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Ciaran, la tempête (du siècle?)

Ciaran, la tempête (du siècle?).

Le grand stress du réchauffement a un points très positif: l’intérêt des populations profanes pour la chose météorologique et pour l’environnement. On regarde en l’air, on scrute le ciel, et par rebond on s’inquiète davantage de la pollution.

 

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Il y a cinquante ans la météo occupait une petite fenêtre et annonçait les commodités ou incommodités du temps sur nos activités. On voulait du soleil pour un mariage, du ciel bleu pour les foires régionales et les festivals.

Aujourd’hui on prend la mesure du monde: la météorologie et le climat, soit l’organisation de la circulation atmosphérique globale, ont une vie propre. Ils ne sont pas subordonnés à nos désirs et activités, c’est l’inverse. Cela a toujours été le cas même si nous n’en avons pas mémoire. L’historien du climat Emmanuel Garnier le rappelle (image 1, clic pour agrandir, tempêtes depuis 500 ans):

« D’abord parce qu’il y a eu une sorte de rémission des catastrophes naturelles entre 1945 et 1980. La dernière submersion de type Xynthia datait des années 1940. On constate également que la mémoire des catastrophes est de plus en plus courte. »

Il précise, à propos de la tempête Xynthia:

« A La Faute-sur-Mer, la digue de protection avait déjà été rompue par une tempête de type Xynthia en mars 1937 et l’on a pourtant construit dans les années 1950 des maisons en construisant une nouvelle digue censée être insubmersible alors que c’est une cuvette inondable. »

 

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Mais ces tempêtes ne sont-elles pas plus fréquente et plus intenses? Non. Dans une autre interview le chercheur associé au CNRS répond à ceux qui voyaient dans les tempêtes de 1999 des signes évidents de l’aggravation climatique. Il s’inscrit en faux:

« Le verdict de l’histoire dément les propos de ceux qui, au lendemain de la catastrophe de décembre 1999 en France, insistaient sur le caractère exceptionnel et nouveau des aléas venteux. Les cinq cents dernières années sont marquées successivement par des offensives et des rémissions. »

Il est rejoint par un autre scientifique:

« L’histoire des tempêtes confirme donc que l’occurrence de ces événements brefs et aléatoires ne doit rien au réchauffement global, comme l’admet sans peine Phil Jones, de l’université d’East Anglia (Royaume-Uni). En revanche, l’augmentation des températures pourrait accroître leur intensité, l’humidité pouvant générer de l’instabilité et un changement des flux d’énergie. »

Ce dernier point ne me semble pas démontré.

Sur quatre bulletins météo regardés hier, aucun ne lie la tempête Ciaran au réchauffement. Enfin un peu de raison dans l’hubris climatique déchaîné de notre époque. Quand les météorologues interrogés affirment cela, les journalistes insistent pourtant.

 

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J’ai ainsi vu, entre autres, une journaliste probablement débutante ou insuffisamment formée sur le sujet demander plusieurs fois à un météorologue invité si Ciaran sera plus forte que Lothar et Martin en 1999.

Elle est presque déçue de la réponse négative. Mais quand elle entend qu’il y a des creux de vagues de sept mètres, elle semble excitée, son visage s’illumine de cette excitation qui révèle une crainte et une admiration en même temps.

Mais cela n’a rien d’exceptionnel. La météo marine annonce régulièrement des houles, dont certaines peuvent produire des creux de quatre, six, neuf mètres et plus. Il suffit de vents de force 8 ou 9 sur l’échelle de Beaufort, soit entre 62 et 88 kmh (34 à 47 noeuds), vitesse qui est forte mais pas tempétueuse, pour produire une houle de 6 à 9 mètres.

La journaliste ne semble pas connaître la plus haute vague jamais surfée en 2020, mesurée à 26,2 mètres! Au Portugal des vagues de 30 mètres ne sont pas si rares (vidéo ci-dessous) comme les vagues dites scélérates. Wikipedia en fait une liste dont j’extrais celle-ci:

« février 1995 : le Queen Elizabeth 2 affronte une vague de 30 m dans l’Atlantique Nord. Son commandant, le capitaine Warwick, vit arriver :« ...un mur d’eau solide de 30 mètres de haut ! J’ai eu le sentiment de faire route droit sur les falaises de Douvres. »

 

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Les journalistes lambda ont tendance à chercher le sensationnel. Il y a quelque chose de troublant dans leur quête frémissante de la plus grande intensité (c’est-à-dire du record). La tempête est l’objet d’une compétition du pire.

Pourtant Ciaran n’est pas un monstre comme je l’ai lu. Très forte avec son centre à 955 hPa, mais pas autant qu’en 1999 ou que précédemment, comme le montre cette liste des tempêtes. Il manque parfois des relevés précis mais le passé ne fut pas avare de grosses ou très grosses tempêtes. Celle de février 1935 a produit des vents à 200 kmh (valeur non vérifiée). Celle de 1900 a vu des rafales à plus de 150 kmh.

Et lors de celle de 1859 les 12 Beaufort ont été atteints, soit le maximum de l’échelle.

Enfin selon le Giec, cité ici par le quotidien Sud-Ouest qui relaie les propos d’un chercheur:

« Le rapport n’établit pas de lien probant entre le réchauffement actuel et une quelconque variation du nombre et de l’intensité de ces tempêtes qui transitent à nos latitudes. Il n’infère pas non plus leur renforcement du réchauffement à venir. « Il n’y a pas de consensus établi sur cette question », confirme le Landais Christophe Cassou, l’un des auteurs principaux dudit rapport, chercheur CNRS au Cerfacs, à Toulouse. »

Le ministre français de la transition écologique M. Béchu, qui répète sa leçon en annonçant ders aggravations à venir, devrait se renseigner.

Alors, Ciaran est-elle la tempête du siècle? L’annoncer fait du buzz. Mais nous sommes en 2023. Il y en aura d’autres. Il faut donc attendre 77 ans pour le savoir. En attendant d’autres coups de vents sont prévus pour les prochains jour (image 2). C’est un bon courant d’ouest, porteur de précieuses pluies et d’un grand brassage tous azimuts de l’atmosphère.

 

De bas en haut s'envolaient de grandes guêpes isocèles. La jolie aurore du soir me précédait, les yeux au ciel de mes yeux sans se retourner. Ainsi les navires se couchent dans la tempête d'argent.

André Breton.

 

 

 

 

 

 

Catégories : Environnement-Climat, Météo 1 commentaire

Commentaires

  • Bilan de cette tempête : peu de victimes mais beaucoup de dégâts matériels, de chutes d'arbres en particulier. On l'explique par la perte tardive du feuillage offrant une résistance au vent, et l'humidité des sols gorgés d'eau. Mais où est le réchauffement climatique, toujours mis en accusation par une certaine presse ? En tout cas, l'Homme s'adapte à ces violences météorologiques qui, finalement, font partie de notre environnement naturel.

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