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Jour du dépassement (2 et fin) : un chiffre ne fait pas l’Apocalypse

Peu d’humains se questionnent, vérifient, réfléchissent librement. C’est une tâche ingrate: contrôler les affirmations lancées par des petits groupes suppose de chercher l'information, l'analyser, et douter par principe. On retrouve avec le NEF, qui calcule le jour du dépassement, un groupuscule jouissant d’une aura médiatique disproportionnée, diffusant un message anxiogène, simplifiant ce message à l’extrême et ne donnant pas le biais de son calcul. La manipulation des masses n’est pas loin.

(Premier billet ici).

 

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En suite au précédent billet, la troisième astuce est, comme pour les températures mondiales, de fournir un seul chiffre valable pour la planète. Or si certains pays consomment beaucoup, d’autres, moins développés, compensent le bilan des premiers. Et de même que le réchauffement n’est pas global, contrairement au chiffre unique habituellement présenté, l’indice de consommation n’est pas plus global.

 

«Ainsi nous apprend l'étude, il faudrait 2,2 Chine pour subvenir aux besoins des Chinois et 1,6 France pour en faire autant avec les Français. Mais cette présentation des chiffres est trompeuse. (…) …si le monde entier adoptait le niveau de vie indien, alors la Terre serait largement excédentaire et nous épuiserions à peine la moitié des ressources produites (0,49 fois la planète). La raison principale tient à l'importance de la population indienne. Avec près 1,2 milliard d'habitants, l'Inde doit nourrir à elle seule un habitant de la planète sur 6, ce qui n'est pas la cas des Etats-Unis.»

 

On ne peut en effet comparer les pays entre eux uniquement sur la base de la surface cultivable et recyclable. Les Etats-Unis ont moins d’habitants que l’Inde mais ils exportent des céréales. Il est dès lors impossible de classer les pays en bons et mauvais élèves, comme le fait l’ONG et de globaliser l’indice. Preuve encore par le Brésil, qui produit une empreinte écologique très faible au vu de ses immenses forêts peu habitées, alors que ses habitant dans les villes consomment beaucoup. 

 

 

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Enfin un peu de sens critique dans ce média. L’auteur de l'article ci-après, Daniel Turano, est environnementaliste, ingénieur agronome et proche de la gauche radicale. Il préconise le passage total aux énergies dites vertes et parle de basculement climatique. On ne peut le taxer d’être climato-sceptique. Pourtant il conteste cet indicateur du Jours du dépassement. Voici un court extrait de son article, datant de 2013, à propos de l’empreinte écologique:

 

«… il convient d’être extrêmement critique face aux tentatives de l’utiliser comme indicateur d’une politique de soutenabilité. Vues à travers le prisme de l’empreinte, les différences entre pays sont dues exclusivement à la consommation par habitant. Du coup, on est amené à conclure que seuls les pays les plus pauvres ont un mode de vie soutenable. Il suffit de songer à Haïti pour comprendre la fausseté de cette conclusion.

 

(…)

En résumé, dans les grands médias, le message que le WWF fait passer est le suivant: «La croissance démographique et une consommation par personne en hausse sont les principales raisons de la dégradation environnementale». De là à conclure que le «jour du dépassement global» reculerait si ceux du Nord bouffaient moins et si ceux du Sud faisaient moins d’enfants, il n’y a qu’un pas. Il est vite franchi par certains.»

 

 

Conclusion

 

Un seul chiffre, dont nous ne maîtrisons pas toutes les données, ne peut être représentatif de toute la planète. Il sert sans doute à marquer les esprits mais sa pédagogie alarmiste risque fort de ne pas être entendue. Pourquoi? Parce que aujourd’hui jeudi 13 août 2015, jour du supposé dépassement global, il y a toujours du pain à la boulangerie, des oeufs au supermarché, des salades sur les étals.

 

climat,croissance,décroissance,consommation,jour du dépassement,écologie,terre,planète,Si nous consommions vraiment en 8 mois ce que la terre peut produire/absorber en 12, nous devrions immédiatement nous rationner pour survivre aux 4 mois de pénurie attendus, et consommer 35% de moins dès aujourd’hui. Mais qui le fait? Personne probablement. Et puis allez dire aux Somaliens, qui mangent quelques centaines de grammes par jour, de diminuer leur ration…

 

L’alerte vaut en tant qu’incitation à réfléchir à notre consommation et notre gestion des déchets. Cela suffit peut-être à la justifier. Mais son excès, et le choix discutable des données l’affaiblit d’autant qu’il la sert.

 

Après-demain 15 août ni la presse ni la population n’en parleront plus pendant un an.

 

Mais en attendant les médias s’en donnent à coeur joie pour dramatiser et donc vendre leur canard. Titres de la presse de 2014: «L’humanité vit à crédit», «La Terre est arrivée à bout de ressources en 8 mois», «L'humanité creuse sa dette écologique», «L'humanité vit désormais à crédit sur Terre», etc, pour les moins hystériques.

 

Plus que jamais il faut garder l'esprit critique et ne pas surconsommer d'informations alarmistes. Je parlerai prochainement d'un cas où le remède contre le réchauffement produit un résultat négatif assez dérangeant pour inciter à prendre le temps de réfléchir.

 

Catégories : Environnement-Climat 1 commentaire

Commentaires

  • Il y a des simplismes écologistes néfastes, et surtout des simplismes ordo-libéraux allemands austéritaires qui empêchent toute possibilité d'investissement dans la recherche et la production de solutions plus économes concernant notre capital commun écologique terrestre.

    Les centres de recherche dans les pays du Sud et en France voient leurs budgets rognés année après année. Est ce raisonnable de mettre au chômage des diplômés docteurs en science jeunes pour faire des cadeaux fiscaux aux entreprises comme le CIR ou le CICE qui ne créent pas d'emplois ?

    Ces jeunes diplômés motivés ont travaillé et étudié grâce en partie à nos impôts, maintenant on leur dit tant pis, il n'y a pas de boulot ni de budget pour vous.

    Quelle gabegie, quel saccage de nos impôts, de toute une jeunesse instruite, alors que la situation actuelle montre à quel point nous avons besoin de jeunes scientifiques pour affronter les risques futurs et comprendre mieux le monde dans lequel nous vivons.

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