Je rebondis sur l’article de Grégoire Barbey concernant l’information de plainte pénale de l’employé de sécurité qui a sprayé au poivre Eric Stauffer le soir des Fêtes de Genève. Je rejoins le questionnement sur le risque de stigmatisation qui découle d’une information dont la divulgation n’ajoute rien aux faits - sinon à faire bouillir la marmite fantasmatique genevoise: le plaignant est frontalier.
J’aborde la question soulevée par Grégoire Barbey de manière complémentaire, sous l’angle de la pertinence et de l’intention du journaliste. Cette désignation de frontalier est mise très en avant sur la TdG. Au point de se demander quel est le lien de cause à effet entre cette particularité et la séquence incriminée.
Il y a le titre, puis immédiatement cette première phrase: «Le plaignant est un frontalier.» Je ne vois pas la pertinence d'indiquer cela si rapidement. Sauf si le rédacteur veut ajouter à un conflit une majoration par la supposée animosité que les frontaliers doivent forcément avoir contre Eric Stauffer.
Cette phrase est malvenue à cet endroit. Personnellement je ne suis pas opposé à lire des détails sur une personne qui accède à une petite notoriété. Dans certains cas cela peut être pertinent. Il ne s'agit par exemple pas de stigmatiser une communauté au travers des agissements d'une minorité des siens, mais peu à peu de se faire une idée plus globale du monde et des gens, et des interactions entre tel type de personnes avec la société. Le but étant non pas de les criminaliser par principe mais de tenter de trouver des réponses adaptées et spécifiques.
Il y a plusieurs formes de discriminations, au sens originel de distinguer: «Différencier, en vue d'un traitement séparé, (un élément des autres ou plusieurs éléments les uns des autres) en (le ou les) identifiant comme distinct(s). Synon. distinguer.» - cnrtl.fr. Il ne s'agit alors pas d'exclure ou de stigmatiser. On peut distinguer (discriminer) des personnes par le sexe, le pays d'origine, l’appartenance religieuse, etc. Les conclusions peuvent être stigmatisantes mais elles ne le sont pas initialement.
On peut ici se demander quelle est la pertinence de cette information placée en tout début d'article, et quelle est l'intention du rédacteur. Car sur un incident - provoqué par l'élu semble-t-il mais dans des conditions qui semblent assez fréquentes pour ne pas en faire un tel fromage (passer par la sortie de secours, traverser en dehors des passages protégés, etc) - on fait directement le lien: frontalier - Stauffer - xénophobie - vengeance - etc. De quoi raconter une histoire qui n'a peut-être rien à voir.
Il faut dire que le rédacteur Fedele Mendicino a écrit l'article en trois petits paragraphes après le titre et sous-titre. C'est court. A-t-il voulu consciemment ou non ajouter du piment? Est-ce que lui pense personnellement qu'il y a un lien de cause à effet?
Selon l'article l'auteur dit s'être procuré la plainte pénale. A ce stade elle n'a pu être produite que par le plaignant. Quel contact a-t-il eu avec ce plaignant? Et a-t-il eu contact avec Eric Stauffer pour avoir sa version (ce n'est pas lui qui a écrit l'article sur le sprayage)? Le résultat global est qu’Eric Stauffer a une fois de plus des démêlées avec la justice dans le cadre d’une altercation violente. Attire-t-il la poisse? Le monde entier lui en veut-il? Ou est-ce la conséquence d’un tempérament éventuellement impulsif? Et bien on n’en sait rien! On sait seulement qu’il a voulu passer là où il n’avait pas le droit de le faire. Soit l’agent de sécurité était très agressif et a sans autre utilisé son spray, soit Eric Stauffer a voulu forcer la décision d’interdiction de passer. On n’en sait toujours rien. Toute interprétation est donc superfétatoire.
Bref, l'indication de frontalier est ici étonnante dans la mesure où sa pertinence n'est pas établie. Qu'a donc voulu dire monsieur Fedele Mendicino?
Commentaires
(Je ne m'appelle pas Eric Barbey.)
... désolé... je le change tout de suite. Avec mes excuses.
Il n'y a pas de mal !
Bon faut avouer quand même que pour cette situation, c'est pas de bol pour Stauffer d'être tombé sur un frontalier.
D.J
HL : 1000% en accord avec vous sur cet article. Mais bon il y a presse et presse... le jour où je fais mes valises (dès que ma couvée sera envolée) et que je change d'horizon intellectuel....le champagne coulera à flot et ce sera un grand cru!!!!!!