La Cour d’appel de Trieste, dans le nord de l’Italie, a invoqué pour la première fois un lien entre un acte criminel et une prédisposition génétique. Un meurtrier d’origine algérienne a vu ainsi sa peine réduite de 9 à 8 ans de prison. Après une «psychologisation» que je trouve parfois excessive dans les affaires pénales, va-t-on arriver à une «génétisation» des comportements criminels?
D’abord des extraits de l’article paru dans Libération sous la plume de Mael Inizan:
«Condamné à 9 ans et deux mois de prison pour avoir poignardé un Colombien de 32 ans, à Udine, en mars 2007, Abdelmalek Bayout a vu sa peine réduite d’un an après s’être soumis à une analyse ADN «innovante».
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L’héritage social, mais surtout, pour la première fois en Italie, le patrimoine génétique ont été reconnus par Cour d’Appel de Trieste comme des circonstances atténuantes. Le soir du meurtre, la victime a agressé son meurtrier, le traitant notamment de «pédé». Des insultes qui, pour les juges, expliquent en partie la réaction disproportionnée de cet homme d’origine algérienne et musulman pratiquant. Se référant à une étude britannique du Nuffield Council on Bioethics, «Génétique et comportement humain: le contexte étique» (2002), la Cour a considéré qu’Abdelmalek Bayout présentait une prédisposition, à la fois sociale mais également génétique, au meurtre.
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Les juges ont considéré que la réaction violente de l’accusé a été «déclenchée par le déracinement causé par la nécessité de concilier le respect de la propre foi islamique intégriste avec le mode de vie occidental». Mais, surtout, elle a été exacerbée par des éléments de son patrimoine génétique «qui, selon de nombreuses recherches internationales, augmentent de manière significative le risque de développer un comportement agressif impulsif»
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«C’est un non-sens scientifique», s’exclame Catherine Vidal, neurologue et directrice de recherche à l’institut Pasteur, réfutant tout consensus dans la communauté scientifique sur l’existence de gènes de la criminalité ou de l’agressivité. Selon elle, il existe effectivement des études qui montrent des corrélations entre certains gènes et des comportements, mais sans pour autant prouver une véritable relation de cause à effet. "
Voilà une décision qui va faire grésiller les prétoires et les cabinets d’avocats. Et qui soulève des interrogations contradictoires.
La Justice n’est pas un bloc de granit, et c’est normal. Un délit doit être apprécié d’une part selon la loi, la règle de la société, et d’autre part selon les circonstances personnelles et autres qui ont amené une personne à le commettre. L’idée d’une Justice absolutiste, sans nuance, est attractive quand un crime odieux est commis. Mais comment être d’accord avec la peine de prison ferme infligée il y a quelques années en France à une mère de famille démunie, pour le vol de quelques dizaines de francs de nourriture?
La justice doit avoir une marge d’appréciation, une souplesse, pour s’appliquer de manière adéquate. Ni trop raide, ni trop molle. C’est pour cette raison que l’on tient compte de la personnalité de l’auteur-e d’un crime ou d’un délit pour décider de la sanction. Avec toutefois une tendance à trop psychologiser et à diminuer l’indispensable responsabilité individuelle de ses actes.
Ici un pas de plus a été franchi. Nous n’avons pas tous les mêmes modes de fonctionnement et il n’est pas absurde de penser que nos différences puissent être dues non seulement à des causes psycho-sociales mais aussi biologiques ou neurologiques. Mais alors, outre le fait que c’est difficilement prouvable, il peut en découler une autre piste de réflexion.
S’il est un jour démontrable qu’il y a des gènes de l’agressivité pathologique, accepterons-nous de vivre avec des individus à la dangerosité prouvée? N’y aura-t-il pas tôt ou tard une tentation d’éliminer les individus non conformes ou incurables parce que génétiquement perturbés? Ferons-nous passer des tests de grossesse pour dépister les criminels et provoquer des avortements «judiciaires»? Dans la course vers une société totalement sécure où tout est sous contrôle, l’eugénisme deviendra-t-il une philosophie ordinaire?
En poussant plus loin la science-fiction, où pourrait s’arrêter la prédétermination socio-génétique des humains? Créera-t-on uniquement des individus conformes? Et conformes à quoi, à qui?
Sans aller aussi loin, la décision italienne repose un peu plus la question de la responsabilité individuelle, et la différenciation entre le biologique-génétique et le socio-culturel.
La Cour d’appel de Trieste considère que, le meurtrier ayant une structure psychique fragile et rigide, sa génétique a favorisé l’acte. On peut aussi inverser le propos: ce n’est pas la génétique qui a aggravé le psychisme de l’individu, mais c’est sa culture qui a aggravé sa génétique.
Je trouve que l’on est facilement enclin à atténuer la responsabilité individuelle sous prétexte de perturbations psychologique. Mais au fond il y a une idée à creuser: quand le monde entier sera fait de victimes irresponsables, il ne pourra plus y avoir de criminels! Tous irresponsables, donc tous absouts!
Jusqu’où peut-on aller dans l’atténuation de la responsabilité individuelle, sans engendrer une société invivable et ingérable?
PS: Kadhafi retient deux otages suisses: et si c'était génétique?
Commentaires
Je vois que le retour au Moyen-Age se fait sur plusieurs fronts, dans le cas présent avec un prétexte scientifique bidon,
Mère, plaisir de vous retrouver. En effet, drôle d'ambiance sur la planète... On ne sait même plus qui mène le bal. Mais il se dessine de plus en plus une sorte de nécessité d'entrer en résistance. Votre remarque suscite en moi de multiples pensées que je ne peux encore formuler, dans lesquelles je dois trier. A suivre, ici ou ailleurs.
Sous prétexte "d'humanitaire" on favorise l'immigration, on fait entrer dans un moule des personnes de cultures, modes de vie et tempéraments différents des nôtres, d'où il ressortent ni Occidentaux, ni Orientaux, ni Africains... juste déphasés!
Ces personnes viennent balayer nos rues, enseigner dans nos université ou dealer, peu importe...alors que leurs pays ont besoin de leurs forces et talents!
En échange, nous envoyons des "aides humanitaires" et vendons des armes...surtout ne pas leur laisser l'occasion de développer leur pays selon leurs valeurs, traditions et identités.
Une parenthèse pour un portrait:
"Emile Bomba est le président-fondateur de l’Association de lutte contre l’émigration clandestine (ALCEC), créée en 2003 au Cameroun.
Ayant une formation en gestion à l’université de Yaoundé, il fait de nombreuses conférences en France et en Belgique, sur le thème de l'immigration africaine et sur les moyens de remédier à la déstabilisation des pays du Nord et du Sud, partant du principe que « l’Afrique a besoin des bras et de l’intelligence de tous ses fils » et qu'« il faut redonner envie aux jeunes Camerounais de vivre dans leur pays ».
Il fait partie d'une génération d'Africains francophones de la seconde génération après la Décolonisation et qui cherche a refonder une identité africaine et une autonomie centrées sur ses valeurs traditionnelles, (à l'inverse du point de vue habituel pour qui tout développement africain devait nécessairement être orchestré par l'Occident), l'autonomie exigeant notamment de freiner l'hémorragie des élites africaines, et des jeunes des classes moyennes instruites."
Fin de la parenthése.
Il serait temps de cesser ce regard condescendant envers les "pays en voie de développement" parce qu'ils ont leur identité propre et qu'elle n'est par semblable à la nôtre. Le pire racisme est de nier les différences-car c'est nier l'identité des personnes, nier ce qui fait qu'elles sont UNIQUES et VRAIES
Avoir la prétention de prétendre que c'est "pour leur bien" pour leur évolution, qu'on doit les accueillir chez nous, c'est de "l'humanitaire de bas étage" et d'une suffisance crasse!
Alors que derrière ces fallacieux prétextes se cachent simplement des intérêts financiers et politiques!
Ensuite...Hé bien, devans les Tribunaux, on cherche une bonne explication, sur des bases "scientifiques"...
Où est le respect Humain?
Ensuite...Hé bien, devans les Tribunaux, on cherche une bonne explication, sur des bases "scientifiques"...
Vous faites bien de mettre scientifique entre parenthèse, car il s'agit, dans le cas présent, de l'utilisation d'un vieux problème scientifique, celui de la détermination de caractéristiques culturelles et comportementales (éventuellement encore de leur héritabilité) par des facteurs génétiques. Elle a généralement servi à des fins dits "racistes", c'est-à-dire discriminatoires, mais il semble que dans l'exemple en question un juge peut-être bien intentionné l'a utilisé a contrario, soit par ignorance ou par désir de se faire bien voir.
Aux problèmes que vous relevez j'aimerais ajouter, sans revendiquer aucune originalité dans mon propos, qu'on pourrait aussi regretter que les personnes qui fuient leur pays pour échapper à une pauvreté ou des sévices, sont souvent victimes de deux facteurs qui se conjugent: une mauvaise gestion des ressources par des dictateurs ou des oligarchies locales, et l'appui que ceux-ci obtiennent de pays étrangers qui s'appuient sur la corruption existante pour favoriser leur propres intérêts économiques et géo-stratégiques.
Cette fuite hors du pays est bien sûr une bénédiction pour ceux qui sauvent leurs vies ou échappent à la misère, mais en même temps elle peut arranger des potentats locaux qui voient ainsi leurs opposants diminuer: en effet, au lieu de constituer une masse d'hommes jeunes mécontents et désespérés, qu'ils seraient autrement obligés de massacrer à la vue du monde pour les empêcher de nourrir des révolutions, ils augmentent simplement le pourcentage des femmes, des enfants et des vieillards qui sont beaucoup moins à même de s'opposer à leurs exactions, face à des forces armées qui sont en fait des gardes de corps des gens au pouvoir au lieu de protéger la population contre des attaques venues de l'extérieur.
Nous, les pays d'accueil, du moins ceux d'entre nous qui ne profitons pas de cette situations (mais y en a-t-il vraiment), sommes donc piégés, puisque si nous n'agissons que par motifs humanitaires nous affaiblissons les forces de résistance et de changement dans les pays eux-mêmes, et si nous refusons de le faire, nous agissons à l'encontre des principes d'entraide que nous pouvons être fiers d'avoir élaborés et mis en place.
Dans le pays des magouilles il ne faut pas être surpris par ce verdict qui pour le moment profite à un meurtrier algérien.
Oublions tous les propos émis auparavant et posons-nous cette question : mais à qui profite réellement cette décision ?
- Mais aux mafiosi qui chargeront leurs avocats de pourvoir à la modification des verdicts émis par les tribunaux et peut-être finalement à Benito Berlusconi.
S'il existe un gène du meurtre, je propose d'introduire une loi qui oblige toute personne de faire faire un test génétique avant l'age de 10 ans. Les personnes ainsi identifiées comme meurtriers potentiels seront isolées de la société dans des maisons closes, ou manque d'espace, dans des quartiers surveillés. L'humanité en a une grande expérience. On appelait ça ghettos, camps de concentration (on y concentrait les gens qui présentaient un danger pour la population), Guantanamo, déportation (l'Australie, la "prison" pour les délinquants anglais) et encore fours crématoires et charniers (qui veut nourrir des meurtriers potentiels pendant toute leur vie).
Bienvenus dans le nouveau monde.
@ benpal:
Oui, on pourrait citer "Le meilleur des Mondes", mais l'histoire humaine n'a même pas besoin de ce genre de fiction, comme vous le dites elle en a une grande expérience.
Résistance!
n'importe quoi cette thèse. Mais ils sont fou.