Continuant ma réflexion et mon travail autour du cancer, en particulier avec un thérapeute, c’est autour du loup que je concentre actuellement mon exploration. Ce loup dont le mode de vie est si intéressant pour nous humains, qui sommes plus près de la meute que de la bande de singes en terme de structure sociale.
Le loup comme modèle
L’analyse comparée du comportement du mâle alpha et de mon comportement d’homme est éclairant sur ce qui a modelé mes relations aux femmes et sur le pourquoi des trahisons que j’ai vécues, me conduisant jusqu’aux Assises et au cancer.
Le clan des loups est hiérarchisé, familial, solidaire et sage.
Hiérarchie: elle suppose une subordination, une dépendance et une transmission. Le chef, le parent, décide et transmet. Or je me suis rebellé contre la hiérarchie, contre l’autorité, porté par une soif profonde de liberté. Cette liberté qui m’a fait faire mon chemin par mes propres moyens - faire mes preuves sans aide - et dans un domaine où il n’y avait pas encore d’autorité constituée. Cette liberté que je voulais pour moi je la devais aussi aux autres, par souci de cohérence. Je ne pouvais donc pas poser de cadre à mes compagnes par crainte de les contraindre. De même je ne peux pas être un bon patron car j’aime l’interaction et le partage des responsabilités.
Ce que je ne voyais pas dans mon fonctionnement, c’était mon refus d’assumer mon autorité et le fait que d’autres avant moi en soient dépositaires. C’était le refus du père, un père que j’ai trahi alors que je l’aimais. Etre trahi, aller jusqu’à une fausse accusation et un procès, c’est comme si je devais rencontrer encore cette trahison, payer la mienne. Presque une forme de réparation inconsciente.
Familial: le territoire du loup, sa femelle, ses petits, sont intouchables. Je n’ai pas voulu assumer cette part et je me suis régulièrement placé dans des situations où j’étais fragilisé. Cette puissance du mâle dominant, je l’avais en moi, je la sentais, je l’ai démontrée dans l’énergie très entraînante que l’on me reconnaît et dans la création de ma vie jusqu’à présent. Mais j’ai refusé ce rôle de dominant, m’amputant d’une part importante de ma propre force.
Le dominant pervers
Pourquoi? Là se trouve une clé essentielle: j’avais eu un modèle de dominant très négatif à mes yeux. Ce n’était pas mon père. C’était quelqu’un d’autre, que j’aimais, qui m’a trahi moralement avec violence alors que j’avais 9 ans, et dont l’influence fut déterminante jusqu’à mes 18 ans. C’était un dominant sans éthique, prêt à se moquer de la confiance qu’on lui faisait, un opportuniste, un voleur au fort charisme.
J’étais trop petit pour faire la part des choses: j'ai appris plus tard qu'un dominant n’est pas forcément un traître ni un voleur. Le loup alpha, le loup dominant, n’est pas un tyran. Il est sage et protecteur. J’ai donc jeté le bébé avec l’eau du bain et je me suis construit en refusant la part du dominant en moi - alors qu’il ne fallait refuser que la partie abusive du modèle de dominant que j’avais eu.
Elle ressortait parfois mais je m’y soustrayais. Comme homme j’ai beaucoup développé la douceur, la compréhension, les sentiments, sans pour autant renier l’homme de désir et une sexualité très active. Mais je ne me permettais pas de poser des limites à la femme, ni de trop entrer en conflit. D’ailleurs, et c’est amusant: les rares fois où j’entrais en conflit on me faisait le reproche d’être trop dominant!
Mais un mâle dominant ne peut pas être une femelle, même dominante. Un mâle dominant ne peut trop montrer sa sensibilité sans fragiliser sa louve. Cette trop grande sensibilité chez moi a été une des causes d’une séparation d’avec la femme qui a le plus compté dans ma vie. Le passage du tendre au dur me faisait parfois paraître instable. Et quand je suis venu à elle, que j’ai posé mes armes de dominant, elle a trahi. Je sais aujourd’hui que je ne poserai plus mes armes. Le cerveau archaïque de l’homme a besoin de cet archétype masculin fort, grâce à quoi le cerveau archaïque féminin se sent en sécurité affective et physique. J’avais fait fausse route en écoutant trop les sirènes qui demandaient à l’homme de montrer beaucoup plus ses émotions et des fragilités. Cela c’est la théorie. La pratique en est loin.
Le dominant positif
Assumer d’être un mâle dominant n’a rien à voir avec l’égalité de valeur et de droits ni avec la domination abusive. C’est assumer sa force, ses besoins, poser son cadre et ses limites. C’est fixer son territoire et prendre ses responsabilité, tenir ses engagements. C’est accepter que, petit loup, un loup plus grand a autorité sur moi, jusqu’à ce que je montre ma propre capacité à prendre cette autorité.
Le rebelle en moi a certes un côté fascinant, et valorisant auprès de gens qui dans le monde fonctionnent sur le «contre» plutôt que sur le «pour». Mais ce rebelle m’a tronqué d’une part essentielle de moi-même et compliqué la vie plus que facilité. Depuis ma victoire éclatante aux Assises et les prises de conscience qui ont suivi l’opération de mon cancer je m’affirme avec plus de force. Je n’ai pas à chercher une reconnaissance en évitant de choquer ou de confronter.
Je ne suis plus l’amant ou le père universel, prêt à tout comprendre et soigner. Je suis toujours aussi tendre, mais beaucoup plus positionné et ferme. Du moins j’avance vers cela. Il y a d’autres étapes à venir, comme des peurs d’enfant jamais réglées qui ont contribué à développer en moi une part de lâcheté et à trahir mon père. Des peurs que je me prépare à affronter cet été, par une plongée chamanique solitaire dans la nature, accompagné intérieurement du loup. Je veux voir mes démons - mes peurs - en face, loin des théories égalitaires purement intellectuelles qui ne cachent souvent que des jeux de pouvoir déguisés. Cela fait partie, de toute évidence, de mon évolution et de ma guérison.
Il n’y a pas de hasard: dès l’été 2010, dans mon dernier roman, l’un des personnage est un chamane au nom de Loup des Nuages. Le loup est apparu aussi en décembre dans une séance de thérapie, relié à l’agression d’une juge d’instruction dérangée mentalement et à mon impuissance à me faire entendre. Des vieux schémas toujours actifs.
Le chemin, le travail intérieur, continuent. Je partage ces éléments très personnels en relation avec mes billets sur le cancer, car je crois qu’il est important d’ouvrir des portes et de partager un bout de sa quête intérieure, surtout dans les épreuves.
Liens:
- vers mon billet sur le loup alpha
- vers mes billets relatifs au cancer (regroupés en pdf)
Commentaires
cet animal empli de tous les maux et craintes a beaucoup à apprendre aux humains,il a même un rôle écologique très important d'après les garde faunes du Trentin,alors pourquoi le chasser de nos contrées?sans doute qu'après l'avoir bien observé les humains se sont senti pris à leur propre piége de fait le petit chaperon rouge devait se méfier des humains et non l'inverse,même les laboratoires pharmaceutiques en tirèrent bénéfice,c'est ainsi que Colgate arriva sur le marché!
bonne soirée à vous Hommelibre