Prendre l’avion ? Même pas honte.
En Suisse un sondage Tamedia publié par le Matin Dimanche révèle que la honte et la culpabilité de prendre l’avion ne touchent qu'une minorité de la population: environ 40% des 13 660 sondés.
50 % des personnes interrogées affirment vouloir prendre l’avion pour aller à l’étranger cet été. Dans l’ensemble les hommes culpabilisent un peu moins que les femmes (36 % / 43 %), et les personnes de gauche plus que celles de droite.
La classe des 18-34 ans est la moins touchée par la honte de voler (Flygskam en suédois), et aussi celle qui volera le plus cet été.
Il semble que le discours moralisateur et culpabilisant sur les voyages en avion n’emporte pas l’adhésion. Je l’ai déjà dit, je suis favorable à l’avion, même s’il y a des années que je ne l’ai plus pris. C’est un moyen de déplacement extraordinaire quand on y pense.
Je garde mes distances d’avec les injonctions morales. Sauver la planète est un slogan simplificateur auquel je suis volontairement sourd. Il vous range à faible coût dans le camp du bien. Mais on ne sauve pas la planète, elle se débrouillera toujours d’elle-même.
Cette croisade quasi-missionnaire est à mon avis de nature à contraindre encore plus notre environnement. Je n’ai pas besoin d’une nouvelle religion. Je redoute le déficit démocratique qui accompagne le climatisme.
C’est facile d’attaquer l’avion quand on consomme de l’internet en volume démesuré. Les flottes aériennes ont beaucoup évolué. Les moteurs sont moins gourmands, moins bruyants.
Réduire nos émissions: la même chose devrait aussi s’appliquer en Afrique et en Asie. Les agences occidentales insistent auprès des pays en développement pour qu’ils réduisent leur émissions. Donc réduire le charbon de bois qui est le principal combustible pour des milliards de personnes?
Ce sera possible, comme ça l’est devenu chez nous, quand tous les pays auront l’électricité à la maison. Et les moyens de se payer une voiture électrique ou à essence propre. Aujourd’hui les pays émergents émettent plus de CO2 que les occidentaux. Ce sont eux qui « dérèglent » le plus le climat, selon la théorie carbocentrée.
Les résultats de ce sondage me montrent qu’une bonne partie des gens et de la jeunesse gardent encore leur propre jugement. Ma position peut évidemment être contredite, mais perso je trouve cela plutôt bien.
Le traffic aérien reprend de la santé après la Covid, et retrouvera son niveau de 2019 d’ici deux ans. Les Suisses voyagent beaucoup. En 2022 un spécialiste, Rafael Matos-Wasem, affirmait:
« D’après un sondage de l’Office fédéral de la statistique de 2020, environ 80% des Suisses voyagent régulièrement, pratiquant aussi bien du tourisme domestique qu’international, en se déplaçant en voiture, en train ou en avion. »
Toujours selon ce spécialiste la part des voyageurs touchés par la honte du voyage en avion est faible:
« D’un côté, on a les gens qui ne veulent plus prendre l’avion pour des raisons écologiques – la fameuse honte de voler – et, s’ils veulent quand même s’offrir des escapades, sont très satisfaits du retour en force des trains de nuit. Mais ils sont minoritaires et ne représentent pas plus de 10% des voyageurs. »
Les classes jeunes disent pour se dédouaner qu’elles doivent avoir le droit de découvrir le monde. Il n’y a pas que l’avion, mais celui-ci continue à représenter une valeur forte dans la mobilité. Et puis les personnels politiques, les acteurs Hollywoodiens et les vedettes en tous genre (en gros ceux qui imposent un agenda moral au monde) continuent à donner l’exemple du voyage en avion. Pourquoi devrions-nous nous limiter davantage qu’eux?l
De plus renoncer à l’avion compliquerait considérablement la mobilité mondiale.
Dans La Tribune d’Occitanie un article relate comment le Flygskam a pris de l’essor. Il résume l’étude de la Chaire Pégase sur l’impact du traffic aérien.
La pollution par les avions a pourtant moins augmenté que dans d’autres secteurs et reste en-dessous d’autres activités ou productions:
« … en dépit de la forte augmentation du nombre de passagers aériens transportés au cours des 20 dernières années, les émissions de CO2 du transport aérien ont certes augmenté mais dans une moindre mesure. [...] Ainsi, pour la France, les émissions par passager transporté ont baissé de 28 % entre 2000 et 2018. Si la majorité des compagnies aériennes ont réalisé une forte baisse des émissions de CO2 par passager transporté, certaines ont même réussi à réduire leurs émissions en valeur absolue ». Des résultats obtenus par la mise en œuvre de plusieurs mesures pour accélérer leur transition environnementale.
L’étude pointe ainsi que si l’impact environnemental du transport aérien est de l’ordre de 2 à 3 % des émissions globales de CO2, « les activités liées à internet sont de l’ordre de 4 % et celles liées au textile et à l’habillement sont comprises entre 8 et 10 %. »
En France 12 % de la population est atteinte par la honte de prendre l’avion. Quel pourcentage fait du shopping de textiles régulièrement, bien plus problématique? L’initiateur du mouvement en Suède affirme avoir parcouru la planète sans jamais prendre d’avion. Il reconnaît des déplacements en cargo. Super-polluant, ça, un cargo...
Commentaires
Bonjour,
Ci-joint un lien qui permettra peut-être de complexifier un peu les enjeux, très clivants je vous l'accorde !
https://bonpote.com/pourquoi-arreter-lavion-ne-devrait-plus-etre-un-debat/
Bonne lecture, et merci de nous faire partager vos points de vue (et d'accepter les commentaires qui ne vont pas toujours dans votre sens, c'est suffisamment rare pour être souligné !)
Des quotas pour le tourisme aérien, oui, pourquoi pas. Comme le dit votre lien, la France mérite d'être visitée de fond en comble et l'on peut aussi voyager par l'esprit (carte postale, vidéo, documentaire, livre, etc). Mais H.L. montre que l'avion n'est pas la seule source d'émissions polluantes. Sommes-nous prêts à limiter internet, la mondialisation de la production, la voiture, le chauffage, etc ? Serons-nous capables de contraindre les pays en développement à faire marche arrière avant d'atteindre notre niveau de vie ? Comment allons-nous faire pour diminuer drastiquement le nombre d'enfants par femme dans les pays qui font progresser la population mondiale ? C'est un défi qui n'est pas simple à résoudre. Faisons quand même confiance à la raison.
Bonjour Henri, parfaitement d'accord avec vous, il ne faut pas réfléchir en silos, chaque secteur devra prendre sa part,
rationnellement et le plus équitablement possible.
Bonjour Laurent,
Je vous remercie pour vos interventions que j'apprécie aussi, y compris pour la contradiction qu'elle apportent, justement.
L’article du bon pote est l’exemple de ce qui nous attend de pire: des scientifiques prêts à condamner la liberté, sans débat avec les intéressés (qu’il faudrait seulement éduquer, comme les rouges éduquaient les masses…) – d’ailleurs l’article regrette qu’il puisse encore y avoir débat, cela en dit long sur l’état d’esprit.
Cela au nopm d’une certitude à laquelle seule une poignée de gens a accès pour en débattre, et où ceux qui discutent cette certitude comme c’est normal dans la science et la démocratie, sont traités comme des renégats. L’idée d’une urgence (pourtant discutable) permet toutes les transgressions en « bonne conscience », alors même que l’on s’enfonce dans un nouveau totalitarisme.
Vous m’aviez trouvé « radical » dans un précédent commentaire, et comme je ne voyais pas trop en quoi je n’ai pas répondu sur le moment. Mais la radicalité est dans l’article, dans le Giec, dans les lobbys écolo-écono—politique.
Le présupposé selon lequel il faut réduire les émissions par 4 est un dogme. Il faut le nuancer et l’adapter. Vouloir appliquer une règle unique dans tous les domaines est l’exemple du dogmatisme volontariste aveugle.
Bon on comprend vite l’objectif: sanctionner les riches, ceux qui peuvent voyager.
« Ceci est un très bon rappel : ce sont les ménages les plus aisés qui prennent l’avion, et qui ont en général l’empreinte carbone la plus élevée. N’en déplaisent aux influenceurs, stars et autre digital nomads : il va falloir ralentir. »
L’ordre est donné, la soumission suivra ou bien la sanction tombera.
On y mélange l’abattage des animaux pour faire monter la sauce. On y met la motivation morale et éthique pour bien faire comprendre que c’est mal de faire autrement… On est en plein catéchisme.
L’intérêt du monde actuel est qu’il a laissé les gens faire leurs propres choix en leur offrant les moyens de le faire. Tous les choix ne sont pas les mêmes pour beaucoup de raisons, mais c’est un fait. Aujourd’hui on veut limiter cet état des choses.
« La place que l’on donnera à l’aérien à l’avenir reflétera donc un choix sociétal et éthique : parmi les changements à opérer pour atteindre un monde neutre en carbone, est-on prêts à sacrifier quelques trajets en avion pour préserver des conditions de vie acceptables dans les décennies à venir ? »
Argument populiste en diable auquel on devrait automatiquement souscrire, mais mauvais argument. Le sacrifice est décidé par qui, contre qui? Qui fouette, qui est fouetté?
« Ce changement arrivera en partie grâce à des changements de comportement individuels (voyager moins loin, moins souvent, privilégier d’autres modes), mais devra aussi passer par une régulation plus forte au niveau international pour donner les bonnes incitations au secteur. »
La contrainte est prête.
Un aspect étrange de cet article est son méli-mélo. Entre autres il ne traite pas de ceux qui prennent le plus l’avion: vedettes, politiques, entrepreneurs, etc. etr met tout le monde dans le même sac. Il ne parle pas des asiatiques qui prennent l’avion pour mille raisons, alors qu’Airbus vient de vendre des centaines d’avions dans cette région.
Cela me confirme encore que, contrairement à ce que vous écriviez une fois, le Giec n’est pas un lieu de débats.
Bonne journée.
Moins prendre l'avion, un sacrifice ?
Je n'ai pris l'avion qu'une fois dans ma vie et je m'en porte très bien.
Cela ne m'a pas empêché de voyager, notamment par le train, pour visiter des pays de l'Est européen, en traversant le rideau de fer dans les années septante, Une très belle expérience !