«Faut-il encore équiper notre ville de toilettes publiques?» questionnait hier le blog du PDC carougeois. La municipalité de Brighton, elle, pense que oui, avec une innovation: elle met en place des toilettes «neutres» à travers la ville.
Qu’est-ce que des toilettes neutres? Sans odeur? C’est difficile. Acratopège, pour ceux qui ont l’habitude de lécher les cuvettes? Ah ça non! Beurk! De couleur grise? Encore moins. Il s’agit de toilettes de «genre neutre». C’est-à-dire pour femmes, hommes et enfants indifféremment.
Fini les cabines dames et les urinoirs hommes. Finie aussi la séparation des sexes en deux locaux. Dorénavant c’est tous ensemble. Les «lieux d’aisance pour tous» en quelque sorte. Le pictogramme est explicite (image 1). Quel dommage. Les pipiroom des messieurs offrent pourtant l’occasion de quelques beaux efforts d’imagination, comme celles du Café du Roy à Bruxelles (image 2, cliquer pour agrandir): quatre femmes collées au mur (et en photos) sont en admiration devant la plastique sans reproche de l’anatomie génitale masculine.
Ou au R-Bar de Reykjavic (image 3): des lèvres façon Rolling Stone n’attendent que de faire une gâterie aux mâles errants. Difficile de rester de marbre.
En Espagne c’est l’extérieur des toilettes publiques qui fait preuve d’expressivité: on ne peut se tromper ni de côté ni d’usage (image 4). Ici il ne faut pas demander aux hommes de faire pipi assis, parce que si en plus on peint les silhouettes urinantes en vert et jaune et que l’homme porte une jupe, le malentendu est assuré.
A part le fait de respecter la verticalité masculine, il y a une autre raison de ne pas faire pipi assis: la déco de ces toilettes privées (image 5). Bon sang, messieurs, vous ne voudriez pas voir vos amourettes partir en bouillie juteuse dans la bouche d’un monstre! Une fellation, oui, un quatre-heures, non.
Mais revenons à Brighton. Les toilettes neutres ont été mises en place depuis un an pour ne pas subir le reproche des trans et autres lobbyistes du LGBT. On ne veut pas savoir si c’est un homme, une femme, un homme-femme ou autre hybride qui entre dans le temple public des besoins intimes.
Moi qui croyais que les trans revendiquaient leur différence, erreur. Il ne faut pas les sortir du flot des représentations «normatives». Notez, on pourrait faire moins coûteux: offrir un bandeau à chaque habitant, qu’il poserait sur ses yeux à chaque sortie en société. Il ne verrait plus le sexe des personnes. L’auto-castration visuelle est une solution efficace et économique, non? Il resterait cependant la voix comme arme de discrimination massive: un individu à la voix grave habillé en femme ne passe pas inaperçu. On pourrait dès lors demander à toutes celles et tous ceux qui habitent, et qui pour certains ont bite, dans la charmante cité côtière du Sussex (ça ne s’invente pas) de se taire: aveugles et dans le silence, on ne verrait plus la différence entre quelques trans et un régiment d’hétéros.
Blague à part: pour éviter une souffrance d’exclusion on tente de gommer les différences. Je peux entendre l’intention mais je ne partage pas le supposé remède. Toute différence, dans n’importe quel domaine, est un poids, et un chemin pour s’assumer.
De plus la différence dans le domaine de la sexualité pose une interrogation fondamentale aux personnes hétérosexuelles, c’est ainsi. Ne pas le reconnaître ou le condamner est une forme d’hétérophobie. Il n’est pas juste ni utile de dire à la majorité: «Je suis différent mais vous n’avez pas le droit d’en penser quelque chose ni même de le remarquer». L’interrogation chez les personnes hétérosexuelles peut se traduire par un rejet du différent, c’est vrai. Mais le rejet n’est pas spécifique, il existe des milliers de circonstances de rejet. C’est ce rejet qu’il faut traiter, sans gommer ce qui fait les différences. Dans ce but le film La cage aux folles avait fait plus pour l'acceptation des personnes homosexuelles, par l'humour et malgré les stéréotypes, ou le maire de Paris par sa «normalité» apparente, que l'actuelle campagne LGBT aux relents hétérophobes.
S’assumer c’est accepter ses particularités, non pas les neutraliser. Toute différence par rapport à une norme majoritaire est difficile à assumer. L’égalité n’est pas l’équivalence et l’on doit éduquer les enfants dans une claire compréhension des différences, dont de sexe et de genre, et dans le respect de l’autre. Ce n’est pas en niant la gêne ou les questions que se posent les personnes hétérosexuelles que l’on va faire mieux accepter les personnes homosexuelles ou transgenres. L’inhibition n’est pas le vrai respect de l’autre. Au contraire. Le différent doit apprendre à s'assumer devant la majorité normative et en toutes circonstances, c'est ainsi. Et dans le domaine de la sexualité la majorité normative est hétérosexuelle, avec tout ce que cela suppose d'aménagements culturels et matériel - dont la séparation des toilettes.
Pour finir, un peu de glamour avec cette photo de Miss Slovénie 2007 (image 6). Cela pour sortir des lieux d’aisance et se retrouver à l’air. Miss Slovénie, devant qui bien des hommes assis sur la cuvette des WC auront à coeur de se dresser et de se tenir verticaux, toutes parties confondues, afin de montrer leur mâle virilité de reproducteurs potentiels. Pas question alors de gommer les différences...
Images 2: Café du Roy, Bruxelles; 3: R_Bar, Reykjavic, photo G. Neate; 4: toilettes publiques Espagne; 6: Tjasa Kokalj, miss Slovénie 2007.
Commentaires
Vous avez oublié les doubles cuvettes pour caca patouzes à Sotchi...
Poutine avait bien promis de rendre le séjour agréable aux "hybrides" et autres scatophiles
En Suisse, pour des raisons pratiques ou économiques, certains établissements publics offrent des toilettes mixtes. De prime abord c'est surprenant, puis gênant. Séparer les WC hommes et femmes rassurent les femmes, car voir sortir un homme des WC, la braguette encore ouverte, ce n'est pas très ragoutant.
La séparation des toilettes garantit (au moins subjectivement) que les "vicelards" ne pourront pas aisément importuner les femmes, enfants ou adultes.
Des toilettes mixtes ? Non c'est une mauvaise idée, sauf exception compréhensible (manifestations sportives ou festives, transports publics).