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Cambodge : comment on prépare un désastre environnemental

Cambodge : comment on prépare un désastre environnemental.

Le Cambodge est un pays d’eau. On vient d’y célébrer la fête de l’eau, qui marque la fin de la mousson. La capitale Phnom Penh est fréquemment inondée. La pluviométrie est élevée. De mai à octobre il tombe en moyenne plus de 1 000 mm de pluie.

 

cambodge,inondations,sécheresses,phnom penh,mékong. lac tonlé sap,marais,zone inondable,développementLac Tonlé Sap

« Beaucoup d’anciennes sections du système de drainage dans la capitale sont devenues vétustes et inefficaces en raison du rétrécissement et de l’occupation illégale autour des canaux. Certaines zones de Phnom Penh souffrent alors d’inondations parfois spectaculaires pendant la saison des pluies. »

L’eau a deux origines: la mousson et le fleuve Mékong, en particulier lors de la fonte des neiges himalayennes. La ville est bâtie à la confluence du Mékong et de la rivière Tonle Sap qui vient du grand lac du même nom (image 2 Wiki).

Ce lac a ceci de singulier: en saison sèche il sert de réservoir au fleuve. En saison des pluies le fleuve inonde une grande plaine et reflue vers le lac. Ce renversement des eaux en fait passer la profondeur de 1 à 14 mètres. Ces hautes eaux sont très poissonneuses et contribuent pour une bonne part à l’économie régionale.

On trouve sur le lac de nombreux villages flottants ou sur pilotis, signe de l’adaptation des populations à cette singularité.

Si les inondations du sud Cambodge sont inévitables, comme en témoignent la plaine inondable de plus de 12 000 km2 et les zones de marais qui entourent la capitale, le lac tempère donc certaines formes d’inondations en accumulant l’eau excédentaire, et restitue de l’eau en période d’étiage.

 

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Ces crues du lac en font la prospérité. Selon Wikipedia:

« Lors de sa crue, le lac envahit les forêts et les champs avoisinants. L'écosystème du Tonlé Sap est donc reconnu comme un écosystème de forêt alluviale. L’inondation saisonnière crée un milieu idéal, pour la reproduction des poissons, si bien que quelque 200 espèces y sont répertoriées. (…) Le Tonlé Sap est en effet une des zones de pêche d’eau douce les plus productives du monde, fournissant plus de 75% du volume annuel de pêche en eau douce du pays. Une véritable providence pour les trois millions de Cambodgiens vivant dans la région. »

En saison sèche, la décrue du lac laisse d’importantes alluvions utile à l’agriculture.

Mais il est aujourd’hui menacé: par la surpêche, le déboisement et les… centrales électriques. La surpêche, on l’imagine aisément. Mais le déboisement? Eh bien les forêts denses qui bordent le lac et y plongent leurs racines (image 3), dont la mangrove, offrent des lieux idéaux pour la reproduction.

Mais aussi grand soit-il le volume du lac est limité. La surexploitation des ressources pose problème. Et ce n’est pas tout.

 

cambodge,inondations,sécheresses,phnom penh,mékong. lac tonlé sap,marais,zone inondable,développementLe cas de Phnom Penh

Les usines hydroélectriques construites en amont sur le territoire chinois modifient l’écoulement saisonnier du fleuve. Conséquence: le lac Tonlé Sap ne se remplit plus autant que par le passé.

La Tribune de Genève en faisait état en 2020, ajoutant la sécheresse d’alors aux autres causes. Sécheresse ponctuelle et non durable. Le rôle des barrage est abordé ici dans Le Temps:

« La multiplication des barrages renforce les effets négatifs du changement climatique, explique Marc Goichot, responsable du programme eau du WWF dans la région du Mékong. Par exemple, à la fin de la saison sèche, les réservoirs chinois étaient vides. Les premières pluies ont donc été collectées pour renflouer les barrages et produire à nouveau de l’électricité. »

Même non asséché, mais réduit, le lac n’assure plus sa fonction économique majeure.

Passons à Phnom Penh, où la catastrophe est annoncée.

Le cas de la capitale est simple. Construite à la confluence des cours d’eau, en zone de forte mousson, marécageuse, son inondation régulière est inévitable. Des canaux ont été construits pour drainer l’eau excédentaire mais ils ne fonctionnent plus correctement suite à une implantation envahissante de population sur leur parcours.

 

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L’image 4 montre aussi le développement de la ville en 140 ans. C’est énorme, en particulier lors des dernières décennies. Comment ne pas voir que la ville est submersible, forcément submersible?

Comme si cela ne suffisait pas plusieurs lacs marécageux autour de la ville ont été ensablés, bouchés, en vue de réaliser des grands projets immobiliers, parfois luxueux, dont bénéficie l’élite du pays. Ces terres ne remplissent plus leur fonction de tampon contre les inondations, qui ne peuvent que s’aggraver.

« Les lacs de la capitale cambodgienne, qui pendant longtemps ont assuré aux habitants des ressources en poissons et en agriculture marine, en plus de jouer un rôle de protection naturelle contre les inondations et de traitement des eaux usées, sont progressivement remblayés, à l’initiative de gros industriels et d’agences du gouvernement. »

Plus de constructions, plus de populations, imperméabilisation des sols, modifications artificielles du débit du Mékong: les erreurs que nous avons commises, occidentaux, ils semblent se délecter à les refaire.

Et pourtant:

« Etablie à la confluence de trois rivières, la ville de Phnom Penh est marquée par ses paysages inondés.

 

cambodge,inondations,sécheresses,phnom penh,mékong. lac tonlé sap,marais,zone inondable,développementFrénésie immobilière

Au fil du temps, la capitale cambodgienne a développé un système hydraulique complexe pour prévenir les crues du fleuve du Mékong et les pluies de la mousson. A l’origine composée de lacs et de canaux, cette protection est aujourd’hui peu à peu abandonnée. L’eau perd sa place dans la ville au profit de nouveaux projets urbains, qui assèchent et surélèvent les sols encore perméables. »

Un autre lien propose un article sur l’accroissement du risque d’inondations à cause de la frénésie immobilière.

« Le développement frénétique de Phnom Penh risque d’entraîner une catastrophe environnementale, avec plus d’un million d’habitants menacés par les inondations, ont mis en garde lundi des organisations cambodgiennes de défense des droits humains. Une grande partie des lacs et des terres marécageuses de la capitale cambodgienne ont été asséchés depuis le début des années 2000 pour laisser place à de multiples projets immobiliers. »

Certains médias attribuent bien sûr les inondations de Phnom Penh au réchauffement. Un peu moins de paresse intellectuelle permettrait de donner des informations plus nuancées.

À Phnom Penh et dans d’autres villes ou régions, les désastres en cours ou à venir, presque attendus, ne me surprennent plus.

 

cambodge,inondations,sécheresses,phnom penh,mékong. lac tonlé sap,marais,zone inondable,développementVulnérable

Ou nous vivons avec le risque en le limitant et en nous adaptant au mieux, ou il faut changer les villes, les fleuves, le climat, sur 80% de la planète.

Enfin, une étude pointe le Cambodge comme un pays à hauts risques hydrométéorologiques:

« Au Cambodge, inondations et sécheresses sont les risques les plus récurrents. »

Dont la densification urbaine:

« Cette récente densification de l’urbanisation, l’étalement urbain et les futurs projets d’aménagements dans les principales villes de l’intérieur du pays et sur l’interface côtière participent à une exposition croissante du territoire, lequel présente a priori une vulnérabilité élevée. »

N’y avait-il personne pour les renseigner avant qu’ils ne fabriquent les conditions de futurs désastres environnementaux??

 

 

 

Catégories : Environnement-Climat, Météo 2 commentaires

Commentaires

  • Monsieur Goetelen,
    Merci de condamner cette infamie. J'ai officié au Comité du Mekong de 1967 à 1971. Je connais bien le Bassin Inférieur du Mekong. Phnom Penh et le Cambodge étaient alors un paradis. En 4 ans et demi, je n'ai jamais vu d'innondations à Pnom Penh, le Tonlé Sap absorbait toute la crue. L'occidentalisation s'est installée et a tout détruit, comme ailleurs !

  • Si j'ai bien compris, lutter contre les conséquences désastreuses de ces inondations, c'est à la fois,
    1- Ralentir et arrêter le réchauffement climatique (fonte des neiges, pluies abondantes,...).
    2- Réglementer les transformations humaines de la nature (forêts, zones humides,...).
    Soyons optimistes, on devrait y arriver !

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