« L’avenir est propre » a lancé Bertrand Piccard aux personnes présentes à Abou Dhabi. SI2 a ainsi rejoint son point de départ et bouclé sont tour du monde sans pétrole. Ce vol a été un peu éclipsé par les événements mondiaux, et par le temps d’arrêt à Hawaï pour réparer les batteries et attendre une nouvelle fenêtre de départ.

Aléas normaux quand on teste un prototype en situation réelle. C’est entre autres, là aussi, par l’erreur que l’on apprend. Et j’imagine que Solar Impulse 2 a apporté son lot de problèmes à résoudre. Après des années de travail opiniâtre le résultat est la.

Certes le tour du monde solaire pourrait prêter à sourire. En terme de transport, de fiabilité de la technologie solaire, du poids qu’il peut soulever, l’avion – sans carbone pour se propulser – ressemble davantage à un montage pour adolescents qu’à un produit de ligne et d’avenir.

Cependant le symbole est fort. On peut voler autour de la Terre sans consommer une goutte de kérosène. La légende s’écrit dans le ciel.

L’avenir est-il vraiment propre pour autant? C’est peut-être trop optimiste que de le suggérer. Car la fabrication de Solar Impulse 2, son transport, la médiatisation, sont eux coûteux en énergie et en déchets. De plus tous les produits fabriqués par l’industrie ne peuvent prétendre à la pureté de SI2. Et les avions à venir ne sauraient fonctionner à l’énergie solaire: soulever du sol un A380 est autre chose que lever Solar Impulse.

J’ignore quels enseignements de ce vol pourront être transposées à d’autres produits et situations. Mais le symbole est fort, malgré tout ce que cette expérience contient d’éléments non reproductibles à grande échelle. Même si l’on ne peut envisager la fabrication d’un 747 volant aux panneaux solaires. 

Solar Impulse 2 fait partie d’une démarche économique autant qu’écologique: il fait la promotion des nouvelles énergies sur lesquelles savants et entrepreneurs investissent et construisent les produits d’avenir.

Imaginons les nombreuses applications de l’élastique, breveté en 1845 par Stephen Perry, dans des domaines aussi variés que: vêtements, moyens médicaux de soins et pansements, systèmes d’attache, composants de moteurs et d’appareils électroménagers. Sans oublier les préservatifs.

Ce tour du monde entretient le rêve d’exploits où l’humain et la technologie se complètent et se prolongent. Il a été rendu possible grâce à de riches donateurs et à une équipe pointue, composée de ceux et celles que l’on ne voit habituellement pas, et portée par le charisme de Bertrand Piccard et l’excellence du second pilote André Borschberg.

Avec ses grandes ailes Solar Impulse 2 a la grâce d’un flamand rose. J’ai toujours aimé les engins volants: papier-journal pris dans les tourbillons d’une bourrasque, planeurs, cerfs-volants, avions. Aujourd’hui nous sommes même capables d’envoyer des sondes hors du système solaire. C’est inouï.

Voler est le rêve d’Icare dans la mythologie grecque. Ici Icare n’a pas chuté. Et nous, malgré la violence du monde que la presse relaie copieusement, malgré une sorte de submersion des esprits par cette violence, nous pouvons encore lever les yeux au ciel et rêver.