Questions et réflexions autour des températures.
J’ai beaucoup de questions. En voici quelques-unes. D’où vient la chaleur dont le ciel nous gratifie? Septembre est souvent ensoleillé et doux, mais là c’est plus que doux. Quoiqu’à Genève une légère bise de basse altitude se glisse sous le vent chaud du sud et maintient le thermomètre en zone confortable.
Alors d’où vient-elle? D’Afrique, comme d’habitude, aspirée par un jeu de pressions qui font un effet de pompe (image 1, 4 septembre, source meteo-villes). Ce n’est pas l’ensoleillement qui réchauffe notre air, du moins pas à ce point, c’est de l’air qui vient d’ailleurs, de là où c’est très chaud depuis des millénaires: le Sahara. Et pour ce vendredi 8 l’image 2 montre que la situation dure.
On peut vivre avec la chaleur. Les habitants de la plupart des régions désertiques sur Terre le font. Face à ces incursions répétées d’aire du Sahara, on peut se demander pourquoi. C’est le régime des vents qui a changé., ce qui nous expose aux sécheresses et à recevoir moins de dépressions atlantiques humides comme par le passé, donc moins de pluie. Pourquoi?
Différents cycles ou oscillations connues sur l’océan Atlantique rythment en partie notre météo. La NAO, ou oscillation nord-atlantique, peut faire varier le régime des pluies sur quelques mois.
Un autre cycle, l’AMO (oscillation atlantique multidécennale) a un rythme de 40 à 80 ans. Selon Wikipedia:
« Ce mode de variabilité expliquerait jusqu’à 40 % de la variance de la température de surface moyennée annuellement dans l’océan Atlantique Nord. (…) L’OAM semble reliée à la variation sur de longues périodes de la pluviosité et des températures de l’air dans l’hémisphère nord, en particulier en Europe et en Amérique du Nord. »
Selon ce cycle la phase chaude commencée en 1995 pourrait durer jusqu’en 2025 ou 2035. Enfin l’OA, ou oscillation arctique, complète ces variations naturelles du climat dans notre partie de la planète.
Nous ne sommes pas dans une serre fermée mais dans un système ouvert extrêmement mobile. Dans une serre la température est homogène et se perd relativement peu, les températures sont les mêmes partout. Or nos chaleurs extrêmes sont produites principalement sous d’autres latitudes, puis sont poussées par les courants aériens.
À l’échelle d’une dizaine de kilomètres les températures peuvent être très différentes. Exemple à Genève. Jeudi 24 août un record de 39,3° était annoncé. Or j’ai chez moi une petite station météo numérique. J’ai placé le capteur extérieur sur mon balcon à l’ombre et près d’une fente où l’air circule. Le soleil ne vient pas de ce côté le matin. Il y a de l’herbe en bas et des arbres plus loin, donc cette façade de l’immeuble ne chauffe pas avant 15 heures. Il n’y a pas de forçage.
Les conditions ne sont évidemment pas idéales. L’implantation d’une station doit répondre à des critères précis. Compte tenu de cela je considère qu’il y a quand même une comparaison possible. Le jour des 39,3°, mon capteur extérieur transmettait la valeur de 35,1°.
En général mon capteur indique 1 à 3 ° sous celles de Cointrin dans les heures chaudes. La nuit, logiquement, mon balcon est un peu plus chaud car l’immeuble garde la chaleur de l’après-midi. Par temps gris elles sont identiques.
Cela vaut ce que cela vaut, les conditions étant très différentes. Mais je constate que Cointrin n’est pas représentative de tout Genève. J’habite de l’autre côté de la ville et je n’ai pas vu le record annoncé. D’ailleurs, 39° je pense que je l’aurais senti. Mon corps a encore la mémoire de deux semaines passées au Maroc en juillet-août il y a des décennies, entre Marrakech et Zagora, dans un un air oscillant entre 37° et 43°.
J’avais remarqué depuis quelques années, que Météosuisse avait tendance à surestimer les températures dans ses prévisions, lesquelles températures étaient souvent moins élevées qu’annoncé. D’autres personnes de mon entourage ont fait la même observation.
Dans ma banlieue il n’y a pas d’effet d’îlot de chaleur, qui n’est pour rien dans les mesures à l’aéroport. Cointrin est également trop éloigné du centre-ville pour subir un tel effet. Bref, je n’ai ici rien vu de ce record du 24 août. Il y a au moins 4 degrés de différence d’un coin du canton à un autre. Cointrin chauffe donc plus que mon quartier.
4 degrés. Énorme.
Mais pas totalement surprenant. Les relevés des conditions météo dépendent des stations et de leur emplacement.
Les stations météo au sol souffrent d’emplacements pas toujours les meilleurs. D’après une étude, seules 16% des stations nord-américaines envoient des données continues et fiables.
Par ailleurs les températures relevées par les satellites depuis 1979 sont plus basses que celles relevées au sol. C’est logique. L’image 3 est un tracé des relevés par satellites depuis 43 ans pour la basse troposphère. Le même tracé en 4 avec les épisodes El Niño. L’image 5 est une autre représentation du réchauffement avec ces mêmes épisodes El Niño (de 1982 jusqu’en 2015) par le National Geographic.
Quel rôle joue exactement ce courant chaud (et des autres) dans le réchauffement de l’atmosphère? La question ne me semble pas encore réglée.
À propos d’El Niño une reconstruction sur 400 ans (image 6, source) montre des choses intéressantes, même si les données des périodes les plus anciennes peuvent être plus approximatives qu’au XXe siècle.
On constate deux périodes plus intenses. D’abord on voit une période dès 1880 (fin du Petit âge de glace) jusqu’en 1950 environ. C’est la première forte poussée chaude.
Puis une deuxième entre 1980 et 2020, avec là encore une poussée chaude. On remarque toutefois que les poussées chaudes sont suivies d’une stabilisation voire d’une baisse momentanée (2000-2015, 2017-2023), comme illustré par l’image 3.
Une autre question porte sur la température de référence utilisée pour quantifier le réchauffement. Quelle est-elle? Si l’on prend comme référence 1750, comme souvent annoncé, d’une part on ne dispose pas de relevés réguliers et systématiques, d’autre part c’est la fin du Petit âge de glace, période où les températures ont été les plus basses depuis le début de notre interglaciaire. Je trouve cette référence très discutable. Pourquoi ne pas prendre la référence de l’an 1000? Il faisait plus chaud, cela dessert la théorie alarmiste.
Encore une chose: ce printemps les mois d’avril et mai ont été plutôt frais, avec un courant de bise. Comme quoi, un changement dans le régime des vents et dans la position des pressions suffit à gommer temporairement le réchauffement.
Tout cela entre autres me laisse penser que nous ne savons pas tout sur les mécanismes de variation du climat, et je continue à envisager dans ces variations quelque chose d’autre que la seule augmentation linéaire du CO2 anthropique.
Commentaires
Donc, le GIEC et tous les climatologues nous mèneraient en bateau ? Pour quelles obscures raisons ?
La réalité et le bon sens nous poussent à les prendre au sérieux.
Ainsi vos cartes et graphiques sont intéressants et certainement corrects mais le GIEC les utilise aussi avec bien d'autres, et pourtant ses conclusions sont alarmistes.
Quelle réalité ?
Merci pour ce billet, Hommelibre. Juste deux citations, allant dans votre sens, tirées de Steven E. Koonin, Climat, la part d'incertitude, L'Artilleur, 2022 : "Conclusion : la science affirme que les événements météorologiques les plus extrêmes ne s'inscrivent dans aucune tendance à long terme pouvant être attribuée à des influences humaines" (p. 142), et "Aux Etats-Unis, pays dont les données météorologiques sont les plus abondantes et les plus qualitatives, les records de froid sont effectivement plus rares, mais les records de chaleur ne sont pas plus fréquents qu'il y a cent ans" (p. 144). Par rapport aux exagérations et aux lubies anxiogènes de rigueur dans les médias giéciens, voilà de quoi remettre les pendules à l'heure!