Je débute l’année nouvelle par un hommage aux mères, à certaines mères en particulier. J’ai déjà écrit sur l’abnégation d’une mère, lors de la tuerie du Bataclan. Elsa avait alors sauvé la vie de son fils âgé de 5 ans, en sacrifiant la sienne.
Je veux parler aujourd’hui des mères, nombreuses, qui par choix ou par obligation élèvent leur(s) enfant(s) seules. Les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses. J’en connais dans mon cercle d’amis proches. Et nous en parlons régulièrement.
Ces femmes, ces mères ont la charge souvent entière, ou presque, de l’enfant. Charge d’éducation, de subsistance et charge financière. En plus de leur vie professionnelle. Elles s’en acquittent avec beaucoup de conscience, d’attention et d’abnégation.
Certaines renoncent à une nouvelle vie de couple en raison d’une forme de loyauté envers leur progéniture. Et puis, la recomposition du couple n’est pas forcément simple. Il faut des principes éducatifs assez proches, autant pour la paix du couple que pour la cohérence de l’éducation aux enfants.
Le nouveau partenaire doit trouver une place où une part d’autorité lui est accordée, car un homme ne disposant d’aucune autorité dans un groupe où l’on compte sur lui n’est plus que l’ombre d’un homme. Mais il ne peut non plus remplacer le père. Ce ne serait juste, au sens de justesse des relations, ni pour les enfants, ni pour le père, ni pour lui-même. La confusion n’est pas souhaitable.
Ce nouveau partenaire devient parfois une sorte de concurrent pour l’ex. La mère doit déployer beaucoup d’intelligence pour éviter les confrontations préjudiciables à la famille. En même temps le nouveau doit trouver une place, à réinventer de cas en cas.
Ces mères sont le liant, le pôle fondamental de la famille reconstituée. Et dans les mères de mes amies, elles sont restées le pilier. De nouvelles relations affectives se sont nouées, sans jamais prendre une place durable dans le quotidien de la mère et de ses enfants. Et il ne s’agit pas forcément de femmes désireuses d’incarner une toute-puissance parentale et n’ayant besoin de personne.
Plus: les pères, bien que présents, ont en quelque sorte démissionné. Pourtant les mères dont je parle ont souhaité qu’ils prennent une place, qu’ils assument leur place, au-delà des décisions judiciaires. Aucune d’entre elles n’a joué l’exclusion du père, le chantage, n’a dressé l’enfant contre lui – au contraire! Je les connais, je les ai vues, je peux en témoigner. Ce sont les pères qui se sont eux-mêmes exclus, quelles qu’en soient les raisons.
Bien sûr il y a d’autres situations, des tribunaux trop systématiquement pro-mères, des mères qui excluent, des pères devenus parias de la société par la non-reconnaissance judiciaire et sociale de leur place. Les hommes se suicident quatre fois plus que les femmes, et parmi eux une majorité de pères après séparation.
On peut questionner la facilité des divorces, les idéologies modernes sur la relativité du père, etc. Mais je sais aussi que beaucoup d’hommes ont renoncé à ce combat, à leurs prérogatives et leurs responsabilité même quand les mères séparées les y incitent. Nombreuses parmi elles aimeraient que le père continue à tenir sa fonction d’éducateur et d’autorité.
La société ne peut, ne doit se couper de la paternité, ni l’affaiblir. Mais les pères séparés n’ont pas pour autant à accepter d’être mis de côtés. Le thème est évidemment complexe et large et je sais combien le monde moderne joue sur l’interchangeabilité des individus, les résumant à un rôle social. Je pense que le combat de certains pères est un combat fondamental de l’homme et de la masculinité dans l’équilibre anthropologique de la société.
Les mères qui ne se sont pas remises en couple assument deux fonctions: mère et père. Et c’est très difficile d’être les deux. La répartition classique avait du sens. La mère pouvait être plutôt la consolatrice, le père plutôt le poseur de limites. Aujourd’hui nombre de mères qui éduquent presque seules doivent à la fois laisser les portes s’ouvrir pour leurs enfants et les tenir fermées quand c’est nécessaire.
Deux postures pouvant se révéler antinomiques, et pour le moins difficiles à assumer. Je connais de ces mères honnêtes, qui n’ont pas rejeté le père quand bien même elles auraient pu le faire parce qu’elles en avaient les moyens financiers par leur propre travail. Pourtant je vois des pères devenant des fantômes, des caricatures.
Et bien que mon évolution et mon expérience de vie me rendent particulièrement sensible à la cause des pères et des hommes, je tiens à exprimer mon admiration pour ces mères qui tiennent bien la route, pour leur constance et leur sens des responsabilités dans l’éducation, et à leur rendre hommage pour leur engagement jamais démenti.
Commentaires
" Et c’est très difficile d’être les deux."
et souvent elles n'y arrivent pas, surtout celles qui sont issus de la culture soixantehuitarde, c'est à dire une majorité de méres jeunes. résultat des enfants rois.
"Mais je sais aussi que beaucoup d’hommes ont renoncé à ce combat, à leurs prérogatives et leurs responsabilité même quand les mères séparées les y incitent."
il n'y a plus de vie de couple, l'homme ne peut plus poser les limites à l'enfant au quotidien, il peut encore surveiller son enfant en dehors du domicile, j'en connais un qui là fait.
"Certaines renoncent à une nouvelle vie de couple en raison d’une forme de loyauté envers leur progéniture."
loyauté !!!, elles savent que si elles refont leur vie l'homme avec qui elles vont vivre, ce sera lui à poser les limites, à détenir l'autorité de proximité, ça elles ne le veulent pas, elles veulent être chef de famille.
"Je veux parler aujourd’hui des mères, nombreuses, qui par choix ou par obligation élèvent leur(s) enfant(s) seules."
par obligation, c'est rare par choix oui, divorce la cause principale manque de romance dans le couple.
" Et puis, la recomposition du couple n’est pas forcément simple. "
c'est pour ça qu'on appelle les familles recomposées des familles décomposées.
"Ce nouveau partenaire devient parfois une sorte de concurrent pour l’ex. La mère doit déployer beaucoup d’intelligence pour éviter les confrontations préjudiciables à la famille. En même temps le nouveau doit trouver une place, à réinventer de cas en cas."
ça serait bien que les féministes et l'état expliquent aux mères que le nouveau doit avoir l'autorité de proximité, parce que je pense quelles ont du mal à le comprendre.
"Les mères qui ne se sont pas remises en couple assument deux fonctions: mère et père. Et c’est très difficile d’être les deux. La répartition classique avait du sens. La mère pouvait être plutôt la consolatrice, le père plutôt le poseur de limites. Aujourd’hui nombre de mères qui éduquent presque seules doivent à la fois laisser les portes s’ouvrir pour leurs enfants et les tenir fermées quand c’est nécessaire."
il faut quelles se fassent aider
http://www.uniondesfamilles.org/absence_du_pere.htm
"Union des Familles : L'absence du père peut-elle être palliée par un père de substitution et jusqu'où ?
Jean-Marie Petitclerc: : On ne remplace jamais le père, mais on peut effectivement pallier son absence. Le vrai père, n'est-ce pas celui qui éduque ? comme j'aime à le rappeler aux enfants adoptés.
Ainsi dans les familles recomposées, il faut beaucoup soutenir le rôle du beau-père, car les adolescents ont tendance à lui dire : "Tu n'es pas mon père, tu n'as rien à me dire". Légalement ils ont raison, mais dans les nouvelles propositions de loi qui sont aujourd'hui en cours d'élaboration à partir notamment du rapport Bruel, il est question de donner au beau-père quelques attributs de l'autorité parentale, en particulier dans les petites choses du quotidien : il pourrait signer les bulletins scolaires par exemple.
Il est bien difficile pour une mère d'élever seule un adolescent. Prenons l'exemple d'un ado de 16 ans sans père qui rentre chez lui à 2 heures du matin, avec un autoradio volé dans les mains. Si sa mère l'accueille elle devient complice ; si elle le renvoie, il va traîner dans les rues... Quand on est deux, c'est plus facile. L'un pousse une "gueulante" sur ce comportement inadmissible ; l'autre embrasse en disant : "Tu gardes ta place dans la famille". Déjà, le seul fait de pouvoir dire : "J'en parlerai à ton éducateur" introduit un tiers dans la relation entre la mère et l'enfant. Et c'est un drame aujourd'hui pour nombre d'adolescents de ne pouvoir passer que de madame l'enseignante à madame la juge et à madame l'éducatrice. La seule figure masculine éducative pour eux c'est le CRS ! Il serait urgent de créer une parité dans le monde éducatif."
"La place du beau-parent
L’existence d’un beau-parent a une incidence sur le montant de la pension alimentaire. . Si vous vous remariez avec un homme doté de revenus importants, votre ex-mari pourra demander la révision de la pension alimentaire. Si votre ex-mari épouse une femme sans revenus ou qu’il a avec elle un nouvel enfant, la pension alimentaire qu’il vous verse pourra aussi être diminuée.
Le beau-parent exerce une autorité sur ses beaux-enfants d’autant plus facilement qu’elle est instituée par son conjoint. Quand tous vivent sur le même toit, c’est son autorité de maître ou de maîtresse de maison qui s’applique naturellement. Mais l’organisation des visites et des vacances, le suivi médical et scolaire de enfants restent l’apanage des deux parents.
Il est possible de demander une délégation d’autorité parentale partielle pour le beau-parent auprès du juge du tribunal d’instance à condition que le parent éloigné accepte de déléguer cette autorité. Elle concerne les actes de la vie courante."
" Il faut des principes éducatifs assez proches, autant pour la paix du couple que pour la cohérence de l’éducation aux enfants."
déjà quand les enfants sont avec les deux parents, le père a du mal a donner des limites aux enfants, alors quand ce n'est pas le père bonjour !!!
une mére, elle veut protéger, elle veut connaître et savoir pour préparer l'avenir, le scrute, éduque et s'angoisse: un vrai programme de parti politique
une mère est capable de tout.
de se soumettre, de jouer les couleuvres pour obtenir ce qu'elle veut, autant que de sacrifier l'ensemble
ou de se battre pour ses valeurs, héritées de son patrimoine familial, qu'elle va transmettre à ses rejetons,
n'en déplaise à son compagnon
on en est arrivé au point où l'imagination partage les civilisations hindoues, perse ou australopithèques, les musiques slaves ou de Brahms ou de Bob Marley, les arts architecturaux, les génies mathématiques,
où nos enfants demandent à se retrouver dans un code sinequanon, à l'humanisme incontournable
Leclerc, êtes-vous une femme?
@ suisse & genevois déshérité
non
leclerq non femelle se consacre au sujet "hommage aux mères"
mdr
leclerq, vous êtes français et salarié en Suisse?
@ suisse & genevois déshérité
leclerq non femelle se consacre au sujet "hommage aux mères"
mdr
oui français Artisan en France, ex dessinateur industriel d'ABB Chassieu.
Où sont les hommes?
Le père c’est l’homme
qu'avez vous penser de mes extraits du livre "les territoires perdus de la république?
j'ai presque fini le livre.
le prochain c'est "Sale Blanc chronique d'une haine qui n'existe pas" de Gérald Pichon.
arrête ton char leclerq: on ne peut ignorer les faits du passé et faire comme si.
En l'occurrence, les lois en faveur des femmes et du soutien à la procréation n'ont pas eu lieu en Suisse mais pour des françaises salariées en Suisse. que cela déplaise à ton argument ou non
- le comble fut dans l'emploi pour des suisses, de subir leur licenciement immédiat à sec pour remplacement par ces jeunes fr sortis d'un deug fr sans valeur, inexpérimentés et incapables de supporter le poids du job en Suisse, puis s'en sortir avec tous supports
et que veut ici ce français pseudo leclerq?
Merci de ce bel hommage à Celles qui se reconnaitront. Au passage quelques larmes sur des souvenirs douloureux, mais heureusement la vie vous récompense; certes pas de la part de ceux que vous croyez, mais qu'importe!
Pas trop d'embûches, ou du moins pas trop lourdes sur ce nouveau cheminement annualisé et n'oubliez pas de relever les beaux moments; ceux qui font les petits bonheurs!
@ suisse & genevois déshérité
c'est quoi le rapport de vos délires avec mon post ?
Bonjour et bonne annee de la part d un pere qui a eleve seul son fils apres que la mere a quitte le foyer.
Mettre mon fils dans une creche ?
Jamais!
Du poste de cadre que j avais dans une entreprise financiere, j ai demissionne pour me mettre a mon compte et avoir une activite a domicile comme independant.
Aujourd hui mon enfant est un adulte epanoui et en couple ; et je n ai rien a regretter.
L amour d un enfant donne la force de surmonter toutes les epreuves du monde.
Bonne chance pour 2016 aux peres responsables d une famille monoparentale !
Merci pour ce témoignage Ivan! Et bravo.
Corélande: ne pas oublier les petits moments... yes.
"Et c’est très difficile d’être les deux. La répartition classique avait du sens. "
N' y a t il pas également un risque de schyzophrénie pour les personnes qui assument les deux fonctions (père et mère) dans un couple.
Car bien que beaucoup des familles monoparentales soient exclusivement du fait des mères, il y a tout de même de plus en plus d'hommes qui sont dans cette configuration.
Y a t il des stats disponibles où l'on pourrait se faire une idée ?
Que de généralités dans cet article. Il y a autant de bons et mauvais pères qu'il y a de bonnes et mauvaises mères. Plutôt que de mettre un sexe sur un piédestal, il faudrait féliciter l'ensemble des parents qui essaient de mettre leurs enfants en priorité après un divorce.
La loi n'est toutefois pas faite pour encourager cette approche, avec bien des éléments relatifs à la garde des enfants et aux pensions alimentaires qui ne font qu'encourager les conflits. Quelques pistes pour améliorer les choses:
- Accorder automatiquement une garde alternée aux parents d'enfants à partir de l'âge de scolarité, pour autant que les deux parents soient considérés comme de bons parents (évaluation du SPMi) et vivent dans la même ville
- Dans le cas où les parents sont tous deux considérés comme de bons parents, mais ne veulent pas d'une garde alternée, donner la garde au parent qui en fait le plus pour assurer un contact régulier et harmonieux avec l'autre parent. Accepter que la garde puisse être retirée à un parent en cas de comportement contraire à ce principe.
- Fixer un plafond maximal vers le haut et un seuil minimal des pensions alimentaires.
- Adapter automatiquement les pensions alimentaires vers le bas en cas de diminution durable (après 1 an) des revenus du débiteur, sans devoir passer par le Tribunal de Première Instance (sur la base des déclarations fiscales).
- Créer un service en charge de la gestion des pensions alimentaires, comme cela se fait dans d'autres pays (ex: Australie). Celui-ci étant chargé de la gestion des pensions alimentaires versées (pour empêcher ainsi qu'une pension alimentaire destinée à un enfant soit utilisée à d'autres fins par le parent qui a la garde, dans les cas où la garde alternée n'est pas appliquée)
Ces différentes idées doivent bien entendu être débattues, voire modifiées et adaptées, mais leur principe, visant à ôter toute "arme de manipulation" à l'un des parents (par l'argent ou le droit de visite) et à éviter au maximum le recours à la justice (dont les juges sont trop souvent pétris de préjugés liés à une vision très conservatrice de la famille), doit être à la base d'une amélioration du code civil.
@ Mark:
J'ai choisi de parler spécifiquement de ces mères. Je ne fais pas de compte des bons et mauvais pères ou mères. Je salue les femmes qui, dans cette situation où elles sont plus nombreuses que les hommes et donc plus souvent critiquées, font bien leur job. Je souligne aussi que nombre de ces mères souhaitent que le père prenne plus de place dans la vie des enfants et sont acquises à cela (qui est souvent une demande des pères exclus). Or je constate que certains pères ne prennent pas cette place offerte. Et ce n'est la faute ni de la justice ni de la mère.
Je pourrais écrire des louanges aux pères seuls qui font bien le job. Je ne mets pas sur un piédestal en concurrence de "bien", je pense que beaucoup de ces mères – chez lesquelles la culpabilité n'est pas absente – méritent aussi qu'on les reconnaisse. Parce que mine de rien le fait d'être mère ne les rend pas si sûres d'elles. Pour ces raisons j'ai salué ces mères plutôt que l'ensemble des parents, ce qui serait resté assez général, alors que leur spécificité de mère est interpelée dans ces cas. Par exemple dans les relations avec un fils, avec les questions que se pose un garçon, ou à l'adolescence du garçon.
Pour le reste je suis d'accord avec les pistes que vous suggérez. Mais ce n'était pas mon objet aujourd'hui.
@ chewbac:
Je ne vois pas pourquoi ce risque serait plus grand. Le parent seul devant assurer deux fonctions parfois antinomiques est d'abord en contradiction et doit apprendre à gérer cette contradiction. En général il penche pour une fonction plus que pour l'autre. Il peut aussi en parler avec des proches pour trouver des solutions.
Je ne connais pas d'étude à ce sujet.
"Les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses."
rien d'étonnant. les féministes les ont déculpabilisées, il en a fait des égoistes.
extrait de "la crise de la famille D’Évelyne Sullerot
"Les femmes demandent le divorce et gardent les enfants
Les femmes ne s'en tinrent pas à la difficile conquête du
monde du travail. Elles manifestèrent une beaucoup plus
grande liberté dans la gestion de leur vie privée, prirent des
distances avec le mariage et la vie de famille, mais pas avec
la maternité. Durant ces années 1975-85 de grande libéra-
tion sexuelle, elles affirmèrent au contraire plus fortement
que jamais leur désir d'être mères et leur pouvoir nouveau
sur la procréation et l'éduca'tion des enfants. On en jugera
particulièrement en deux occasions différentes : lors des
divorces de plus en plus nombreux, qu'elles vont elles-
mêmes demander, en obtenant des juges la garde exclusive
de l'enfant, laissant aux pères, désarçonnés, le rôle de
payeur et de parent secondaire, à éclipses ; d'autre part, lors
de l'expansion des nouvelles techniques de procréation aux-
quelles elles firent un accueil enthousiaste et s'empressèrent
de recourir pour réaliser leur désir d'enfant insatisfait.
Pour les femmes, les facteurs favorisant la dislocation des
ménages s'étaient multipliés : surinvestissement sentimen-
tal dans le couple ; choix parfois unilatéral de la femme
d'avoir un enfant en gérant sa contraception en consé-
quence ; décalage des horaires et rythmes de vie des deux
conjoints qui travaillent ; dispersion des intérêts ; souci de
préserver son autonomie constamment rappelé par les
conseillers, par les médias et par les pouvoirs publics, sur-
tout après 1981.
Pour beaucoup, désormais, divorcer n'est plus une faute,
mais un acte de libération personnelle qui implique un cer-
tain courage et engendre une certaine fierté. Leurs maga-
zines le leur répètent et les téléfilms ne se tenninent plus par
un mariage, mais par le départ, plein de bravoure, de la
1975-1985 :les mères jouent les premiers rôles 139
femme mariée qui a choisi d'être enfin elle-même. Elles
savent que l'opinion est de plus en plus indulgente envers les
divorcées et pleine de considération pour les femmes seules
avec enfants. Elles ont aussi conscience du fait que le
divorce n'est plus seulement la sanction d'un échec intime
conduisant à une impasse, mais qu'il peut être le prélude
nécessaire à de nouvelles « séquences ›› de vie comportant
de nouvelles chances. Enfin, ce qui est déterminant, depuis
le vote de la loi de 1975, elles ont la quasi-certitude qu'elles
« gagneront ›› leur divorce et « auront les enfants ››. En effet,
la proportion des gardes confiées aux pères a chuté de plus
de la moitié et s'établit autour de 7 %, tandis que celle des
gardes confiées à la mère est montée à près de 90 % - quel
que soit le type de procédure, requête conjointe, abandon,
ou faute, même si les torts sont du côté de la mère.
L'attitude des mères à l'égard du divorce a profondément
changé durant cette décennie. Dans les centres Retravailler
qui s'étaient répandus dans toute la France, plusieurs for-
matrices en ont été frappées. Les observations qu'elles ont
faites alors et m'ont communiquées, bien que non chiffrées,
n'en sont pas moins plus révélatrices qu'eussent pu l'être des
réponses à des sondages d'opinion. En effet, elles ont été
faites sur une durée de quinze années (1974-89) ; elles ont
porté sur un très grand nombre de femmes de milieux
moyens, modestes et défavorisés dans tout le pays, les-
quelles passaient avec les formatrices 120 heures, dont envi-
ron 12 heures, réparties sur cinq semaines, d'expressi0n
libre en petits groupes. Or, de 1975 à 1985, une véritable
transformation a pu être constatée.
Dans les années 1970, environ 10 % des femmes reçues à
Retravailler se disaient « en difficulté conjugale ›› et cher-
chaient à se réinsérer dans le monde du travail parce
qu'elles formaient le projet de divorcer. Elles arrivaient
écrasées d'inquiétude pour l'avenir et de sentiment de culpa-
bilité à l'end.roit de leurs enfants. Elles se demandaient si
leurs parents voudraient bien les accepter avec leurs enfants
après la séparation « le temps de se retourner ››. Elles se
tourmentaient à l'idée des réactions de leur mari quand elles
annonceraient leur intention de divorcer. Elles s'interro-
geaient à haute voix et réclamaient l'avis des autres femmes
du groupe 2 comment les enfants vont-ils prendre cela ?
Leur en voudront-ils ? Et si ce n'était pas bon pour eux ?
Dix ans plus tard, la proportion des mères (plus jeunes)
venant à Retravailler chercher une réinsertion profession-
nelle pour pouvoir divorcer avait augmenté. Elles apparte-
naient aux mêmes milieux, peut-être un peu plus modestes
encore, et plusieurs avaient un mari au chômage dont elles
désiraient se séparer. Mais leur décontraction, frisant par-
fois l'inconscience, tranchait sur l'anxiété de celles qui les
avaient précédées. Bien souvent, lors des échanges libres,
elles ne mentionnaient même pas le fait qu'elles avaient un
ou des enfants. Les fonnatrices, qui avaient pour règle de ne
jamais poser de questions personnelles, le savaient par leur
dossier d'inscrlption et attendaient en vain qu'elles fissent
allusion soit aux solutions pratiques qu'elles envisageaient,
soit à l'impact que leur divorce pourrait avoir sur leurs
enfants. Elles parlaient volontiers de leur intention de divor-
cer et montraient souvent une certaine hâte : « Quand, dans
un couple, ça n'est plus ça, mieux vaut en finir vite, parce
que, quand on est jeune, on peut refaire sa vie. ››
Les fonnatrices de Retravailler, qui avaient appris à décul-
pabiliser, rassurer, réconforter, dynamiser les éclopées du
mariage abattues tout en les préparant au monde du travail,
ont commencé par se réjouir de rencontrer de plus en plus
de jeunes femmes déculpabilisées qui prenaient elles-
mêmes, sans drame, l'initiative de changer de vie. Puis peu à
peu, le soulagement de les voir si souvent guillerettes et non
plus démoralisées s'est mêlé de quelque inquiétude : que
représentait la famille tout nouvellement créée pour celles
qui allaient si aisément la briser, non pas à la suite d'un
drame conjugal lourd, mais plutôt d'un rapide désenchan-
tement devenu insatisfaction et impatience - sans trop de
souci des effets sur les enfants, et pas le moindre concernant
le mari ? "
"Ce sont les pères qui se sont eux-mêmes exclus, quelles qu’en soient les raisons"
quels torts ont t'ils eu les pères aucun qu'on t'ils fait pour se faire éjecter de la famille qu'ils avaient formé rien.