C’est en tous cas la demande d’un nombre grandissant d’élus et de représentants de la gauche française. Hier la gauche du parti socialiste a ajouté sa voix dans ce concert de demandes. Au nom des statuts du PS, art. 5.3.1:
«… le candidat à la présidence de la République est désigné au travers de primaires citoyennes ouvertes à l’ensemble des citoyens. »
Cette position légaliste semble légitime. Les statuts sont comme la Constitution d’une association. Ils indiquent les procédures à suivre. On peut cependant se demander si le même zèle serait mis en oeuvre si le président en exercice était populaire et ne risquait pas de plomber les possibilités pour la gauche d’une réélection presque automatique.
Les rats ne quittent pas vraiment le navire mais voudraient bien un autre capitaine pour éviter une Bérézina, un laminage de l’ensemble de la gauche. Si d’aventure François Hollande passait outre, d’autres candidatures viendraient du Parti de gauche et de EELV. Mathématiquement Fanfrelande serait relégué en troisième position donc hors course pour le deuxième tour.
Ces primaires ne devraient cependant pas le déranger outre mesure. Il les gagnera probablement, et acquerra une seconde légitimité. En effet les voix additionnées de Mélenchon et des écologistes sur certains sondages, restent en dessous de celles qu’il obtiendra du PS. Mais avec cet intronisation il pourrait remotiver les électeurs de gauche.
Pour cette gauche hors du gouvernement et non socialiste, des primaires sont l’ultime rendez-vous pour ne pas disparaître. Elle en a besoin pour retrouver une tribune et faire entendre sa voix. Faire passer son discours dans la primaire pour se réunir ensuite dès le premier tour de l’élection ne suffit pas pour marquer son identité. Dans tous les cas de figure, primaire ou non, Jean-Luc Mélanchon pourrait se représenter. Il ne semble pas vouloir laisser ses voix à un François Hollande qu’il considère comme tout sauf de gauche.
Il a d’ailleurs affirmé ne pas vouloir d’une primaire à gauche. On le comprend. Dans l’impossibilité de la gagner, une élimination à ce niveau signifierait l’impossibilité de prendre la tribune publique et de faire passer son discours politique. Le Parti de gauche obligé de défendre Hollande dès le premier tour? C’est peu probable. Donc même s’il gagne la primaire au PS il y a peu de possibilité pour Fanfrelande d’être présent au deuxième tour.
Les primaires pourraient donc devenir des sortes de baillons pour les formations plus petite que le PS. Y participer c’est être sûr que l’on ne sera pas présent lors de la campagne. C’est donc se priver de la plus grosse caisse de résonance de la vie politique française.
Ces primaires nous donnent aussi deux signaux. D’une part il y a un désir de plus de démocratie. On ne veut plus laisser la décision à un aréopage de barons qui savent faire voter des militants godillots. On veut décider en direct.
D’autre part elles signalent que les partis n’ont plus de candidats forts, des personnalités majeures fédératrices et naturellement légitimes. Au PS moins qu’ailleurs puisque les orientations du duo Hollande-Valls ont ouvertement provoqué une rupture d’avec les thématiques habituelles de la gauche.
Les primaires sont également supposées donner une pré-visibilité au futur candidat ou à la future candidate. Le fait d’avoir gagné un premier test lance une dynamique de succès. Personne ne les conteste. Mais en même temps ces primaires ouvertes plus largement que sur la base militante, peuvent aussi accentuer le caractère de séduction et de spectacle des candidatures.
On peut même se demander si c’est à la rue de décider du programme et du candidat. Certains diront: c’est la démocratie réelle. D’autres dénonceront un populisme qui ne dit pas son nom.
En l’état les primaires semblent surtout ajouter un acte au psychodrame politique dont les français nous régalent habituellement.