Le gouvernement français a publié une statistique comparant l’évolution des niveaux en orthographe depuis trente ans. Entre 1987 et 2016 le taux moyen de fautes a presque doublé.
Selon cette étude:
« … nos enfants font en moyenne 17,8 erreurs, contre 14,3 en 2007 et 10,6 en 1987. (…) Dans une langue réputée parmi les plus compliquées, c’est l’orthographe grammaticale – règles d’accord sujet-verbe, groupe nominal, accords du participe passé – qui perd les écoliers. Et cette perte ne concerne pas seulement quelques-uns : près d’un élève sur cinq (19,8 %) commet 25 erreurs en 2015 ; ils étaient 11,3 % dans cette situation alarmante en 2007, et seulement 5,4 % en 1987. »
10,6 fautes il y a trente ans et 17,8 aujourd’hui. L’école ne remplit-elle plus assez son rôle de transmission? A-t-elle été submergée par les idéologies socialisantes? Est-il véridique que les gouvernements successifs ont laissé descendre les exigences, par crainte de discriminer les enfants issus de l’immigration ou de classes économiques et culturelles défavorisées – un nivellement par le bas, ou pour neutraliser toute compétition entre les enfants?
La compétition est aujourd’hui mal vue et dénigrée par les tenants de l’idéologie égalitariste. Elle désigne des plus et des moins performants. La notation est suspectée d’engendrer des discriminations – alors qu’elle est d’abord un marqueur individuel pour l’élève, un signal du niveau où il se trouve à un moment donné.
Le mérite lui-même semble être devenu mauvais car élitiste. La lutte contre toute discrimination est, dans ce cas, susceptible de tirer une société vers le bas. L’émulation par le meilleur et par la gratification personnelle et l’estime de soi ne fonctionne plus. Un repère majeur d’auto-évaluation de l’élève disparaît. Est-il vraiment remplaçable par un plus grand esprit de collaboration entre les élèves?
L’école publique est devenue un lieu de confrontation des visions. Si la compétition, qui est une relation verticale, est accusée parfois de former et d’alimenter un esprit de conflit, la pratique systématique de la collaboration, relation horizontale, pourrait bien être suspectée de générer des individus moins autonomes aux plans intellectuels et affectifs, craignant de s’affirmer et moins productifs.
Mais c’est trop schématique. La réalité est en général plus complexe que la théorie et si l’on suit ce type de spéculation, on peut aussi remarquer que la collaboration n’évite pas le fait vertical d’un meilleur et d’un moins bon.
La sagesse ne serait-elle pas de promouvoir la compétition dans certains domaines et la collaboration dans d’autres, laissant aux enseignant la responsabilité de ne pas survaloriser les meilleurs et d’insister sur l’aspect marqueur individuel des notes?
Car les adultes rencontreront une mixité des modes de fonctionnement tout au long de leur vie. Autant les préparer aux deux et les habituer à articuler ces deux modes de manière appropriée, quitte à développer un soutien scolaire pour les élèves qui peinent le plus. N’ayant moi-même pas été un élève hyperscolaire et plutôt mal à l’aise avec les notes, j’envisage néanmoins que ce système puisse être rendu plus confortable, donc plus utilisable par l’élève, s’il est bien expliqué et amendé.
L’égalité des chances est alors rétablie et le niveau général poussé vers le haut. Cela permet de plus de rétablir une culture du résultat dans les domaines où elle est opportune. La gratification que procure le résultat est un facteur de prise de confiance en soi.
L’orthographe est une carte de visite. Les moins performants pourraient bien grossir les métiers à basses qualifications. Je doute en effet que beaucoup d’employeurs, dans les services ou l’administration, acceptent d’engager des personnes incapables d’écrire correctement.
Dans ce sens j’approuve la volonté de François Fillon à propos de l’école: remettre les fondamentaux en premier objectif. L’orthographe en est un. Que cela paraisse « réac » ou France du passé, comme les « progressistes » se complaisent à désigner FF, n’a aucun intérêt. La qualité d’une transmission, la qualification des élèves et leur avenir sont au contraire des questions résolument actuelles, donc très modernes.
Commentaires
Oui et ça n'est pas la réforme des collèges qui continue à éloigner l'enseignement du modèle classique qui va améliorer la situation.
On peut aussi parler de cette étude qui montre que les petits français sont les plus mauvais d'Europe en mathématiques. Pourtant les énoncés utilisés, qui posent des difficultés aux élèves, semblent d'une grande facilité. Peut-être est-ce dû à une mauvaise compréhension du langage ?
Ah, heureusement que les petits Slovènes sont les meilleurs en maths, les petits Azerbaïidjanais au jeu de Mhijrg, les petits Suisses pour préparer la fondue. Ajoutons que la densité de cons (il faut s'en réjouir) diminue au Sud, et que les Soudanais sont les meilleurs en calligraphie traditionnelle. Je voudrais continuer cette énumération. Mais faute de temps, je vais conclure : les racistes, les nationalistes et les pédagogues imbéciles ont encore de beaux jours devant eux. Vive la compétition ! Séparons enfin clairement les riches des pauvres, les bons des mauvais !
Cher hommelibre,
- "Orthographe : la catastrophe s’amplifie"
Grammaire: c'est pas mieux. ;-)
Chuck: que voulez-vous dire?
@Mozartindigent
Bonjour, mon cher (le nom m'échappe tout à coup)
Bravo pour avoir orthographie correctement les nom de nationalité: les Slovènes, les Azerbaïidjanais, les Suisses (même petits), les Soudanais.
Cela seul vous classe, dans l'élite des participants aux blogs. Aïe !
Cher hommelibre,
- "Chuck: que voulez-vous dire?"
Lire, écrire ... c'est tellement moisi !
Chuck,
Pensez-vous par exemple au langage sms? Ou internet?
La grammaire y est en effet parfois malmenée comme l'orthographe. Or la grammaire est aussi une partie de la construction de la pensée.
Beaucoup d'analphabètes se servent d'un logiciel d'orthographe sur internet - ce qui n'empêche ni les fautes ni le charabia quand ils n'usent pas de plagiat comme constaté sur les blogs.... Il en va de même pour les SMS même abrégés.
La grammaire est primordiale pour maîtriser l'orthographe. C'est le rappel de Chuck Jones.
Il me semble que la situation actuelle de l'école en France est justement ce qui divise la société et les classes économiques ou intellectuelles. L'enseignement privé ne cesse de croître dans l'hexagone. Aujourd'hui près de 20% du nombre d'étudiants dans l'enseignement supérieur est dans le privé. Ces écoles n'acceptent certainement pas des élèves à l'orthographe aléatoire.
www.decideursenregion.fr/National/Developper-Manager/economie-sociale/management/L-enseignement-superieur-prive-se-porte-bien
Le nombre des écoles privées continue à croître. Ce ne sont plus seulement les enfants de classes économiques hautes qui les fréquentent mais aussi de classe moyenne, au prix de sacrifice familiaux.
Le nivellement par le bas est donc un facteur de croissance des inégalités et de diminution de la cohésion sociale. Il n'y a ni racisme ni nationalisme ici, argument dont je ne vois pas trop la pertinence, mais une simple réalité. Le diagnostic ne me semble pas approprié. Il semble plutôt que l'égalitarisme forcené produit plus d'inégalité sans donner l'envie de réussir sa propre vie et sans s'en donner les moyens.
Il vaut mieux se modeler sur les meilleurs plutôt que de chercher le plus petit dénominateur commun.
"L’orthographe est une carte de visite. Les moins performants pourraient bien grossir les métiers à basses qualifications."
Pas vraiment... Beaucoup de jeunes arrivent à faire des études de niveau universitaire avec de grosses lacunes orthographiques. C'est une fois sur le terrain, qu'ils se retrouvent confrontés au problème.
Faut-il serrer la vis? s'acharner à expliquer pendant des heures des subtilités, exceptions, exception d'exceptions???
Personnellement, je serais plutôt partisan d'une simplification de l'orthographe. Bien entendu, les érudits de service nous diront que la langue et son respect orthographique est notre culture, que de garder des accents ou lettres inutiles font sens si l'on recherche l'origine des mots etc.... Mais au final, le français devient une langue compliquées dans un Monde où tout se simplifie et pousse à l'intuition.
@ Riro:
"C'est une fois sur le terrain, qu'ils se retrouvent confrontés au problème. "
Le problème n'est donc que déplacé et mis en bout de chaîne, là où il porte le plus à conséquence. Je n'ai pas d'élément de preuve pour ceci mais j'imagine que les universités qui acceptent des étudiants ayant ces lacunes n'ont pas vraiment de réputation à défendre.
Une haute école privée doit former des personnes qui n'auront pas ce problème de terrain. Au travers de leurs étudiants c'est leur réputation qui est en cause et donc l'inscription de nouveaux étudiants et la survie économique de l'établissement.
On peut en effet simplifier l'orthographe. Simplification compliquée cependant. Elle devrait faire l'objet d'une étude approfondie et d'un consensus. Le français est compliqué, sa grammaire a fait souffrir des générations d'écoliers. Moi-même je vérifie régulièrement certaines formes pour en être sûr. Pour beaucoup serrer la vis produit plus de résistance que d'apprentissage, il faut donc voir comment éviter cet écueil.
On pourrait remplacer sans trop de difficulté le PH par le F, par exemple. Mais beaucoup de formes viennent du latin, langue elle-même compliquée. La complication sert souvent la précision de la pensée, comme les accords de participes qui permettent de désigner précisément l'objet concerné dans une phrase.
Je suis d'accord avec vous sur l'évolution plutôt intuitive, pour autant on ne doit pas perdre la précision de l'intention et de la communication. Certaines langues proposent cette précision non par la grammaire mais par le contexte de la phrase, et il me semble que l'intuition pousse dans ce sens. Il me paraît difficile de passer rapidement à cela en français, sans lui faire perdre plus qu'il ne gagnerait, car même l'intuition utilise des codes pour être comprise et ces codes sont différents de ceux d'une précision littérale.
Le constat est sans appel, mais il ne suffit pas de dire que l'école serait la seule responsable et qu'il suffirait de décréter qu'on doit se concentrer sur les fondamentaux, discours que l'on entend depuis au moins 15 ans, mais que l'on n'est jamais arrivé à vraiment mettre en œuvre ( ici ou en France) et pour cause : il est difficile de définir les différentes missions de l'école et ensuite de lui donner les moyens de les accomplir.
En tant qu'enseignante, je n'ai pas constaté sur le terrain ( à Genève) une renonciation à des objectifs haut placés. Au Cycle, les trois regroupements en niveaux de compétence signifient bien que l'on est très attentif aux notes et que le système cherche à mettre en valeur des performances scolaires et d'effectuer une sélection.
L'enseignement de l'allemand ( mon domaine) est devenu de plus en plus exigeant. Au CO, on table désormais sur les acquis du Primaire, ce qui est logique et légitime.
Il y a 20 ans, on recevait des débutants et on avançait forcément plus lentement et on arrivait moins loin.
Cela étant, il m'a semblé qu'on arrive maintenant à obtenir une petite élite très performante, mais que le niveau de la majorité des élèves n'a pas réellement augmenté. On a a perdu les élèves les plus faibles, qui continuent à baisser les bras face à l'allemand, car les exigences leur semblent au-delà de leurs possibilités, tout comme dans beaucoup d'autres matières. Au lieu d'"assurer les fondamentaux", ces élèves se mettent aux abonnés absents.
En mathématiques, le niveau de la matu est au-delà de tout ce qu'on avait exigé à "mon époque".
En plus, les élèves passent beaucoup de temps avec l'informatique, l'anglais et ... le français, qui a un forte dotation-horaire, puisque le problème a été identifié et pris en compte. La grille-horaire comporte de moins en moins de couture, cuisine, travaux manuels, musique.
Et nos élèves, comme les élèves français, ne sont pas bons en orthographe et même en syntaxe. Je le constate chez mes propres enfants, jeunes adultes, étudiantes à l'université. Mais à ce stade-là, on sait utiliser les correcteurs et poser des questions.
Tout cela pour dire, que les 32 heures ne suffisent plus pour former des élèves très bons dans toutes les matières. Le monde autour de l'école a tellement changé en 50 ans, que l'orthographe ne peut être une sorte de priorité pour eux. Les profs se retrouvent déphasés avec leurs objectifs.
On peut le regretter et d'autant plus que l'orthographe reste un marqueur social.
Comme Riro, je me pose des questions sur la position particulière de la langue française. Beaucoup de jeunes sont désavantagés par leur incompétence, qui peut leur fermer des parcours professionnels. Là, il y aurait un créneau pour la formation d'adultes. Il me semble qu'un adulte motivé peut apprendre plus vite et mieux, qu'un enfant ou un ado, qui n'y voit pas une priorité...
De plus, les étudiants d'aujourd'hui doivent bien maîtriser l'anglais. P.ex. en Sciences, déjà les travaux de Bachelor doivent être rédigés dans cette langue.
Ce n'est pas "la faute" des étudiants, ils doivent simplement s'adapter aux exigences du monde académique. Leurs travaux doivent pouvoir être lus à travers le monde universitaire. Les défis sont vraiment d'un autre ordre et il faut le prendre en compte, lorsqu'on aborde la question de l'orthographe française.
A ce stade, je ne pense pas que l'on soit prêt pour une réforme ou une simplification. Un tel projet se heurterait à une résistance tellement vive, que ce serait une perte de temps suicidaire.
Patoucha, je trouve que les correcteurs orthographiques desservent tout le monde. J'ai une assez bonne orthographe (si je n'écris par trop vite avec mes deux doigts et si je me relis attentivement), et je garde le correcteur pour corriger plus rapidement certains mots. Un style plus personnel exige régulièrement que je "corrige le correcteur".
Avec l'habitude on voit assez vite les erreurs dues au correcteur et celles dues à une lacune. La presse internet est souvent truffée d'erreurs, les pigistes ne se relisant pas toujours. Il y a là un réel effort à faire.
Pour les sms j'utilise quelques abréviations comme bcp pour beaucoup, mais en général je prends le temps d'écrire les mots et phrases en entier, avec ponctuation, même si c'est plus long.
@Calendula
Je vous rejoins. J'irais encore plus loin en affirmant que le monde académique ne fait que répondre aux besoins du monde professionnel. Un jeune qui entre sur le marché du travail à Genève risque de se retrouver avec des collègues ne maitrisant, parfois, pas le français. J'ai moi-même travaillé dans une boîte où les gens capables de rédiger en anglais étaient bien plus recherchés que ceux sachant écrire un parfait français.
Le français est en voie de "latinisation".
Riro, il n'est pas en voie d'être latinisé: il l'est, il l'est déjà. Un peu normal: c'est son origine.
Pourquoi est-le latin qui a été repris? Pourquoi pas le gaélique, langue celte, au vu des 6 siècles de présence celte en Europe? A cause de la domination romaine plus forte, ou postérieure, ou plus répandue? De l'utilité de cette langue qui se parlait partout (langue universelle au début, parlée dans les églises)?
Apparemment il n'y a pas eu d'autre influence suffisante pour produire une autre langue en Gaule.
Riro, je crois que je n'avais pas compris dans quel sens vous mentionnez "latinisation": dans le sens d'un déclin et d'une transformation?
À voir, il reste très prisé dans le monde, très vivant, et la latinisation du latin a quand-même pris du temps.
Petit détour par Wiki:
https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_langue_fran%C3%A7aise
@Calendula
"On a a perdu les élèves les plus faibles, qui continuent à baisser les bras face à l'allemand, car les exigences leur semblent au-delà de leurs possibilités, tout comme dans beaucoup d'autres matières."
J'ai moi-même enseigné jusqu'au degrés de la Matu pendant plus de 30 ans. J'ai aussi commencé ma vie en parlant le suisse-allemand, puis j'ai appris le Hochdeutsch à l'école. Je l'ai même enseigné pendant quelque temps. Je comprends vos inquiétudes et les partage. Il se trouve que mes 5 enfants ont passé par le système scolaire genevois et que 2 y sont encore.
Ce que j'ai pu constater c'est que ma fille, qui n'a jamais eu de problèmes scolaires, juge l'allemand au Collège "dément" (ce que je traduis par trop difficile et(ou peu attractif). De plus, j'ai fait l'année dernière des révision de vocabulaire avec mon fils en 1ère année du Collège et j'ai trouvé le livre employé beaucoup trop difficile et touffu dans ses exemples.
Je vous livre mon sentiment, tout en sachant qu'il ne représente que moi et mes enfants et qu'il y a mille manières d'y répondre, aussi bien en mettant en question les compétences des élèves eux-mêmes, que celles de certains enseignants (nous savons tous qu'il y a un manque chronique de profs d'allemand et de mathématique) et pour finir les exigences des plans d'études.
En ce qui concerne les mathématique (ou la mathématique, puisqu'au cours de ma vie et de ma carrière j'ai assisté à une réforme majeure dans ce domaine), posent depuis toujours un problème presque insurmontable à nos élèves. Il en est d'ailleurs de même pour nombre de leurs collègues des autres disciplines, qui n'ose pas donner autant de devoirs qu'ils voudraient et jugeraient nécessaires par ce que leurs élèves croulent déjà sous la charge imposée dans cette branche.
Encore une fois, c'est une constatation que j'ai faite à l'époque où j'enseignais, dans le collège où j'ai enseigné le plus longtemps. Ce problème a suscité de nombreuses heures de discussions et de concertation aussi bien entre maîtres eux-mêmes qu'au niveau des associations de maîtres et des conseils de direction et je doute que la situation ait véritablement changé.
Les deux disciplines que vous avez citées dans votre intervention continuent manifestement a empoisonner la vie des élèves et les raisons, si elles n'ont toujours pas trouvé de remède, peuvent au moins être (et l'ont souvent été) cernées. Pour l'allemand, il tourne essentiellement autour de l'attractivité de la langue, notamment par rapport à l'anglais, et du quasi bilinguisme qu'exige son usage dans notre pays, un problème fondamentalement insoluble. Seul l'ajustement de certaines exigences et un effort concomitant pour rendre l'enseignement plus attractif peut éventuellement remédier à cette situation.
En ce qui concerne les maths, la discussion sur les qualités qu'exige son apprentissage remonte presque aux premières interrogation de Jean Piaget. Il me semble que peu de progrès a été fait. Comme l'allemand, les maths restent toujours la première cause d'échecs à l'école, et les quelques révoltes des maîtres d'autres disciplines ou de leur hiérarchie pour éliminer (ou dissimuler) cette réalité, notamment en rendant d'autres disciplines tout aussi éliminatoires, notamment le français depuis quelques années, ne "font rien à l'affaire".
Les Australiens viennent de faire le constat que seuls environ 13 pour cent des élèves choisissent les maths fortes, alors qu'ils sont aux alentours de 50 pour cent à Singapour. Ils se retrouvent donc classés derrière le Kazakhstan dans un classement récent qui a également fait du bruit chez nous. Les maths sont-ils donc définitivement à ranger dans une catégorie à part du savoir scolaire, celle des disciplines insurmontable pour les élèves qui n'ont pas un don particulier ?
En tant que partisan convaincu de l'importance des sciences comme compostante du savoir humain et du plaisir que leur maîtrise peut apporter, je ne peux pas me résoudre à accepter ce constat, d'autant moins que mes différentes formations universitaires aient porté principalement sur d'autres domaines.Je ne suis pas certain, non plus, qu'un régime scolaire de fer (ou de terreur), tel qu'on nous présente parfois ceux des pays asiatiques, soit la solution, pour autant qu'il y ait une réalité dans cette qualification.
La solution ne peut venir que des profs de maths eux-mêmes, qui doivent absolument trouver une manière de présenter leur matière de manière plus attractive et plus maîtrisable. A quoi servent tous les Masters en pédagogie dont Genève s'enorgueillit tant si leur acquisition ne débouche pas sur un meilleur enseignement ? Un enseignement qui ne se réfugie (et ne cache pas son impuissance) dans la voie de l'élitisme et de l'élimination d'un plus grand nombre d'élèves, encore moins si le résultat est leur départ vers les écoles privées.
J'ai eu le même sentiment avec l'allemand et les maths: deux matières présentées de manière très rigide et non attractive. Austère "Wir Sprechen Deutsch"... Résultat: 6 ans d'allemand et je ne tiens pas une conversation, 2 ans d'anglais et j'écris des textes (avec fautes) dans cette langue, et je suis des conversations courantes.
Les maths, je ne sais toujours pas faire les équations simples. Quand on ne comprenait pas, le prof répétait la même explication en donnant l'impression qu'il en changeait. Beaucoup d'élèves lâchaient prise.
Vu récemment dans un restaurant français (pas un boui-boui bar PMU)
Vin: 1/4 (=25cl pour ceux qui ne sauraient pas compter) = 14€
Le verre de 15 cl = 6€
Autrement dit, 30cl coûtent moins cher que 25cl.
Nous n'avons évidemment pas eu le culot de les corriger et avons modestement commandé deux verres.
@Mère-Grand,
Votre réponse reflète bien des préoccupations actuelles, qui ne sont pas nouvelles.
Il y aurait tant à dire, parce que la problématique de l'orthographe française n'est pas la même que celle de l'allemand, de l'anglais ou des maths.
Les mathématiques ont toujours bénéficié d'un statut plus noble dans la culture scolaire. Il est bien plus désirable d'être fort en maths que fort en orthographe ou en anglais !
Beaucoup d'élèves totalement désinvestis en allemand ont à cœur d'être bons en maths, une façon de me prouver que ma branche est le vrai problème et qu'eux, ils n'ont pas à se remettre en question.
Les profs d'allemand redoutaient les classes de "Scientifiques" à l'époque, où cette section existait, car on était assuré de se retrouver remis fondamentalement en cause et avec des arguments pseudo-scientifiques, fabriqués de toutes pièces, pour prouver que l'allemand était nul et ne servait à rien. Ces élèves se sentaient totalement au-dessus de telles basses besognes... Je n'ai eu de cesse de rappeler à leur bon souvenir les génies de la Renaissance ou des Lumières, qui maîtrisaient une vaste gamme de savoirs, comme Leonard de Vinci, pièce maîtresse de mon argumentation.
En tant que parent, j'ai cru comprendre que l'enseignement des mathématiques avait fait de véritables progrès à Genève, parce que mes enfants ne s'en sont jamais plaints. Tout donnait à croire qu'elles ont pu bâtir quelque chose de solide dans leurs têtes. Lorsque j'ai vu leur programme en Primaire, j'ai en tout cas compris que c'était mieux qu'autrefois ;-)))
Il serait intéressant de savoir, ce qui est différent à Singapour, qu'est-ce qui fait que les élèves soient si bons en maths. Quelque chose dans le contexte doit aider à réaliser cette excellence.
D'après ce que j'en sais, il s'agit d'une société très disciplinée, avec une propension au respect de la loi, qui peut être très pointilleuse. En tout cas, le contexte est très différent du nôtre.
Les maths sont censés faire appel à l'intelligence et à la réflexion, alors que l'orthographe, comme l'anglais ou l'allemand, demanderaient surtout du travail de mémorisation, qui est généralement perçu comme fastidieux et bête.
En réalité, on fait des opérations mentales sophistiquées, lorsqu'on arrive à utiliser un mot et à former des phrases à bon escient et rapidement ( langue parlée).
Depuis " Wir sprechen Deutsch", on a fait d'immenses progrès, mais on n'échappe pas à la répétition du voc, qui peut parfois ressembler au bon vieux bourrage de crâne. Heureusement, on n'apprend plus des mots comme "assiéger", " le chevalier" ou "téméraire", mais des mots utiles et plus fréquents dans la vie de tous les jours.
Nous ne devons jamais oublier, que si nous lâchons l'enseignement de l'allemand en Romandie, les français ne tiendra pas en Suisse alémanique. Que cela nous plaise ou pas.
Complément à ma (déjà bien longue) adresse à Calendula:
A propos des maths, je me souviens d'avoir lu un commentaire émanant d'une sommité internationale à propos de leur maîtrise. Il disait en résumé que pour apprendre les maths il ne s'agissait pas de comprendre mais de pratiquer, cette pratique entraînant à la longue non seulement un savoir faire, mais une compréhension profonde du sujet.
Si c'est vrai, et ça l'est certainement dans une certaine mesure, non seulement pour l'acquisition des maths mais aussi celle des langues, tout notre système éducatif, y compris nos pratiques d'éducation des enfants, vont à l'encontre de cette conception. Il y a longtemps que chez nous on a abandonné le principe du "Tais-toi et répète" pour le principe "Je vais t'expliquer pourquoi ...".
En même temps l'école a abandonné le "apprendre par coeur", considéré comme totalement ringard et inutile, pour ne prendre que cet exemple. Il n'y a guère plus que dans le sport que le principe prôné par feu mon maître de judo et probablement tous les entraîneurs sportifs actuels selon lequel il faut faire tel ou tel mouvement, prise ou geste, 10000 fois pour commencer à le faire de manière efficace est encore considéré comme normal, nécessaire et efficace.
Il y a là probablement à corriger quelque peu le célèbre effet de balancier qui, partout où il a été appliqué de manière extrême et souvent avec avec la bonne conscience de l'innovation, a presque toujours fait plus de dégâts qu'il a entraîné de progrès.
- « Lire, écrire ... c'est tellement moisi ! »
- « Pensez-vous par exemple au langage sms? Ou internet? »
Beaucoup trop de tévé ...
http://www.psychologies.com/Famille/Enfants/Epanouissement-de-l-enfant/Articles-et-Dossiers/Trop-de-tele-nuit-gravement-aux-enfants
https://www.google.ch/?&gws_rd=ssl#q=trop+de+t%C3%A9l%C3%A9vision
... beaucoup trop d'écrans ...
http://www.psychologies.com/Culture/Ma-vie-numerique/Articles-et-Dossiers/Trop-d-ecrans-l-alerte/Trop-d-ecrans-les-risques-pour-les-enfants
https://www.google.ch/?&gws_rd=ssl#q=trop+%C3%A9crans+enfants
... et beaucoup trop de "babillage" stérile et non structuré des enfants et des ados, laissés involontairement à eux-mêmes par des parents (et autres adultes formateurs) à l'expression lacunaire, ...
http://apprendreaeduquer.fr/3-piliers-dune-communication-efficace-entre-parents-et-enfants/
... avec pour conséquence ... des difficultés de réflexion et de raisonnement, par manque de mots pour exprimer des nuances et des différences, et améliorer ses capacités de discernement.
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2010/10/18/01016-20101018ARTFIG00772-les-enfants-inegaux-devant-le-vocabulaire.php
"Avec 400 mots de vocabulaire, la maîtrise des codes devient problématique.
Et les exclus de la langue de Molière ont toutes les chances de devenir
des exclus tout court."
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/164169-la-langue-francaise-est-elle-en-voie-de-disparition.html
http://www.atlantico.fr/decryptage/vie-avec-500-mots-francais-emprisonnement-social-qui-menace-plus-en-plus-jeunes-gilles-siouffi-francois-gaudin-2393521.html/page/0/1
@Mère-Grand,
Le statut de l'apprendre-par-coeur est justement très grand dans le cadre de l'apprentissage des langues étrangères. Il n'a jamais vraiment été abandonné, parce qu'on ne peut pas s'en passer. On essaye certes de contextualiser, d'utiliser le vocabulaire dans des activités variées, mais à mon humble avis, les listes actuelles sont réellement trop longues. A un moment donné, il n'est plus possible d'utiliser tout ce matériau de façon à se l'approprier. Sauf si on est particulièrement talentueux, motivé ou discipliné. (Les enfants d'enseignants sont souvent motivés et d'accord de se soumettre aux principes de la vie scolaire ...)
Les élèves se bloquent souvent devant ces listes et les récitations qui s'en suivent, c'est une sorte de guérilla permanente. Ils décident de ne pas apprendre, de se permettre le nombre admis de mauvaises moyennes. Ça se passe probablement ainsi avec l'orthographe. Comme elle ne peut être l'unique paramètre de l'évaluation, les élèves font l'impasse.
Dans un tel contexte, beaucoup d'élèves savent très bien calculer ;-)))
La réalité de la vie scolaire est souvent mal connue à l'extérieur. En tout cas dans le Secondaire, ça n'a pas fondamentalement changé par rapport à "l'école de grand-papa", même si on a progressé dans les méthodes, les moyens audio-visuels, la compréhension du fonctionnement du cerveau.
Il y a un problème de temps disponible par rapport au volume de savoirs à maîtriser. Le temps que les jeunes et leurs familles sont d'accord de consacrer à l'école n'est pas suffisant pour s'exercer véritablement, comme on exerce des gestes sportifs par la répétition.
Il est probable, que p.ex. à Singapour, l'école soit la priorité absolue des élèves et de leur familles. Le système de valeurs doit favoriser la réussite intellectuelle autrement que chez nous.
Ici, il est important d'être socialement brillant ( habillement, possession d'objets branchés, nombre d'amis et popularité...). L'école fait un peu pâle figure et elle n'est pas renforcée par le discours ambiant.
La déroute orthographique est à voir dans un contexte beaucoup plus vaste que celle de la seule institution scolaire.
Comme on me l'a déjà suggéré, je devrais mieux me relire !
avant -dernière ligne : un contexte plus vaste que celui ( et non : celle) de la seule institution scolaire.
Après 50 ans en terres francophones, je bloque encore sur masculin /féminin, car dans ma langue maternelle, ces catégories n'existent pas.
En finnois, il n'y a pas d'articles ( nommés "déterminants" dans le jargon actuel)et je dois souvent réfléchir une fraction de seconde, pour ne pas me tromper. Et parfois, ça rate ! D'autant plus, qu'en allemand, les articles ne correspondent pas forcément au français.
La polyphonie cérébrale est maîtrisable, mais pas parfaitement, si on est pressé. Heureusement, cela peut contribuer à la plus grande joie des autres commentateurs, puisqu'en chacun de nous sommeille un prof muni d'un crayon rouge virtuel ! ;-))))))))
Calendula et Mère-Grand: très très intéressant, votre échange. Il m'amène à réfléchir sur mon propre comportement d'élève, et même d'adulte.
@Calendula
"même si on a progressé dans les méthodes, les moyens audio-visuels, la compréhension du fonctionnement du cerveau"
Je n'ai pas du tout l'impression que si progrès il y a eu, et c'est certainement le cas dans le domaine du "fonctionnement du cerveau" d'après la littérature scientifique que je pratique, ils n'ont guère influencé la manière d'enseigner et de "tester" les connaissances utilisées par la plupart des enseignants.
Il est vrai qu'au Collège Rousseau il y cette année quelques heures supplémentaires (et pas toujours accessibles) sur un des aspects de l'apprentissage, notamment les conditions d'une mémorisation efficace, mais ce sont des heures supplémentaires. A mon sens tout enseignant qui fait appel à la mémorisation, et qui ne le fait pas, devrait nécessairement partager ce savoir (admettons qu'il l'ait après tous les cours théoriques auxquels il est soumis dans notre République) avec ses élèves dès son entrée en matière.
Je ne m'étendrai pas sur l'usage fait des moyens audio-visuels, dont j'ai vu les tout débuts à l'époque où nous faisions le choix des machines à utiliser (de coûteux Revox au début !) et composions les premiers exercices ad hoc. Leur usage s'est en tout cas fait avec beaucoup de heurts et de tâtonnements et, me semble-t-il, pendant longtemps au moins, sans que les résultats soient à la hauteur des moyens investis.
@ Mère-Grand,
Les choses sont très diverses, selon l'ordre d'enseignement ( Primaire, CO, Collège).
La méthodologie de l'allemand a fondamentalement changé, puisque le WSD, si mal nommé, ne poussait pas du tout à prendre la parole, mais à maîtriser la grammaire, pour faire des traductions. Un peu dans le style de l'enseignement du latin. Thème et version, langue morte.
L'audio-visuel actuel comporte beaucoup d'activités très bien pensées, avec des exercices plutôt malins. On peut s'interroger sur le voc avec des logiciels très bien pensés. On peut regarder des séries télé concoctés exprès pour l'enseignement de la langue étrangère etc etc.
Les nouveaux Labos-Langue sont très performants et apprendre leur maîtrise est un vrai défi pour les enseignants, qui n'ont jamais fini d'apprendre et d'essayer de s'adapter au " progrès".
Au CO, les élèves ont accès aux Labos une fois par quinzaine, cela reste donc une activité plutôt rare à l'école, mais on encourage à utiliser à la maison les moyens en ligne, mis à disposition sur le site du DIP.
On exige vraiment davantage des élèves, puisqu'ils ne doivent plus seulement savoir traduire, mais également comprendre les textes entendus, parler eux-même en continu ou en dialogue, écrire des textes ("rédactions"). On continue bien sûr à devoir comprendre ce qu'on lit.
Le chapitre " apprendre à apprendre" a été terriblement critiqué par le grand public. Il s'agirait d'une arnaque totale. J'ai suivi des formations pour cela, il y a au moins 25 ans, car j'étais intriguée par les blocages des élèves. A cette époque, les cours s’appelaient " Méthodes de travail des élèves".
Nous devions d'abord comprendre, comment nous fonctionnions nous-même dans une situation d'apprentissage, pour ne pas croire que tous les élèves auraient cette même approche mentale. En constatant que le collègue obtenait peut-être de meilleurs résultats à sa façon, j'étais poussée à tester d'autres astuces. C'était très convaincant et j'ai essayé de mettre tout ça à profit avec les ados. En classe, mais aussi pendant des cours facultatifs.
Cette approche demande beaucoup de temps, c'est pour ça que le cadre de 32 heures hebdomadaires est insuffisant.
Je n'en démords pas : si on veut être bon, il faut investir du temps.
Les génies existent, mais ils sont l'exception.
Beaucoup d'élèves très performants camouflent le fait qu'ils travaillent, car ce n'est pas bien vu, il ne faut pas passer pour un intello besogneux. Mieux vaut faire semblant d'être naturellement génial.
Et je suis donc d'accord avec l'enseignant de mathématique, qui vous a dit, que la pratique régulière est la clé de la réussite.
@ hommelibre,
Ado, j'ai été une élève peu sérieuse, comptant sur la chance et perdant peu de temps avec les devoirs.
Mais ça suffisait pour réussir.
Jusqu'en 3ème du Collège, où il a fallu s'y mettre sérieusement. Et j'ai fini par apprécier cet effort.
Lorsqu'on passe de l'autre côté du pupitre, on découvre que l'univers des enseignants n'est pas du tout ce que l'on s'imaginait.
Ça doit ressembler à ce que vivent les candidats à la présidence, toutes proportions gardées. La réalité des responsabilités, des contraintes, des enjeux est surprenant. Et en plus, il faut continuer à savoir capter l'attention, si pas la sympathie et l'adhésion.
Pas facile...
Les instits ou profs redisant la même explication à l'élève ne comprenant pas, en mathématique, notamment, pratiquent une discrimination sournoise reconnue et dénoncée(Albert Jacquard) promesse de futurs barrages d'accès...
Les parents mécontents qui en ont les moyens inscrivant leurs enfants aux écoles privées voire pour les mieux instruits qui en trouvent le temps, professions libérales ou indépendantes, artisanat instruisent leurs enfants eux-mêmes ou par précepteurs directement à la maison
ce qui creuse d'"autant mieux" les fossés entres les enfants des classes moyennes principalement et les autres enfants, jeunes ou étudiants privilégiés.
Exactement le contraire de ce que prétend le pouvoir.
Et... qui l'ignore?
Pourquoi le pouvoir prendrait-il des gants ou modifierait-il ses dispositions dites améliorations règles ou lois puisque les personnes concernées jouent aux autruches?