la houille, a peut-être sauvé des forêts en Europe et ailleurs. Le charbon est utilisé depuis un millénaire. Son exploitation industrielle va changer le monde, comme le charbon de bois avait changé la vie dans la Préhistoire et ouvert la porte au travail du métal.

Cette fois c’est l’industrie qui en profite, mais aussi le chauffage des habitations. Grâce au charbon les grandes innovations vont modifier le quotidien des gens, comme par exemple le train. On en extrayait du gaz d’éclairage pour les villes. L’usage domestique se développait aussi:

« Pour le ménager, les pauvres gens le réduisent en une poudre grossière qu’ils mêlent avec de la terre glaise ; ils travaillent ce mélange, comme on feroit du mortier; ils en forment ensuite des boules ou des espèces de gâteaux, qu’on fait sécher au soleil pendant l’été. On brûle ces boules avec du charbon de terre ordinaire ; & quand elles font rougies, elles donnent pendant fort longtemps une chaleur douce & moins âpre que celle du charbon de terre tout seul. »

Les entreprises charbonnières ont été les plus grandes de leur époque. Aujourd’hui, sous la pression de l’écologie politique et idéologique, on voudrait jeter le charbon aux oubliettes de l’Histoire.

Silicose

Mais qu’on lui construise d’abord un musée. Car toutes les innovations industrielles, médicales, sociétales, doivent leur existence d’abord au charbon, avant que le pétrole ne prenne la relève avec le succès que l’on sait.

Et au moins, que l’on décore de manière posthume tous les hommes et les femmes qui sont descendus à la mine pour notre confort, notre bien-être, notre chauffage, notre développement. Les hommes principalement, mais aussi des femmes, y ont laissé leur vie et leur santé.

Selon un recensement au moins 72 000 morts par silicose sont recensés pour 250 ans d’exploitation minière en France. 900 mineurs décèdent encore chaque année de cette maladie qui détruit les poumons.

Toutefois une autre étude recense au moins 34 000 décès par silicose entre 1946 et 1987. Tous les cas ne sont pas pris en compte:

« Non seulement elle ne concerne que les silicosés reconnus, mais à l’intérieur de cette population elle ne retient que les défunts dont les ayants droit ont réclamé et obtenu des reversions de rente : c’est à eux en effet d’établir la preuve d’une relation de causalité entre la silicose et le décès. »

Légende

Au temps des mineurs de fond, les célèbres « gueules noires », il y avait ceux qui rentraient le soir, visage noirci, corps épuisé, malmené. Il y avait ceux qui ne rentraient pas, soufflés par une explosion de gaz ou ensevelis par l’effondrement d’un boyau de mine.

Et il y avait ceux qui, souvent encore jeunes, commençaient à cracher du sang. Combien exactement sont morts pour nous? Impossible à dire avec précision.

Mais ils ont permis le développement de technologies nouvelles, apporté de la prospérité, oeuvré non seulement pour leur propre bien mais pour celui de tous.

Le charbon a été et est encore un formidable moteur de développement bien qu’il soit considéré comme la pire énergie fossile par les écologistes. Le charbon est encore la deuxième ressource énergétique mondiale. Son bilan est fortement positif, si l’on pense aux services rendus depuis la préhistoire.

Ceux qui l’ont sorti des entrailles de la Terre, malgré la souffrance, la peine, la maladie et la mort, ou grâce à cela, et malgré la pollution dégagée par cette ressource, ont écrit une histoire utile pour l’humanité, une légende.

Le charbon: une belle histoire au final.