Avant de livrer la date je souhaite signaler cette étrange et belle lumière qui a baigné Genève ce matin. Sous un stratus peu dense on devinait une couleur beige-rose, presque sombre comme lors d’une éclipse de soleil cinq minutes avant la phase totale, et très diffuse. Elle teintait l’atmosphère autrement que d’habitude. C’était une grosse couche de sable du Sahara au-dessus du Léman. Les voitures en étaient couvertes.
Alors, ce pire désastre? J’hésitais à livrer ce chiffre car son ancienneté pouvait faire douter de la fiabilité du relevé. J’ai cependant continué à chercher, et j’ai trouvé cette photo (image 1, clic pour agrandir) qui marque toutes les grandes crues depuis 250 ans, à Cadillac. La plus haute cote de crue est à 12,60 mètres par rapport à l’étiage. 12 mètres 60…
Accrochez vos ceintures: la pire crue était en 1770. En plein petit âge glaciaire! On la nomme la crue millénaire, ou aussi la Grande Souberne des Rameaux (souberne est un synonyme local d’inondation).
Logiquement les désastres devraient augmenter avec le réchauffement. Or, le pire a eu lieu en 1770 donc avant l’ère industrielle. La pire suivante, en 1875, la pire troisième en 1930 (à Marmande, pas à Cadillac), et à ce jours aucun crue n’a dépassé celles-ci.
L’évêque Grégoire de Tours décrit ainsi la grande inondation par la Garonne déjà en l’an 580:
« En en octobre 580, notre pays fut accablé pendant 12 jours d’un vrai déluge d’eau. Le territoire est inondé et dans l’impossibilité de recevoir les semailles d’automne. Les rivières sortirent des limites qu’elle n’avaient jamais franchi, ce qui causa la perte de beaucoup de troupeaux, un grand dommage pour la culture et la ruine de beaucoup d’édifices. »
Les crues de la Garonne sont un fait historique marquant dans cette région. Elles ont parfois déplacé le lit du fleuve. C'est l’érosion naturelle.
Elles semblent contredire les annonces dramatiques sur le réchauffement qui devrait intensifier les phénomènes extrêmes. Même si ces crues semblent un peu plus fréquentes depuis 50 ans, elles sont surtout mieux évaluées et documentées.
En réalité on ne peut dire ni que les crues sont plus fortes ou plus fréquentes, ni que la pluviosité a augmenté de manière sévère, ni que la répétition de ces crues se soit resserrée. Pluies démentielles, crues répétées dans la même année, destructions massives ont toujours eu lieu. Tout au plus leur accorde-t-on aujourd’hui une attention jamais égalée auparavant.
L’historique des crues de la Garonne, et en général du midi de la France, ne permettent pas d’affirmer que le réchauffement du climat soit la cause des épisodes récents. On regarde trop le moment présent sans recul sur la période ni perspective historique. C’est comme regarder une fourmi avec un télescope: on grossit démesurément la réalité.
Pourtant les dégâts annoncés des crues récentes sont considérables. À cela une cause majeure, plus relevante que leur intensité: les modifications du paysage et de l’urbanisme.
Selon un article de Jean-Claude Yvard sur les inondations à Bordeaux depuis le XVe siècle. Citant l’inondation de 1981 il précise:
« L’importance considérable des dégâts n’est pas seulement en relation avec une insuffisance d’information pour les riverains. C’est aussi que, depuis mars 1930 ou même février 1952, de notables modifications sont intervenus dans l’environnement naturel et matériel des sites proches du fleuve. La disparition des haies, l’établissement de drainages, les cultures sur sur le nu dans la vigne et le maïs, sont diverses pratiques qui ont facilité l’évacuation des eaux fluviales.
Tous les observateurs de 1981 conviennent de noter la rapidité de la montée des eaux. L’équipement agricole d’un prix plus élevé est d’une fragilité plus grande que celui des années 1930. Les tracteurs, les trayeuses, les machines à laver et autres appareillages électriques résistent moins bien au passage des eaux que les charrettes en bois ou des outils plus frustes.
L’aménagement des zones industrielles a été inconséquent puisqu’il s’est fait en terrains submersibles. Des fûts et des bidons de l’usine de produits chimiques du Ciron, à Barsac, ont été emportée par les inondations jusque dans les vignes voisines. »
Ce n’est pas le réchauffement: nous travaillons depuis 50 ans à rendre les inondations plus graves et plus coûteuses. Ce n’est ni le ciel ni le CO2: c’est nous-mêmes.
Je conclus en mentionnant un document officiel très instructif, disponible sur ce lien, La mémoire par l’image. Il résume toutes les grandes inondations en France autour de l’arc méditerranéen depuis 150 ans (la crue de 1770 n’y figue pas). Les images de ce billet (clic pour agrandir) en sont extraites. Elles proviennent principalement de Gallica-la Bibliothèque nationale française et illustrent des crues d’il y a plus de 100 ans.
Certains veulent faire de ces épisodes extrêmes des marqueurs du réchauffement. Cela ne saute pas aux yeux! Aujourd’hui on ne peut malheureusement plus constater un désastre naturel météorologique sans le lier au réchauffement et donc aux humains coupables dit-on de crimes contre la planète.
Or tout cela n’est pas nouveau. Mais, comme le disait Rose Bertin dans les années 1770:
« Il n’y a de nouveau que ce qui est oublié ».
En regard de ces différents éléments, la notion d’urgence climatique est fortement surestimée. Le réchauffement ne produit en l’état pas plus de catastrophes, ni plus intenses, que par le passé. Plus que le réchauffement, la pollution et la déforestation sont des menaces pour notre environnement et pour nous-mêmes.
Quant fleuve pyrénéen, puissant et impétueux, chanté par plusieurs auteurs, il débordera encore et encore. C’est le destin. Et il y aura encore une Marie-Jeanne qui se jettera du pont de la Garonne, quand il sera reconstruit, vers Bourg-les-Essonne...
Commentaires
C'est vrai que le réchauffement climatique n'est vraiment visible qu'à travers des moyennes sur de longues périodes. Les évènements météorologiques forts sont-ils plus fréquents et plus dévastateurs du fait du réchauffement ? On ne peut le dire avec certitude car, comme le montre "Homme libre", beaucoup de facteurs interviennent pour en expliquer la cause (modifications des sites dues à l'Homme, par exemple). Que l'écologie politique profite de ces catastrophes pour avancer ses pions, c'est évident.
Mais cela ne doit pas nous inciter à ignorer cette évolution climatique vers le réchauffement de la planète. Je fais confiance aux scientifiques du GIEC qui ne sont pas tous, loin s'en faut, des idéologues écolos. Il faut certainement, dès à présent, prendre des dispositions pour économiser l'énergie et la rendre moins polluante. C'est, me semble-t-il, une priorité. Et on ne pourra pas, dans un premier temps, se passer du nucléaire pour atteindre ce but. Or, que ce soit en Allemagne ou en France, on prend le chemin inverse. C'est aberrant !
Le Giec publie à chaque fois deux versions de ses rapports. La version longue est pour les scientifiques. La version résumée est pour les politiques. Cette dernière version est beaucoup plus alarmiste que la longue, La volonté politique prime.
Le réchauffement est-il un danger ou une bonne opportunité? Cela dépend où, mais c'est largement une bonne opportunité pour la production agricole. Les humains vivent sous tous les climats, même très chaud, sans être constamment menacés, ils s'adaptent.
Le CO23 est-il ou non la cause, et la cause unique, du réchauffement? La question est loin d'être tranchée. La controverse n'est pas éteinte malgré l'omerta médiatique qui empêche toute continuation du débat public.
Les hydrocarbures étant limités, l'avenir devra à un moment se faire sans eux. C'est la bonne raison de prévoir leur remplacement.
Je suis moins confiant que vous sur le Giec. Il s'appuie sur des modèles qui tous sauf un sont bien au-dessus des relevés réels. C'est une volonté et une stratégie.
Le Giec peut se tromper en effet. Les prévisions sont peut-être exagérées mais je pense qu'il y a un consensus, entre les scientifiques, pour un réchauffement dû à l'activité humaine. Je ne pense pas qu'on puisse y échapper. Par contre, je suis optimiste sur la possibilité de nous y adapter. Et le nucléaire me paraît indispensable pour y parvenir, compte tenu du développement prévisible des pays qui voudront s'aligner sur les plus riches.
"Le CO23 est-il ou non la cause, et la cause unique, du réchauffement? "
mon avis, peut-on affirmer aussi péremptoirement qu'actuellement que le CO2 crée un réchauffement ? le sujet mérite d'être approfondi.
Leclercq, j'ouvrirai bientôt une rubrique et une série sur le CO2.